Le « Salon des refusés », c’est une expo qui s’est déroulée à Paris, au Palais de l'Industrie en 1863, sur décision de Napoléon III, pour accueillir les 3 000 œuvres qui n'avaient pas été retenues par l'Académie pour le Salon de peinture et de sculpture.
Pour son cinquième album solo, Claire Diterzi repêche l’idée et s’en va préparer son nouvel opus à la villa Médicis de Rome dans la section ‘musique actuelle’, choix qui entraîne de vives critiques de la part de certaines personnes issues du milieu de la musique classique contemporaine. Ces chansons sont quelque part ‘refusées’ tout comme les œuvres choisies par l’empereur, d’où le titre de sa nouvelle plaque.
Refusées est un euphémisme. C’est carrément à une levée de boucliers que l’on assiste. Les vieilles huiles bien pensantes ne digèrent pas que l’on puisse ‘souiller’ ces lieux pour enregistrer une œuvre de ‘bêtes chansons’, alors que résonnent encore sonates, opéras, concerti et autres symphonies des plus grands. Quel outrage !
Et pourtant, Claire nous propose douze plages qui ne nuiront en rien à la sacralité des lieux ; tout est opéré en douceur, chaque chanson évoquant davantage une peinture qu’une chanson pop française.
En effet, une fois passée la plage inaugurale, « Le roi des forêts », seul titre aux relents électriques et bien en chair, le reste de l’album se veut gentil, calme et bien respectueux.
Pour y parvenir, Claire troque sa guitare électrique pour un instrument des plus baroques : la viole de gambe qui restera fréquemment présente. Pour le reste, chaque titre s’écoute comme on regarde un tableau, avec patience et curiosité. Au creux de chaque plage, on retrouve de la poésie, de la nostalgie, de l’humour, un délicat tissage des genres et des instruments pour un voyage particulièrement dépaysant.
Claire Diterzi est une des rares chanteuses françaises qui soit une véritable musicienne. Elle partage avec nos oreilles reconnaissantes des petites perles de littérature musicales.
Pour l’anecdote, on épinglera une reprise tout en finesse de « Riders of the Storm » des Doors qui vaut le déplacement.