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Tom McRae

`J'aime l'idée que la musique pop soit populaire'

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De Tom McRae, on connaissait la voix, l’écriture intelligente et les mélodies poignantes. Désormais, il faut compter aussi sur ses envies pop, sans toutefois délaisser la mélancolie. ‘King of cards’, quatrième album déjà, prouve que le chanteur poursuit sa route empreinte de doutes, de colère mais également balisées de notes plus optimistes. Si « Tom McRae » (2001) se révélait en noir et blanc et « Just like blood » (2003) sonnait plus rouge, le nouvel opus du songwriter surprend par sa palette de couleurs.

Je pense que « King of cards » est multicolore. Comme un paquet de bonbons, une boîte de chocolats, c’est très éclectique. Je voulais que chaque chanson soit différente, ait une ambiance particulière. Les autres albums s’inscrivaient dans un certain ton, je ne voulais pas faire quelque chose de similaire. Celui-ci est plus lumineux. Autrefois, on n’écoutait pas un disque de Tom McRae avant de sortir le vendredi soir ou quand on se sentait heureux, par exemple. Je voulais le réaliser, parce que je ne l’avais jamais effectué. Mais ça ne veut pas dire que le prochain ne sera pas sombre et déprimant.

Le titre de l’album provient de la chanson « Sound of the city », pourquoi l’avoir choisi?

Le livre que je lisais en écrivant les chansons parlaient d’Houdini, connu aussi pour être le ‘roi des cartes’, car il a commencé sa carrière en accomplissant des tours de cartes. Beaucoup de chansons parlent de magie, qu’elle soit liée à la religion, à la politique, à l’amour… C’est l’idée de l’album. Et puis, « King of cards » est un titre qui sonne bien…

Vous abordez des thèmes tels que la fuite, l’identité, la disparition… Est-ce la trame du disque?

C’est la trame de ma vie ! Je ne sais pas exactement ce que je fais, ni ce que j’essaie d’être ni où je vais. Je ne suis même pas sûr d’opérer les bons choix ; peut-être devrais-je juste disparaître… Ce sont des questions que je continue à me poser tous les jours. Je n’avais pas envisagé de les traduire sur un disque, mais elles transparaissent dans la musique.

Ce disque est plus éclectique, craignez-vous de vous répéter au fil des albums ?

Je n’ai pas peur, je ne le veux pas. Il ne m’intéresse pas de reproduire ce que j’ai déjà accompli auparavant. Le premier disque était sombre. Je voulais, en réaction au précédent, que le deuxième soit différent. Mais je ne crains pas de me répéter.

Le premier opus a été reconnu comme coup de maître, n’est-ce pas la manière la plus difficile de commencer une carrière ?

Je ne sais pas. J’ai toujours envie de me dire que l’album en cours sera le meilleur. Quand je réécoute le premier album, je me dis que telle ou telle partie était bonne, pareil pour le deuxième etc. Mon meilleur album est probablement un peu de tous. Je ne pense pas avoir déjà exécuté un chef d’œuvre. J’espère toujours y parvenir lors du prochain…

Y a-t-il, pour ce disque, une volonté d’être plus accessible ?

Oui.

Cela signifie-t-il qu’il faut renoncer au dépouillement?

(Il rit jaune) J’aime l’idée que la musique pop soit populaire. J’aime les chansons pop: parfois c’est simple et triste, mais ce sont toujours des chansons pop. Il me plait de penser que sur cet album je pourrais toucher des gens qui ne seraient peut-être pas attirés à la base par ma musique. J’essaie de mettre plus de sucre dans les ingrédients pour voir si cette recette attirera d’autres personnes. Je ne l’avais jamais tenté avant. De nouveau, c’est quelque chose de neuf. Je ne renonce à rien, pas au côté obscur, ni à la mélancolie qui est toujours présente. Je travaille déjà pour le prochain album. Il sera encore plus mélancolique que tout ce que j’ai pu réaliser à ce jour.

La chanson "Keep your picture clear" diffère de ce que ce vous composez habituellement. Quelle était l’idée ?

J’aime les surprises, en musique. J’aime réécouter plus tard ce que j’ai concocté et me dire ‘ça ne sonne pas comme moi, c’est brillant !’, parce que j’en ai marre de ma voix, de ma façon de penser. C’est une de mes chansons préférées, elle commence jazzy, pas vraiment comme Tom Waits mais il y a cette sorte d’esthétique, avec ces claquements de doigts. Et s’achève par quelque chose de très fort, de très rock.

J’ai lu que vous aimiez AC/DC ?

(Rires) Quand j’étais enfant, les premiers groupes qui me plaisaient relevaient du heavy metal : AC/DC, Iron Maiden…

C’est très différent de ce que vous pratiquez aujourd’hui…

Je pense que toutes les musiques sont les mêmes. Je ne pense jouer de la musique folk, mais les compos de heavy metal peuvent être interprétées en folk ; tout dépend seulement de la manière de les jouer.

‘Houdini and the girl’ se réfère au fameux magicien. Vous comparez-vous à lui d’une manière ou d’une autre?

Oui. Quand vous regardez un magicien, surtout ses tours de cartes, vous savez ce qu’il fait, vous connaissez le truc, mais vous voulez croire que c’est magique. La musique est ainsi : ce n’est que de la musique, mais elle offre quelque chose de plus fort, de plus grand. Etre un musicien, c’est être un magicien.

Votre chanson « The ballad of Amelia Earhart » parle de cette aviatrice qui eut une vie incroyable et une mort tragique. Est-ce une héroïne pour vous ?  

Je ne sais pas si c’est une héroïne mais je suis fasciné par les gens qui sont des pionniers. Ce n’est pas seulement le fait qu’elle était pilote, elle a traversé l’Atlantique et parcouru le monde mais surtout qu’à cette époque cette expérience a dû être très dure pour cette femme. Elle devait être incroyablement courageuse. Houdini fut la première superstar mondiale, connu dans le monde entier par ses tours épatants. Ce n’est pas seulement le mystère ou son art à disparaître qui me passionne ; mais surtout le fait d’avoir été le premier à le réussir. J’aime les pionniers.

Pensez-vous être un pionnier ?

Absolument pas, en aucune façon. Je n’ai rien créé de différent, je pratique de la musique pop.

Dans « Lord How Long », évoquez-vous la guerre en Iraq ou en Afghanistan?

