Goudi et Lubna Azabal dansent le tango de l’ennui…

Lubna Azabal est une actrice belge née à Bruxelles d'un père originaire du Maroc et d'une mère espagnole. Après avoir été dirigée par les grands noms du cinéma international, elle a remporté ‘Le Golden Globe’ pour le film ‘Paradise Now’. Lubna adore les…

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Jean-Claude Mondo

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mardi, 16 janvier 2007 04:00

Ruf Records Anthology

Thomas Ruf est né le douze décembre mil neuf cent soixante-cinq (12.12.1965). Il est le boss du label qui porte son nom. Son chiffre fétiche est le 12. C’est sans doute une des raisons pour lesquelles il a sous-titré cette luxueuse collection : "12 years of where blues crosses over". Une compile qu’il a voulu plus originale que toutes celles de ses éventuels concurrents. En fait, cet opus constitue une rétrospective de douze années riches en productions maison.

 

En 2006, le "Full circle" de Walter Trout avait récolté un immense succès commercial. Son plus grand à ce jour. "Workin' overtime" en a été extrait. Une plage au cours de laquelle il partage un duo en compagnie du Canadien Jeff Healy, célèbre guitariste atteint de cécité. La délicate Sue Foley figure également sur ce recueil. Pour un titre très saignant. En l’occurrence la plage éponyme de son excellent elpee "New used car". En 2005, la redoutable et imposante Candye Kane s’était illustrée par son excitant "White Trash girl". La présence de cette compo n’est donc pas étonnante. La même année, le Ruf Blues Caravan réunissait plusieurs jeunes artistes dont Ian Parker, un Britannique particulièrement doué. Sa voix est pure. Sa guitare menaçante. Mais surtout il impressionne par son "It hurts a man". Commis en 2003, le "White crosses" du Texan Omar Dykes nous permet de revivre de biens agréables instants. Un morceau finalement bien léger concédé par le géant dont le bon quintal lui donne souvent une puissance démesurée. On n’entend plus guère Larry Garner aujourd’hui. En 2002, la voix frêle mais bien timbrée de ce sympathique personnage colorait une chanson qui porte son nom. L’année suivante, Thomas faisait une découverte importante : Ana Popovic. Depuis, sa carrière a pris une toute autre dimension. La guitariste slave est même prête à rebondir outre-Atlantique, puisqu'elle vient de signer chez Delta Groove, label établi à L.A. réputé pour son dynamisme. Sa très belle ballade "Love fever" est ici incluse. En 2000, l’Albion avait révélé le jeune Aynsley Lister. Il a déjà bien roulé sa bosse depuis. Chantre remarquable, Kevin Coyne nous a malheureusement quittés. En 2004. Un hommage lui est en quelque sorte rendu sur cette plaque. L’écurie possède également ses fers de lance. Tout d’abord Canned Heat, les rois de la boogie music. "See these tears" date de 1999. Il met en exergue le talent de Robert Lucas et du regretté Henry Vestine. Le funk débridé et participatif de Bernard Allison n’a pas été oublié. Il remonte déjà à 1995. Et Luther Allison clôture la partie audio de cette anthologie par "Put your money where your mouth is". En 1989, Ruf était l'agent européen de cette star. Cinq ans plus tard, il monte son label pour son héros. C'est l'Histoire!

