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Brazen tient la distance…

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Alice Bossut

Alice Bossut

C'est une salle comble qui attend le groupe Birdy NamNam, vendredi soir au Théâtre National de Bruxelles, dans le cadre de l’édition 2012 du Festival des Libertés. Mêlant hip-hop et musiques électroniques, ce groupe français réunit quatre DJ. Ses prestations scéniques sont devenues une marque de fabrique. Ils scratchent simultanément sur quatre platines, se répartissant et s'échangeant la ligne de basse, le solo, les rythmes et le thème principal. Acclamé tant par le public que par la presse, Birdy NamNam a reçu de nombreux prix, et se produit depuis 2005 un peu partout dans le monde.

Ce concert, très attendu par un public bruxellois venu en masse, débute en apothéose. Le décor majestueux reçoit les quatre musiciens. Ils semblent minuscules, devant un public exalté avant-même le début du set. Le concert commence dans une bouffée d'applaudissements et de sifflements flatteurs. Immédiatement, les corps gigotent, déchaînés. Les protagonistes lancent leur show, dansant au rythme des vinyles qu'ils scratchent avec délice, et des boutons qu'ils chipotent avec une précision de métronome. Les curseurs sont poussés à fond, le volume fait vibrer le sol, les cages thoraciques et les neurones. Les rythmes s'accélèrent et les yeux ne sont pas en reste, éblouis par le jeu de lumières alternant flashes multicolores, rayons tourbillonnaires et autres effets stroboscopiques.

Tapissant l'arrière-scène, un dessin d'aigle gigantesque mêle iconographie antique, religieuse et industrielle.

L'ambiance est bien présente ; les morceaux se succèdent naturellement ; et pourtant, petit à petit, l'énergie s'essouffle et la salle se désemplit insensiblement. Les titres se suivent et se ressemblent, similaires dans leur intensité, leur construction rythmique, leur tempo.

Faut dire que la position surélevée des DJs nous empêche de voir ce qu'ils bidouillent, nous interdisant ainsi le plaisir d'observer les correspondances entre gestes et sonorités, de démêler ce qui relève du scratch ou du jeu de machines.

La musique est urbaine et sauvage. Certes, la mécanique est bien huilée, mais elle semble avoir perdu l’audace des premières années.

Si on se réfère aux musiques expérimentales dispensées dans de petites salles underground de la capitale, il est indéniable que les artistes exploitent bien mieux leur potentiel. Qu’ils nous offrent une plus grande diversité de création et un pouvoir de fascination, liés, sans doute, à leur prise de risque et à leur singularité.

Le concert de Birdy Nam Nam, ce soir, ressemblait à une prise de drogue en accéléré : exaltation, effets hypnotiques, et dégringolade pénible, presque agressive pour les sens.

Birdy Nam Nam

 

vendredi, 19 octobre 2012 20:52

L’importance du paramètre visuel…

Ce vendredi 13 octobre, le combo bruxello-colombien La Chiva Gantiva donnait un concert dans la petite salle de l'Ancienne Belgique. Rapidement sold-out, ce spectacle arrive un an après la sortie de leur disque "Pelao" chez Crammed Discs. Nourrie de cultures afro-colombiennes, leur musique, métissage de funk, rock, jazz, rap, afro-beat et cumbia se nourrit de percussions caribéennes, d'instruments typiques du rock, mais également de cuivres, et en particulier d’interventions de clarinette et de saxophone. Une demi-heure avant le concert du collectif, Raphaël Espinel, membre fondateur et chanteur de la Chiva, nous a accordé cette interview, au milieu du crew se préparant dans une ambiance tranquillement excitée.

Vous avez tourné dans plusieurs pays au cours de cette année. Vous êtes allés jouer en Colombie pour la première fois, où vous avez reçu un accueil très enthousiaste. Prévoyez-vous d'aller vous produire, à nouveau, en Amérique Latine ?

Bien sûr ! On a maintenant un label là-bas. On aimerait retourner jouer en Colombie, et dans toute l'Amérique Latine. Mais on entre maintenant dans une période consacrée à la composition. En fait, nous avons l'intention d'enregistrer un disque en 2013, qui sortirait idéalement à l'automne.