Oui, j’ai toujours écrit au sujet de la politique. Il y a au moins une chanson qui en parle sur chaque album. Je vis dans un monde réel, donc je suis fâché par certains événements alors que d’autres m’attristent. Ces réactions se ressentent dans les chansons. Il est très difficile d’écrire au sujet de la politique car tout le monde s’y est déjà frotté. Bob Dylan en particulier. Mais rien n’a changé. Pareil pour le Live8. Les gens en ont marre de la musique et la politique. Mais je pense qu’il est très important de se mouiller, d’exprimer ses sentiments ; même si ça ne change rien. Je le manifeste d’une façon très personnelle sur « Lord How Long », mais aussi sur « Keep your picture clear ». Il ne s’agit pas de parler de ‘comment sauver le monde, comment le nourrir…’ mais juste de dire comment je me sens.

C’est par la musique que vous affirmez votre position quant aux conflits ?

Pas seulement. J’ai participé à nombreuses manifestations pour émettre des protestations. J’ai écrit des lettres. Je suis honteux et gêné.

« On & on » est une chanson assez forte, vous attaquez Dieu ?

Absolument, très explicitement. Je ne crois pas en Dieu.

Votre père était pasteur…

Oui, il l’était.

Vous éprouvez quand même de la colère face à Dieu ?

On ne peut pas être fâché sur ce qui n’existe pas, donc je ne suis pas fâché sur Dieu. Ce qui m’importe, c’est que les guerres sont menées par des gens clamant leur religion comme une cause. Peu m’importe que l’Eglise catholique veuille interdire l’utilisation du préservatif en Afrique et qu’en conséquent le SIDA se répande. Peu m’importe que les fondamentalistes islamiques causent la perte du destin des musulmans qui sont considérés comme radicaux. Il y a beaucoup de fous dans le christianisme comme dans l’islam. La religion est une arme très dangereuse. Sous toute autre forme, une arme serait interdite. On interdit le revolver, la religion, c’est la même chose.

Peut-on tout dire en musique ?

Je pense que la musique jouit d’une liberté totale. On peut parler de mort, d’amour, de sexe, de religion… Il n’y a pas de règles. Ca ne fait pas de différence, c’est juste de la musique.

Les médias vous décrivent souvent comme un songwriter sombre. Partagez-vous leur point de vue ? 

Je pense que c’est vrai, mais j’aime la mélancolie. Mes livres, films et groupes préférés, sont tous mélancoliques. C’est une émotion que j’aime. On n’est pas heureux tous les jours, il y a des hauts et des bas. La mélancolie résume ces états d’âme.

Comment imaginez-vous les auditeurs qui écoutent votre musique?

Je n’y pense pas, d’aucune façon. Cette idée ne me traverse même l’esprit. Je pense que je ne suis pas unique : si j’écris des chansons que j’aime, qui m’émeuvent, je pense que des gens les aimeront aussi.

Que ressentez-vous lorsque vous jouez vos chansons intimes devant un large public ?

Ce n’est pas différent pour moi, ce sont juste des chansons. Je ne monte pas sur scène en cherchant à ressembler à quelqu’un d’autre. J’aime l’idée que sur scène je ne doive pas porter de masque, je peux juste me révéler comme je suis. Ca ne me parait pas bizarre de faire ça, c’est naturel.

Si vous écriviez pour d’autres artistes, lesquels choisiriez-vous?

J’aime vraiment écrire des chansons pour des songwriters country. Surtout les femmes. Patty Griffin… Elle a une voix exceptionnelle et c’est une songwriter de génie. Sinon, Emilie Harris… J’aime les chanteuses country.

Quelle est, selon vous, la meilleure chanson jamais écrite ? Et le disque le plus accompli ?

C’est une question très difficile pour les musiciens parce qu’il y en a tant. Je deviens de plus en plus obsédé par l’écriture des chansons. « Wichita lineman » de Jimmy Webb, interprétée par Glen Campbell, dans les années septante et plus récemment reprise pas Johnny Cash. C’est probablement ma chanson préférée de tous les temps. Meilleur album? « Abbey Road ». Il y a tout sur cet album : des chansons que j’aime, d’autres que je n’aime pas. Un bon album devrait comporter des chansons qu’on n’aime pas. Des paroles brillantes. Les Beatles ont tout fait et sur cet album ils l’ont fait.

Pensez-vous consacrer toute votre vie à la musique ? Dans la négative, que comptez vous entreprendre ?

C’est intéressant… Je ferai de la musique tant que j’aimerai ça. Je ne fais que commencer et je ne veux pas arrêter ici. Si je devais faire autre chose ? Quelque chose de physique, où j’ai les mains sales et je transpire. Abattre des arbres… Non ! Pas abattre! Planter des arbres. Quelque chose comme ça…

 

Tom McRae

Ce n’est pas encore la fin du monde, mais de la tournée…

Écrit par

C’est la deuxième fois en quelques mois que votre serviteur assiste à un concert de Tom McRae. Le précédent s’était déroulé à l’Archiduc de Bruxelles, en avril dernier. Un showcase organisé dans le cadre de la sortie de son dernier album, « Did I Sleep And Miss The Border ? » Ce soir, l’AB est en mode semi-flex. Et le spectacle est sold out. Il s’agit de l'avant-dernière date de la tournée qui s’achèvera à Paris le 3 octobre

Brian Wright assure la première partie. C’est le guitariste de Tom McRae. Il est issu de Waco, au Texas. Il compte 4 albums solos à son actif : « Dog Ears » en 2006, « Blurbird » en 2007, « House On Fire » en 2011 et « Rattle Thier Chains » en 2013. Cinq ans plus tôt, et plus ou moins à la même époque, il assurait déjà le supporting act pour son leader.

Brian a une bonne bouille qui sent bon le soleil du Sud des Etats-Unis. Son humour est transcendant. Et il le manie le plus souvent en raccordant sa gratte. Une semi-acoustique. Parfois on se demande s’il ne la désaccorde pas expressément pour sortir ses vannes. Il est également armé d’un harmonica. Un profil qui colle parfaitement à la country.