Le DVD s'ouvre et se referme par le merveilleux Luther Allison. Il chante "Bad love", extrait d'un vidéoclip tourné en 1994. L’émotion est alors à son comble. Et c’est bien compréhensible. Chez Ruf, on ne s’est véritablement intéressé au DVD qu’au cours des trois dernières années. En 2006, le line up de Blues Caravan (toujours d’actualité) réunissait Ian Parker, Aynsley Lister et Miss Lyytinen, dont la fraîcheur illumine les cœurs. Souriant, Sue Foley caresse les cordes de sa Telecaster multicolore tout au long d’"Absolution". Et elle est habile sur son instrument, la mignonne! Bob Brozman manifeste une dextérité folle et quasi inhumaine. Un exercice de style d’un bon quart d'heure. Bernard Allison reprend le succès éternel de son père, "Bad love". Flanqué de ses Howlers, Omar nous entraîne au cœur des bayous de la Louisiane. Il nous y réserve un de ses meilleurs titres : "Monkey land". 2005 est manifestement l’année des décibels. Robin Trower, Ana Popovic et Ian Parker se fendent chacun d’un blues rock bien électrique. Ce dernier se distingue inévitablement dans la spécialité qui est la sienne : la longue ballade lente aux accents dramatiques, et nous concède un excellent "Awake at night". L’univers californien des Imperial Crowns s’embrase. Dément, brûlant, torride même, "Lil' death" est attisé par la slide aux accents métalliques et démoniaques. De plus anciennes images ont également été sélectionnées. Et en particulier celles consacrées à Aynsley Lister, réputé pour sa slide puissante. A Walter Trout, ensuite. Le vendeur le plus performant du label est bien évidemment soutenu par ses Free Radicals. Et enfin au coup de cœur maison, le sympathique duo teuton, Friend'n Fellow. Si cette collection est finalement bien agréable à regarder aussi bien qu’à écouter, nos vœux, pour la suite de l'histoire, vont inévitablement à Thomas Ruf!

 

 

mardi, 09 janvier 2007 04:00

Put it in the Alley

Le Kilborn Alley BB est un groupe issu de Champaign, près de Chicago. Il sillonne les routes, depuis pas mal de temps. Son line up réunit Joe Asselin à l’harmonica, Chris Breen à la basse, Andrew Duncanson à la guitare et au chant, Ed O’Hara aux drums ainsi que Joshua Stimmel à la guitare. Ils collaborent régulièrement avec Johnny ‘Yarddog’ Jones, un bluesman noir originaire de Detroit. Eponyme, leur premier opus est paru en 2003, sur le label Pee Dee. "Put it in the Alley" constitue leur second. Enregistré fin 2005 à Chicago, ce disque a été produit et mixé par leur ami Nick Moss. Ils signent pratiquement tout leur répertoire.

L'ouverture est royale. Elle me rappelle les débuts du Paul Butterfield Blues Band, opérés voici environ 40 ans. Andrew jouit d’une voix puissante, adaptée à ce type de musique. "Your next baby's daddy" est explosif. Joe souffle rageusement dans son harmonica pendant qu’en arrière-plan, une slide rôde dans l'ombre. Différent, "Tales from the Alley" évolue sur un tempo exotique : un mambo. Un style régulièrement adopté dans l’univers du Chicago Westside (NDR : pensez à Otis Rush !) Ces aventures de la Kilborn Alley paraissent bien excitantes. Asselin dispense un solo d'une tristesse infinie. On est au bord des larmes, tant l'émotion est parfaitement traduite. Sauvage et immédiat, "The blues take me in" est imprimé sur un rythme soutenu. Nous ne sommes ici plus tellement loin d’un Sonny Boy Williamson. Pourtant, j’avoue être davantage séduit par les thèmes lents. A l’instar de "Thousand miles". Joe fait pleurer son instrument. Le son traduit un sentiment de désespoir. Persuasif, Duncanson chante impeccablement. Son interprétation fait mouche. Son timbre évolue régulièrement dans un registre proche d’Eric Burdon. Et c’est un compliment ! Blues lent, "Can I get a hello?" nous plante dans le décor du Southside blues de Muddy Waters… Malheureusement, toutes les compos n’atteignent pas le même niveau. Parfois, la section rythmique trahit quelques signes de faiblesse. Et je pense tout particulièrement aux lignes percussives tracées sur "Can I get a hello?". Une situation reproduite tout au long de "Soldier blues" ainsi que sur le très primaire "Behind my back", même si cette dernière plage ne manque pas de charme. Les musiciens avouent avoir vécu des moments difficiles sur la route. Et ils restituent parfaitement ce sentiment de souffrance sur "Got dues to pay". Le spectre de Howlin' Wolf hante ce fragment parcouru par le saxophone de Dave Fauble, réminiscent d’Eddie Shaw. La fin de parcours est plus heureuse. "Home to my baby" en est la plus belle illustration. Un boogie sans artifice. Les musiciens y reprennent le refrain en chœur pendant que Joe décolle. Ce dernier empoigne son instrument chromatique pour attaquer "The breakaway", un de ces blues dont le sympathique George Smith avait le secret. Duncanson injecte toute sa rage et sa passion dans son chant. A l’instar du maître, Muddy Waters, il exécute un dialogue entre ses cordes. Le dépouillement musical manifesté ici est le gage d'une rare qualité. Le message du blues passe en force. Mais dans l’univers du blues lent, "Mr Campbell's blues" constitue un sommet. Parcimonieuses, les notes restituent cette sensibilité à fleur de peau. Nick Moss à la guitare, Gerry Hundt à l'orgue Hammond et Dave au sax sont au sommet de leur art. Nick et Gerry reviennent pour participer au titre final. Intitulée "I like to live the love", cette ballade est attachante et stimulante. Andrew Duncanson possède une excellente voix. Joe Asselin est talentueux. Et le Kilborn Alley BB réunit une équipe de passionnés : de véritables blues soldiers. Enfin, pour que votre information soit complète, sachez que Kate Moss s’est chargé des illustrations de la pochette, reproduisant une Kilborn Alley bien peu engageante…