La Chiva Gantiva réunit sept musiciens, parfois des invités vous rejoignent sur scène. Comment se déroule le processus d’écriture ?

En général, c'est Philipp Deckers, le guitariste, et moi qui composons, ensuite on propose le morceau au groupe qui le façonne en le jouant. Pour le texte, je demande parfois conseil à des amis écrivains, journalistes...

Les membres du groupe ont fréquenté les beaux-arts ou suivi une formation de théâtre. Y en a-t-il qui ont également suivi un même cursus dans le domaine de la musique ?

Le guitariste et le batteur sont musiciens de formation. Effectivement, trois d’entre-nous sont issus du monde des arts plastiques (illustration, gravure, sculpture), un autre du théâtre ; ce qui explique pourquoi on conserve toujours cet intérêt pour le côté visuel. L'image reste un paramètre important pour nous.

On le voit dans vos deux vidéo-clips, il existe un vrai travail créatif, notamment dans “Pelao”, où un petit personnage de papier évolue au sein d’une ville multicolore, peuplée de jouets et de marionnettes. Cet aspect ludique semble très présent, que ce soit dans la façon dont vous jouez avec le public lors des concerts, sur la pochette d'album...

C'est vrai, d'ailleurs “Pelao” en Colombie signifie à la fois pelé, fauché ; et c'est également ainsi qu’on appelle les gamins. Même si on a un regard critique sur la société, c'est pas pour ça qu'on va s'habiller en noir et jouer les fatalistes ! On souhaite garder un regard d'enfant, être positifs même si on dénonce les clichés qui collent à la peau ou si les textes de nos chansons sont consacrés aux difficultés rencontrées par les immigrants.

Vos concerts sont efficaces. On y ressent une énergie très forte et communicative. Comment faites-vous pour préserver l’intensité de l'enregistrement du disque, sans l'éteindre ?

Pour “Pelao”, on a travaillé en compagnie de Richard Blair, producteur anglais qui vit depuis trente ans en Colombie. Il nous a proposé d'enregistrer en studio mais de garder les conditions du ‘live’. Nous avons joué ensemble, dans la même pièce. Chaque musicien ne s’est pas acharné à enregistrer des prises séparées. Cette technique aurait communiqué un climat plus froid à notre musique. C'est la raison pour laquelle, l’album a un son un peu ‘garage’. Mais ce choix est circonstanciel. On ne reproduira pas forcément cette recette pour le prochain disque.

Je laisse ensuite les musiciens finir de se préparer avant leur entrée en scène.

Le concert sera chaud, festif, le public bruxellois se prêtant volontiers aux jeux et danses proposés par la Chiva Gantiva. Comme quoi, avec un peu de bonne volonté, même un samedi 13, par un soir pluvieux d'automne, on peut garder la frite.

 

lundi, 23 avril 2012 03:00

Le tango de Melingo…

C'est un soir mouillé revêtu d'un aspect surréaliste. Dans le hall de la salle de concert, des demoiselles offrent aux arrivants ruisselants, des éponges en forme de micro. Une marque automobile allemande sponsorise le concert ; elle a d’ailleurs également parsemé la place Flagey d'énormes drapeaux. Nous montons les étages jusqu'au vaste théâtre, scène en bois s'étageant sur plusieurs niveaux, fauteuils de devant immatriculés ‘World Trade Center’ ou ‘Comte et Comtesse de...’. Les spectateurs sont disséminés sur plusieurs niveaux, mais les meilleures places du parterre sont réservées : un carré composé principalement d'hommes en costards bien taillés occupe les premiers rangs.

Mais prenons le temps de présenter l'artiste avant qu'il n'entre en scène. Daniel Melingo est argentin. Il est né à la fin des années cinquante. Il étudie la clarinette et la composition musicale à Buenos Aires. En 78 il doit, comme beaucoup d'artistes et autres dissidents, fuir la dictature militaire. Il a vingt ans et s'exile au Brésil. Là-bas, les rencontres l'amènent à jouer dans le groupe Agua de Milton Nascimento. De retour en Argentine, quelques années plus tard, il devient guitariste et chanteur au sein de deux groupes dont on n'a toujours pas oublié les noms : Los Twist, dont le mélange de ska et de rock alternatif aurait pu naître d’une rencontre entre les Rita Mitsouko et Madness ainsi que Los Abuelos de la Nada (Les Ancêtres du Rien du tout), impliquant Andrés Calamaro.