« Former Queen Of Spain » concède des accents hispaniques. « Red Rooster Social Club » est un bluegrass spasmodique. Il nous confesse que « Rosalee » est une chanson composée par son épouse, alors qu’il s’agit du nom de sa fille. Il nous réserve également une cover étincelante du « The Biggest Thing That Man Has Ever Done » de Woody Guthrie. Et le set s’achève dans un climat de bonne humeur. Parfait pour préparer le show de McRae.(Pour les photos c'est ici)

Ce soir, Tom McRae est donc flanqué de son fidèle groupe, The Standing Band. Il réunit Olli Cunningham (synthés, percussions, vocaux), Oli Kraus (violoncelle), Richard Hammond (basse, contrebasse, percussion, vocaux), David Walsh (batterie) et enfin Brian Wright (guitares, banjo, pedal steel). Pas d'accordéon ni de violon pour ce concert, mais un violoncelle. Sept lumières rouges marquées de notes de piano, derrière lequel siège Olli Cunningham, préludent l'arrivée des autres artistes... Mais ce sont de puissants spots bleus qui vont les mettre en exergue.

Tom est bien sûr en avant-plan. « The Dogs Never Sleep », issu du dernier opus « Did I Sleep And Miss The Border », ouvre le set. L’interprétation est puissante et convaincante. Particulièrement efficace, le drummer s’y révèle souverain. Ses frappes sont métronomiques. En outre, la section rythmique est parfaitement en phase. La formation est bien soudée. Et il ne faut qu’un petit geste de Tom pour que la musique s'emballe.

Pour « The High Life », Tom délaisse sa gratte. Il adresse un signe à l’ingé-son pour remonter le volume du micro, avant que le morceau ne démarre. Et en trombe ! Tom saisit le pied du microphone et s'accroupit, puis le relève tout en chantant.

La voix de McRae est écorchée et rocailleuse. Et elle colle parfaitement à ses ballades. A l’instar d’« End Of The World News (Dose Me Up) », qu’il aborde d’abord, seul, à la sèche. Ou encore « Let Me Grow Old With You ». Des ballades qui manifestement enchantent l’auditoire ; il reprend d’ailleurs régulièrement les refrains en chœur.

Très interactif, Tom présente chaque chanson ; en l’illustrant parfois d’un petit trait d’humour.  Sur « Expecting The Rain  », le nouveau single, Tom utilise un peu sa voix comme un instrument. Il la module même à la manière de Christophe. Superbe, « Christmas Eve, 1943 » est un titre à la mélodie contagieuse et au refrain enjôleur.

Pour « A & B Song », un extrait du tout premier LP (NDR : il est éponyme !), paru il y a 15 ans, il entame le morceau paisiblement, un peu comme une autre ballade, avant qu’il ne monte en puissance, intensité qu’il communique à l’aide de sa six cordes acoustique. Autre plus ancienne plage, « Walking 2 Hawaii » (« Just Like Blood ») est interprétée en duo. Tom à la gratte et Oli Kraus au violoncelle pour ce classique empreint d’une douce mélancolie…

« Hoping Against Hope » évoque la fin du monde. Le set tire à sa fin. Place ensuite au solide « What A Way To Win A War », premier single (NDR : il ne figure pas sur ce disque, mais est téléchargeable sur les différentes plateformes officielles) qui a précédé la sortie du nouveau long playing. Les musicos et Tom chantent presque a cappella. Impressionnant ! Et la foule est ravie ! « Silent Boulevard » (« All Maps Welcome ») achève officiellement le concert. Une compo, déchirée entre douceur et puissance, au cours de laquelle Tom est au sommet de son art. 

En rappel, le combo nous accorde encore « Ghost Of A Shark » (« Just like Blood ») et « The Boy With The Bubblegun », un titre bouleversant, illuminé par les interventions du violoncelle. A ce jour, ce concert figure parmi mes trois meilleurs de cette année…Pour les photos, c'est )

(Organisation : Ancienne Belgique)

Tom McRae

Mes influences ne sont pas nécessairement musicales…

De son véritable nom Jeremy Thomas McRae Blackall, Tom MacRae est né le 19 mars 1969, à Chelmsford, en Angleterre. Son premier elpee est paru en 2000. Il est éponyme et est suivi d'une tournée qui passe par les Transmusicales de Rennes, une première partie pour Autour de Lucie à Paris, puis 11 dates en tête d'affiche ainsi que la participation aux festivals d'été. Au cours de son premier périple, il s’intéresse au répertoire d’artistes français majeurs : Alain Bashung (en compagnie duquel il partagera l'affiche lors de sa tournée destinée à promotionner son deuxième LP), Miossec, Keren Ann, Françoise Hardy et Dominique A. Tom est nominé, sans pour autant remporter de prix, au Mercury Music Prize ainsi qu'aux Q Awards. Il y a plus de 15 ans que Tom sévit sur le circuit rock conventionnel. Il est également considéré comme l'un des meilleurs chanteurs/compositeurs insulaires. Pour enregistrer « Did I Sleep And Miss The Border », son 7ème opus, il a rappelé son fidèle backing group, un disque dont les sessions se sont déroulées au Pays de Galles et dans le Somerset.

Sous un superbe soleil, nous débarquons au Huis 123 de l'Ancienne Belgique. Il est 16h15. Bien installés dans de confortables fauteuils, l’entretien peut commencer.

Question bateau pour commencer, peux-tu nous parler du processus d’enregistrement de ton dernier elpee, « Did I Sleep And Miss The Border » ?

En 2010, j'ai tourné en compagnie de musiciens avec lesquels je me produisais –pour certains et un peu moins pour d’autres– depuis une quinzaine d'années. Après cette aventure, je ne souhaitais plus reprendre la route immédiatement sous une même formule. Je voulais tenter une autre expérience. J'ai donc gravé un disque plus personnel, davantage épuré, en 2013. Mais dans ma tête, je repensais toujours aux moments au cours desquels nous étions tous ensemble et à ce que nous étions capables de proposer. J’ai donc eu envie de composer une œuvre qui soit dans leurs cordes et qui leur permette d’apporter la pierre à l’édifice. L'écriture des chansons et l’exercice des démos ont pris un peu plus de temps de prévu ; mais finalement, après quelques années de séparation, on s’est retrouvé en studio. Sous leur impulsion, certains morceaux ont été retouchés. Et très progressivement, le résultat a pris forme, tenant compte du témoignage de nos existences, lorsque nous formions ce bon groupe…

Tu as vécu pas mal de temps à New York. Tu es revenu en Angleterre ?

Oui, j’y vis à nouveau, depuis cinq ans. Mais, je compte encore déménager. Je pense m’installer en France quelque temps. J’ai constamment l’envie de changer d’air…

Tu ne te plaisais plus à New York ?

