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Ty Segall - Sjock 2024
Sebastien Leclercq

Sebastien Leclercq

Basé en bordure du Rhin (sur le site Tanzbrunnen), le célèbre festival allemand célébrera en 2025 (les 19 et 20 juillet) sa 19ème édition. Réputé pour sa programmation post-punk, dark-wave, gothic ou encore EBM, l’organisation colonaise a pour habitude d’annoncer déjà très tôt son affiche (dès la fin de l’édition précédente).

Des derniers noms se sont ajoutés mi-septembre. Parmi les têtes d’affiche, on relèvera : Die Krupps, Lord of the lost, la légendaire Ann Clark, Suicide Commando ou Oomph!

Au milieu de l’affiche le duo régional de Wisborg, les légendaires Nosferatu ou Eisfabrik. De nombreuses découvertes vaudront aussi le détour comme le band post-punk turc Ductape qui enchaîne les dates de tournée (NDLR : ils sera notamment présent ce 1er novembre 2024 à Charleroi dans le cadre de l’Alterfest).

L’affiche complète et les infos pratiques sont à retrouver sur : www.amphi-festival.de | www.facebook.com/amphifestival | www.instagram.com/amphifestival !

Et pour se faire une idée de l’ambiance du festival, il y a aussi l’aftermovie de 2024 : https://www.youtube.com/watch?v=TR2Tlymp8xg&ab_channel=AmphiCrew

 

lundi, 05 août 2024 11:09

Lokerse feesten 2024 : lundi 5 août

Si la veille l’affiche lorgnait vers les 80’s, ce lundi est réservé, pour une large part, aux 90’s, proposant comme têtes d’affiche, les Pixies et l’ex-The Verve, Richard Ashcroft. Mais pas que… puisque quelques surprises vont pimenter la soirée. Compte-rendu de cette journée

Place d’abord à la synth-pop incandescente de Future Islands. La formation avait déjà opéré un passage remarqué, il y a un peu moins d’un an, à l’Ancienne Belgique. D’entrée de jeu, le leader Samuel T. Herring se dépense sans compter. C’est presque devenu un rituel. 

Ses vocalises sont incomparables. Il est capable de monter dans les aigus puis de hurler comme un chanteur de doom-métal, sans la moindre difficulté. Et sa chorégraphie n’a rien à envier à Béjart ou Charmatz. Les compos s’enchaînent et tapent comme les rayons de soleil sur nos têtes. On a cependant parfois l’impression que le set tire en longueur, mais en fin de parcours, « Seasons (Waiting On You) » (NDR : élu meilleur single par le NME, en 2014) réveille la foule. Pour clôturer sa prestation, la formation nous gratifie d’un de ses premiers ‘simples’, « Long flight ». Caractérisé par sa longue intro, il nous fait presque oublier que certaines compos se ressemblent…

La grosse surprise la soirée viendra à nouveau du club Studio Brussel. Bill Ryder Jones y est programmé. Votre serviteur s’y rend avec des pieds de plomb. A cause de son passé de guitariste au sein de The Coral, groupe destiné aux ados, fondé en 1996. Et puis la presse spécialisée le taxe de songwriter, laissant supposer qu’il s’agit d’un folk singer au répertoire soporifique. Votre serviteur débarque d’ailleurs dans la salle, alors que le set est déjà bien entamé. Mais en observant le line up, il y a de quoi changer d’avis. Il implique une violoncelliste/choriste, deux guitaristes, dont l’un double aux chœurs, un claviériste, un batteur, un bassiste et bien sûr Bill au chant et à la sèche. Bien que soigné, son look est plutôt dépareillé. Chaussé de lunettes fumées et les cheveux hirsutes, il ressemble un peu à Richard Aschroft, également issu du Nord-Ouest de l’Angleterre, et qui va le succéder sur la main stage. Les compos oscillent entre folk qui monte régulièrement en crescendo, et une sorte de dream-pop/shoegaze surprenante. En extrapolant, cette expression sonore navigue quelque part entre celle de Swell et de The Folk Implosion. Les quelques centaines de spectateurs apprécient et réalisent qu’ils vivent un bon moment. Un regret quand même, c’est ce timing de Bill Ryder Jones qui empiète sur celui de la scène principale. Ou l’inverse ! Finalement il aurait été préférable d’écourter le concert de Future Islands pour ne rien manquer de celui-ci. Un artiste à suivre donc.

On venait d’en parler : Richard Ashcroft se produit donc, sur la grande scène. Il grimpe sur l’estrade d’un air désinvolte. Et entame un petit pas de danse clownesque sur la musique d’intro, « Bring On The Lucie » de John Lennon (NDR : inclus sur le dernier opus, « Acoustic Hymns Vol 1 »). Cheveux en bataille et veste militaire sur le paletot, il s’exclame ‘What a beautiful evening’ (NDR : Il est vrai que le soleil se couche, et ses derniers rayons illuminent le podium). Il s’emballe même un peu trop, en annonçant de manière précipitée, le premier morceau : ‘This song is called « Sonnet »’. Avant que ses musiciens ne rectifient le tir. C’est par un autre titre du répertoire de The Verve, « Space and time », que le set débute. Et préalablement au suivant, le leader annonce, sur d’un ton amusé : ‘Ok, now we will play « Sonnet »’. Il introduit le morceau suivant par ‘It’s a song we have not played since a long time : « Weeping willow »’. Tout au long de la ballade « A song for the lover », des images de couples célèbres sont projetées sur l’immense écran installé en fond de scène (NDR : il reproduit une TV géante parfois subdivisée en plusieurs postes vintage). Malheureusement Richard, armé d’une sèche, n’est pas toujours très visible sur l’estrade. Il est trop souvent masqué par le guitariste et le bassiste. Excentriques, ils monopolisent l’espace. Look jamaïcain, le premier est coiffé en dreadlocks. Le second n’arrête pas de bondir sur la gauche du podium. En fin de parcours, la setlist nous réserve quelques tubes : « The drugs don't work », « Lucky man » et bien sûr l’incontournable « Bitter sweet symphony », pour lequel Richard propose au public de chanter l’intro (NDR : et celui-ci ne va pas se faire prier !) Le chanteur commence enfin à se remuer. Il simule un combat de boxe contre son pied de micro et fume une dernière cigarette (NDR : il en aura grillé quelques-unes entre les morceaux, causant des interruptions inopportunes). C’est sous la forme rock’n’roll qu’on préfère le voir ; cependant, le concert s’achève au bout d’une petite heure et quart.

La foule s’agglutine de plus en plus aux premiers rangs. Pas de doute, la majorité du public est venue pour voir et écouter les Pixies. Les échos recueillis à la suite de son passage, la veille, à Ronquières, sont plutôt dithyrambiques. C’est de notoriété publique, le groupe s’amuse à changer ses playlists. Et ce soir, le set démarre en force par « Gouge away », « Wave of mutilation » et « Isla de Encanta ». Mais à l’instar de sa prestation accordée au festival Hear Hear, en 2022, la suite est plus cool. Frank Black troque sa guitare électrique contre une sèche. Il nous réserve deux nouvelles compos, « Chicken » et « The vegas suite ». Elles sont quelque peu anesthésiantes et devraient figurer sur un prochain elpee, intitulé « The night the zombies came », dont la sortie est prévue pour la fin de l’année.

Mais l’impressionnante liste de singles de la première heure rebooste le concert : « Vamos », « Velouria », « Debaser » et l’hymne « Where’s my mind », en final. La nouvelle bassiste Emma Richardson apporte un plus à l’ensemble ; en outre, elle assure les backing vocaux (NDR : expérimentée, elle milite également chez Band Of Skulls).