Enfant du rock contestataire, issu d'une génération qui ramasse malgré elle les miettes des turpitudes politiques d'Argentine, il redécouvre la puissance du tango, et commence à composer des mélodies modernes, sur des bases de tangos tissées de rock, de musique classique et de jazz. Il passe alors quelque temps en Espagne, retourne ensuite dans son pays natal, avant de s’établir à Paris, où il vit aujourd’hui. Il a sorti plusieurs disques en solo, dont l'excellent "Maldito tango" (Maudit tango), et fin 2011 "Corazón y hueso" (Cœur et os), qui vient de débarquer en Europe. Cette tournée est d’ailleurs destinée à défendre cet opus. Ce soir, nous aurons également droit à quelques nouvelles compos : il paraît qu'un nouvel album est sur le feu.

Les cinq musiciens s'installent. Ils se réservent contrebasse, bandonéon, violon, guitare électrique et acoustique. Les instruments démarrent et Melingo sort sans empressement de l'obscurité. Il s'approche et sa voix vient se poser sur les notes, accompagnée de gestes éloquents et de regards malicieux. Nul besoin d'être hispanophone pour comprendre ce dont il parle. Le personnage est cocasse, charismatique ; et c'est bien parce qu'il y a des fauteuils que l'on ne se met pas à danser. Ses comparses sont aussi vocalistes et reprennent en chœur l'écho du thème principal. Ou sifflent. Ou crient.

Les titres se suivent avec aisance, variés dans leurs rythmes et intensités. Melingo chante la langue de Buenos Aires, le langage des quartiers populaires. C’est-à-dire le lunfardo, un argot hérité des nombreuses vagues d'immigration, qui mêle l'espagnol à d'autres idiomes européens et précolombiens ; ce jargon qui a été employé par les grands écrivains argentins, et depuis toujours par les tangueros.

Daniel Melingo donne lui aussi l'impression de sortir de la rue, et de la nuit. Vêtu d'un pardessus noir, coiffé d'un chapeau, sa silhouette mince et bavarde invoque les petits personnages du peintre Antonio Segui ou certains protagonistes des nouvelles de Cortázar.

Après quelques compositions issues du dernier essai "Corazón y hueso", comme "El Tatuaje" (Le Tatouage) et « Negrito », Daniel Melingo dédie « Se igual » aux cartoneros de Buenos Aires, nombreux précarisés qui pour survivre ramassent les cartons sur le pavé et les revendent aux entreprises de recyclage. Ce titre parle des gens de la rue et de l'indifférence des passants, de la bière et de la colle qui rendent fou.

Puis arrivent l'histoire d'un type exubérant au grand nez surnommé "Narigón, et celle d'un pickpocket maladroit qui se fait arrêter "En un bondi color humo" (dans un bondé couleur de fumée). Le chanteur s’éclipse, laissant place à ses accompagnateurs pour des moments instrumentaux magnifiques, comme le fameux "Volver" (du maitre du Tango Carlos Gardel) joué par la guitare et chanté par la scie musicale lancinante.

Au gré du concert se dessine une ambiance de ruelles sombres, de cafés enfumés, et Melingo, tout en nous racontant ses légendes, se change en clochard fou et visionnaire. Il se moque de ses musiciens en grimaçant dans leur dos, fait mime de trébucher, s'affale, regarde sa montre au milieu d'un morceau, s'allonge et continue à chanter, reprend place sur sa chaise, enlève ses chaussettes qu'il renifle une dizaine de fois avant de les lancer au beau milieu du carré des messieurs chics, provoquant le départ de certains d’entre eux ! Poète ambitieux, il veut, comme il le dit dans un de ses morceaux, ‘inspirer l'inspiration’, en mettant tout à l'envers, ‘ciel de terre, terre de lumière’. Quand il saisit la clarinette c'est pour la faire hurler ; et si, dos au public, il joue au chef d'orchestre, augmentant et diminuant le volume sonore dispensé par ses musiciens, c'est pour mieux battre des ailes et se changer en corbeau bonimenteur.