 

 

 

mardi, 09 janvier 2007 04:00

Take the gamble

Ce jeune chanteur/guitariste/compositeur (NDR : il n’est âgé que de 21 ans !) est un talent à l’état pur. Paru en 2004, son second album ("You don't love me") en était déjà la plus belle des promesses. Ce musicien puise aussi bien ses références dans le blues que le jazz. Le blues des années 40 et 50 ainsi que le swing des années 30 et 40. Ce musicien reconnaît pour influences majeures T-Bone Walker, Clarence Gatemouth Brown, Charlie Christian, BB King, Tiny Grimes, Duke Robillard et Jimmie Vaughan.

Dave signe neuf des treize plages de son nouvel opus. Il parvient à y patiner son blues traditionnel, mais aussi contemporain, de touches country, jazz, swing et rock. Sa fidèle section rythmique -AJ Hager à la basse et Matt Rousseau aux drums- est toujours au poste. Cependant, il a reçu, pour la circonstance, le concours de nombreux invités de marque. Sous la houlette bienveillante du grand Duke Robillard. Parmi ces ‘guests’ figurent Arthur Neilson, le guitariste new-yorkais de Shemekia Copeland et du label Dixiefrog (NDR : il est préposé ici à la basse !), Doug James (ex-Roomful of blues) aux saxophones, Al Basile au cornet ainsi que Miss Dona Oxford –véritable princesse du boogie woogie- au piano.

Dès les premières notes du "She walks right in" de Clarence Gatemouth Brown, on ressent la patte du grand Duke. Le son est dense, remarquable. La section rythmique swingue du tonnerre. Dona Oxford virevolte derrière ses ivoires. Une situation idéale pour mettre les différents solistes en exergue. Ce que ne manquent pas de faire Dave Gross aux cordes et Doug James au sax ténor. Cette entrée en matière est une véritable claque qui laisse augurer une suite royale. Gross a pris de la bouteille. Il signe la plupart des plages. Et puis sa voix est aujourd’hui bien plus assurée. "Mess on my plate" nous entraîne dans la cité de la Nouvelle Orléans. Dave et Dona se révèlent très inspirés face aux cuivres de James et d'Al Basile. "I'm leavin' baby" emprunte un rythme syncopé. Nous ne sommes pas tellement loin du rockabilly, mais imprimé sur un tempo plus lent. L'ambiance est cool. Pas de cuivres. Ce qui n’empêche pas la formule d’atteindre un niveau très relevé. Confronté au talent du petit, Duke ne tient plus en place et se pose en rival habile. Premier blues lent, "I'm so hungry blues" baigne au sein d’un climat très fin de soirée. Dans cet univers si naturel et réaliste, très T-Bone Walker aussi, Dave manifeste beaucoup d’assurance face aux interventions somptueuses de Basile au cornet. Instrumental atmosphérique, "Swingin' on all six" trempe dans le jazz et le swing des années 30. Les solistes interviennent à tour de rôle : Doug, Dona, Al, l'ami Dennis Gruenling à l'harmonica et Dave. La classe! Qu’est-ce-que la voix de Dave a pu s’améliorer en quelques années ! Animé par un festival de cuivres, "Walkin' in a daze" en est une des plus belles illustrations. "That's all you get" lorgne davantage vers le R&B contemporain. Préposé à la basse pour cet opus, Arthur Neilson est passé à la guitare rythmique. Dona siège à l'orgue Hammond. Gross en profite pour gratter dans le style funky d'Albert Collins. Dave n’est manifestement pas allergique à l’éclectisme. Abordé dans un style laidback, "You ain't playin' me no more" confirme cet état d’esprit. Sculptée dans le country blues, cette plage brille par son solo en picking, tout en fraîcheur, devant le piano roulant et paresseux de Dona. "I know your wig is gone" rend hommage à T-Bone. Un swing jazz qui puise allègrement dans le passé. Ce qui n’empêche pas les différents instrumentistes de tirer leur épingle du jeu. Ce swing désuet frôle même l’univers de Django Reinhardt et de Benny Goodman sur "After you've gone". Et le concours d’Al Basile n’y est pas étranger ! Plus contemporain, "Movin' on down the line" séduit par son sens mélodique. Tout en finesse, "Make things right" émarge au swamp blues. Assurément un des meilleurs albums parus en 2006!

