En intro de ce disque de lounge, on entend la mer, les vagues allant et venant sur le sable fin d'une plage perdue sous les Tropiques (voir la belle pochette). Comme le dit le grand théoricien du son Murray Schafer dans son livre séminal, 'Le Paysage sonore' : " La mer évoque la purification, la fraîcheur et le renouveau. Par sa perpétuelle présence, elle est symbole de l'éternité. Par ses marées, le va-et-vient de ses vagues, symbole du changement ". La lounge, ce serait donc tout ça à la fois : du neuf, du pur, de l'éternel, du changement. Neuf, ça ne l'est plus depuis longtemps ; depuis que ses beats moites et convenus envahissent notre espace auditif jusqu'à la saturation, du resto branché aux toilettes de chez Biguine. Pur, encore moins : il ne s'agit ni plus ni moins que d'une vaste escroquerie commerciale destinée à flouer les consommateurs que nous sommes ; une honteuse atteinte à la musique, la vraie, et à notre intelligence, celle qui nous permet de discerner la lounge de l'électro de qualité. Eternelle, sûrement pas : la lounge disparaîtra aussi vite qu'elle est apparue, remplacée par une nouvelle mode passagère formatée par l'industrie du disque, et dont le seul but sera de remplir les poches des rentiers du music business. Symbole de changement, on en doute : c'est plutôt une régression, un nivellement par le bas… " Souleiado ", c'est aussi le nom d'une chaîne de magasins de tissus provençaux : on croit rêver ! Encore une chose : l'interlude n°10 de ce précieux CD s'intitule " Mistral ", et l'on entend effectivement le vent souffler, délicatement… Jung parlait du vent comme du " souffle de l'esprit ". Ici, c'est un vent fétide, qui, espérons-le, balaiera une fois pour toutes la lounge de notre horizon musical.