Pour terminer cette soirée, cap sur le club Studio Brussel pour assister au set de The Murder Capital. On ne parlera ici plus d’une découverte (NDR : sa prestation accordée dans le cadre de l’édition 2019 du Sonic festival, et celle dispensée à l’Orangerie du Botanique, en 2020, ont été commentées dans Musiczine), mais plutôt de confirmation. Voire d’évolution. Une mutation qui frappe dès l’entrée en scène des musicos. Tout d’abord en ce qui concerne le look. Exit l’apparence post punk entrainant le port d’un costume élégant et d’une chemise. C’est plutôt sous l’aspect de bad boys que le band déboule sur le podium. A l’instar du chanteur de Fontaines DC, James McGovern, derrière des lunettes fumées, affiche une image qui pourrait naître d’un croisement entre un rappeur et Sid Vicious, Déchaînés, les derniers pogos éclatent au sein des premiers rangs. Certains spectateurs sollicitent un stage diving du leader, dont il est coutumier, mais ils ne l’obtiendront pas. Même si son attitude davantage survoltée sur certains titres aurait pu traduire une envie d’opérer le grand saut. Un set sans temps mort, au cours duquel le combo n'a pas négligé les incontournables « More is less », « Green & Blue » et en clôture « Don’t cling to life ». Le parfait complément aux Pixies ou une belle manière de ponctuer cette journée, très riche, en force…

FUTURE ISLAND, Bill RYDER JONES, RICHARD ASCHCROFT, PIXIES, THE MURDER CAPITAL

(Organisation : Lokerse feesten)

Photos Wim Herbaut ici

dimanche, 04 août 2024 16:41

Lokerse feesten 2024 : dimanche 4 août

Alors que la plupart des festivals ne laissent plus beaucoup de place au rock, les Lokerse feesten continuent de régaler les amateurs du genre. Ce dimanche, l’affiche se focalisait essentiellement sur la période 1977-1987. Et, par conséquent des styles musicaux qui ont marqué cette époque : punk, post-punk, ska ou encore new-wave et EBM. La journée est chargée (pas moins de 10 groupes à l’affiche, contre 7 le lendemain). Mais comptez sur nous pour (presque) tout vous raconter…

On écoute de loin d’Arbeid Adelt ! Programmé assez tôt dans l’après-midi, son temps de passage est limité à 35 minutes. Il parviendra à y caler 8 titres dont une reprise de P.I.L.

Il faut remonter au début des 80’s pour retrouver les prémisses de sa discographie. En 1983, il sortait son premier elpee, « Jonge helden », dont le titre maître avait été produit par Jean-Marie Aerts. Et qui s’articule autour du BV (NDR : Bekende Vlaming) Marcel Vanthilt, personnage populaire dans le Nord de la Belgique, pour son implication au sein de médias comme MTV, VTM et Stubru. Notamment. On remarque rapidement ses limites au chant, et tout particulièrement sur le hit le plus notoire du band, « Ik sta scherp ». Une forme de punk/new-wave aux vocaux rappés ; un phrasé délirant mais guère envoûtant. Et le résultat est identique sur la reprise de « Death disco », insérée à mi-parcours. En espérant que Jah Wobble (qui joue en soirée) n’a pas entendu le massacre d’un titre phare de sa discographie, depuis les coulisses. Néanmoins, le set demeure divertissant et heureusement, les musiciens sauvent les meubles. Les membres originaux dont feu Willy Willy (parti alors rejoindre The Scabs) et Dani Klein (qui avait fondé Vaya Con Dios), ont été depuis remplacés par un guitariste, un batteur et un saxophoniste qui tiennent la baraque. Sans oublier une jeune claviériste, dont les backing vocaux sont tout à fait rafraîchissants. En tout cas, le public flandrien semble conquis. Il faut aussi signaler que la formation remonte régulièrement sur les planches. Elle s’était d’ailleurs produite, un an plus tôt, dans le cadre des Fonnefeesten (NDR : un festival parallèle qui se déroule à la même période, et à quelques centaines de mètres du Grote Kaai de Lokeren) …

Un autre combo flandrien embraie : Vive la Fête. Mais dont ls compos sont interprétées en français. Et votre serviteur doit avouer que la présence de ce band n‘est pas pour lui déplaire. Vive la Fête avait déjà enflammé le club des Lokerse feesten, devant un auditoire archicomble, en 2023. Sa recette est identique, mais fonctionne invariablement à merveille. Toujours aussi sexy, Els Pynoo débarque en tenue de danseuse du Moulin Rouge. Elle a même oublié son soutif. Autour d’elle, on retrouve son compagnon Danny Mommens (NDR : un ex-dEUS, faut-il le rappeler) à la sixcordes, un bassiste (NDR : probablement celui qui gigote le plus au monde, sur les planches), un claviériste et un batteur. Et ces deux derniers sont de nouveau maquillés comme des Zorros.

Les tubes défilent : « Nuit blanche » en ouverture, « Schwarzkopf », « Jaloux », « Maquillage » ... Ou encore, en final, « Noir désir » dans sa version longue et « 2005 » au titre trompeur, car il colle vraiment aux 80’s. Le set véhicule d’ailleurs de nombreux accents empruntés à cette décennie. C’est ce que leur reproche les détracteurs. A cause du tempo répétitif des claviers et de cette ligne de basse typiquement new-wave. Mais qu’importe puisque Vive la Fête possède un don pour faire danser et mettre un peu de gaieté ; des ressources idéales en cette après-midi ensoleillée.

Dans un tout autre style, The Selecter s’empare ensuite de la main stage. A l’instar de The Specials et de Madness, il est considéré comme un des fers de lance du mouvement ‘2 tone’, qui a favorisé, fin des 70’s, la renaissance du ska combiné alors au punk-rock. On remarque d’ailleurs, au sein des premiers rangs, autant de punks à crête colorée, que de rudeboys coiffés de chapeaux ou/et affublés de fringues à damiers noir et blanc. Car The Selecter existe depuis… 45 ans maintenant. Après un break intervenu entre 1981 et 1991, il se reconstitue et grave cinq nouveaux albums. C’est sur un arrangement du générique de ‘Chapeau melon et bottes de cuir’ (ce qui resitue aussi la période) que le show débute. Du haut de ses 70 balais, Pauline Black reste toujours élégante dans son costume, et sous son chapeau ‘pork pie’. Elle mène la danse dès « Three minute hero », s’autorisant des commentaires engagés entre les compos. Ainsi elle condamne le Brexit ou accentue la phrase ‘Is good for absolutely nothing’ lors de la reprise de « War » (chanson pacifiste d’Edwin Starr). Elle présente aussi son batteur, Charley 'Aitch' Bembridge, membre originel du groupe, au look de vétéran jamaïcain. Ce sont les seuls rescapés du line-up originel qui a bien changé au fil des décennies. Pauline déclare : ‘We are the Selecter and if you don’t know us, you will know this song’ (Trad : ‘Nous sommes The Selecter et si vous ne nous connaissez pas, vous connaîtrez cette chanson’), avant d’attaquer le tube « On my radio », puis de clôturer le set par le tout aussi classique « Too much pressure ».

Et de changement de line-up il en est aussi question chez La Muerte. Un autre groupe culte belge des 80’s qui, après une longue interruption (NDR : de 1994 à 2014), s’est reformé, mais en apportant du sang neuf. Sous la forme du bassiste de Channel Zero et du guitariste de Deviate (NDR : outre son job de disquaire dans le quartier de la Bourse de Bruxelles, il milite encore au sein d’autres formations). Pas étonnant que le club soit plein à craquer. Le nom du band bruxellois est affiché en lettres rouges incandescentes et évocatrices ; de quoi mettre le feu aux planches en déversant son metal inclassable, teinté de psyché ou de stone-rock. Au chant, Marc du Marais est à nouveau masqué (NDR : on a chaud pour lui !) comme s’il venait d’être kidnappé. Son timbre vocal oscille du mélodieux à la vocifération, alors que fiévreux, les riffs se répandent dans toute la salle. De nombreux headbangers se défoulent au sein des premiers rangs. L’atmosphère est de plus en plus moite et devient irrespirable. Votre serviteur décide alors de s’éclipser en se rappelant qu’à la fin des 90’s, lors d’une édition du Dour festival, une célèbre marque de déodorant aspergeait les spectateurs qui le souhaitaient, à la sortie d’un chapiteau. Cette démarche aurait été judicieuse pour la circonstance.