 

 

 

mardi, 30 janvier 2007 04:00

Resurrection

Julian est né aux Pays-Bas. Dès son plus jeune âge, il est fasciné par Jimi Hendrix. Et en particulier par son elpee "Are you experienced". A partir de cet instant, il commence à prendre goût au blues musclé et bien électrique, écoutant alors aussi bien les bluesmen noirs comme Elmore James, Freddie King et Buddy Guy que les princes anglais du british blues boom, Peter Green, Rory Gallagher ou encore Alvin Lee. Il commet son premier album en 1996, "Where will it end?" Depuis, il en a aligné une bonne dizaine, dont trois immortalisés en public, "Live" en 98, le double "DeLivered" en 2002 et le coffret "Dedication" en 2005, trois œuvres incluant à chaque fois une version de "Hey Joe"!

Ce nouvel opus studio a été concocté quelque part en Allemagne. Il a bénéficié du concours de sa section rythmique : le fidèle bassiste Tenny Tahamata et le batteur Rob Heijne (ex Ruben Hoeke Band). Julian a composé l'intégralité des chansons. L'ami Julian démarre en force par "Moving to survive". Manifestement, il est hanté par le spectre de Rory Gallagher. Il possède la même pêche que l'ange irlandais disparu. Ses cordes sont constamment à l'offensive, ses vocaux éructés. Il ne s’accorde par la moindre seconde de répit, exploitant le re-recording pour ses solos. Sa Stratocaster possède ici le don d'ubiquité! Et avouons que son intention de faire revivre le fantôme du bon Rory est assez réussie. Quoique de bonne facture, "Burnin' soul" se révèle plus dur que celui de son idole. Il aime écraser notre Batave! Caractérisé par ses changements de rythme et ses successions de riffs, ce ‘Sas sound’ me rappelle les glorieuses années des guitar heroes. Une recette reconduite lors du puissant "Runnin' all my life" que Julian domine tel un Alvin Lee survitaminé! Manifestement, l'homme maîtrise parfaitement son style. Lorsque le tempo s'adoucit, il soutient son chant de riffs dramatiques. A l’instar d’"All I know", plage au cours de laquelle nous sommes pris sous le Sas charme, même si la délicatesse ne fait pas partie du Sas world. Et au passage, il dispense des notes meurtrières. Un as ce Sas ! Le titre maître est une petite déception, car il n'apporte rien de neuf. Pourtant, lorsque la basse de Tenny poursuit les six cordes de Sas, on a l’impression de revivre les beaux jours de Ten Years After ; et on se rappelle alors Leo Lyons se tortillant comme un fou pour suivre son leader. Mais franchement, je préfère Julian dans l’exercice des plages lentes et oppressantes. D’ailleurs, s’il se débrouille plutôt bien dans le registre, il n'est pas un petit rat de l'opéra. Et même s’il aime alterner le doux et le dur, il ne fait pas dans la dentelle. Parfois on a l’impression qu’il cumule plus de guitares que le Lynyrd Skynyrd au grand complet. Cri de désespoir concédé au pays des drogues dures, "Junkies blues" est un hymne déjanté. Les cordes opèrent le voyage lysergique tandis que transi d'effroi, Sas se met à souffler furieusement dans un harmo! Quoique naviguant dans des eaux plutôt éloignées du blues, ce "Resurrection" s'inscrit bien dans la sphère du catalogue Provogue.