J'ai aimé y vivre. J'y retourne régulièrement. J'y ai passé un mois à Noël cette année. C'est un endroit qui te communique une inspiration incroyable. Un peu comme Londres, Paris ou Bruxelles. Une énergie prodigieuse émane de toutes ces grandes villes. C’est peut-être un cliché, mais New York évoque une forme de romantisme et de poésie qui t’ouvre l’esprit, un peu comme dans les films et les livres. C'est aussi une métropole où on peut circuler très facilement. J'y ai vécu et je m'y sens comme à la maison. Je sais où je suis et où je vais. J'ai des amis là-bas. Il n'y a pas beaucoup de vrais New-Yorkais qui y sont nés et y ont grandi. Elle est tellement grande et mythique. Elle a une telle envergure et pas uniquement d'un point de vue géographique. Il est agréable de s'y abandonner, s'y laisser porter par le courant des événements. Et j'aime ça, ce sentiment de disparaître dans le ventre d'une cité qui est tellement plus que ce que vous ne serez jamais. En plus, c’est assez rassurant.

Tes parents sont pasteurs. La religion est-elle importante pour toi ? Dicte-t-elle ton écriture ?

Non, la religion n'est pas importante à mes yeux. D'un point de vue sociologique, le comportement des gens par rapport à la religion, leur manière d'y répondre, m'intéresse, mais je ne suis pas quelqu'un de pieux. J'ai grandi dans une famille religieuse et tout un temps, j'ai dû faire partie de ce monde. Mais je l'ai très vite rejeté, car ce n'était pas pour moi. Il est très intéressant de grandir dans cette sphère afin de ressentir le pouvoir de la musique, le pouvoir de chanter dans un choeur dans une église, de vivre cette expérience spirituelle, mais cette implication était étrangère à Dieu ou la Bible ou n'importe quelle religion. Non, elle n'est pas importante pour moi. J'aime ses images, que j'utilise dans mes chansons. J'ai grandi en lisant la Bible, en allant à l'église trois fois par semaine. Ce passé fait partie de moi, mais dans un contexte poétique plutôt que spirituel.

Tu ne te produis pas souvent en Belgique. Pourquoi? Tes concerts y sont pourtant chaque fois sold out ?

J'ai de la chance ! C'est une bonne question. Je ne veux pas solliciter le public trop souvent. Je ne veux pas que les gens s'habituent à ma présence. Quand un concert est programmé, je préfère que le public soit enthousiaste et qu’il se dise ‘Il faut qu'on y aille !’ plutôt que ‘Oh, c'est encore Tom McRae, il reviendra l'an prochain’. Je souhaite que ce moment soit spécial. Proposer quelque chose de différent, innover, afin que chaque concert soit unique en son genre, que ce soit en compagnie d’un groupe, d’un quatuor à cordes, en solo ou autre. Et il me faut du temps pour savoir comment y parvenir.

Tu as sorti un LP ‘live’ en 2007. Sa diffusion est confidentielle. Pourquoi uniquement le vendre en concert et sur ton site et pas en magasin ?

Bonne question ! Je pense qu'aujourd'hui il existe une évolution dans notre manière de diffuser la musique et de la partager avec le public. Encore une fois, c'est une question de sollicitation. Si tu sors officiellement un cd afin de le retrouver dans tous les magasins et que les médias en parlent, tu mobilises ce support à un moment précis. Et c'est la formule que j’adopte quand il y a une matière nouvelle ; car je veux que tout le monde se focalise dessus. Pour ce ‘live’, c’est dans le but de faire revivre les spectacles, de les rendre fun. Je les publie après les tournées. Je ne souhaite pas qu’on y prête trop d'attention. Il s'agit plutôt d'un souvenir d'une certaine période. Je ne veux pas que les mélomanes s'ennuient. Et les journalistes n’ont certainement pas envie d’écrire un papier sur le même artiste chaque année. Sinon ils vont s’exclamer : ‘Oh, encore un nouvel album de Tom McRae’. C’est l’explication et ma manière de dire : ‘Voici un petit album, juste pour vous. Je reviendrai avec quelque chose de plus consistant plus tard’.

Tu as démarré ta carrière en France où tu y jouis d’une certaine notoriété. N’est-ce pas un paradoxe d’y avoir rencontré le succès, avant la Grande-Bretagne ?

Oui, j'ai vraiment eu de la chance de fidéliser un public en France et un peu plus tard, en Belgique. C'est très intéressant d'être reconnu dès la sortie de ton premier album, car si on l’espère, on ne s’y attend pas. Et le vivre sur un autre territoire, puis ailleurs encore et voir ce phénomène se propager, c’est quand même particulier... et même formidable. Aussi, dans un pays comme la France, que je connaissais déjà un peu, où j'avais passé du temps, où j'avais voyagé, c'était assez spécial. J'avais le sentiment que si le succès tardait à venir au Royaume-Uni, ce n'était pas grave. Car la France, la Belgique et la Norvège me l’accordaient. Je me suis rendu compte que peu importe qui vous êtes, quelle que soit votre nationalité, quelle que soit la langue que vous parlez, nous sommes tous pareils. Et si vous parvenez à établir une connexion quelque part, un lien très fort se tisse auprès des gens qui se sont manifestés d’abord. C'est un peu comme les premiers qui débarquent lors d’une soirée : ils reçoivent toujours le meilleur accueil.

« Christmas Eve, 1943 » est une ballade empreinte de mélancolie. Mais de quoi parle-t-elle exactement ?

J'ai vu une photo –je ne me souviens plus très bien où, peut-être dans les toilettes– d'un soldat américain de l'armée de l'air, qui était en garnison à Sorrente, pendant la guerre. Il avait épousé une fille du coin. Et j'ai utilisé ce cliché comme point de départ à la chanson, avant d’imaginer ce que cette situation aurait pu entraîner. Et comme j’ai inventé la suite, la fin est devenue tragique. Il la tue et se suicide ensuite. J’avais l’intention d’écrire un texte narratif. De raconter une histoire autre qu’autobiographique, tout en y ajoutant des éléments auxquels je m'intéresse et des petits bribes de moi. J’ai essayé de ne pas uniquement envisager la réalisation d’un album dans on ensemble, mais plutôt comme de petites saynètes, de courts-métrages, de romans, mis bout à bout. Et tout particulièrement ce morceau. Il a été abordé comme un film. Il retrace leur vie commune et leur séparation. Les images y sont nombreuses. C’est aussi le titre dont le mixing a été terminé en premier lieu. Et il est devenu la pièce centrale. J’ai donc placé la barre assez haute pour le reste, car je voulais que les autres plages soient à la hauteur, aussi bonnes, aussi parfaites et intéressantes. Sans quoi, elles n’auraient pas eu leur place sur le disque. Donc c'est une chanson importante.