On reprend donc un peu d’air frais (?!?!?) en mettant le cap sur la grande scène extérieure. The Damned y est programmé. Né en pleine explosion punk, en 1976, il a rapidement basculé vers la new-wave (NDR : il figure d’ailleurs sur de nombreuses compilations qui lui est consacrée). Il ouvre le bal par le single « New rose ». Au chant, Dave Vanian a toujours son look de vampire. Et celui du bassiste, Ray Burns (alias Captain Sensible), est devenu légendaire : son béret rouge, ses lunettes de soleil, ses cheveux blonds (qui tirent de plus en plus vers le blanc) et son pull marin à lignes horizontales. Toujours aussi agréables à écouter, les titres s’enchaînent ; mais sans jamais provoquer la moindre étincelle, faute, sans doute, d’une absence de cure de jouvence…

Paradoxalement la foule n’est plus au rendez-vous dans le club. Elle préfère déjà se positionner idéalement pour les deux têtes d’affiche. Conclusion : de nombreux spectateurs sont agglutinés aux premiers rangs. Pourtant, la journée n’a pas été décrétée sold out ; mais caser un millier de personnes supplémentaires sur le siterelève de la mission impossible (NDLR : après ‘Chapeau melon et bottes de cuir’ !). Approcher du podium à moins de 30 mètres exige d’être sur place, bien à l’avance.

Mais revenons au club Studio Brussel, car c’est là que va se dérouler le meilleur concert de la soirée. Fréquemment salué par la critique, The KVB va encore mettre tout le monde d’accord (NDR : enfin les quelques centaines de spectateurs qui ont fait le bon choix). L’expression sonore oscille quelque part entre celles de Protomartyr, Chelsea Wolf, Soviet Soviet, The Kills et The XX, pour le duo vocal. Et pour cause, la voix nasillarde, et parfois émouvante de Nicholas, se conjugue parfaitement à celle de Kat, plus allègre et douce (NDR : au moment d’écrire ces lignes, les harmonies d’« Afterglow » trottent encore dans la tête de votre serviteur).

KVB compte les musicos les plus jeunes de cette journée. Il a été formé en 2010, alors que les autres combos accusent, en moyenne, 40 années d’existence. Preuve de l’engouement qu’il suscite, en 2024, sa tournée rernseigne de nombreuses dates en Angleterre, mais s’exporte également dans les pays de l’Est (dont le Kazakhstan) et même en Chine ! ‘And last but not least’, son visuel qui tapisse le fond de scène est manifestement le plus impressionnant.

Et on ne peut pas en dire autant de Sisters of Mercy. A l’instar de sa prestation au Suikerrock, en 2022 (compte-rendu à lire ou à relire ici)

les écrans vidéo placés de chaque côté du podium, ne diffusent pas les images du concert, mais des séries B de science-fiction ou des mangas des années 80-90. C’est d’autant plus gênant que le light show ne permet pas de voir grand-chose en ‘live’, surtout pour les spectateurs qui ne sont pas postés aux premiers rangs. Quant à l’attitude et la voix du leader, Andrew Eldritch, tout a déjà été écrit à ce sujet. Il doit constamment s’appuyer sur son guitariste Ben Christo, qui assure les backing vocaux. Parfois, il doit même crier pour émettre des sons ou des onomatopées, car elle ne suit plus. Heureusement, le nouveau venu au sein du line up, le transgenre Kai (NDR : ce Japonais est également actif au sein d’un projet solo sous le patronyme Esprit d’Air) apporte une bonne dose de fraîcheur, que ce soit à la guitare acoustique ou électrique. Malgré cette contribution bénéfique, ce concert constitue la grosse déception du festival. En outre, il n’est pas allé au-delà de l’heure et des morceaux culte, comme « Marian », ont souffert d’un tempo accéléré par Docteur Avalanche…

Les musiciens de Front 242 l’avaient annoncé en février dernier, ils mettent un terme définitif à l’aventure. Mais avant de tirer sa révérence, il s’est lancé dans une ultime tournée baptisée ‘Black out’. Suite, notamment, aux problèmes de santé rencontrés par Jean-Luc De Meyer, mais également à une certaine lassitude éprouvée par les membres de la formation. Et tout comme Sisters of Mercy, le porte-drapeau (belge) de l’EBM n’a plus sorti d’albums depuis des décennies. Cependant, le band peut compter sur sa fan base pour remplir régulièrement les salles (comme à l’AB, où il se produira plusieurs soirées de suite, en janvier 2025) ou attirer un public nombreux, lors des festivals. Richard 23 annonce en cours de set qu’il s’agit de leur dernier festival, en Belgique. A l’issue du show, au moment de prendre congé de la foule, l’émotion sera même palpable chez les membres du band

Front 242 va accorder un set en forme de best-of. De quoi ravir l’auditoire, et tout particulièrement les aficionados plantés près de l’estrade, qui en profitent pour lancer les premiers pogos de la journée. Les beats incitent à danser (NDR : c’est la définition de l’Electronic Body Music’). Les hits défilent tels des uppercuts décochés aux festivaliers : « W.Y.H.I.W.Y.G. », « Body To Body » et « Moldavia » pour débuter. « U-men » puis « Tragedy for you ». Mais encore « Welcome paradise », avant le rappel. De quoi tenir en haleine la foule, malgré l’heure tardive. Lors du final, « Happiness », « No Shuffle » et l’inévitable hymne (national ?) « Headhunter » au refrain contagieux, clôturent un concert remarquable. Une certitude : les concerts d’adieu programmés en salle vaudront le détour. Et pour apporter une touche noir-jaune-rouge au show, « La danse des canards » sert d’outro…

Cette longue journée des Lokerse Feesten s’est quand même révélée particulièrement hétéroclite.

ARBEID ADELT !, VIVE LA FËTE, THE SELECTER, LA MUERTE, THE DAMNED, THE KVB, SISTERS OF MERCY, FRONT 242

(Organisation : Lokerse Feesten)

Photos Wim Herbaut ici 

 

 

Ce concert des Cranes figurait parmi les têtes d’affiches de cette 31ème édition des Nuits Botanique, qui se déroule, cette année, du 24 avril au 5 mai. D’une part il était rapidement sold out, et d’autre part il dénotait par rapport aux nombreuses découvertes programmées lors de cette l’affiche. Car il faut remonter à 2008 et au VK (une salle bruxelloise où la formation s’est produite à 6 reprises, depuis 1992), aux Lokerse feesten en 2005 ou encore dans le cadre de ces même Nuits du Bota, en 2001, pour retrouver une trace de leur passage en Belgique

La formation gantoise TAKH ouvre le bal. Son origine remonte à 2015, lorsque les membres de The Black Heart Rebellion avaient invité Annelies Van Dinter (Echo Beatty), pour participer aux sessions d’enregistrement de l’elpee « People when you see the smoke », comme seconde chanteuse et drummeuse.

Les lumières sombres et tamisées confèrent une ambiance darkwave au concert. On pense indéniablement à Dead Can Dance voire à Swans. A cause des parties vocales qui alternent entre la voix lyrique de la préposée aux fûts à celle, plus caverneuse, du claviériste. Parfois, l’expression sonore vire vers l’indus. Et n’est pas des plus réjouissantes en début de set. Mais progressivement, et surtout lors du final, « Hair Of A Horsetail », un crescendo bien orchestré prend forme. Pour se terminer par une déferlante de riffs et de sons, et une voix plus enragée. Un set apprécié à sa juste valeur dans une Orangerie déjà bien remplie (NDR : ce qui n’est pas toujours le cas pour une première partie).

