Le plus laborieux reste toujours de savoir quel paysage sied le mieux à I Am Kloot : les sombres ruelles d’une cité anglaise post-industrielle ou les vertes campagnes britanniques ? Cette question nous tiraille depuis la sortie de Natural History, pierre initiale posée par le trio aux premiers jours d’un nouveau millénaire encore mal réveillé. Cette perle d’élégance et de sensibilité résonne aujourd’hui encore comme l’un des meilleurs souvenirs de ce début de siècle. Alors, lorsque John Harold et ses deux acolytes se remettent au travail pour un troisième album, l’effroyable dilemme revient au galop: paysage campagnard ou citadin ? Pour le coup, le groupe décide de ne pas trancher : il se construit un immense building au beau milieu de la prairie, secoue le désuet à l’aide d’une désarmante dose de modernité. Certes, ce « God and Monsters » n’étonne plus. Car désormais, chacun sait combien I Am Kloot est doué. Le folk-rock des Mancuniens continue de gratter les cordes sensibles, d’effleurer une émotion à fleur de pop (« The Stars Look Familiar », « Avenue of Hope »). Parfois plus rêches que par le passé (« Sand and Glue »), les compos d’I Am Kloot s’épanouissent en territoire inconnu : un univers de tempête et de distorsion que le trio parvient à apaiser de ses bouleversantes mélopées. La formation de Manchester supplante même Mike & The Mechanics grâce à un « Over My Shoulder » enfin digne de porter son titre. Bref, quand le rat des villes rencontrera le rat des champs, I Am Kloot chantera de façon fort civile et cette fois, décidément, rien ne manquera au festin.