 

 

 

mardi, 16 janvier 2007 04:00

Satisfy somebody

Non seulement, Gary et Anita partagent leur existence, mais la vie et la musique se rejoignent dans leur passion. Celle du blues. Gary chante, compose, joue des claviers et de l'harmonica tandis que sa douce Anita joue de la basse acoustique et se réserve l'une ou l'autre percussion. Ils se sont retirés dans l'intimité d'un studio pour produire ce premier album. Le couple est issu du Canada occidental. Gary a longtemps sévi sur la scène blues de Winnipeg. A une certaine époque, il avait -paraît-il- impressionné le regretté Junior Wells. Il a drivé ses Harpoons avant de fonder son Gary Preston Band, au sein duquel militent Anita et deux autres musiciens. Une formation toujours en activité…

Pour ouvrir les hostilités, le duo s'attaque au répertoire de Willie Dixon ; et en l’occurrence à "Don't go no farther". Gary possède une voix bien assurée. Il double ici au piano et à l'harmonica pendant qu'Anita joue le rôle du géant Dixon sur sa basse acoustique. Mais au fil de la compo, l’instrument chromatique est mis de plus en plus en évidence. "Mighty long time" développe un dialogue entre la voix et l'instrument. Un moment bien intense au cours duquel Gary souffle avec retenue, à la manière de Sonny Boy Williamson II. Parfois le duo emprunte les accents syncopés de New Orléans. C'est évident sur "Cuddle up". Une situation qui se reproduit sur le titre maître. Preston se révèle, par ailleurs, très bon pianiste. Il joue aussi bien des deux mains. Sa voix est percutante tout au long des toniques "Seven nights to rock" et "Lonesome" (NDR : une cover de Memphis Slim). Il est également capable de chanter le blues sur un mid tempo. A l’instar de son "Platypus blues". Sa musique à bouche y produit alors des cris plaintifs. Parfois l'ambiance vire au jazz/cabaret. Comme sur "The bounce" ou encore lors de la reprise du hit planétaire de Ray Charles, "Georgia on my mind". Gary s'accompagne à l'orgue et au piano tandis que la tendre Anita joue des lignes bien mélodieuses sur sa basse. Si "Got an uncle in Harlem" prend une coloration swing jazz, le délicieux "Hurt" se couvre d’accents exotiques. Miss Bonkowski étale alors tout son talent à la basse. "Bayou heat" opère une incursion dans le pays du zydeco, une plage au cours de laquelle Anita est passée au frottoir. Pour achever cette bonne production maison, Gary se remet à souffler comme le vieux Sonny Boy, lui rendant en quelque sorte un hommage à travers ce "Greasy"!

 

 

 