« Eco il Mondo » dresse le portrait d'un vieil homme élégant, qu'il mime, parodiant son rôle de dandy destroy. Tout est maitrisé : l'air de rien, Melingo sait très bien ce qu'il construit. L'autodérision embrasse le romantisme, les ambiances de vieux rades cèdent la place à des moments plus intimes et moins rocambolesques. Les maitres (Gardel, Garcia Lorca) sont cités mais jamais imités.

Quand après un rappel, il nous annonce de son timbre rauque ‘C'est fini pour ce soir, j'ai plus de voix’, c'est pour revenir et nous gratifier d'un dernier chant à capella et guitare acoustique : « Del barrio me voy » : le chant de quelqu'un qui s'en va, qui quitte son quartier, déjà mélancolique de ce qu'il abandonne.

Esprit libre et ébouriffé, indigent d'une élégance à faire pâlir les hommes d'affaires et rougir les jeunes filles, Melingo est bien parti pour faire aimer le tango au delà de l'Amérique latine.

 

jeudi, 08 mars 2012 17:24

Live in France

Une plage décapante ouvre cet album live immortalisant la tournée française, accomplie par le duo mexicain Rodrigo y Gabriela, qui module énergiquement des rythmes flamencos aux accents rock, jazz, et métal.

Deux guitares acoustiques et quatre mains menteuses, qui font croire à l'orchestre et aux percussions. L'un s'occupe en réalité des accords pour que l'autre puisse courir sur des soli endiablés.

L'album claque comme un coup de fouet, les doigts jouent avec les résonances des cordes, cassent le rythme, frappent les corps des instruments.

Expressionnistes, Rodrigo et Gabriela semblent être un feu d'artifice permanent. Accélérations, tension, puissance maximale. On en prend plein les oreilles.

Mais toujours, la même intensité, le rythme frénétique et régulier, qui gagnerait à reprendre son souffle dans des compositions plus lentes ou en jouant davantage sur les variations de volume. Le duo ne fouille pas assez les subtilités de gammes, de dissonances, de contrastes, comme si la prouesse technique se suffisait à elle-même.

Certaines potentialités physiques de la guitare sont explorées, les sons ne sont pas désagréables, mais la composition n'offre que trop peu de surprises. Les mélodies s'enchaînent, le public exulte, et en fin de parcours, on a envie d'aller prendre l'air, de respirer un peu, après cette fête bruyante ou rien d'important n'a été dit.

 

jeudi, 13 octobre 2011 02:00

Un feu d'artifice visuel et musical.

L'atelier 210 accueillait, ce jeudi 13 octobre 2011, les Too Much & The White Nots, à l'occasion de la sortie de leur premier album, "Hootenanny". Quatre ans après leurs débuts (sur les planches de l'atelier 210!), le public qui afflue pour les (ré)entendre jouer prouve, s'il le faut, que le combo bruxellois s'est taillé une belle réputation.

La convivialité est de rigueur dans cette petite salle. Le public est plutôt jeune, mais on croise aussi une vieille dame accompagnée d'enfants.

La première partie du concert est assurée par Sinus Georges. Seul à la guitare et au chant, ce gai et sympathique luron est accueilli avec bienveillance, malgré une influence très marquée de  pop-chanson française-un peu reggae et une voix dans la lignée d'Anis, de Patrice, d’Ayo voire de Tété... Les textes ne sont pas d'une grande profondeur, (l'une des chansons s'intitule "Viens par ici que j't'attrape") mais c'est vers la fin du set que Sinus Georges se rattrape un peu, en interprétant des compositions apparemment plus récentes, et un peu moins stéréotypées.

