Ce disque est vraiment singulier. Il est le fruit d'enregistrements opérés entre 2012 et 2013, aux studios Torricalla. C'était avant que leur bassiste, le redoutable Giancarlo di Marco, ne quitte le navire. Ce quatuor italien, établi à Teramo en Italie, implique alors, outre Giancarlo, Pietro Calvarese, à la guitare et aux bidouillages électroniques, Danilo Francesco, également aux grattes, ainsi qu’Alessandro Antinori, aux percussions. Auparavant, le combo avait publié deux 12 inches, "Satori" en 2013 et "Music to watch the clouds on a sunny day" en 2014. "Unforgettable, lost and Unreleased" est donc un recueil de fonds de tiroirs. L’œuvre ne respecte d’ailleurs aucune ligne de conduite. Giancarlo avait imposé un style à sa formation. Sa basse servait de structure aux jams improvisées des grattes au bord du délire. Elles étaient ainsi susceptibles de s’enfoncer dans le psychédélisme, mais également dans le space et le cosmic rock ; lors d’expérimentations qui semblaient pratiquement sans fin…
Sur les huit plages proposées, outre "Untitled", une brève et douce intro blues, trois plages dépassent les 10’ et une va au-delà des 20 minutes. Cette musique n’est donc pas destinée à votre chaîne hi fi, mais plutôt à la formule ‘live’. L’identité du combo demeure une énigme. La seule photo publiée sur un blog nous révèle des musicos qui ne sont plus de première jeunesse! Le moins âgé affiche plus de 40 balais ! Mais comment appréhender cette expression sonore improvisée et expérimentale, peu soucieuse de la qualité finale ? Prog ? Psyché ? Peut-être en optant pour une extension artificielle. Kraut rock ? Pourquoi pas ? Si on se réfère aux 70’s. Noise ? En adoptant alors une réflexion plus contemporaine.
"Bangkok" est une plage qui s’ouvre dans la douceur. Les guitares s'étirent paresseusement en boucle, dans l’esprit d’un d'Ash Ra Tempel, quatre décennies plus tôt. Avant que la suite ne se soulève, comme dans un tourbillon. Et suivant un même schéma, les cordes de Danilo et Pietro bercent paisiblement "Nicotine", jusqu’au moment où les cordes aux tonalités psychédéliques, pourtant parfaitement maîtrisées, ne viennent brouiller les pistes. Et lorsque les longues plages s’installent, la musique devient expérimentale. "Noise again" nous replonge dans l’univers chaotique et avant-gardiste de Hawkwind. Bref interlude paisible, "No name science" est orchestré par les cordes de Di Franco. "Radon" et "The monarch must die" sont des épopées de longue haleine, propices aux chevauchées cosmiques tourmentées. La première est parcourue d’un discours déclamatoire incompréhensible. La seconde se solde par une digestion laborieuse. Après "Mechanical lady", transition de courte durée, place à l’envol final, "My girlfriend is a zombieslut", une piste de 22’ qui nous entraîne au cœur de terres bien peu inhospitalières…