Pourquoi ne pas avoir inclus « What A Way To Win A War » sur l’elpee ?

Pour deux raisons. J’aime beaucoup ce single ; mais j’avais l’intime conviction qu’il ne collerait pas à l’album. Il aurait rompu son charme, détonné dans son atmosphère. Or, je souhaitais que l’ensemble soit cohérent et propice au voyage. Suis pas sûr qu’un autre label aurait accepté mon point de vue. On m’aurait peut-être imposé d’y ajouter cette compo. Il s’agit de mon disque et je veux en garder le contrôle, dans la plupart des pays où il sortira. Chez les Beatles, « Penny Lane » et « Strawberry Fields Forever » ne devaient pas nécessairement figurer sur « Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club Band ». Et ils sont restés à l’état de 45trs. Pourquoi faire payer les gens deux fois pour le même morceau ? J’en ai donc conclu que la formule pourrait être fun. Je l’ai filée aux plates-formes légales, comme Spotify. Je voulais simplement annoncer la sortie de « Did I Sleep And Miss The Border », que cette chanson soit juste, un avant-goût. Et finalement, j’estime le processus intéressant.

Tu vas te produire dans une église, à Courtrai. Dois-tu réadapter tes chansons lors d’un événement aussi particulier ?

Oui, il va bien falloir. C'est toujours différent de jouer dans une église. Tout dépend des musiciens qui vont participer au projet. Pas vraiment facile en compagnie d’un groupe, car il n’est pas possible de faire du rock dans une église. Donc j'imagine que je vais devoir tempérer les ardeurs, mais j’ignore encore comment. Nous n'avons d’ailleurs pas encore commencé à répéter. Repose-moi la question, après le concert.

Certains medias comparent ta voix à celle de Jeff Buckley. Qu’en penses-tu ?

Drôle d’idée ! C’est tout à fait faux. Jeff Buckley avait une voix phénoménale. D’ange même. Je ne chante certainement pas comme lui. Je n’ai pas dit que je chantais faux. Je crois même que ma voix est belle, mais je ne boxe pas dans la même catégorie. C’est une méprise, même si je suis flatté de la comparaison.

Quelles sont tes principales sources d’inspiration ?

La pauvreté, la faim dans le monde… c’est peut-être désinvolte de ma part, mais mes influences ne sont pas nécessairement musicales. Bien sûr, j'écoute de la musique et il y a des compos que j’apprécie et que je volerais bien. J'aime la manière dont quelqu'un peut créer un univers. Mais, je ne peux pas le copier, il a déjà été réalisé. Pour composer, je me sers de tableaux que j’accroche dans mon studio et j’y épingle des cartes postales, des pages déchirées d'un magazine ; et j’y inscris aussi des idées, des remarques. Une chanson par support. Et lorsque j’entame l’écriture, je récolte toutes ces sources, panneau par panneau. Elles sont multiples et illimitées : des conversations que j’ai entendues dans la rue, à la TV, dans des films, que j’ai lues dans des magazines, etc. Je lis pas mal de recueil de poésies. En fait, je fonctionne comme un aspirateur.

Quels sont les artistes qui t’ont le plus marqué et incité te lancer dans la musique ?

C'est une bonne question. J'estime beaucoup Bruce Springsteen, Paul Simon et Bob Dylan, mais mes références ne se limitent pas à l’americana. Les plus grandes influences résultent d'une période où on est le plus à même d'être influencé. Adolescent, j’étais complètement tombé sous le charme de deux artistes. Tout d’abord Paul Simon. Personnellement, j’ai toujours estimé qu’il écrivait les meilleures chansons, les meilleures mélodies, les textes les plus significatifs. J'avais l'impression qu'il me parlait, qu’il voulait me communiquer une certaine vérité que je devais comprendre ou un message qu'il voulait transmettre et qu'aucune autre musique n’était capable de me procurer. « Bridge Over Troubled Water » a été un album important pour moi. C'était l'un des trois seuls 33trs pop que mes parents avaient achetés. J'écoutais « The Only Living Boy In New York City » en boucle en pensant que c'était ce que plus tard, je voulais faire. Et puis Billy Bragg. J'ai acheté son premier long playing et je l'ai écouté. Ce n’était pas la plus belle voix du monde. L’ensemble était un peu désordonné. La production était sommaire, mais le disque allait tellement à essentiel. C'était juste un gars avec une guitare. Je ne jamais entendu une de ses chansons à la radio. Je ne l'ai jamais vu à la TV. Ce n'était pas une grande star et pourtant sa musique me parlait plus que tout ce que je pouvais voir ou entendre d'autre. Je voulais devenir comme ces deux gars.

Et Miossec, Dominique A ainsi qu’Alain Bashung ?

C'est triste qu'Alain Bashung soit mort. J'ai eu l'honneur d’assurer sa première partie, il y a quelques années et de le rencontrer. Ce sont des artistes majeurs de la chanson française. Ils ont vécu suffisamment longtemps pour avoir eu le temps d’observer tout ce qui se passe autour d’eux tout en continuant à vivre leur musique. Difficile de croire que la future génération parviendra à atteindre leur statut. Dans 25 ou 30 ans ? J’en doute ! En fait, la carrière des artistes contemporains semble tellement éphémère. Difficile se faire une place au soleil, mais encore plus difficile d’y rester. Tellement difficile, qu’un jour on regardera en arrière vers ces Serge Gainsbourg, Alain Bashung ou Johny Cash. Nous n’en connaîtrons plus d’une telle envergure. J'ai eu la chance de pouvoir chanter « La nuit je mens ». C'est vraiment une bonne chanson.

Quel est le dernier album qui t'a le plus marqué et que tu as éventuellement écouté en boucle ?