C’est en manifestant une grande attente que les fans des Cranes continuent de se presser à l’Orangerie, qui finira par devenir moite et noire de monde. Autant l’écrire tout de suite, après une absence de 12 longues années sur les planches (NDR : il y a bien eu deux petites dates précédentes britanniques calées en octobre dernier), le show va connaître de nombreux ‘leaks’ ! SI la voix douce, fluette, voire infantile, d’Alison Shaw est restée intacte, elle peine à la maintenir tout au long des titres. Les hésitations de ses musiciens (dont son frère Jim à la batterie qui manifeste souvent des signes d’agacement), et tout particulièrement de son bassiste/claviériste absorbé par ses réglages, donnent l’impression d’assister à un soundcheck voire une répétition. Indulgent et patient, le public sera finalement récompensé par les tubes « Pale Blue sky » et Everywhere » qui s’enchaînent. L’auditoire se réveille et applaudit chaleureusement. Mais l’enthousiasme va vite retomber, à cause de nouveaux soucis de balances. Les musiciens s’y attèlent à trois (NDR : mais où étaient les ingénieurs du son du Botanique ce soir-là ?) pendant qu’Alison éprouve un grand moment de solitude, et finit par tourner le dos à la foule, pendant quelques minutes. Lors des titres suivants, elle s’excusera à plusieurs reprises, et proposera même d’interrompre et de recommencer un des morceaux. Pendant « Loved », le batteur commence à s’énerver et perd même le fil de la chanson. Heureusement, après « Jewel », « Far away » et « Adrift » réveillent de bons souvenirs exhumés des ténèbres, que savoure une audience qui applaudit de plus en plus fort.

Interruptions comprises, le set n’a duré que 50 minutes. Il paraît donc normal que le band revienne accorder un rappel qui ne s’est pas fait attendre.

Alison rencontre toujours cette difficulté à se concentrer à la fois sur sa guitare et ses textes. Les morceaux ont aussi du mal à s’enchaîner, mais qu’importe, ce ne sont pas moins de cinq titres dont le fameux « Fuse » (NDR : il figure sur le premier elpee, difficile à se procurer, mais réédité en 2023) qui seront interprétés. Sous l’insistance du public, et alors qu’on supposait le concert terminé, le band nous gratifie d’un deuxième encore qu’il clôture par un « E.G. shining », nous replongeant au cœur d’une ambiance féérique susceptible, presque, de nous faire oublier les imperfections de la soirée.

Car oui la prestation de ce soir était plutôt brouillonne. On est bien loin de la tournée des stades de 1992 accomplie en compagnie de Cure. Et plus particulièrement de cette date au stade de Lievin, où Robert Smith lui-même était venu prêter main forte au band ! Elle se situe à mille lieues de cette brillante performance dispensée dans le cadre du festival de Dour, dans le haut de l’affiche, lors d’une édition pourtant déjà bien fournie et au cours de laquelle de grosses pointures comme Pulp et Blur étaient programmées.

Mais qu’importe, puisque les aficionados semblent pardonner les approximations de ce soir ; d’autant plus qu’ils peuvent longuement côtoyer les membres du groupe au stand merchandising ou au bar, après le concert.

Mais également savourer le cadre et l’ambiance de ces Nuits du Bota. Et le mélange des spectateurs des différents salles. Le vendredi par exemple, un public de métalleux (à la Rotonde) se mêlera à celui branché du Museum, et des ados de l’Orangerie. Et l’on soulignera aussi l’innovation d’un ‘all access’, le samedi 4 mai, au cours duquel un seul ticket permettra l’entrée à toutes les salles et au chapiteau, pour 27 concerts différents.

Pour les photos des Nuits, c’est ici

(Organisation : Botanique)

mardi, 05 décembre 2023 16:03

Une soirée haute en couleurs…

Le concert de Blonde Redhead était très attendu. Pas étonnant qu’il affiche sold out. Le band ne s’était plus produit chez nous depuis un bon moment. Soit en 2018 dans le cadre du Rivienrenhof de Deurne, après 2014 et 2017 ; et chaque fois à l’Orangerie du Botanique et au festival de Dour. Son 10ème album, « Sit Down for Dinner », a également tardé avant de sortir, puisqu’il resté au stade de la composition depuis 5 (!) ans.

Ce dernier opus est plutôt introverti, inspiré de l’incertitude de l’année 2020, ainsi que des souvenirs d’enfance, vécus par Kazu Makino, multi-instrumentiste et chanteuse du groupe. On aurait donc pu traditionnellement s’attendre à une première moitié de setlist faisant la part belle aux titres de ce dernier elpee, et en final de tubes plus noisy et envolés du band. Mais c’est mal connaître Blonde Redhead qui aime innover et nous surprendre.

Le set de Blonde Redhead débute donc par des anciennes compos jouées également lors des précédentes tournées ; et « Falling man » résonne toujours comme une intro lancinante. Elle est portée haute et forte par Amadeo Pace et soutenue à la batterie par son jumeau Simeone. Kazu reste plus en retrait (mais cette attitude va vite changer). Elle quitte ses claviers, pour s’emparer progressivement du micro et vient se déhancher, parfois lascivement, au milieu de la scène.

Le jeu de lumière est époustouflant pour une salle de petite taille comme l’Orangerie. Ce dégradé, principalement de bleu et mauve, a de quoi enchanter. La tenue sexy de Kazu (NDR : une mini-jupe à paillettes) est assortie au décor de fond (deux longues toiles ornées de motifs chatoyants et féériques). Celle des frères Pace est plus sobre. Ils sont vêtus d’un pantalon et d’une chemise de couleur blanche, assortie à leur chevelure, elle aussi identique pour les deux musiciens.

« Dr. Strangeluv », « Doll Is Mine » et « Elephant Woman » s’enchaînent à merveille ; et il faut attendre le cinquième titre pour entendre une partie du dernier opus. Le public est compact (NDR : lorsque l’Orangerie affiche complet, c’est toujours le cas) et les déplacements sont difficiles. Ainsi, aller se chercher une bière au bar relève du parcours du combattant. Ce qui explique en partie pourquoi la foule n’est pas (encore) survoltée. Pour assister à davantage d’enthousiasme dans l’audience, il faut attendre « Bipolar », placé dans le dernier tiers de set, et joué en primeur au Bota (même si le titre était sur la setlist des dates précédentes, il semble, selon les fans itinérants, qu’il n’avait pas encore été joué). « 23 » va aussi ravir la plupart des spectateurs, il est vrai plutôt quinquas et fans de la première heure.

En rappel, « Here somtimes » laisse tomber les guitares. Amadeo prend place aux claviers, la batterie se veut plus tribale, et Kazu étale sa voix qui n’a pas pris une ride (tout comme son physique d’ailleurs) malgré les 30 années de carrière. La soirée se termine en douceur par deux derniers titres fraichement sortis : « Not for me » et « Kiss her kiss her ». Le public applaudit chaleureusement. Et il faut d’ailleurs plusieurs minutes à la chanteuse asiatique pour le saluer et se décider à quitter la scène. Il faut dire qu’après 5 années d’absence en live, et une tournée qui touche à sa fin, elle doit savourer ces derniers moments.

Que dire, enfin, sur la première partie plus que décevante de Núria Graham ? Il y avait pourtant de quoi être enthousiaste après avoir écouté son dernier long playing, « Cyclamen », a cours duquel elle joue quelques titres, seule, au piano ou qui intègrent différents instruments en y incorporant des touches jazzy. Mais sur les planches, l’Irlando-italienne et un acolyte pseudo-musicien se contentent d’une vieille guitare (volontairement ?) mal accordée, d’un clavier minimaliste, d’une clarinette ou d’un sax trop discrets. Résultat : le set s’avère soporifique et les spectateurs le délaissent rapidement. Dommage, mais on consentira peut-être une seconde chance, une autre fois, à cette artiste, pour autant qu’elle change sa configuration de groupe.

