Pour enregistrer son nouvel album, Marianne Faithfull a de nouveau bénéficié du concours de Hal Willner à la production. Mais aussi d’une multitude de collaborateurs, parmi lesquels on épinglera la présence de Lou Reed, à la guitare solo, sur « The old house », une chanson très cabaret (NDR : pensez à Bertold Brecht), sorte de valse signée par le dramaturge irlandais Frank McGuiness. Du bassiste des Meters, George Porter Jr., pour le titre maître. Une compo à laquelle participe également le requin de studio, Doug Pettibone, à la gratte acoustique, tout comme sur « Love song », une cover de Lesley Duncan, immortalisée par Elton John.
L’opus aligne 9 reprises et 4 chansons personnelles. Une performance, lorsqu’on sait que Sister Morphine préfère adapter le répertoire d’autrui. Il est vrai que dans cet exercice de style, elle excelle. Et je pense tout particulièrement au titre qui ouvre la plaque, « The stations », une superbe ballade spectrale, issue de la plume de Geg Dulli et de Mark Lanegan, parcourue de cordes de guitare bringuebalantes et traversée d’envolées de lap steel gémissantes. Une lap steel qu’on retrouve sur de nombreuses plages. Autre cover particulièrement réussie, le « No reason » de Jackie Lomax. Très r&b. Plus énergique aussi. Dans l’esprit d’Otis Redding, mais aussi et surtout des Stones. Et puis le « Gee baby » de Carole King. Dont le rythme syncopé et les accords de piano nous plongent dans l’univers de la Nouvelle-Orléans. Ou encore le « Past, present and future » des Shangi-La, un morceau au cours duquel elle parvient à nous plonger dans un climat mystérieux, à l’aide de sa voix déclamatoire. Paru en single, « Why did we have to part », est une autre ballade, mais signée Laurent Voulzy et le « Back in baby’s arms » d’Allen Toussaint est enrichi de chœurs gospel. Enfin, dans un registre plus personnel on épinglera « Prussian blue », coloré par un clavier vintage et « That’s how every empire falls », encore une valse lente enrichie d’arrangements luxuriants. Ce type d’arrangements est d’ailleurs une constante tout au long de l’œuvre. Ils impliquent même régulièrement instruments à cordes et cuivres, un peu comme chez Phil Spector. Un album agréable à écouter, mais un peu trop conventionnel pour vraiment s’imposer…