La cavalcade de Jéhan…

Poussé par un nouvel élan poétique, Jean Jéhan a sorti son nouvel opus, « On ne sait jamais », le 18 novembre 2023. Pour ce cinquième elpee, Jéhan fait le choix de s'affranchir de ses affinités folk rock, pour aller vers des horizons plus dégagés. On retrouve…

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Écrit par - Akim Serar -

Tête pensante et active du collectif Les Marquises, Jean-Sébastien Nouveau nous a accordé un entretien téléphonique, ce dimanche 5 décembre. Une conversation chaleureuse au cours de laquelle cet artiste sensible, humble et talentueux est parvenu à nous faire oublier la tempête qui souffle, dehors, entre Lyon et ma région, et permettre un instant de s’évader sur ces lointaines îles du Pacifique Sud, en bonne compagnie. D'abord, il y a le nom. Inutile de revenir sur la référence proclamée à Jacques Brel. Et puis la signification poétique relative à la localisation géographique de cet archipel, perdu loin de tout continent. Et enfin surtout, la musique. Et quelle musique! « Lost Lost Lost » est une œuvre singulière, pensée, dense, riche de détails, de sons, d'idées. Conceptuelle sans être présomptueuse. Onirique sans être soporifique. Une bande-son qui interpelle les sens et les bouscule.

Jean-Sébastien, sans revenir sur ce qu'on peut lire au travers d'autres interviews, mais pour nos lecteurs qui ne connaîtraient pas encore la genèse de ce premier album, peux-tu nous parler de sa principale source d'inspiration?

La trame du disque est inspirée de l'artiste Henry Darger que j'ai découvert au travers d'une exposition à Lausanne. Son œuvre est tout simplement ahurissante, et d'une telle force (NB: pendant des années, dans l'anonymat le plus complet, retiré dans les toilettes d'un hôpital de Chicago où il était commis au nettoyage, cet artiste fournira plus de quinze mille pages illustrant un univers coloré où des fillettes orphelines sont plongées dans la terreur d'adultes tortionnaires et des caprices de la nature. Pour plus de détails, visitez http://www.abcd-artbrut.org/article.php3?id_article=91) Je ne dirais pas que je m'en suis inspiré. C'était plutôt comme un repère constant. Quand je ne savais plus quelle direction donner à tel où tel morceau, je me replongeais dans le bouquin que j'avais acheté, et ces représentations de ces fresques hallucinantes me guidaient, me servaient de repère. J'ai vraiment été marqué par cette œuvre fourmillante qui représente le travail d'une vie.

En ressortent six titres épatants qui s'enchaînent habilement.

Merci. Oui, j'ai vraiment recherché à délivrer un disque dense, physique, et qui parle au corps. Je voulais que la musique remue les tripes de l'auditeur. Qu'il y ait une réelle interaction avec lui. Et 6 titres me paraissaient le format idéal. Condensé et propice à ce désir d'urgence. Pour moi, six à huit titres, c'est le nombre idéal pour un album. J'ai lu quelque part que Thom Yorke pensait qu'idéalement, chaque prochaine sortie de Radiohead serait limitée à 4 morceaux. J'aime bien cette idée. Elle permet d'aller à l'essentiel. De ne pas se perdre en chemin.

Tu parles de disque physique? En termes de confrontation?

Je voulais que l’auditeur soit remué, qu'il ressente les choses... Physiquement. Oui, vraiment, de manière physique. Dans mon projet précédent, Immune, la musique me semblait un rien trop contemplative. A l'écoute, il était permis de rêver, de voyager. Cette fois, je voulais quelque chose de plus ressenti. Ebranler les sens. Pas juste les chatoyer.

Existe-t-il d’autres sources qui t’ont inspirées pendant le processus créatif et pendant l'enregistrement?

Bien sûr. J'avais une idée bien arrêtée de la manière dont je voulais que ce disque sonne. J'ai pensé à la lisibilité de la musique. Un peu comme un film d'Alfred Hitchcock. Si vous regardez ces films, ils ont l'air assez linéaires, on suit facilement le cours de l'intrigue. Mais on y décèle de petits détails qui s'immiscent tout au long et ont tout leur sens. De même, je désirais une trame évidente dans son déroulement, mais qu'une autre dimension s'intègre.

