Le label Crosscut vient de prendre l'excellente initiative d'éditer une série fort intéressante d'elpees enregistrés en public. Intitulés "In the house", ils ont été enregistrés en Suisse, dans le cadre du Lucerne Bues Festival. Un soir de novembre 1998, la scène était occupée par de véritables routiers du Chicago Blues, venus apporter la bonne parole! Le vétéran Bob Stroger est un gentleman du blues. Il est originaire du Missouri mais vit à Chicago depuis 1955. Il s'est très rapidement converti au blues. Pendant une quinzaine d'années, il a participé à l'aventure d'Eddie King & the King Men ; mais au cours des années 80, il a embrassé une carrière de musicien freelance. Ce qui lui a permis de côtoyer les meilleurs bluesmen : depuis Otis Rush à Sunnyland Slim, en passant par Jimmy Rogers et quelques autres ; et d'enregistrer en compagnie de la crème de la scène blues chicagolaise. A l'instar de Billy Flynn et de James Wheeler, il a sévi au sein de la première mouture du Mississippi Heat.
Le line up de ses Chicago Blues Legends me donne l'eau à la bouche. Il est constitué, à la base, du Ken Saydak trio ; c'est à dire Ken au piano, Marty Binder à la batterie et Bob à la basse. James Wheeler et Billy Flynn aux guitares, ainsi que Ron Sorin à l'harmonica, complètent le tableau.
Bob entame au chant son "Talk to me Mama", un titre bien saignant qui met en exergue la guitare de Wheeler et l'harmo de Sorin. "The blues is back in town" nous clame Mr Stroger, avant de nous servir un blues à fleur de peau intitulé "Stranded on St Louis", un fragment écrit par Omar Shariff, au cours duquel tous les musiciens sont parfaitement en place. J'épinglerai cependant le rôle joué par Ken Saydak ; un rôle semblable à celui qu'Otis Spann exerçait pour Muddy Waters, c'est à dire tantôt dans l'ombre, tantôt sur le devant de la scène, mais du début à la fin brillant, discret et toujours efficace. Ken opéra ses débuts chez le groupe de Mighty Joe Young, avant de rejoindre celui de Lonnie Brooks. Il participa également à des sessions pour Johnny Winter, avant de former Big Shoulders, en 1987. Billy Flynn chante le "Lovin' man" de Muddy Waters. Il n'oublie pas d'y inclure une bien solide partie de slide. Flynn est un guitariste blanc qui fut découvert par Jimmy Dawkins. Ce musicien très apprécié et très sollicité à joué depuis avec le Legendary Blues Band, Mississippi Heat, Kim Wilson et Otis Rush. "Extension 309" marque le retour du blues lent et prenant. Un morceau composé, chanté et interprété par James Wheeler ; un musicien qui a longtemps joué pour Otis Rush et Willie Kent & the Gents. James chante aussi le très rythmé "Gonna make some changes". Le rythme emprunte celui du chemin de fer tout au long de "Loan me train fare", une plage qui souligne les qualités de l'harmoniciste Ron Sorin. Un musicien fort proche de Ken Saydak. Il a participé à son album "Foolish man", paru sur Delmark, et fit aussi partie de Big Shoulders ainsi que du backing group de Johnny Winter. "Heads up" est un instrumental signé Freddie King, il est interprété à la manière de ….Freddie K. Ken Saydak adore les envolées rythmiques de la Nouvelle Orléans. Il le démontre à travers sa version du "Thinking and drinking" d'Amos Milburn. Il le chante d'une voix chaude et ravagée, dans le même style que son "Watching the river flow", paru sur son album "Love without trust". Un disque édité également chez Delmark. Ecrit par Jimmy Rushing et un certain Count Basie, le somptueux "Going to Chicago" constitue le dernier blues lent. L'album s'achève par un vigoureux "Keep your hands off her". Une heure d'excellent Chicago blues classique!