« Metals » de Feist. J'adore Feist. Quand il est sorti, juste après « The Reminder » qui lui a permis de percer, j'ai pensé que c’était vraiment un disque unique en son genre. Accrocheur, très dur, intéressant et sombre, en même temps. Et une voix vraiment tranchante. J’en ai conclu qu’en matière de recherche sonore, il avait exigé énormément de travail. Que techniquement, c’était difficile à réaliser. Je l’ai écouté en boucle. Puis le « Bad As Me » de Tom Waits. La plupart des gens ont sans doute pensé qu’il s’agissait d’un autre cd de Tom Waits. Mais, pas seulement ; car il est tout bonnement époustouflant. Ces deux albums, je les ai écoutés pendant les sessions d’enregistrement du mien. Pour concocter deux œuvres pareilles, les deux artistes devaient être au sommet de leur art. Vraiment.

As-tu encore des contacts avec Scott Walker ?

Oui, on s'envoie des messages tout le temps ! (rires) Non, en fait depuis bien longtemps. Scott Walker m'avait demandé de me produire au Meltdown Festival (NDR : en l’an 2000 !) Elliott Smith était alors à l’affiche. J'ai pu le rencontrer et passer un moment en sa compagnie. Une entrevue inoubliable. Mais quand on me parle de Scott Walker, je pense immédiatement à Elliott Smith.

En 2015, tu as écrit « Love More or Less » pour Marianne Faithfull, une composition qui figure sur l'opus « Give My Love To London ». Que représente-t-elle pour toi ? Et pourquoi lui avoir écrit une chanson ?

Elle a appris que je connaissais Rob Ellis, le producteur de cet album. Elle était à la recherche d’un auteur-compositeur qu'elle appréciait afin de mettre ses mots en musique pour une ballade destinée à ce disque. Ils avaient une liste, et finalement, ils m'ont choisi. Et quand Marianne Faithfull te demande un service, tu acceptes, parce que c'est Marianne. Donc elle m'a envoyé son texte et je l’ai mis en chanson. Après, j’ignore ce qui peut se passer dans sa tête. Soit elle aimera ou pas. Soit elle l’utilisera. Ou pas. Mais c’est simplement incroyable de l’écouter chanter cette compo en concert. Qu’elle figure sur un long playing auprès de titres signés par des auteurs aussi illustres que Nick Cave, Warren Ellis ou Steve Earle. Elle appartient à cette catégorie d’artistes qui ont du vécu. Comme Alain Bashung. Elle recherche constamment de nouveaux défis. Et son attitude t’inspire.

Tu sembles dégoûté par le système néo-capitaliste. Pour toi, qui tire les ficelles sur cette terre ? Le monde politique ou financier ?

Certainement pas le monde politique. Ce n’est plus le cas depuis bien longtemps. Il sert de paravent. Tout se trame en arrière. Ce sont les marchés, les banques et la haute finance qui contrôlent notre mode de vie. Nous sommes en danger. Nous vivons une époque périlleuse. Et nous sommes impuissants. C’est inquiétant…

L'Europe sociale et économique est malade. La situation des réfugiés qui débarquent en Italie n’est toujours pas réglée. Tous les pays regardent dans leur assiette et finalement, rien ne bouge. Quel est ton avis à ce sujet ?

C'est ce qui se produit quand l'économie va mal. Les gens ne voient plus au-delà de leurs propres frontières. Certains disent qu’il s’agit de patriotisme, mais c'est plutôt du nationalisme voire du paternalisme. C'est effrayant. Cette situation s’est déjà produire dans le passé et elle n’a pas encore servi de leçon. On a vu ensuite quelles ont été les conséquences. Les termes du débat changent et les gens sont dépouillés de leur humanité. On commence par leur attribuer d'autres noms, puis à attaquer les pauvres, les sans-abris, les chômeurs et enfin les immigrants. Comment résoudre ces problèmes ? En construisant une Europe unie. En adoptant une politique européenne commune afin d’aider ces êtres humains qui fuient la persécution et la précarité. Nous sommes tous des êtres humains. Et je suis toujours surpris... ou finalement, ce n’est pas une surprise... Ces événements me désolent, car personne ne prend en charge le véritable problème. On manque d'imagination. Malheureusement, la question des immigrés est loin d’être résolue. On essaye de limiter les dégâts et on se contente d'attendre, car une juste solution coûte trop cher...

Ta chanson « You Cut Her Hair » a fait l’objet d’une pub pour Kenzo. De quoi t’apporter une forme de notoriété, du fric, ou du plaisir ?

Du parfum ! Elle figure sur mon premier album et remonte à 2008 ou 2009. Bien plus tard après l’avoir écrite. Très étrange. A mes débuts, je n'aurais jamais accepté un tel deal, pour ne pas la dévaloriser. C'est étonnant qu’une telle compo consacrée à un tel sujet puisse servir, par la suite, à une campagne de pub pour un parfum. Et je suppose que comme beaucoup de mes congénères, je me suis retrouvé face à un bon vieux dilemme. Je souhaitais qu’un public le plus large possible puisse écouter cette chanson. Mais en même temps, j’avais l’opportunité de la rentabiliser un max. Tout en bénéficiant du support TV à travers des images d’une jolie femme. Et bien oui, j’ai accepté. Aussi quand je me connecte sur YouTube, ce n’est pas la vidéo tournée au préalable qui est diffusée –soit celle de la visite d’une maison étrange en compagnie d’un vieux monsieur, et qui me met en scène drôlement coiffé– mais d’une femme, à moitié nue, traversant un champ de coquelicots. Et finalement, c'est génial !

 

Tom McRae

Did I Sleep And Miss The Border

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De son véritable nom Jeremy Thomas McRae Blackall, Tom MacRae est né le 19 mars 1969, à Chelmsford, en Angleterre. Son premier elpee paraît en 2000. Il est éponyme et est suivi d'une tournée qui passe par les Transmusicales de Rennes, une première partie pour Autour de Lucie à Paris, puis 11 dates en tête d'affiche ainsi que la participation aux festivals d'été. Au cours de son premier périple, il s’intéresse au répertoire d’artistes français majeurs : Alain Bashung (en compagnie duquel il partagera l'affiche lors de sa tournée destinée à promotionner son deuxième LP), Miossec, Keren Ann, Françoise Hardy et Dominique A. Tom est nominé, sans pour autant remporter de prix, au Mercury Music Prize ainsi qu'aux Q Awards. Il y a plus de 15 ans que Tom sévit sur le circuit rock conventionnel. Il est également considéré comme l'un des meilleurs chanteurs/compositeurs insulaires.