mardi, 02 janvier 2007 04:00

The road to Escondido

J.J Cale est né en 1938. A Tusla, en Oklahoma. Ce n’est donc plus un néophyte. Devenu intemporel, son célèbre hit, "After midnight", a été composé dans les années 60. Au départ, cette chanson n’était que la flip side d’un 45 tours. La version d’Eric Clapton deviendra un succès international (NDR : elle figure également sur son album éponyme, paru en 1970) ; mais surtout va lancer la carrière de JJ. Dont le premier elpee, "Naturally", paraît en 1972. Dans son repaire, loin du monde et surtout des modes, JJ créée son propre style musical, emprunté au blues, au rock, au jazz et à la country : le Tusla sound, une musique qui sera qualifiée de ‘laidback’ ; c’est à dire décontractée, simple et chaleureuse, un style dont il est le porte-drapeau en compagnie de Tony Joe White. JJ s’est retrié depuis un bon bout de temps à Los Angeles, où il se consacre à la composition. Sa rencontre avec Eric Clapton n'est gère surprenante. Eric a toujours apprécié JJ et en emprunte très régulièrement le style laidback. A deux reprises, il a converti des chansons de Cale en véritables tubes : "After midnight" bien sûr, et un peu plus tard "Cocaïne" (NDR : une compo incluse sur l’elpee "Slowhand", gravé en 77). Si cette collaboration n’apporte pas de surprise majeure, elle est surtout l’œuvre de JJ qui signe ici onze plages, ne concédant que deux morceaux à Eric et une reprise. De nombreux invités ont participé à la confection de cet opus. Dont plusieurs gratteurs. Etonnant lorsqu’on sait que les deux artistes sont des virtuoses de la six cordes. Et en particulier Doyle Bramhall II et Derek Trucks, deux membres de l’EC Band, ainsi que John Mayer et Albert Lee. Feu Billy Preston se réserve les claviers (NDR : oui, oui, c’était lui l’organiste qui se cachait derrière les Beatles !). Nathan East ou Pino Palladino la basse.

Empruntons la route d'Escondido, une petite cité sise au nord de San Diego, en Californie, nichée au creux d’une vallée entourée de montagnes rocheuses. Plage d'ouverture, "Danger" est un ‘instant winner’, un titre qui accroche immédiatement, vous pénètre, vous contamine et ne vous lâche plus avant d’avoir épuisé sa dernière seconde. L'orgue omniprésent du regretté Billy Preston introduit cette plage (NDR : il s’st éteint le 6 juin dernier). JJ et Eric chantent en duo, avant qu’une guitare largement amplifiée (celle de Doyle Bramhall II ?) ne fasse son apparition. Mais en toile de fond, la gratte d’Eric entre en scène. Feutrée, elle amorce la conclusion. Une formidable entrée en matière. L'album est ensuite partagé entre ballades, plages rythmées et moments intensément blues. Parmi les ballades, le délicat "Heads in Georgia" est traversé de bien jolies parties de guitares. Intimiste, "Who am I telling you?" s’accroche à la slide du jeune Trucks. Quelques plages plus enlevées affichent une coloration country. A l’instar de l'excellent "When the war is over", enrichi de cuivres, mais également parcouru par la slide de Trucks et les cordes d'Eric. Un des grands moments de l’album. Un morceau qui me rappelle un succès de JJ, intitulé "Call me the breeze". Le violon de Dennis Caplinger et la guitare en picking d'Albert Lee tirent leur épingle du jeu tout au long de "Dead end road". Les parties de cordes qui balaient "Anyway the wind blows" sont manifestement southern rock. En finale "Ride the river" synthétise l’œuvre. Compo assez enlevée, "Missing person" concède des accents sudistes. En particulier sous son aspect instrumental. Les guitares (Doyle, Derek) et les claviers y sont bien mis en évidence. Mais le blues n’a pas été oublié. Et je pense tout particulièrement au "Sporting life blues" de Brownie McGhee. Eric chante cette plage très fin de soirée, un morceau qui bénéficie du concours de Taj Mahal à l’harmonica. Impeccable, "It's easy" évolue sur un tempo bien plus enlevé. Un morceau ‘barrelhouse’, idéal pour la route. Blues intimiste, "Hard to thrill" relève de la plume d’Eric et de John Mayer. Les cordes de ces deux solistes et le piano acoustique de Preston sont bien mis en exergue. Autre blues, "Last will and testament" est caractérisé par les interventions immédiatement reconnaissables de Slowhand. Dans le domaine du roots rock, cet album est vraiment d’excellente facture…

