Après deux albums chantés en français, Keren Ann s'attaque au marché anglo-saxon. De toute beauté, ce " Not Going Anywhere " voit la copine de Biolay et de Salvador s'imaginer suivre les traces de Joni Mitchell et damer le pion à toutes ses prétendues descendantes (de Suzanne Vega à Beth Orton). Au départ, cet album ne devait être qu'une resucée anglophile de " La Disparition " : au final, on compte pas moins de sept nouvelles chansons pour seulement quatre reprises du disque précédent. Sur ces quatre titres, l'empreinte de Biolay n'a forcément pas disparu, même qu'il est présent sur un autre morceau, " Road Bin ", jolie comptine bluesy à la slide guitare… Mais c'est encore toute seule que Keren Ann impressionne le plus : sur " Sailor & Widow ", petite merveille de pop mélancolique, et sur les deux morceaux qui ouvrent l'album, " Not Going Anywhere " et " Polly ", empreints d'une force mélodique qui va droit au cœur. Avec Keren Ann, la chanson, qu'elle soit française ou anglaise, n'a pas à s'inquiéter quant à son avenir : il apparaît déjà radieux, malgré quelques maladresses de jeunesse (ces ambiances parfois trop surannées, cette tendance un peu complaisante pour les trop jolies notes). En solo, flanqué de Biolay ou de Bardi Johannsson (Bang Gang, Lady and Bird), Keren Ann réussit pour l'instant un (quasi) sans fautes. Reste au temps à donner à sa musique encore davantage de consistance, et à ses textes de profondeur. " Not Going Anywhere " ? Bien au contraire. Car à l'horizon, se profile la consécration.