Du folk crépusculaire et cotonneux, d’une beauté sourde, presque gothique : Gravenhurst, alias Nick Talbot, rappelle l’époque où John Martyn, Bert Jansch et Colin Blunstone traduisaient notre mal être en quelques notes balayées par le vent, s’accrochant tant bien que mal aux branches pourries de nos incertitudes. Le cœur fragile et les doigts bleuis par le froid hivernal, ces ménestrels d’une cause perdue (l’amour, l’espoir, la vie) charriaient avec eux leur lot de malheurs, mais ne baissaient jamais vraiment la garde : il fallait se battre, coûte que coûte, contre ses propres fantômes. Gravenhurst est le fils cadet de cette lignée de songwriters, dépressifs mais en quête d’absolu. Que son disque (le deuxième) sorte sur Warp, label parangon de l’électro nineties (Aphex Twin, Autechre, Sqaurepusher,…), prouve que sa musique dépasse tous les clivages… tellement elle est puissante. Mâtiné en ses coins obscurs de nappes ambient et d’arpèges sibyllins (= post-rock bristolien), ce folk lunaire, comme en apesanteur, sonne quasi comme une prière. En cela « Flashlight Seasons » est notre nouvelle église : nous en serons à jamais les fidèles, délivrés de tout mal. Amen.