Après une petite pause, les sept membres des Too Much s'installent dans le joyeux bazar disposé sur la scène. Beaucoup d'instruments (violoncelle, contrebasse, calebasse, guitare, flûte, harmonica, harmoniums, carillon, tube, guimbarde, didgeridoo, charango...) et des micros pour tout le monde, une lampe épileptique, un téléphone scotché au pied de micro. L'espace prend des allures de cirque, les musiciens arborant chignons, vestons de cow-boy, robes dorées ou tissus années trente. Les genres s'y côtoient pour un feu d'artifice visuel et musical.

Venus d'horizons musicaux différents, les membres de Too Much & The White Nots se sont rejoints pour cette belle expérience, éclectique malgré une classification folk. Le concert s'ouvre par un premier morceau dynamique et décalé, qui entraîne de suite les plus timides bassins. Vient ensuite un titre plus lent qui met le violoncelle à l'honneur, ainsi que les voix dont les types se répondent.

Darshen Golan (guitariste et chanteur) est au centre, et si c'est lui qui initie la plupart des morceaux, l'improvisation de tous a certainement permis d'enrichir les compositions. La spontanéité et l'amusement sont palpables, et chacun se met à danser, enfants émerveillés par le dompteur d'ours et la fildefériste.

Quelques reprises sont jouées, dont « My Moon My Man » de Feist, dans un admirable arrangement qui le rend franchement méconnaissable. Entonné par un duo d'harmoniums, il monte en puissance quand la violoncelliste, le contrebassiste et Choekita, la chanteuse à la voix grave s'en mêlent. Très rythmé, il semble partir en tango, puis s'accélère, s'étoffe, se répète et prend une direction plus électronique.

Sur « Folk is not dead », tous les membres scandent, non sans ironie, la phrase empruntée au slogan ‘punk is not dead’. La lampe de salon se met à clignoter comme lors un orage, le rythme et les bouches s'exagèrent, jeu auquel l'auditoire prend part.

Le groupe n'hésite pas à nous emmener dans des contrastes marqués, et quand la violoncelliste et le contrebassiste interrompent leur duo pour laisser exploser les percussions, les fauves sont lâchés et le plaisir embrase la salle entière.

Quelques ballades balancent cette furie, dont une reprise de Daniel Johnston, plus sage et introspective. On pense furtivement à Moriarty, et ses odeurs de Far West, mais l'on aurait tort de vouloir comparer les Too Much, et surtout, ce serait très long, vu la souplesse du répertoire.

Généreux, les Too Much n'hésitent pas à en faire un peu trop, avec classe et autodérision.

Trois morceaux de rappel continuent résonner dans l'atelier 210. Les musiciens attrapent des percussions et deviennent batucada, puis terminent par « Elise », chanté en acoustique et en rang d'oignon, les sept complices tapant des mains, sautant et jouant de la sonnette de vélo et du réveille-matin.

Too Much & The White Nots se produira en concert le 25 novembre au Rideau Rouge à Lasne, et probablement d'ici peu sur d'autres scènes bruxelloises.

(Organisation Atelier 210)

 

Il y a des bandes originales de films que l'on aime écouter, qui existent pour elles-mêmes et pas seulement au regard des films qu'elles accompagnent. Pour n'en citer que quelques-unes, gardons en mémoire « La chambre du fils », de Nanni Moretti, « Hable con ella » de Pedro Almodovar ou encore, dans un tout autre style, la B.O. culte de « Grease » signée Jim Jacobs et Warren Casey.

Joann Sfar, créateur de la bédé « Le chat du Rabbin », qui vient d'être adaptée au cinéma, a su s'entourer de musiciens de renom pour cette aventure cinématographique.

Il a de nouveau confié les compositions à Olivier Daviaud. Cet arrangeur et compositeur a bossé en compagnie de Dionysos, Jacques Higelin, Thomas Fersen... et est l’auteur de la musique du premier film de Sfar, « Gainsbourg, vie héroïque ».

Enrico Macias, chanteur français d'origine juive séfarade, connu comme le chanteur du déracinement, et le groupe Amsterdam Klezmer Band (big band flamand responsable d’une musique explosive, entre jazz et klezmer) en assurent l'interprétation.

Pour autant, le disque n'est pas de ceux que l'on réécoutera. Les titres illustrent certainement bien le dessin animé, mais ils sont trop courts, trop disparates pour donner un sens au disque, et les rares paroles ne tiennent pas le coup sans l'image et le récit.