(Organisation : Botanique)

Le monde est chaud !      

Le Théâtre Naional est situé à quelques centaines de mètres du lieu de l’attentat qui s’est déroulé à Bruxelles, l’avant-veille. On aurait pu craindre une annulation du festival ou un renforcement des mesures de sécurité. Finalement, par rapport à la soirée de dimanche (Vitalic), rien n’a vraiment changé : pas de longue file ni de fouilles à l’entrée. Pour notre plus grand bonheur, et une façon de ne pas céder à la peur. Même si certaines connaissances présentes le lundi, redoutaient de revivre un deuxième ‘Bataclan’, en apprenant, en direct, la tuerie perpétrée à deux pas de la salle.

Mais ce soir, l’ambiance est et restera bon enfant. En outre, elle sera définitivement ‘peace’ comme dans tout bon concert de reggae et world music. Et d’ailleurs, celui de Tiken Jah Fakoly est programmé, lors de cette 7ème soirée de festival, entre deux films engagés et de qualité. ‘Behind the line’ raconte le parcours d’une artiste (dessinatrice) syrienne, confrontée à l’instabilité dans son pays et le choix de le quitter ou d’y rester. Puis ‘The mind game’, un film/documentaire de Sajid Khan Nasiri, jeune Afghan de 15 ans, qui a fui le sien pour la Belgique et raconte ses périples. Des thèmes qui correspondent parfaitement aux valeurs sociopolitiques défendues par l’artiste.

Tiken Jah Fakoly est originaire de la Côte d’Ivoire, et a commencé tardivement (à l’âge 30 ans) à chanter du reggae. Mais près de 25 ans plus tard, il s’est forgé une réputation de militant. Un engagement politique qui lui a valu d’être persona non grata dans son propre pays, le forçant à s’exiler au Mali et pendant quelques années, au Sénégal. Responsable de 11 albums intéressants, à ce jour, et assurant de fréquentes tournées (NDR : dont une dernière date sold-out à l’AB, en mars 2023), il est toujours actif sur le circuit musical.

Et le concert de ce soir ne va pas faillir à sa réputation. Les 8 musiciens débarquent d’abord sur les planches : 3 cuivres, 1 bassiste aux allures de Jamaïcain, 1 guitariste, 1 batteur et 1 claviériste. Et surtout une touche d’originalité : un préposé au Xalam (NDR : ce n’est pas le nom d’un médicament, mais un luth sénégalais). Les deux choristes suivent, puis l’ensemble se lance dans une impro de quelques minutes, qui s’achève par la phrase ‘le passager Tiken Jah Fakoly est demandé’. Et le chanteur de s’exécuter en déboulant sur « Dernier appel » (NDR : issu de l’elpee éponyme, paru en 2014). Il embraie par « Le peuple a le pouvoir » et « Africa » (NDR : dans un anglais très approximatif, mais on lui pardonnera). « Tonton d’America » communique son premier message sur le réchauffement climatique, avant un second en soutien à ‘SOS Méditerranée’. Puis « Gouvernement 20 ans » (NDR : issu du dernier opus, « Braquage de pouvoir », sorti en 2022). Et surprise, le ‘capitaine’ Winston Mcanuff débarque pour chanter en duo « I can hear ». Le Jamaïcain, qui collabore régulièrement avec des artistes français, affiche un look plutôt exubérant. Ses pas de danse enragée et sa puissance vocale collent naturellement à la prestation du quinquagénaire (NDR : il est âgé de 55 balais). L’énergie est partagée aussi bien sur les planches que dans le public. « Le monde est chaud » lui permet de faire passer de nouveaux messages sur le dérèglement climatique (‘La planète nous donne des coups’). Il n’en oublie pas « Plus rien ne m’étonne », « Quitte le pouvoir » ou « Ouvrez les frontières », des tubes interprétés en fin de parcours, puis en rappel, « Françafrique » et « Braquage de pouvoir » qui ponctuent plus de deux heures d’un concert intense.

Et la fête va se poursuivre, pour les plus persévérants, dans le couloir de l’étage, où une scène gratuite propose un set de Bantu Continua Uhuru Consciousness (BCUC en abrégé, et affiché en arrière-plan), un groupe issu de l’Afrique du Sud dont la musique mêle allègrement la world, la pop et une sorte de funk. Que d’émotions en cette soirée, et positives cette fois-ci. Cela fait du bien après celles de tristesse, éprouvées deux jours auparavant, à l’issue de l’attentat. Merci Tiken, merci le festival des Libertés !

(Organisation : Festival des Libertés)

 

 

C’est toujours au Théâtre National de Bruxelles (sur le Boulevard Jacqmain, à 2 pas de la gare du Nord et la rue Neuve) que se déroule le traditionnel festival des Libertés. Un événement qui pointe ses projecteurs sur des valeurs essentielles de la démocratie : libertés physiques, idéologiques, intellectuelles, religieuses et morales. Son programme propose des séances de cinéma et des documentaires, suivi de débats, des expositions, des performances... et en seconde partie de soirée, des concerts. Compte-rendu des spectacles de Mezerg et Vitalic qui se sont déroulés ce dimanche 15 octobre.

Marc Merzergue (alias Mezerg) ouvre les hostilités. Il a suivi une formation classique au conservatoire de Bordeaux, est remonté vers Paris avant de se proposer des compos techno inspirées de différentes sonorités électro. Une recette qui a fait son succès dans de nombreux festivals européens majeurs (NDR : il a débuté au Sziget, à Budapest). Véritable homme-orchestre, il nous offre ce soir un one-man show très particulier. Une sorte de Rémy Bricka de l’électro. Outre ses synthés, sa prestation se distingue par son utilisation d’un thérémine qu’il met bien en exergue. Le thérémine est cet instrument électro ancestral, dont l’artiste use et abuse pour faire varier la hauteur de la note. Le tout en ne touchant pas cet appareil, mais en faisant varier la distance entre sa main et l'antenne verticale sur son extrémité. Ajoutez-y des caissons de basse que Mezerg fait kicker à l’aide de ses pieds, et vous aurez le tableau du show de cet artiste hors pair, devant nous ce soir. Toutes ses sonorités viennent heureusement casser le rythme répétitif et assez ‘tchack tchack boum’ des morceaux. Par moments, on se croirait à une rave party. D’autant qu’il fait sombre dans la salle et l’éclairage sur l’estrade est assez atomisant. En outre, Mezerg, dont le visage est souvent caché derrière sa longue chevelure, est disposé latéralement au centre du podium, tournant presque le dos à une grande partie du public. On comprend alors beaucoup mieux pourquoi de nombreux spectateurs rejoignent le bar pendant le set (NDR : il n’y en a qu’un seul à l’étage ; et vite saturé, il provoque de longues files, rappelant les pires moments de celui du Botanique). Il faut attendre la fin du set pour voir l’artiste se lever, faire face et saluer le public. C’est à cet instant, qu’on découvre son visage de mousquetaire. Et sa chemise à fleurs. Un style vestimentaire aussi éclectique que sa musique, finalement.

Vitalic nous avait déjà gratifiés d’un tout grand concert, à l’Ancienne Belgique, en mars 2022. Un moment d’autant plus particulier, que non seulement la date avait été postposée plusieurs fois, mais qu’il s’agissait du premier concert après Covid où la foule pouvait s’en donner à cœur joie, sans masque. Et ce soir, l’ambiance est déjà bien fiévreuse, dès les premières notes. Le light show est à nouveau impressionnant. Il faut dire que l’artiste se sert d’architectures et des technologies de pointe (faisceaux lumineux très précis), créant ainsi une scénographie toujours aussi bluffante, constituée de tableaux de lumières. Il semble même avoir inspiré certains ingénieurs des plateaux de TV. Ses compos aussi figurent dans de nombreuses BO de films, spots publicitaires, génériques TV ou de jeux vidéo. Bref, ce pro a acquis une belle notoriété. Et ce soir, on sait qu’il va encore nous balancer du lourd, comme il y parvient régulièrement, dans les grands festivals (NDR : ses passages à Dour entre 2005 et 2017 ont toujours fait recette).