En découle une musique élaborée par strates successives...

Effectivement, j'opère par succession de couches. C'est l'avantage de concevoir un album de A à Z dans son appartement. Le home recording offre le luxe de pouvoir revenir tous les jours sur différents morceaux en chantier.

Tu es entouré sur ce disque par Jonathan Grandcollot (Pan Pan Pan, Robe Et Manteau) et par Jordan Geiger (Minus Story, Shearwater, Hospital Ships). Comment s'est déroulée la coopération?

Fort bien. Jonathan est un ami que j'ai connu sur les bancs de l'école. C'est un multi-instrumentiste de talent avec qui j'ai beaucoup de plaisir à travailler. Il apporte sa couleur à l'album. J'enregistrais quelques boucles de drums, et lui jouait de la batterie en live. On a mixé l'album ensemble. On partage la même vision des choses. Quant à Jordan, j'avais imaginé d'autres contributions, mais sa voix et sa façon de chanter tout en fragilité me paraissaient coller parfaitement aux morceaux.

Tu avais notamment pensé à Stuart Staples des Tindersticks, si je ne me trompe?

Oui. Et aussi à Chris Adams de Hood. Des timbres de voix sensiblement différents, en fait...

Comment avez-vous organisé la collaboration entre Lyon et Austin?

J'ai contacté Jordan par mail, et il a paru tout de suite intéressé par le projet à l'écoute des démos. Je ne l'ai rencontré qu'une fois, lors d'un passage lyonnais de Shearwater, et nous avons un peu discuté ensemble. Puis, de fil en aiguille, il m'envoyait ses parties chantées que j'incorporais alors au son des Marquises.

Est-ce un line-up définitif ou penses-tu engager d’autres coopérateurs pour la suite?

Il y aura du changement, c'est sûr. Mais je ne sais pas encore précisément vers qui je vais me tourner au final. La suite est en chantier, mais sera différente de « Lost Lost Lost ». Je ne veux pas d'une redite. J'aimerais m’orienter vers quelque chose de différent. Un peu dans l'optique ‘chansons bricolées’.

Tu envisages donc de changer beaucoup de choses. N'as-tu pas peur que le résultat se singularise un peu trop?

Il est encore trop tôt pour le dire, mais je pense que l'identité des Marquises sera toujours bien palpable, même si je modifie certains éléments. J’aspire adopter une autre approche musicale. J'aime des artistes comme Robert Wyatt ou Hood, dont le travail a pu évoluer. Ils sont parvenus à se remettre en question. J'aime le Post Rock, mais je suis vite distrait lorsqu’un morceau ne comporte pas de vocaux. Au final, je m'ennuie très vite. J'aime le côté humain qui me permet de me raccrocher à une chanson. La somme de toutes ces influences génère l'essence de ma musique. Et je veille à l'homogénéité du tout.

Avant de nous quitter, quid de l'aspect live?

On ne joue jamais. Je ne suis pas musicien. Je peux broder quelque chose sur ma guitare qui me semble intéressant mais que je serais incapable de le recréer par la suite ou alors avec beaucoup de mal et de recherches. Rejouer « Lost Lost Lost » sur scène demanderait une réinterprétation des morceaux. Donc, pas de concerts pour l'instant. Par contre, je m'intéresse à l'aspect visuel de la musique. Images et son étant à mon sens intimement liés. J'ai pris beaucoup de plaisir à collaborer auprès de différents cinéastes pour chacune des chansons. Le résultat est fantastique. J'adore ce que chacun a apporté. J'ai d'ailleurs l’intention de sortir un coffret reprenant le Cd, et un Dvd des vidéos. Et puis une amie m'a demandé de participer à un projet excitant qui constituerait à mettre en musique des images projetées sur des façades, lors d'un festival à Lyon.

Jean-Sébastien, ce fût un plaisir de m'entretenir avec toi.

Mais moi de même.

La conversation se clôt dans le bruissement d'une bourrasque qui au dehors chasse la neige en tourbillon. Loin des images d'Épinal, sur les Marquises, souffle un vent nouveau...

 

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