Musique d'ambiance, d'atmosphère, qui montre que le nom ne fait pas tout. Et que la promotion à outrance (voyons l'effort hallucinant dont a bénéficié le film) n'est pas forcément utile.

Mais comme dit si bien Sfar sur son blog, ‘Finalement, il y a assez d’œuvres formidables pour ne pas évoquer des choses moins bien’ (post du 18 août).

A bon entendeur...

 

mercredi, 14 septembre 2011 02:00

Accordion Samurai

Ces samurai ne sont pas sept, mais cinq.

Ils ne sont pas japonais, mais italien, français, finlandais, belge et irlandais.
Pour armes, ils n'ont que leurs accordéons.
Rien d'autre.
Pas de percussion, pas de basse...
Plein de boutons ! Et pas sur la figure !
Des doigts qui vont à toute allure, et l'expérience de chacun en partage.

Le projet est né il y a trois ans, et les Samurai ont commencé leurs concerts l'an dernier. Voici leur premier disque, produit par Home Records.

Pas spécialement conçu pour les amateurs de piano à bretelles, mais aussi pour qui aime la saudade, le rock et le folk, la mélancolie et la danse.

Les cinq univers donnent une grande liberté de ton, tantôt proche du folk irlandais, tantôt de la musique de films. Les musiciens savent donner corps à leur musique. C'est profond mais pas épais.

C'est sacrément bien foutu, à l'instar du titre « Eleanor Neary's Hornpipe » composé sur une structure classique : le thème revient, se dédouble, dévie, part dans des disharmonies avant d'être rejoué pour clore le morceau.

Malgré la couverture de l'album (où les soufflets rouges rappellent des entrailles), le disque ne se terminera pas en hara-kiri, mais par un superbe morceau finlandais intitulé « The last Waltz », majestueux et élégant.

 

jeudi, 08 septembre 2011 02:00

Klara Festival 2011 : jeudi 8 septembre

Ce jeudi 8 septembre 2011, dans un studio 4 (l'une des salles de Flagey) bien rempli, le groupe anversois Dez Mona et quelques musiciens du collectif BOX (Baroque Orchestration X) donnaient la première représentation de leur opéra "Sága". Organisée par le Klara Festival 2011, dont le thème est "Imagine Paradise", la soirée s'inscrivait dans une programmation de musique classique.

Une jeune femme présente la soirée : Sága est le nom d'une déesse des pays nordiques, gardienne des contes et légendes. C'est un opéra, mais il n'y aura pas de personnages ou de fil conducteur, ni une histoire qui commence et finit. En réalité, on le découvrira, il s'agit d'un concert comportant une scénographie nécessitant des costumes, mais pas d'un opéra.

Le public s'installe dans la salle –un théâtre garni de sièges moelleux disposés en plusieurs étages de balcons– et les artistes ne se font pas plus attendre pour débuter le concert.

Six musiciens entrent en scène, pieds nus, vêtus de longues jupes grises et de chemises blanches, et entament une composition épique et mélancolique. Le contrebassiste Nicolas Rombouts et l'accordéoniste Roel Van Camp (de Dez Mona) sont accompagnés de quatre membres du projet BOX : Jutta Troch à la harpe, Pieter Theuns au théorbe (sorte de grand luth italien à double manche) et au carillon à tubes, Piete Vandeveire à la viole, Tijs Delbeke au clavecin, au violon, à la guitare ainsi qu’au trombone.

Une sobre installation lumineuse compose le décor. Un rond de lumière blanche tombe à la verticale sur la tête des musiciens, créant une atmosphère monacale, climat renforcé par la grande barbe noire du contrebassiste et par l'austérité qui règne dans la salle.

Après une délicate introduction, Grégory Frateur (le chanteur de Dez Mona) fait son apparition.

Sa voix perce le vide, d'une amplitude remarquable et d'une texture inimitable. Le chant, en anglais, est expressionniste, et les gestes l'accompagnent. Frateur ressemble à un crooner,  tignasse bouclée qui retombe en banane décoiffée, le corps tout secoué à chaque inflexion.

