Les cinq alchimistes tournaisiens de Sioban, tous inspirés par les plus belles complexités harmoniques du renouveau du rock progressif, possèdent désormais l'outil indispensable pour sortir de l'anonymat et se forger un nom dans le milieu prog. L'album L.O.V.E. ouvrira sans nul doute de nombreuses portes au combo dont le nom rend hommage à une héroïne de bande dessinée, et le chanteur Meet ainsi que ses quatre compères pourront peut être enfin partir en tournée avec l'une ou l'autre formation à la renommée internationale.
A l'écoute des premières mesures de la plage titulaire, morceau épique décliné en sept parties, les anciens se remémoreront les fastes de Yes ou de King Crimson, alors que les plus jeunes penseront plutôt à Dream Theater ou à Porcupine Tree. Les racines, c'est important, en rock autant qu'ailleurs et Sioban n'est pas en manque de repères, tant la façon de phraser les mélodies vocales évoque le Marillion période Fish, tant les nombreux breacks perpétuent la tradition des piliers des années 70, tant la finesse du jeu de guitare de Dave Snappe constitue un hommage permanent aux prouesses de Steve Howe ou de Mike Oldfield. Mais Sioban a le don de développer des idées connues des amateurs tout en y apportant beaucoup de fraîcheur, avec ce petit quelque chose en plus qui fait toute la différence. Le talent est au rendez-vous ! Acoquiné avec la photographe Clemence Leveau, le groupe a mis un point d'honneur à réaliser un objet au superbe design. La couverture fait la part belle au vocaliste du groupe ainsi qu'à une célèbre marque de bourbon, tandis que le livret, enrichi des textes en anglais des quinze chansons finement ciselées et de superbes clichés, constitue à lui seul une petite merveille de graphisme. L'usage sobre des sonorités synthétiques, oeuvre du claviériste frasnois Damien Michel, flatte l'oreille, entrouvrant les portes d'univers féeriques, mariant brillamment délicatesse onirique et interventions plus fougueuses. L'utilisation d'un piano, dès l'intro de L.O.V.E., prend toute sa dimension sur l'envoûtant "Strung out", tandis qu'on se laisse emporter par les arpèges de guitare acoustique sur le très ‘marillionesque’ "Tuesday morning in september". Après avoir essuyé plusieurs refus de maisons spécialisées, c'est finalement le label hollandais Labrad'Or Records qui a accepté de signer Sioban pour la distribution de son premier album. Désormais, on peut écouter l'unique formation de néo-prog du Hainaut occidental aux quatre coins du monde. S'il arrive à digérer ses influences et à mettre sa virtuosité au profit d'un style encore plus personnel, Sioban peut se construire un bel avenir, même si chacun sait, dans le petit monde du prog, que ce genre musical reste réservé à un public averti, constitué uniquement de véritables passionnés.