En 1913, le futuriste Luigi Russolo présageait l'avènement de la techno dans son manifeste ‘L'Art des bruits’, proclamant que ‘les moteurs de nos villes industrielles pourront dans quelques années être entonnés de manière à former dans chaque usine un enivrant orchestre de bruits’. A l'écoute de l'album de Capitol K, on se dit que l'Italien avait foutrement raison : depuis Pierre Schaeffer et jusqu'à Richard D. James, les apôtres du bruit érigé en musique ont semé leur bonne parole à travers le monde, allant même jusqu'à contaminer de leurs bleeps post-modernes les genres les plus frileux, du R'n'B (Missy Elliott, Destiny's Child,…) à la chanson française (Brigitte Fontaine, Christophe,…). Derrière Capitol K se cache Kristian Craig Robinson, petit protégé de Mike Paradinas (Mu-ziq), à qui l'on doit d'ailleurs quelques perles de l'electronica la plus bruitiste. Né à Malte, ayant grandi à Bornéo, émigré à Londres, Robinson aurait pourtant pu s'enliser avec sa musique dans le pudding techno-world. Heureusement, il n'en est rien : bien implanté dans la cité, il a su capter l'ambiance urbaine avec éloquence, traquant le bruit comme un entomologiste l'insecte rare. " Island Row " oscille ainsi entre une techno déjantée mais subtile (" City "), du sampling exotique (" Darussalam ", enregistré dans la forêt équatoriale de Bornéo) et du psychédélisme de bon aloi (c'est-à-dire loin des clichés trance cher à Paul Oakenfold). Grâce à son éclectisme, Robinson nous livre un album passionnant et accessible, tout en étant exigeant.