Les ambiances rock et blues se mêlent au répertoire baroque, par le mariage audacieux des instruments issus d'univers éloignés. Le carillon à tubes (structure à laquelle sont suspendus des tubes, qui provoque une belle image lorsqu'il est frappé au marteau par la harpiste en dos nu) évoque le son des cloches, tandis qu'un tambour insuffle de la gravité aux morceaux.

Au beau milieu d'un titre, un silence est jeté, un silence très long qui suspend le public, incrédule.

La scénographie s'est métamorphosée, un champ de lumières s'est insensiblement allumé derrière les musiciens qui semblent alors flotter dans un cosmos végétal. Les loupiotes évoquent aussi des cierges disséminés dans l'espace, monastère d'un autre temps, d'une autre dimension.

En plein centre du mur frontal, une série de cercles concentriques et irréguliers se sont eux aussi allumés, tel un œil divin surveillant l'assistance ou un trou noir, c'est selon. 

Pour qui connaît Dez Mona, et l'aime pour son côté sombre, le concert tourne un peu trop dans cette ambiance féérique et paradisiaque. Grégory Frateur ne se trahit pourtant pas, on retrouve ses cris profonds et ses vibratos aigus.

C'est finalement dans le dénuement que la musique est la plus intense, lorsque le duo accordéon voix se permet une incartade. Ou lorsque les cordes (viole, violon, contrebasse, théorbe) dialoguent entre elles. Quand tout le monde chante en chœur, c'est une scène pastorale aux notes trop attendues, déjà entendues. Ca sent la rédemption, ça goûte le nuage. De même, lorsque le violoniste se met à chanter, sa voix pop a du mal à faire écho à la voix de Grégory Frateur, si pleine d'émotions.

L'assistance y est peut-être pour quelque chose dans cette trop sage atmosphère.... Ou bien sont-ce les voix qui forment un chœur harmonique et harmonieux, alors que justement, ce sont justement les dissonances et la tension à la limite de la fausse note, que l'on aime chez Dez Mona.

Le public applaudit entre chaque morceau, mais pas une tête ne bouge, pas un corps n'essaie de se balancer sur les fauteuils molletonnés (certains même se sont assoupis). On n'est pas à un concert de rock, mais tout de même.... tout cela manque un peu de ‘lâcher prise’, de spontanéité. C'est beau, mais finalement au paradis, peut être s'ennuie-t-on un peu.

Dez Mona + BOX

 

mercredi, 06 juillet 2011 20:21

Ring n’ Roll (b)

Catherine Ringer, quatre années après la mort de Fred Chichin (son compagnon sur scène et dans la vie), nous propose son album solo. Un disque en forme d'hommage et de remise en selle. Même en surmontant la disparition de son complice, difficile de se passer de celui qui assurait les compositions, figure discrète sur scène mais tout de même moitié des Rita Mitsouko ! Catherine Ringer est donc de retour. Et surtout son énergie, sa bizarrerie et sa voix incroyable, qui s'écarquille dans des aigus de diva avant de se répandre dans des graves sulfureux.

« Ring n'Roll » parcourt un vaste paysage musical, entre rock, folk, ska, punk, chanson française, musique de film ou classique, électronique, tropicale. Catherine Ringer y est accompagnée à la basse et à la guitare, au clavier ainsi qu'à la trompette, à la batterie, et par quelques petits bruitages et autres sons électroniques, flûtes et percussions.

On ne sait pas vraiment sur quel pied danser, car la personnalité décalée de la chanteuse ne rattrape pas l'inégalité des compositions. Il est difficile de ne pas comparer, de ne pas succomber au charme dépotant des clips des Rita que l'on retrouve facilement sur la toile. Comme si le mélange de ces deux personnalités électriques faisait courir les électrons, et qu'il fallait maintenant retrouver une autre voie, un nouveau circuit pour faire passer le jus.

« Pardon » donne l'impression de vouloir transmettre un message important sur la miséricorde et la culpabilité, tout en jouant la carte de l'autodérision, et laisse une impression étrange.

Les trois meilleurs titres, situés en fin de disque, donnent envie de réappuyer sur ‘play’ et de repartir pour un tour.