Il nous revient flanqué de son fidèle backing group. Ses précédents périples, il les avait accomplis, d’abord soutenu par un quatuor à cordes, et puis en solo. Enfin, pas tout à fait, car un violoncelliste l’avait accompagné pour défendre son album « From The Lowlands », tout au long d’un circuit qui, a duré deux bonnes années. C’est également à cette époque qu’il compose pour différents confrères et consoeurs, dont Marianne Faithfull.

Le line up de The Standing Band réunit Olli Cunningham (synthés, accordéon, percussion et chant), Oli Kraus (violon), Richard Hammond (basse, contrebasse, percussion et chant), David Walsh (batterie) et enfin Brian Wright (guitares, banjo et pedal steel). « Did I Sleep And Miss The Border » constitue son septième LP. Il a été enregistré au Pays de Galles et dans le Somerset.

L'approche de l'écriture de ce nouvel opus est différente des œuvres précédentes. Les chansons sont plus narratives, donc moins autobiographiques. Elles traitent de sujets brûlant comme la mondialisation, l'immigration, la faim, le pouvoir des banques et de la finance ainsi que des dérives politiques…

« What A Way To Win A War » est le premier single paru avant la sortie officielle de l’elpee. Il ne figure pas sur ce disque, mais est téléchargeable sur les différentes plateformes officielles.

Sur « The High Life », Tom a la rage. L’instrumentation est agressive. La voix de McRae est blessée, rocailleuse. Gémissante, elle hante « The Dogs Never Sleep », une compo balayée de percus ténébreuses et sauvages. « Christmas Eve, 1943 » bénéficie d’une jolie mélodie au refrain accrocheur. La compo que je préfère. Sur « Expecting The Rain », il utilise sa voix comme un instrument, à l’instar de Christophe… « Let Me Grow Old With You » est une tendre ballade. Quelques cordes quand même sur « We Are The Mark », un concours qui accentue le sentiment de mélancolie de la chanson. Des bruitages métalliques et glaciaux lacèrent sa voix sur le sombre « My Desert Bride ». « Lover Still You » s’écoute comme une prière. D’autant plus que « Hoping Against Hope » nous parle de la fin du monde.

Tom est un artiste attachant qui respecte son public. Il repart en tournée et se produira dans le cadre des Ardentes le 10 juillet 2015 et à l'Ancienne Belgique le 2 octobre 2015.

Tom McRae

Un nouveau concierge à l’Archiduc…

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Le très sympathique Tom Mc Rae se produisait, ce 18 mai, à l'Archiduc, dans le cadre des cafés-concerts, pour défendre son nouvel album « Did I Sleep And Miss The Border ». Un showcase proposé en guise de release party, devant une quarantaine de personnes. L'Archiduc est situé à deux pas de la Bourse. C’est un endroit très ‘classe’ que fréquente régulièrement Arno.

Votre serviteur s’installe à droite de l'entrée, bien calé dans un fauteuil qui a déjà bien vécu. Il est aux premières loges, face à un podium improvisé qui occupe a moitié du bistrot. Heureusement, une partie de l’auditoire peut également assister, confortablement assis, au spectacle, du balcon. Olli Cunningham siège derrière un immense piano à queue. A sa droite, se plante le bassiste, Richard Hammond, et juste à côté de lui, le guitariste Brian Wright. Sans oublier le drummer David Walsh, en retrait. The Standing Band. Tom occupe le centre de l’estrade.

Qui présente d’abord ses musicos. Soit The Standing Band. Puis remercie le public et le patron du zinc. Etonnant, dès que l’un ou l’autre client se présente à la porte d'entrée, Tom lui ouvre la porte et l’invite à entrer dans l'établissement, pour participer à la fête

Et on est parti pour une heure de concert. Qui s’ouvre par « The Dogs Never Sleeps ». Balisée par les drums, l’instrumentation est puissante. Régulièrement, Tom tourne le dos à l’auditoire, pour observer ses musicos. Le son est excellent. Armé de sa gratte semi-acoustique, Tom embraie par « We Are The Mark ». Au beau milieu de la chanson, Tom interrompt le spectacle et fixe la porte d’entrée. Un dernier arrivé souhaite pénétrer au sein de la taverne. McRae lui ouvre et lui signale qu’il est le bienvenu, s’il fournit l’assemblée en cocaïne. Fou rire général. Le client entre discrètement et s’installe au bar, alors que Tom reprend le fil de la compo, le plus naturellement possible. Franchement, c’est vraiment un type qui a le sens des relations humaines… et de l’humour…

Armé de sa gratte, il aborde, quasi en solitaire, « Expecting The Rain », une ballade uniquement soutenue par quelques battements de caisse claire. Tom McRae utilise un peu sa voix comme un instrument. Il souffle dans son harmo pour attaquer « Let Me Grow Old With You ». De plus en plus grave, sa voix monte en intensité, alors que la section rythmique brille de mille feux. Ce qui déclenche les acclamations nourries du public. Tom a empoigné sa guitare électrique pour interpréter « Christmas Eve, 1943 », un titre empreint de charme et de tendresse qui prend toute sa dimension en live. A cause de ces chœurs religieux qui engendrent une forme de recueillement, au sein de l’auditoire. Le set s’achève par « What A Way To Win A War », un morceau acoustique au cours duquel les musicos et le public participent aux clappements de mains. Un chouette showcase. De quoi patienter, en attendant le retour de l’artiste, à l'Ancienne Belgique, en octobre prochain.

(Organisation : Gentle Promotion + Archiduc)

Tom McRae

Cherche désespérément inspiration…

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Octobre 2000. L’auteur-compositeur britannique arpente les scènes internationales, fort d’un premier album brillant et unanimement salué par le public et les critiques musicales. Un pop-rock aux structures classiques, optimisé d’une voix surprenante et la plume authentique d’un songwriter. Les deux premiers elpees (« Tom McRae » et « Just Like Blood ») le propulse sur les scènes des festivals les plus prestigieux (Meltdown, Transmusicales…) et l’invitent à des collaborations francophones cocasses (Autour de Lucie, Bashung, Miossec, Françoise Hardy ou Dominique A).

Cet artiste, devenu depuis lors l’un des chefs de file d’un certain pop-rock ‘pleurnichard’,  n’est cependant pas reconnu par ses frères de larmes et ne fait assurément pas l’unanimité dans l’univers indé. En outre, les trois derniers opus du chanteur anglais pataugent lamentablement dans une musicalité qui radote. Sénilité juvénile qu’il comptait soigner en proposant son dernier opus, « The Alphat of Hurricanes ».     

