Eté 2007, Sean Carney est victime d'une piqûre d'araignée. Il est hospitalisé. Un séjour qui lui coûte les yeux de la tête. Faut dire qu’à l’instar de nombreux artistes américains, il ne dispose pas de couverture sociale. Il est cependant aidé par différents organismes, dont la Blues Fondation. Son aventure le fait réfléchir. Et il décide de venir en aide aux artistes qui luttent contre la maladie.
Le 2 décembre 2007, Sean présente son premier spectacle : ‘Blues for a cure’ ; chez lui, à Colombus. Il a reçu le concours de Teeny Tucker, Willie Pooch et Omar Coleman. Les bénéfices sont versés à l'American Cancer Society et à l’OSU James Cancer Research Center. En novembre dernier, il organise la deuxième édition de ‘Blues for a cure’. Y participent des légendes issues de Chicago comme Henry Gray et Hubert Sumlin. Il profite de l’occasion pour introduire quelques uns des artistes présents lors du spectacle, au studio Central City de Colombus. Le pianiste noir Henry Gray flanqué de ses musiciens ainsi que le Trampled Under Foot, une formation prometteuse issue de Kansas City, se joignent donc circonstanciellement à Sean Carney et au chanteur/guitariste Jonn Richardson.
TUF est trio très familial. Il implique les frères Schnebelen : Nick à la guitare et Kris à la batterie, ainsi que la frangine Danielle Hudspeth à la basse. Les trois musiciens chantent! L'ouverture est instrumentale. Une toute bonne reprise du "Side tracked" de Freddie King. Les échanges entre les trois solistes (NDR : Sean, Jonn et Nick) sont de haut vol. L’association entre TUF et les deux maîtres de cérémonie se réserve pas moins de sept plages, dont la première est la plus percutante et séduisante : "Love my baby". De son timbre puissant, la féline Danielle chante cette compo aux accents du Delta, devant les trois solistes insatiables. Jonn Richardson chante en toute décontraction "Crosscut saw", un morceau popularisé par Albert King. Nick attaque son "Jonny Cheat", un boogie puissant de plus de 9’, caractérisé par ses échanges dévastateurs. Sean se réserve les vocaux sur le "Use what you got" de Freddie King, un très long blues lent, qu’il interprète d’une voix passionnée et dévorante ; des spécificités qui le hantent en permanence! "Comin' home to you" s’inspire du gospel. Le clan Schnebelen se charge des chœurs. "Wait on time" est signé Kim Wilson. Un West Coast blues bercé de swing et soutenu par une section de cuivres, à laquelle participe le redoutable Gene Walker, au saxophone. Nick chante d’un timbre graveleux le funk léger "Ain't my problem". Jonni a cédé sa guitare à Steve Gerard (NDR : c’est le gratteur des National Debonnaires, une des meilleurs formations de Kansas City). Walker est toujours au poste pour souffler dans son sax ténor.
L’elpee recèle encore quatre plages réservées à Henry Gray, un pianiste noir âgé aujourd’hui de 84 ans. Il a longtemps milité au sein du backing band de Howlin' Wolf. Sean, Jonn ainsi que le souriant Bill Stuve à la basse se mettent au service de Gray qui chante tout d’abord sa plus célèbre compo, "Cold chills", un blues imprimé sur un tempo lent, soutenu par Andy Cornett à l'harmonica. Puis dans un style fort semblable, "Times are getting hard". Les deux autres morceaux, en l’occurrence "Come on in" et "How could you do it", sont plus rythmés. Ce superbe elpee s’achève par les neuf minutes de "Whoa baby". Inspirée par la musique du "You don't have to go" de Jimmy Reed, cette plage est saturée d’émotion. A cause de la voix troublante de Nick. Et puis, en toile de fond, des sonorités feutrées et minimalistes dispensées par les trois guitares. Un excellent album !