Ne pas confondre The Field et Field Music. Le premier est le pseudo d’un artiste techno suédois, répondant au nom d’Axel Willner. Le second, un quatuor insulaire drivé par les frangins Brewis, Peter et David. C’est cette formation issue de Sunderland qui nous intéresse ici. Et pour cause, elle vient de sortir un nouvel album. Un disque très riche. Et pas seulement parce qu’il est double ! Leur tournée transitait par la Belgique. Le combo en a profité pour accorder quelques interviews. David s’est prêté à cet exercice de style, en toute sincérité, pour Musiczine. Et à l’instar de la musique dispensée, tout au long de leur elpee éponyme, les réponses ont fusé dans tous les sens…
Je présume que vous ne débarquez pas pour la première fois en Belgique. Heureux de revenir dans notre pays ?
En fait, nous ne nous sommes produits, qu’une seule fois en Belgique. Au Pukkelpop, en 2006, si mes souvenirs sont bons. Une très belle expérience même si elle a été de courte durée ; car nous devions accorder un show à Sunderland, le lendemain. C’est donc avec grand plaisir que nous retrouvons la Belgique ! C’est une chance de pouvoir y jouer à nouveau (NDR : les Anglais avaient accordé deux concerts, chez nous, à Ostende et Anvers, respectivement ces 22 et 23 avril).
Vous avez êtes accordé un break de 3 ans, à l’issue de la publication de votre album précédent (NDR : l’excellent « Tones of Town »). Certaines rumeurs de split ont forcément circulé. Etaient-elles fondées ?
Nous ne prenions plus beaucoup de plaisir au sein du groupe, à l’époque. La décision la plus logique a donc été de se séparer et de nous consacrer à nos projets solos (The Week That Wasn’t pour Peter et School Of Language pour David). Nous ne savions pas si nous allions un jour nous remettre à composer sous le nom de Field Music. Mais comme nous sommes frères ; nous ne pourrons de toute façon, jamais réellement nous séparer !
Aviez-vous besoin de ces expériences en solo ? Y avait-il certaines idées qui ne convenaient tout simplement pas à l’univers de Field Music ?
Il existait pas mal de choses que nous pensions à l’époque ne pas convenir à Field Music. Comme, par exemple, des chansons construites autour de samples de batterie de The Week That Wasn’t ou des morceaux sans claviers pour School Of Languages. Mais en tournant pour ces albums, nous nous sommes rendu compte que nous devions élargir la palette de Field Music et cesser de nous imposer des barrières et des règles. Bon nombre de nouvelles compos de « Field Music » découlent donc de nos expériences vécues en solo.
Ce nouvel elpee regorge d’influences. Lesquelles aviez-vous en tête lors des sessions d’enregistrement ?
Difficile à dire… j’écoutais en tout cas David Bowie. Et puis nous étions en pleine phase de redécouverte de la musique qui avait bercé notre enfance. Comme celle du Led Zeppelin, qui était le premier groupe que nous avons réellement aimé. Et puis également, d’autres artistes, que nous avions repérés dans la collection de disques de nos parents, comme ceux de 10CC ou The Cream.
Quelle direction désiriez-vous explorer, lors de la confection de ce nouvel elpee ? Certaines de vos nouvelles découvertes vous ont-elles influencées?
Nous voulions créer une œuvre longue et variée, afin de donner une image plus complète de ce que nous sommes et aimons réellement. Nous refusions de nous engager dans une seule direction de bout en bout. Nous souhaitions emprunter toutes les directions à la fois, sans aucune limite !
Vous produisez toujours vos albums. Ne pensez-vous pas que vous pourriez puiser de nouvelles idées, en confiant ce rôle à quelqu’un d’extérieur au groupe ? Ou estimez-vous que vous en développez suffisamment ?
Il est très difficile pour nous de séparer les arrangements de la composition. Nous avons de plus des idées très précises du son que nous voulons recréer ; donc je ne vois pas comment nous pourrions travailler sous la houlette d’un producteur. En studio, Peter et moi sommes producteurs, avant d’être musiciens d’ailleurs…
Quels sont vos rôles en studio?
Nous écrivons chacun de notre côté et nous occupons tous les deux d’un peu de tout. Une véritable équipe !
Vous disputez-vous comme de véritables frères lors des sessions d’enregistrement ?
Pas vraiment. Nous avons une règle d’or : celui qui a composé la chanson prend les décisions finales quant à sa réalisation. Nous sommes dictateurs chacun à notre tour ; donc pas de disputes possible !
L’opus contient 20 chansons et s’étale sur plus de 70 minutes. Avez-vous réussi à inclure toutes les chansons composées ou certaines ont-elles été éliminées ?
Pratiquement toutes nos compositions s’y trouvent. Nous en avions, en fait, écrites 23 ! Mais les 3 qui ne se figurent pas sur l’album n’étaient pas terminées…
Ce disque est très éclectique. On a parfois l’impression que ce sont des groupes différents qui ont concocté des morceaux comme « Let’s Write A Book », « Choosing Numbers » ou « You And I ». Ne craigniez-vous pas un manque de cohérence ?
Nous étions au contraire très excités par cette absence de cohérence ! Les changements de style faisaient partie de notre nouvelle philosophie. Mais comme Peter et moi chantons à notre tour, je pense que notre musique sonne tout de même toujours comme du Field Music.
Il recèle aussi quelques chansons quasiment pop, comme « Them That Do Nothing » ou encore « You And I » ; mais elles figurent parmi les 18 autres, plus riches et complexes. Vous ne semblez pas particulièrement obnubilés par la recherche d’un succès populaire.
Notre seul but est de créer la meilleure musique possible et le seul moyen pour y parvenir est de tenter de composer celle que nous aimerions écouter. C’est aussi simple que ça. Je n’écrirai jamais une chanson pour qu’elle rencontre un succès commercial. J’aime beaucoup trop la musique pour ça.
Quels sont vos groupes favoris du moment ?
Ils sont principalement américains : Deerhof, The Fiery Furnaces et Joanna Newsom. Mais je vous conseille également de tendre l’oreille à Frankie and The Heartstrings. Ce sont nos amis. Ils sont issus de la scène de Sunderland et composent des hymnes indie-pop très sexy.
Habitez-vous toujours Sunderland? Pourriez-vous décrire cette ville à nos lecteurs ?
Et oui ! J’habite toujours cette ville du Nord-est de l’Angleterre de plus ou moins 250 000 habitants. Elle se situe non loin de Newcastle, à plus ou moins 6 heures de route de Londres. Hormis son glorieux passé, illustré par l’essor de l’industrie maritime et charbonnière, Sunderland ne jouit pas d’une grande notoriété. En outre, les habitants ont été particulièrement touchés par la disparition de ces secteurs d’activité économique. Aujourd’hui, elle est pauvre et souffre d’un taux de chômage très élevé. Sunderland n’est pas une ville très culturelle ; sauf si l’on considère le foot comme de la culture. Une situation parfois fort déprimante. Mais c’est chez moi et je n’ai aucune intention de la quitter, car je l’aime, malgré tout…