 

mardi, 09 janvier 2007 04:00

Where I come from

Bill Lupkin est né et a grandi à Fort Wayne, dans l’Indiana. Touché par le virus du blues, il émigre à Chicago, fin des sixties. Il y hante assidûment les clubs des quartiers Sud et Ouest pour chanter ce blues, tout en soufflant dans son harmonica. Il fréquente les Aces, le backing band de Little Walter et de Junior Wells ; mais devient également un collaborateur régulier du pianiste blanc, Bob Riedy. Ce qui lui permet de soutenir la comparaison avec les grands ; et en particulier Muddy Waters, Howlin Wolf et surtout le guitariste Jimmy Rogers, pour lequel il participera d'ailleurs à la confection de l'album "Gold tailed bird" (produit par Freddie King), en 1972. Une aventure au cours de laquelle il avait acquis la promesse de travailler en compagnie de Canned Heat. Un projet qui ne s’est, cependant, jamais concrétisé. Mark Hummel, le célèbre souffleur californien, est responsable des notes consignées sur la pochette. Il avait rencontré Bill, en 1973. A Los Angeles. Et avait été impressionné par sa technique, notamment par les effets obtenus par la langue, afin de développer un style proche de James Cotton. Plus d’un quart de siècle plus tard, Lupkin nous rappelle à son bon souvenir. Il avait ainsi monté un groupe : le Chicago Blues Coalition, en compagnie duquel il ait commis un elpee chez lui, à Fort Wayne, en 1999. Un disque enregistré en public intitulé "Live at the Hot Spot". Au sein de son backing group figurait alors le pianiste Barrelhouse Chuck et le guitariste Billy Flynn.

Pour enregistrer ce tout nouvel opus, il a reçu le concours de ses amis. Il a ainsi conservé le drummer du Chicago Blues Coalition, Mark Fornek ; et puis les musiciens de Nick Moss. Il signe toutes les plages de cette œuvre, en exploitant à merveille toutes ses expériences vécues. Le booklet est illustré par des témoignages photographiques où il figure en bonne place auprès de tous les grands. Impressionnant !

L'album s’ouvre par le puissant "What's with that?". Bill respire la joie de chanter et de souffler. Nick Moss piaffe d’impatience et décroche, sans attendre, une première flèche sur ses cordes. Nous sommes ici en plein cœur du Chicago Southside. "The sun is shinin" accroche instantanément. Les musiciens manifestent une grande cohésion. L’ambiance des années 50 est parfaitement restituée. Une sonorité qui fait plaisir à entendre. Bill souffle comme Little Walter. Tim Wire nous ramène dans l'univers de Sunnyland Slim et d'Otis Spann. Nick lorgne vers celui de Jimmy Rogers et d'Eddie Taylor. "All night long", "Move out to the country" et "Bad feelin" évoluent dans le même registre. Lupkin y démontre avoir entièrement assimilé la quintessence de la Cité. Celle de Little Walter, Junior Wells, James Cotton et consorts. Jamais ce disque ne suscite l’ennui! Instrumental explosif, "Madison & Sacramento" nous renvoie à l'époque au cours de laquelle, Little Walter – flanqué de ses Aces – sévissait… un temps que nous n'avons – hélas ! – pas connu… Et si vous n’êtes toujours pas convaincu par le talent de cet artiste, je vous invite à prêter une oreille attentive à un titre comme "You got me nervous", un fragment parcouru par les rythmes exotiques et syncopés de rumba. Ou encore par "Cant' hide a lie", un des sommets de l'album. Empruntant le style d’Otis Rush, Nick Moss se réserve une envolée épique sur les cordes ; mais il la convertit progressivement en un style bien personnel. L’elpee explore d’autres horizons sonores. A l’instar d’"I want to love you", une plage qui s'enfonce dans les marécages louisianais. Nous ne sommes alors plus tellement loin du monde de Lazy Lester. Pas étonnant que Mark Hummel apprécie ce diable de Lupkin. Etrange, mais régulièrement, Bill me rappelle un de mes artistes favoris : William Clarke. "What you gonna do" en est la plus belle démonstration. A cause de cette force de frappe, de cette puissance de souffle et de cette conviction jamais prise en défaut. La voix est bien adaptée au style. Hundt y apporte une touche originale à l’aide de sa mandoline. Dans un registre réminiscent de Johnny Young. En fin d'album le disque nous réserve une version différente de "Move out to the country". Plus cool, elle remonte à l’an 2000. Elle implique la plupart des mêmes musiciens. Steve Lupkin, le petit frère, a rejoint le line up. Il y est préposé à la basse. Hubert Sumlin participe à cette plage à l’ambiance assez Howlin' Wolf. Ce clin d’œil adressé à Bill Clarke est reproduit lors du slow blues, "Early hours of the mornin". Cinq minutes de bonheur! Bienvenue chez les Grands, Mr Lupkin!