A côté des titres de son dernier double elpee, « Dissidænce » (paru en 2021 et 2022), le Français nous gratifie de tubes plus anciens comme « Poison lips » ou « Second lives » qui ont le don de faire siffler et danser la foule. Même aux balcons des étages, les premiers rangs sont debout, les bras en l’air ! Les morceaux sont à chaque fois revisités, parfois expérimentaux, sans jamais tomber dans le snobinard. La musique de Vitalic a une âme, des mélodies tantôt dépouillées, tantôt densifiées par les beats et les basses, sans jamais chercher à être dans l’air du temps. Une ambiance et un show dont on ne se lasse pas, même après 20 ans d’existence.

Mezerg + Vitalic = Sunday Night Fever         

(Organisation : Festival des libertés)

 

dimanche, 08 octobre 2023 10:43

Celebrate me !

Début novembre 2002, Baxter Dury accordait son tout premier concert à la Rotonde du Botanique. Près de 21 ans plus tard, et après de fréquents passages dans ce parc urbain bruxellois, il est de retour à l’Orangerie et le concert est archi sold-out.

Ttrruuces ouvre les hostilités. Comme son nom ne l’indique pas, le band s’est formé à Londres, à l’issue d’une rencontre entre le Français Jules Apollinaire et l’Anglaise Natalie Findlay. C’était en 2019. Par la suite, Ben Simon (à la basse) et Connor Burnside (à la batterie) sont venus compléter le line up. Ce dernier est toutefois remplacé par une jeune fille derrière les fûts, ce soir. Bien que tagué comme ‘psychédélique’, dans le communiqué de presse, la formation distille une musique plutôt éclectique, parfois aux relents très (trop) poppy ou parfois enrichie de touches de folk. Et lorsque le violon entre dans la danse, on pense alors à Arcade Fire. On a même droit à du disco kitsch lors d’un mix entre « Funky town » et « Rasputin ». Si le set est assez posé au début, et Jules plutôt relax et discret, Natalie va multiplier les poses sexy, et le finir de façon plus déjantée. Une première partie agréable à suivre, mais pas la découverte de l’année non plus.

Baxter Dury était revenu chez nous aux Lokerse feesten il y a un peu moins de deux mois, en ouverture de Blur. Un show qui avait quelque peu perturbé les fans de la première heure vu son changement de style. Pourtant ce soir, c’est toujours en tenue de dandy british, costume classique et chemise grise, que le natif du Buckinghamshire débarque sur les planches, précédé d’un batteur et d’un guitariste. Bien que leurs interventions s’avèrent particulièrement efficaces, ils resteront en retrait, tout au long de la soirée. A sa droite, sa fidèle et charmante claviériste est toujours au poste. Elle le soutient aux backing vocaux, d’une voix translucide et impeccable, qui contraste toujours avec le chanté/parler du leader.

« So much money » ouvre le bal (NDR : tout comme le dernier opus « I Thought I Was Better Than You », sorti cette année). Avant d’embrayer par deux titres phares de « Happy Soup » (NDR : l’elpee qui l’avait révélé au grand public, en 2011) : « Leak at the disco » et « Isabel ». Parfois Baxter reste figé face à son micro, ne s’autorisant que quelques mimiques, rappelant, quelque part, son paternel Ian (NDR : si vous ne le connaissez pas, on vous invite à découvrir le clip de « I Want to be Straight » ici,

 enregistré le 11 septembre 1979, dans le cadre de l’émission ‘Top of the Pops’, alors qu’il est déguisé en bobby, tout comme ses musicos, les Blockheads ; sachez également que c’est à la mort de son père, début 2000, que Baxter s’est mis à composer).

Mais souvent, ce soir, il abuse d’une gestuelle réminiscente du Tai-chi. Qui finit par irriter. A-t-il passé un séjour trop long en Asie ? Quand il se noue un foulard autour du front, on se remémore Christophe Walken, perdu au sein de la jungle vietnamienne, dans ‘Voyage au bout de l’enfer’. Ses pas de danse semblent hantés voire possédés. Mais il emprunte plutôt une voix rauque et un phrasé à la Sleaford Mods. Les nuances de douceur sont apportées par Madelaine, notamment sur l’un des titres phares de la soirée, « Celebrate me ».

La fin de set souffre d’ailleurs beaucoup moins de monotonie, et tout particulièrement lors d’un « Cocaïne man » au cours duquel Baxter porte un casque lumineux digne de Daft Punk. Il abandonne ses déhanchés pour se rapprocher du public qui l’applaudit et lui permet d’atteindre le sommet de son concert. A un certain moment, on imagine qu’il va se lancer dans un crowdsurfing ; mais après mûre réflexion, il y renonce. Paradoxal, mais pendant le refrain de « Prince of tears » (‘Everybody loves to say goodbye’), le public a envie que ce moment privilégié se prolonge et vire même à la fête. Et c’est ce qui va se produire, au cours d’un ultime rappel électro traduit par le « These Are My Friends », de Fred Again. Les premiers rangs se transforment en véritable dancefloor, et le band partage alors, avec le public, un délire en apothéose.

Un show très varié, très lent à véritablement prendre son envol, mais qui s’est achevé dans une forme de frénésie collective. Baxter Dury s’éloigne, en effet, du côté dandy de ses débuts, mais cette métamorphose n’est finalement pas pour nous déplaire. Un signe distinctif ? L’ovation qu’il a reçue en fin de prestation…

(Organisation : Botanique)

 

dimanche, 27 août 2023 15:04

W-Festival 2023 : dimanche 27 août 2023

Après une première édition en 2016 à Wortegem, deux à Amougies en 2017 et 2018, puis une autre à Waregem en 2019, c’est dorénavant (depuis 2021) sur la Klein Strand d’Ostende que le W-festival se déroule.

Et si les premières éditions lorgnaient surtout vers la new-wave des 80’s, c’est dorénavant dans les décennies 80 et 90, mais au sens large des décades, que les programmateurs piochent leur line up. Que ce soient pour des artistes plus ‘pop’ (voir carrément kitsch) sur la scène principale. Ou plus underground sous le plus petit chapiteau justement baptisé Batcave (on y retrouve pêle-mêle de la dark-wave, de l’EBM, de la synth-pop, et bien d ‘autres styles dont celui qui est parfois catalogué de gothique). Le W-festival est parvenu à faire face à une marée d’annulations et évité le risque de faillite de l’entreprise Wave to synth (NDLR : elle-même confrontée à l’annulation du Sinner’s day 2022 et à la banqueroute d’un revendeur de tickets anglais). Mais le temps est dorénavant au beau fixe pour ce week-end, et la journée de samedi va même afficher sold out.

Notre journée de ce dimanche commence par The Cardigans. Cinq amis suédois qui ont dû attendre leur troisième elpee, publié sur une major, « First Band On the Moon », en 1996, pour connaître le grand succès. Un opus qui recèle le single « Lovefool », popularisé par la bande originale du film de Baz Luhrmann, ‘Romeo + Juliet’. En tenue de capitaine, costume jaune et sweat blanc et noir rayé, Nina Persson tient la barre au chant, même si on pourrait lui reprocher une attitude rigide voire figée tout au long du concert. En début de parcours, la formation nous réserve son hit, « Erase/Rewind », afin de se rappeler au bon souvenir de ceux qui auraient oublié le nom du band. Un single issu de son long playing « Gran Turismo », à ce jour le plus peuplé en hits. La suite s’avère plutôt soporifique. En cette après-midi ensoleillée, de nombreux spectateurs quittent d’ailleurs le chapiteau pour profiter de l’air marin. Il faut attendre la fin du set pour voir le combo (et le public) commencer à s’emballer ; et notamment pendant « Lovefool » et « My Favourite Game ».

