Nous sommes en août 2002, à Santa Cruz, en Californie. Au club ‘Moe's Alley’. Maître d'œuvre, l'harmoniciste Mark Hummel organise ses rencontres de souffleurs baptisées ‘Blowout’. En 2000, ces rencontres avaient débouché sur le premier volume du « Blues Harp Meltdown ». La session de 2002 alimente donc le deuxième tome. Elle bénéficie de nouveau du concours de R.J Mischo et de Gary Smith ; mais pour la circonstance également de Johnnie Dyer, Gary Primich, Annie Raines & Paul Rishell. En quelque sorte, un tour des USA de l'harmonica avec, pour invité, le guitariste français Frank Goldwasser alias Paris Slim. Mark Hummel est bien entendu de la partie. Flanqué de ses Blues Survivors. Pour assurer le backing band.
Le premier disque laisse R.J Mischo à la manœuvre. Aujourd’hui établi sur la West Coast, l'homme de Minneapolis est en forme. Le souffle puissant, il interprète son "Telephone blues" de fort belle manière. Paris Slim prend le premier solo, suivi de Charles Wheal, le gratteur des Blues Survivors. Pendant tout ce temps, Mischo est déjà occupé de s'époumoner. Sûr que RJ met déjà la pression sur ses collègues en présence ! Il s’acquitte ensuite d’un instrumental lent, de son harmo chromatique, à la Georges Smith. Du bien bel ouvrage ! Les mêmes musiciens restent en place pour seconder Gary Smith dans sa version du "You can't hurt me no more" de Nick Gravenites, imprimé sur le rythme de "Help me". Frank y signe un nouveau solo parfait. Gary chante avec ravissement l'histoire d’une "Story telling woman". Il joue subtilement, à la manière de Little Walter et de James Cotton, ce Chicago blues bien lent et brûlant. Gary termine par un exercice de style brillant sur l'instrumental signé Little Walter, "It ain't right". Une performance de très haut niveau ! Paris Slim accomplit la suivante pour l’"All these blues" de Dedric Malone. Il est bien à l'harmonica. Le tempo évoque Albert King. Franck chante correctement et n'a surtout pas à rougir de son exercice de souffle, pendant que Charles Wheal peut enfin se libérer aux cordes. Mark Hummel vient alors diriger ses musiciens pour trois plages. Soutenu par June Core, le drummer de Charlie Musselwhite, et Wheal à la jump guitare, "Seven nights to rock" libère une fameuse dose de swing. Le rythme à la Elmore James envahit le fantastique "I'm gone". Tout est parfait : le rythme, la voix, l'harmo et la slide de Paul Rishell. Mark termine par une longue version du "Love shock" de Little Sonny. Elle prend le temps de se développer avant d'éclater littéralement. Hummel s’y révèle très productif sur le chromatique. Ce premier Cd se termine par "Nothing but the devil", un très long blues lent tiré des swamps et composé par Jay Miller. Une parenthèse saturée de sensibilité. Paul Rishell est au chant et à la guitare, Annie Raines souffle dans l'harmonica comme Big Walter Horton.
Ce sont les mêmes qui introduisent le second morceau de plastique, par trois plages issues de leurs plumes. Pour la circonstance, il sont entourés des Blues Survivors. J’en retiendrai surtout le vigoureux exercice instrumental d'Annie sur "Annie's rocker". Elle ne s’y accorde aucun répit mort pour reprendre sa respiration. Quel souffle ! Originaire du Mississippi, (NDR : tout comme Muddy, il vient de Rolling Fork), le vieux Johnny Dyer est ici le seul harmoniciste de couleur. Il se consacre à un répertoire entièrement voué au Chicago blues urbain ; et en particulier à "Everyting's gonna be all right" de Little Walter, "Mojo boogie" de J.B Lenoir, ainsi que "Long distance call" et "Blow wind" de Muddy Waters. Ce vétéran est toujours aussi sémillant ; particulièrement sur "Mojo boogie". "Blow wind" reçoit un traitement de shuffle. Johnny chante mais c'est Mark Hummel qui joue l'harmo. Pour clôturer ces sessions, le Texan Gary Primich monte sur les planches, suivi des Survivors et de Paul Rishell à la guitare. Il s'acquitte d'un répertoire très éclectique. Nous reconnaissons de suite ses coups d'harmo comme autant de griffes. Dès l'intro du "Real gone lover" de Danny Bartholomew, Charles Wheal se révèle très efficace aux cordes. La machine swingue le tonnerre. Gary chante avec passion "Can't stand you when you're drinking", un blues lent écrit par Jeff Turmes. Le solo est un des meilleurs moments du double album, tant il est vécu. Tout le feeling de l'artiste transpire dans ces instants. Primich nous réserve encore un tonique "Playgirl" de Smiley Lewis. Je vous recommande chaudement cette excellente collection d'harmonica blues !