Parmi les nombreux groupes qui ont agité l’underground new-yorkais au début des années quatre-vingt, Liquid Liquid mérite une place à part. A l’instar de leurs collègues de Konk, ils ont exploré le funk, l’afro beat, le dub, le free jazz et le disco pour en restituer une vision très singulière. Quasi trente ans après la sortie d’une poignée de maxis ayant eu une influence majeure sur de nombreux musiciens, le label Domino a décidé de rééditer l’intégralité des travaux du groupe, enrichi d’inédits et de prises live.
Pas ou très peu de guitare chez Liquid Liquid : basse, batterie et percussions dominent le sujet. Quelques notes éparses de marimba, de sax et de mélodica viennent ponctuer un chant torturé et abstrait rappelant le John Lydon de « Metal box ». La vingtaine de titres réunis ici part dans plusieurs directions : un peu d’afro beat punk (« Out » et « Outer »), des impros tribales et free (« Rubbermiro », « Eyes sharp », « Where’s Al »), des prototypes du son punk-funk –repris un quart de siècle pus tard par une flopée de groupes (« Bellhead », « Optimo »). D’autres morceaux lorgnent davantage vers le funk, comme « Sank Into the Chair », « Push » ou « Cavern », plagié d’ailleurs en son temps par le Sugarhill Gang sur « White Lines ». Sans « Cavern », un des gimmicks les plus connus du hip hop (la phrase « Something Like a Phenomenon ») n’aurait peut-être jamais existé. Sauf que dans « Cavern », le chanteur de Liquid Liquid scande « Slip In And Out Of Phenomenon » et semble davantage parler de Platon que de Block Parties…
Mais trêve de plaisanteries. Trente ans après sa conception, la musique de Liquid Liquid reste furieusement unique et expérimentale. Pas toujours facile d’accès, elle réserve de belles surprises à l’auditeur, surtout lors des titres les plus futuristes du groupe, tout simplement ‘bluffants’.