Le décès tragique du vocaliste d’exception Layne Staley, un obscur jour d’avril 2002, aurait pu mettre un terme définitif à l’histoire d’Alice In Chains. Abattu par ses dépendances aux drogues, l’homme au grain de voix si particulier, laissait derrière lui un vide immense et un désarroi total au sein du combo amputé de son si charismatique frontman.
Un bref retour scénique en 2006, réunissant les trois membres survivants épaulés par William DuVall lors d’un concert de charité, laissait néanmoins libre cours à l’imagination des fans. Certains n’y voyaient qu’une simple réunion anecdotique et sans lueur d’espoir, tandis que d’autres n’hésitaient pas à rêver d’un retour plus concret ; discographique celui-là.
Réalisé dans le plus grand secret, « Black Gives Way To Blue » n’est que le quatrième album studio du groupe, mais il constitue surtout un authentique chef-d’œuvre et une ode au talent de Staley. Car l’esprit d’Alice in Chains est resté bien ancré au sein du trio formé par Jerry Cantrell, Mike Inez et Sean Kinney. Les harmonies vocales, si caractéristiques du son du groupe, demeurent sa marque de fabrique, d’autant que les timbres de William DuVall et de Jerry Cantrell se marient à merveille. A tel point qu’on a presque l’impression d’être en présence d’un line up inchangé. Phénoménal ! Et si la production du talentueux Nick Raskulinecz (Foo Fighters, Rush…) n’est pas étrangère à cette alchimie retrouvée, la qualité des nouvelles compositions confère déjà à ce nouvel opus des allures de ‘classique’.
On reste bouche bée à l’écoute de l’inspiré et poignant « All Secrets Know » qui ouvre l’album avec grande classe. Mais la claque est encore plus forte dès les premières mesures de « Check My Brain », titre imparable doté d’un riff d’une lourdeur à faire pâlir d’envie Tony Iommi (Black Sabbath, pour les plus jeunes) en personne. Autre pierre angulaire de cette nouvelle livraison, « A looking in View », un brûlot sombre et heavy qui se révèle sur plus de sept minutes épiques, tandis que la pédale wah-wah n’est pas en reste sur « Last of My Kind » rappelant qu’Alice In Chains a été une source d’inspiration pour… Metallica. La facette acoustique est toujours présente, comme en témoigne le très épuré « Take Her Out » ou l’irrésistible ballade « When the Sun Rose again » sur laquelle Cantrell confirme son statut de grand guitariste. Aussi touchant qu’inattendu, le piano d’Elton John émaille une plage titulaire qui referme cet album un peu hors du temps mais d’une authenticité bouleversante Une sacrée claque !