 

 

 

mardi, 16 janvier 2007 04:00

Bigg Mann

Samuel est dyslexique. Ce qui ne l’a pas empêché de se consacrer à la musique, dès son plus jeune âge. Il aime le rock, et en particulier Queen. Mais est surtout fasciné par les guitaristes. Et en particulier Yngwie J Malmsteen, Tommy Bolin ou encore Stevie Ray Vaughan. En 2000, il fonde Texas Flood, un quartet dont le patronyme laisse, bien entendu, augurer du style adopté. Il se lance ensuite dans un duo, en compagnie du batteur Steve Washington : le Washington Lees Experiment. Toujours pas satisfait de ses expériences, il cherche à créer un nouveau concept dans l’univers du blues, en posant les bases de son projet sur l'ambiance et le fun que peuvent générer sa musique. Il fonde alors son propre trio, flanqué du bassiste Adam Ogiliev (déjà impliqué dans le Texas Flood) et du drummer Andy Perfect. Le groupe veut briser les perspectives conventionnelles du blues, en communiquant aussi bien un sentiment de bonheur que de tristesse. Mais suffit pas d’avoir de bonnes idées, il faut aussi les concrétiser. Alors, ce "Bigg Mann" est il vraiment différent de la production blues habituelle ? Tout d’abord, il n’affiche qu’une durée de 40 minutes. Ce qui est vraiment peu pour un cd. Surtout lorsqu’on veut convaincre le mélomane avoir décelé un nouveau créneau. Blues Matters, label anglais particulièrement dynamique, a signé le Lees Band. B.M. est également un magazine de blues qui prend une ampleur certaine sur le net…

Dès les premiers accords de "Bigg mann", on sent le Lees Band libéré. Tout au long de ce blues rock bien carré, tempétueux, la guitare occupe tout l'espace sonore. Sam possède une bonne voix. Puissante également. Mais surtout, ses cordes dominent parfaitement leur sujet. Faut dire que grâce aux vertus du re-recording, il assure également la rythmique. En trame de fond, Andy tape dur sur ses peaux. "The way it is" se distingue par une rythmique digne du ZZ Top de naguère. Lees double à l'orgue. Cette plage me fait penser furieusement au hard blues rock anglais des seventies. "See you again" accentue cette première impression. Rien de bien neuf à l’horizon. La cohésion rythmique est irréprochable. Ce qui permet, sans aucun doute, de donner toute confiance au soliste. Le travail sur les voix passe bien la rampe. Résultat des courses : la musique est très accessible. Parfois elle me rappelle les duels échangés entre Jeff Beck et Jimmy Page, lorsqu’ils sévissaient chez les Yardbirds. Plage lente et atmosphérique, "It's not your fault" s’écarte totalement de l’univers du blues. L’interprétation est cependant de bonne facture, même si les cordes empruntent un profil heavy metal. Acoustique, "Dusty road blues" est un intermède instrumental de brève durée. Dans le registre des ballades, "Little girl lost" trempe dans le R&B. Mais je la trouve un peu trop américanisée à mon goût. Dans le registre, je préfère "The memories that still holds me". A cause de ses accents sudistes. Une compo de southern rock dont le mur de guitares est aussi épais que solide. Blues rock classique et rythmé, "Dance hall" rappelle l’inévitable Vaughan. Autre ballade, "The other side of the day" constitue un des meilleurs moments de l’œuvre. Un blues très mélodique réminiscent d'un certain Fenton Robinson. La finale s’enfonce dans le hard rock pur et dur. Agressives, les guitares sont traitées à la manière de Pat Travers. Et en bonus track, on a encore droit à "Set me free", une ballade, ma foi, tout à fait inoffensive. Bref, si cet opus met en exergue des musiciens particulièrement efficaces dans leur style, on ne peut vraiment pas dire que leur musique soit révolutionnaire…

 

 

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