L’air de rien, Aimee Mann enjolive sa discographie depuis le début des années 90. La quarantaine franchie, la dame a traversé des périodes d’introspections musicales ("Whatever"-1993), des temps de folles exubérances alternatives ("I’m with stupid"-1995), une bande originale magistrale pour le compte du fameux "Magnolia" de Paul Thomas Anderson ("Bachelor n°2"-2000) et une romantique échappée spatiale ("Lost In Space"-2002).
Aujourd’hui, Aimee Mann nous propose un aperçu de trois soirées estivales passées sur les planches new-yorkaises du Saint Ann’s Warehouse de Brooklyn. Cette esquisse pertinente nous offre non seulement l’opportunité de la (re)découvrir visuellement par l’entremise d’un DVD (trois concerts parmi tant d’autres) mais aussi et surtout grâce à la subtile complémentarité du cd "live" (curieusement amputé de trois titres par rapport au DVD). Avant de porter un quelconque jugement de valeur à cet enregistrement, applaudissons la mise en forme de ce double ouvrage, la liberté sélective procurée à "l’auditeur/téléspectateur". Pour une fois, le choix lui est laissé. A ce titre, le DVD-CD "Live at St. Ann’s Warehouse" demeure une expression exemplaire à méditer, une plus-value de qualité pour tout un chacun. Le DVD d’Aimee Mann ne s’éloigne jamais des clichés alignés ces dernières années par l’industrie du disque. Classique dans le traitement des images, la partie visuelle s’adresse essentiellement aux admirateurs de toujours.
Le pendant sonore s’avère bien plus intéressant, nécessaire pour pénétrer l’univers délicieux de notre charmante folk-rockeuse. Quelques applaudissements en guise de préface s’effacent progressivement et laissent gambader la douceur de "The Moth", titre inaugural. Les souvenirs d’une chanson en compagnie de Bernard Butler titillent ensuite nos tympans par la grâce de "Sugarcoated". Le soin accordé à la production de cette représentation publique épate et confère des relents de ‘best-of’ à ce concert estival. Encore sous le charme de "Wise up", jolie complainte romantique, nous poursuivons l’aventure au gré des paroles de "Save Me", titre propice à la délectation mélancolique. Combien de larmes ont glissé sur nos joues à l’écoute de cette rédemption ? Apprécier et pleurer. Aucune alternative ne peut s’envisager. Au son des derniers accords de sa chanson, Aimee bénit son assistance : "God bless you", soutient-elle avec ferveur. Cette grande blonde serait-elle une nouvelle missionnaire, venue ici-bas pour convertir la foule massée à ses pieds ? Cette parenthèse spirituelle, court moment d’évasion apostolique, se confirme à l’entame de "Stupid Thing". Chose idiote mais à laquelle nous n’avions jamais songé. Pourtant, cette fois, le rêve laisse place à une cure de réalité en compagnie de cette voix d’ange. La tessiture céleste d’Aimee Mann représente une bonne part de paradis, une voûte imaginaire de nuages blancs et de bonheur. Trop heureuse d’être descendue sur terre, notre tête blonde s’égare parfois dans l’euphorie de son concert où certaines compositions perdent de leur mélancolie originelle. Mais jamais, au grand jamais l’envoyée du ciel ne s’égare du droit chemin.