Autre podium et autre public pour Corpus Delicti. Un groupe français principalement actif entre 1992 et 1997, proposant une dark-wave sise quelque part entre London After Midnight et Nosferatu. L’expression sonore se distingue par de solides riffs de guitare rock, une basse appuyée et une batterie soutenue. Le tout emmené par le maître de cérémonie, le chanteur Sébastien. D’ailleurs on dirait qu’il a enfilé une soutane. Sa voix est impressionnante. Il est posté à l’avant-plan ou en incursion devant l’assemblée. Le show prend des allures de messe du dimanche célébrée par un grand prêtre. Les pogos se déclenchent au sein des premiers rangs ; et le public habitué de festivals plus pointus savoure l’un des rares moments bien percutants et dans un style bien alternatif, à contrario de ce pop/rock inoffensif proposé sur la main stage.

A l’instar de la prestation de Natalie Imbruglia qui suit sur ce podium, mais dont le charme, la silhouette et la voix sont restés intacts, 25 ans après sa période de gloire. Dans sa robe de mannequin, elle fait virevolter sa longue chevelure au rythme de ses pas de danse. Pas de contestation, son show est agréable à regarder. Il n’est donc guère étonnant que ça se bouscule en backstage pour prendre des selfies, que la belle accorde, le sourire aux lèvres. Si sa célébrité est demeurée intacte en Australie, chez nous elle est plutôt reléguée au rang de ‘one hit wonder’, et tout particulièrement pour « Torn », un tube qui sort l’auditoire de sa léthargie dans laquelle il était tombé au fil du temps, et dont il va enfin sortir en fin de parcours.  Narcoleptiques, s’abstenir à l’avenir, en tout cas !

Et ce n’est pas mieux, cette fois-ci, du côté de la batcave pour Blancmange. Pourtant le souvenir de son passage à Amougies, en 2018, était plutôt bon. Mais réduit à un duo, la musique est devenue particulièrement minimaliste et ne parvient plus à transcender la voix de Neil Arthur. Même « Living on the ceiling » n’incite plus à danser comme des pharaons, ni pousser la chansonnette.

Heureusement, comme à l’Amphi festival un mois plutôt (NDR : où le public était bien plus exigeant), un mythe va véritablement faire honneur à son rang de tête d’affiche : OMD. Hormis une décennie d’inactivité (NDR : de 1996 à 2006), le groupe issu de la banlieue de Liverpool est parvenu à traverser le temps, sans trop d’encombre... Pour preuve, le titre d’intro « Atomic Ranch », paru en 2013, auquel il enchaîne immédiatement le tube « Electricity », datant… de 1979 ! Il a beau accuser 64 balais, le chanteur Andy McCluskey se déhanche d’un côté à l’autre de l’estrade et déploie sa voix de baryton. Elégant, dégageant une sympathie naturelle, il manie parfaitement l’humour bien britannique. L’autre membre fondateur, Paul Humphreys, quitte la hauteur de ses claviers pour s’associer aux vocaux sur « Forever live and die », et se fait chambrer par son acolyte qui lui demande de parler flamand. Le duo n’hésite pas à rappeler son attachement à la Belgique, et notamment pour introduire « Locomotion ». ‘Un titre qui opère un retour à la maison’, introduit McCluskey. Et d’ajouter : ‘Le clip vidéo a été tourné près d’ici dans votre port…’ ‘Et il faisait bien froid, c’était en février’, surenchérit Humprheys. Le second claviériste Martin Cooper (NDR : actif au sein du band depuis 1980) ajoute ci et là des notes de saxophone. « Sailing on the Seven sea » et l’incontournable « Enola gay », joué en version maxi 45trs, viennent clôturer un show de toute beauté et sans temps mort. Andy prend soin de dire au revoir dans toutes les langues, sous les applaudissements nourris d’un public qui n’aura cessé de frapper des mains jusqu’au dernier son. On regrettera juste qu’OMD ne nous ait pas accordé la primeur ‘live’ de son single, dévoilé quelques jours auparavant, « Bauhaus staircase » (NDR : c’est le morceau éponyme du nouvel elpee qui sortira ce 27 octobre 2023 ; et il fait suite à « The Punishment of Luxury », paru en 2017).

Et on garde décidemment les meilleurs pour la fin, en compagnie de Project Pitchfork sous la Batcave tent. S’il tourne fréquemment dans son pays natal, l’Allemagne, il faut remonter au W-festival de 2018 pour retrouver trace de son passage chez nous. Son concert prévu entretemps au Casino de Sint-Niklaas avait été reporté pendant la pandémie, puis finalement annulé. La formation est plutôt prolifique. Elle a publié pas moins de 18 playings studio en une trentaine d’années d’existence. Même si une trilogie était annoncée en 2018, elle n’accouchera que d’un duo d’elpees : « Akkretion » et « Fragment ». Pas d’actualité discographique donc, mais un changement majeur de line-up quand même, depuis le départ du claviériste et backing vocal, Dirk Scheuber, parti fonder son projet Blackhead. Son absence est toutefois compensée par un deuxième drummer qui va inoculer davantage de fougue à un set emmené par Peter Spilles, en toute grande forme. Même sa voix, habituellement trop rocailleuse, ne faillit pas ce soir. Les titres phares vont s’enchaîner « Beholder », « Rain », « Timekiller ». Autant d’occasion de s’autoriser un pas de danse sous les beats électro dignes des plus grands groupes EBM ou darkwave du genre. « Souls » et « Existence V4.1 », en final, sont autant d’occasion pour Peter Spilles de faire étalage de sa puissance vocale. Le petit millier de fans encore présents (il est 23H30 et beaucoup de matelots ont déjà quitté le navire ostendais) auront apprécié ce final empreint d’énergie.

Mais le festival n’est pas tout à fait terminé, puisqu’il reste l’After party. Un autre bon DJ set (il y en a eu tout au long de ce festival, entre les concerts, sous la batcave) revisite les 80’s devant la scène principale. Cependant, le public est clairsemé à cette heure, car il n’est plus tout jeune, il faut bien l’avouer (NDR : il se situe plutôt dans la tranche d’âge 50-60, que dans les 15-25 ans que l’on rencontre habituellement lors d’autres festivals). La plupart de ces derniers ont déjà quitté les lieux avant minuit (afin de choper les derniers trams ou trains pour quitter la côte), après il est vrai, un week-end déjà bien chargé et réussi dans l’ensemble.

(Organisation : W-Festival)

lundi, 07 août 2023 16:14

Lokerse Feesten 2023 : lundi 7 août

Des étincelles, là où on ne les attendait pas…

Le premier grand invité de ce quatrième jour des Lokerse Feesten, n’est autre que le soleil. Les trois premiers ont été copieusement arrosés. Heureusement le site est bétonné et les désagréments vécus à Ronquières ont été évités. Le site est intact, et l’accès toujours aisé tant en train qu’en voiture.

Bien que The Haunted Youth ne soit responsable que d’un premier elpee (« Dawn of the Freak », sorti en 2022), il bénéficie déjà d’une large exposition médiatique. Surtout au Nord du pays où il a gagné un concours organisé par ‘Studio Brussel’. Il est déjà présent dans tous les grands festivals cet été, à l’instar de Whispering Sons. Sa musique navigue d’ailleurs dans un registre qui rappelle également les 80’s, et notamment en s’appuyant sur une ligne de basse répétitive et lourde. Mais pas seulement, puisque son expression sonore lorgne aussi vers une dream pop circa 90’s, lorsqu’elle baigne dans les claviers atmosphériques. Au chant, le leader et guitariste Joachim Liebens affiche la nonchalance de Thurston Moore. Au synthé, également planté à l’avant du podium, Hanne Smets le seconde impeccablement aux vocaux. Parfois, le spectre de Beach House se met à rôder. La présence de fumigènes accentue le climat planant d’une prestation qui aurait gagné en efficacité, si elle avait été programmée en seconde, voire en fin de soirée. Mais d’autres vedettes, nées réellement au cours des 80’s et 90’s vont s’emparer de la main stage.