Quatre albums plus tard, Tom McRae envahit l’espace du Cirque Royal armé de titres sensiblement plus orchestrés et munis de revendications écologiques. Un homme crie les injustices climatiques. Attention : préparez vos mouchoirs !          

Ce virage artistique n’a cependant aucune raison d’affoler les fans de la première heure. Le chanteur british connaît son public, sait jongler avec son répertoire et aurait trop peur de le déranger. Rien d’expérimental à l’horizon mais une multitude d’instruments qui viennent (trop) légèrement bousculer l’univers frileux de McRae. Guitares, banjo, ukulélé, batterie, violons, claviers, clarinette, accordéon (…), viennent tour à tour soutenir légèrement la voix sans jamais l’étouffer. Guitare et piano étoffent discrètement son timbre sur « Summer of John Wayne ». L’orchestration n’est jamais que prétexte à la mise en valeur de la voix, certes splendide mais redondante, du chanteur anglais. Seul « Please » s’offre le luxe d’une explosion rythmique et polyphonique digne d’un combo.

Les réactions vives du public se feront d’ailleurs entendre principalement sur les anciennes compos (« A&B Song » et « The Boy With the Bubblegum ») du fidèle artisan. Les nouvelles sombrant désastreusement dans une mièvrerie inouïe. Le talent de l’artiste d’outre-Manche n’est nullement remis en cause. Par contre, l’originalité et la créativité devront attendre quelques années encore.  

De l’ouragan alphabétique annoncé à travers ce dernier opus, il ne subsiste qu’une larme infime perdue dans un océan pop-rock suffisamment pollué.    

 

Tom McRae

The Alphabet of Hurricanes

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Qu’est ce qui peut pousser une personne à écrire des chansons aussi noires, aussi tristes, aussi sombres et nostalgiques ? Sa vie, son passé, son environnement ? Force est de constater que Tom, en tout cas, n’est pas ce qu’on pourrait appeler un gai luron de la musique !

Fils de pasteur et issu d’un petit village anglais, Tom écrit et compose ses deux premiers albums (« Tom MacRae » et « Just like Blood ») à Londres avant d’émigrer à New York pour concocter les deux suivants (« All Maps Welcome » et « Kings of Cards »). Estimant avoir fait le tour de la question ‘américaine’, il revient à ses premières amours et (re)débarque à Londres où il installe chez lui son propre studio d’enregistrement. Après s’être acheté les instruments nécessaires à son travail (banjo, ukulélé, violon, batterie,…), c’est à domicile qu’il enregistre son cinquième album studio (entrecoupé entretemps d’une session live parue en 2008, uniquement disponible sur internet et lors de ses concerts). Les chansons composant « Alphabet Of Hurricanes » ont été écrites au cours d'une période de deux ans pendant laquelle Tom était incapable de choisir l'endroit où il voulait vivre.

Sur ce dernier opus, les mélodies tantôt intimistes, tantôt plus énervées, sont alimentées par une instrumentation simple mais subtile. On y retrouve les ingrédients qui sont un peu la carte de visite de Tom : des textes intelligents, une voix sublimement déchirante et des mélodies romantiques. Le thème décliné sur la majorité des titres est la colère d’un homme face aux dérèglements de la nature, ses caprices, ses phénomènes catastrophiques et ses conséquences pour notre pauvre planète. Y aurait-il là un parallèle à faire avec sa propre vie ?

Fidèle à sa ligne de conduite, Tom McRae ne surprend pas, n’innove pas non plus, il perpétue une tradition de songwriter bien ancrée chez lui : des chansons à texte sur des musiques douces et soignées.

Les amateurs du genre apprécieront et iront ‘timidement’ l’applaudir lors de sa tournée qui fera escale chez nous ou pas très loin ; et en particulier le 24 mars au Cirque Royal de Bruxelles ainsi que le 1er avril au Grand Mix de Tourcoing. Quant à celles est ceux qui ne le connaissent pas, inutile de tendre les pavillons vers les ondes FM, Tom y est des plus discrets, hélas pour lui !

 

Tom McRae

Just Like Blood

On avait quitté Tom McRae avec abattement : ce type, avec ses chansons tristes et dépressives, n'était décidément pas un joyeux luron. Ce " Tom McRae ", d'une beauté certes indubitable, n'était pas notre compagnon le plus cher lors de nos matinées ensoleillées : plutôt à écouter tard le soir, quand la nuit étouffante recouvrait de son manteau noir nos espoirs les plus secrets. Tom McRae, le nouveau héraut de nos doutes et de nos errances, avec sa voix haut perchée et ses hantises qui frôlaient souvent l'emphase, nous mettait presque mal à l'aise. Avec ce " Just Like Blood " d'une pesanteur certes encore marquée, l'Anglais semble s'être un peu assagi et détendu ; en témoigne le morceau d'ouverture et ses samples… africains ! " Welcome back… " : tels sont les premiers mots de ce " A Day Like Today " lumineux et reposé, à des lieues déjà de ses anciennes compos. Tom McRae donne ainsi le ton : finies les introspections larmoyantes, et en route pour la joie ! Peine perdue, déjà, à la fin de ce titre en trompe-l'œil : si l'Anglais nous accueillait avec une gentillesse étonnante, voilà qu'il nous gratifie, en toute fin, d'un " I love you to death " de triste mémoire. Triste, en effet : c'est avec ces deux mots qu'il composa la bonne moitié de son premier album… " La mort, l'amour, c'est du pareil au même ", semble nous dire Tom McRae : et de fait, il remet ça tout au long de ce " Just Like Blood ", avec plus ou moins de bonheur (ou plutôt malheur). C'est qu'on ne change pas un homme en une chanson, fut-elle imprévisible : Tom McRae continue donc, dans une veine rouge sang, à graver des chansons sombres et pas drôles, à écouter les larmes aux yeux et les dents serrées. Parfois, l'étau se desserre (" Karaoke Soul " et ses envolées de cordes), mais la couleur de l'album reste noire de chez noir. Il n'empêche que des chansons comme " " Overthrown ", " Walking 2 Hawaii " et " Mermaid Blues ", trio gagnant du milieu de l'album, confirment le talent de Tom McRae pour transcrire à merveille ce sentiment de détresse qui nous tenaille tous, un jour ou l'autre, au lendemain d'une rupture. Tom McRae : à la fois bourreau (des cœurs) et victime (consentante) de ses propres faiblesses ? Tout juste. De la pop SM, en somme.