Le lancinant « Si un jour » est alimenté par une boucle de guitares et de vocalises, tentative d'espoir évoquant l'idée d'une renaissance. « Mahler » est un hommage assumé à Chichin, un poème chanté avec lenteur et vibrato sur l'air d'une symphonie du compositeur (Gustav Malher), soutenu par des cordes sensibles. « Rendez-vous », magnifique, clôt le disque sur un air pétillant et optimiste, à base d'accordéon, de beats électroniques et de grands éclats de voix. Le rendez-vous est donné sur un futur boulevard, voire ‘Sous une forme animale / Gazeuse ou minérale / On sera juste deux molécules / qui se ventriculent’.

Et d'ici là ? Pardon d'être si prosaïque, mais on voudrait bien encore un peu de musique !

 

mercredi, 22 juin 2011 02:00

Suppléments de mensonge

Hubert-Félix Thiéfaine, figure emblématique d’un rock engagé et marginal, vient de sortir un dernier disque aux formes plus rondes, aux inflexions plus romantiques que celles qu’on lui connaissait. A quelques exceptions près, les mélodies sont plus douces que d’aventure, et s’organisent autour d’une structure traditionnelle. Mais si le cadre est classique, le contenu dépote comme aux premiers pas de cet inclassable musicien. Ecrits en rimes et en alexandrins, les textes évoluent au sein d’une atmosphère baudelairienne. Ils abordent des thèmes comme ceux de l’amour, du voyage, de l’exotisme, des douceurs féminines, de la nostalgie et de l’enfance et recèlent de nombreuses références littéraires. La plume de Thiefaine griffe et arrache plus qu’elle ne caresse.

Les trois premiers morceaux inaugurent l’album en beauté. "La Ruelle Des Morts", ressuscite les mythes de l’enfance, les souvenirs des soirées magiques de juillet, framboises, kéfir et récits d’aventure. Ces images sont celles de Thiéfaine enfant. La ruelle des morts est le nom d’une artère de Dole, petite ville jurassienne dont l’artiste et votre serviteur sont originaires. Les allusions à Barberousse se réfèrent peut-être à la place qui porte cette appellation, et à la mystérieuse statue du cyclope qui s’y tient. "Fièvre Résurrectionnelle" est une chanson d'amour itinérante, quête irréelle d'un absolu impossible, d'amour et de liberté. Chanson langoureuse, "Trois Poèmes Pour Annabel Lee" nous renvoie à un poème d'Edgar Poe écrit à la mort d'une femme, amour d'enfance doublement défunt.

Malgré une tendance à l'adoucissement, quelques titres plus rock font cingler les guitares. Egalement plus sombres, "Garbo XW Machine " et "Lobotomie Sporting Club " révèlent une urgence angoissée, sur une rythmique endiablée.

Quelques chansons sont moins intéressantes, à l’instar des "Ombres du soir" aux inflexions débonnaires et de "Compartiment C Voiture 293 (Edward Hopper1938)" rêverie d’un romantisme un peu usé, inspiré d’un tableau représentant une femme qui lit dans un train.

Le cinquième morceau, "Petit Matin 4.10 Heure d'Eté" semble être le symbole de tout le disque. Sur une instrumentation sobre, mêlant guitare, harmonica et d'autres cordes plus légères, HFT nous confie : ‘Je n’ai plus rien à exposer dans la galerie des sentiments. Je laisse ma place aux nouveaux-nés sur le marché des morts-vivants’ ou encore ‘Je rêve tellement d'avoir été que je vais finir par tomber’. Nostalgique envers un temps perdu et désabusé face au monde à venir, Thiéfaine a choisi de brûler la chandelle par les deux bouts, de vivre dans un présent incandescent, d’en épuiser l’ivresse. Avec une sincérité impudique, cet esprit libre se livre dans ce disque, qui sera suivi de sa dernière tournée, baptisée Homo Plebis Ultimae Tour.

 

En espérant que les médias généralistes se rendent enfin compte de son existence, donnant en même temps tort à cet artiste qui a dit que ‘la meilleure façon de devenir célèbre, c'est d'être mort.

 

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