Et autant l’écrire tout de suite, les autres têtes d’affiches vont s’avérer très décevantes. Et notamment Siouxsie qui, après plus de 10 ans d’absence sur scène, et plus de 15 ans en studio (son album solo, « Mantaray », remonte à 2007), avait choisi l’Ancienne Belgique, début mai, pour inaugurer sa nouvelle tournée. Un set jugé agréable, sans plus, accordé devant un parterre de fans qui s’étaient empressés de rendre ce concert sold out en quelques minutes. Mais on la sentait perfectible au niveau de sa voix ; et les attentes étaient donc légitiment grandes, ce soir. Encore plus pour ses aficionados qui n’avaient jamais pu assister à un de ses concerts. Mais quelle déception ! Dès le hit « Israël » rien ne fonctionne. On a l’impression d’être en présence d’un mauvais cover band. Les musiciens impriment un tempo plutôt lent, pour ne pas dire apathique (NDR : de quoi regretter l’absence de ses Banshees, comme le charismatique Budgie à la batterie, voire Robert Smith à la guitare). Quant à Susan Baillon (de son vrai nom), elle peine à élever la voix. Elle ne l’a pas suffisamment chauffée ? Manque de répétition ? En rodage ? Toujours est-il que la sauce ne prend pas, et la foule réagit plutôt timidement. Et vu le problème récurrent d’oreillettes, on ne peut pas dire que la situation soit idéale pour réaliser un show qui tienne la route. Un ingé-son intervient à de nombreuses reprises pour régler le récepteur placé dans le dos de la chanteuse, mais en vain. Celle-ci finira par plaisanter du contretemps : ‘J’espère que vous m’entendez bien chanter ? Car moi je ne m’entends pas’. Son flegme et son humour britannique lui permettent de garder la tête froide, là où certains artistes auraient jeté l’éponge. Finalement l’imperfection de la mise à feu va quelque peu transcender la suite. Pendant « Dear prudence » (NDR : une cover des Beatles, faut-il le rappeler ?), « Lands end » et surtout « Spellbound », elle se déhanche (NDR : à 66 balais, Susan a conservé sa souplesse à défaut de sa voix). Et son public commence enfin à s’enflammer sur « Happy house » et surtout « Hong Kong garden » (NDR : qui n’avait pas été interprété à l’AB). « Into a Swan » vient déjà clôturer un set d’une petite heure qui laissera pas mal de monde sur sa faim. Sa prestation aura été bien moins étincelante que son look.

Les bonnes surprises, on les rencontre souvent sur les petites scènes des festivals. Et pour la circonstance, au club ‘Studio Brussel’. D’une capacité inférieure à 1 000 personnes, il est fermé lorsqu’il atteint son quota. Il faut donc s’y rendre en temps voulu. The Weave s’y produit. Peu connue du mélomane lambda, cette formation implique quand même le guitariste de Blur, Graham Coxon. Et la bande à Damon Alban est programmée le lendemain. Un concert, bien évidemment, sold out. Il avait quitté le groupe en 2002, pour se lancer dans une carrière solo, mais l’avait réintégré en 2008. Et puis pendant les pauses du combo londonien, il a multiplié les collaborations, s’est investi au sein de The Jade Hearts Club et plus récemment de The Weave, dont le premier opus est sorti début de cette année, en compagnie de son épouse, l’ex-Pipettes, Rose Elior Dougall. Ensemble, ils se partagent les vocaux. Vêtue d’une robe rouge, elle se charge des claviers ; et envoûtante, sa voix n’est pas sans rappeler PJ Harvey. Si les ballades évoquent Swell, dès que la musique s’avère davantage délurée, on pense aux Dresden Dolls. Graham passe de la guitare au sax en toute décontraction. Et un violoniste, un bassiste et un batteur apportent des nuances jazzyfiantes. Un vent de fraîcheur est venu souffler sur les Lokeren Feesten. Un fameux contraste par rapport aux stars qui ont mal vieilli…

Car, qu’écrire encore de positif sur Placebo ? A l’instar de son dernier elpee (« Never let me go »), paru il y a un an, et qui faisait suite à une absence studio de plus de 10 ans, le groupe est toujours aussi populaire. Et peut-être même plus qu’on pourrait l’imaginer. La set list de ce soir est majoritairement tirée des 13 titres de son huitième long playing. Le groupe pousse même le vice à aligner les morceaux quasiment dans l’ordre du tracklisting. Malgré une certaine perfection technique (et dans les arrangements) de ces nouvelles compos, elles sont jouées sans grand enthousiasme. De quoi gâcher le nôtre…

Non, vraiment, Brian Molko, ça lui arracherait les poils de la moustache de ne dire simplement qu’un bonjour, merci ou au revoir ; lui qui s’exprime parfaitement dans la langue de Molière. Il reste planqué derrière son micro, toujours dans la même posture. Ses compos s’enchaînent sans temps mort, ni interaction et semblent plus lisses et insipides que sur disque. Le grand et excentrique bassiste Stefan Olsdal tente de compenser, comme il peut, ce climat déprimant. Il se réserve même le micro sur la reprise du « Shout » de Tears for Fears. On se demande d’ailleurs pourquoi Placebo multiplie les covers, alors qu’il dispose d’un bel éventail de propres singles. Les quelques tubes dispensés ci et là (« Too Many Friends », « Song to Say Goodbye », « The Bitter End » ou encore « Infra-red ») viennent un peu animer une deuxième moitié de set. Mais à l’instar de la version (NDR : encore une) du « Running up that hill » de Kate Bush, balancée en final, à moins d’être un inconditionnel, on ne voit plus trop l’intérêt d’aller voir Placebo en concert. Il est loin le début du millénaire, lorsque Placebo peinait à remplir le Brielpoort de Deinze, mais dispensait un show à la fois vivifiant et passionné.

Setlist : Forever Chemicals, Beautiful James, Scene of the Crime, Hugz, Happy Birthday in the Sky, Binic, Surrounded by Spies, Sad White Reggae, Try Better Next Time, Too Many Friends, Went Missing, For What It's Worth, Slave to the Wage, Song to Say Goodbye, The Bitter End, Infra-red

Encore : Shout (Tears for Fears cover), Fix Yourself, Running Up That Hill (A Deal With God) (Kate Bush cover)

Heureusement, pour retrouver l’enthousiasme du public et sur les planches, on peut encore se réfugier dans le club ‘Studio Brussel’. Comme l’annonce le présentateur et chauffeur de salle, le groupe suivant se produit déjà dans les plus grands festivals belges depuis plus de 20 ans (NDR : le premier bon souvenir de votre serviteur remonte à 2001 au Beach festival de Zeebruges). Originaire de Kruisem, à plus ou moins 40 bornes de Lokeren, il joue presque à domicile. Et le public accueille donc Vive la Fête à bras ouvert en ponctuant sa joie d’acclamations et de sifflets. Comme d’habitude, c’est plein de charme et la banane aux lèvres qu’Els Pynoo opère son entrée sur l’estrade, en compagnie de son compagnon et guitariste Danny Mommens (NDR : quelques minutes auparavant, en backstage, on pouvait les voir tout sourire et exaltés avant de grimper sur le podium). « Nuit blanche », « Schwarzkopf », « Assez » ou « Jaloux » sont autant de tubes dansants qui nous entraînent jusqu’au bout de cette nuit. En rappel, « Maquillage » (au cours duquel Danny assure le backing vocal) et « Noir désir » nous assènent deux belles claques devant un auditoire ravi de la prestation. Pas étonnant dès lors que le concert de Vive la Fête, prévu à l’AB, le 8 décembre, soit déjà complet.

Voir aussi notre section photos ici

(Organisation : Lokerse Feesten)

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