La disparition de Gelatine Turner…

Gelatine Turner, c'est un projet chanson porté par deux frères, Pierre au son et Romain au chant. Ensemble ils composent une chanson hybride entre pop et alternative. « Disparaître », c'est une marche hypnotique, un souffle qui s'emballe, une perte de repère…

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Les échos intergalactiques de Mr. Bison…

Le cinquième opus de Mr. Bison paraîtra ce 16 février. Il s’agit d’un groupe italien dont la musique vous entraîne au cœur d’un voyage prismatique qui explore les notions de liberté et de destin à travers la mythologie nordique et tisse une tapisserie sonore…

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Eric Ferrante

Eric Ferrante

jeudi, 08 août 2013 03:00

Sziget Festival 2013 : jeudi 8 août

L’invité surprise de cette édition 2013 restera indiscutablement le soleil de plomb cognant sur le site de ses 40 degrés. Une chaleur caniculaire invitant à la sieste et au farniente. Fort heureusement, l’île richement boisée nous réserve une multitude de zones d’ombres et de repos. Zones sur lesquelles les szitizens profitent de moments de pause indispensables avant d’affronter les parterres des scènes où le soleil darde sans répit ses rayons. Une solution ingénieuse avait été trouvée par les organisateurs pour lutter contre cette vague de chaleur infernale sur les deux Main Stage (pop-rock et world). Une solution consistant à tirer des tubes de refroidissement de la régie jusqu’à la scène projetant de la vapeur d’eau qui retombe sur le public pour rendre l’atmosphère plus supportable. Par contre, les chapiteaux, transformés en vivarium pendant la journée, étaient à la limite du fréquentable.

Le soir tombé, les festivaliers, passant d’un podium à l’autre, profiteront de la fraîcheur de l’île pour se perdre sur les chemins et allées sur lesquels ils croiseront des créatures et des personnages sortis d’univers improbables. Pas le temps de laisser respirer ses sens. Moment où ils tomberont nez-à-nez avec les troupes du Théâtre de Rue Géant venues d’Australie, d’Inde, de Chine, d’Europe ou d’ailleurs. Lesquelles mettront en scène des productions interactives monumentales et émouvantes. La nuit tombée, les rues d’Óbuda se transforment alors en un monde parallèle et passent dans une réalité alternative, étrange et poétique. Le monde du théâtre envahit l’espace et sublime l’ordinaire.     

Autre acteur majeur et féérique de cette vingtième édition : la lumière ! Omniprésente, celle-ci occupe 20 hectares de forêt et se transforme en art. Lampions, arbres illuminés, le Disco Park et le Freak Park éclairent la nature avec des lumières d’ambiance, des stroboscopes et des machines à fumée créant une atmosphère fantastique en plein milieu de la forêt. Le Luminarum, le Tarot Labyrinth, le Cökxpon, la rue des Lampions et les théâtres de rue offrent au Sziget une ambiance unique. Un vrai régal pour les yeux !

Démonstration en image : http://www.youtube.com/watch?v=GsL_GX1kOOw#at=67

Toute une mise en scène extraordinaire qui en ferait presque oublier l’essentiel, la musique. Témoignage de l’éclectisme du festival : nous commençons la journée par Regina Spektor et l’achevons par une séquence de clowns, après le concert de Bad Religion. 

La chanteuse américaine Regina Spektor est née à Moscou et réside à New-York. La bande sonore de « 500 Days Of Summer » lui a servi de tremplin pour se faire connaître dans le monde entier. Son engagement au sein d’organisations militant pour les droits des gays, lesbiennes ou transsexuels ainsi que sa prise de position en faveur du Tibet et sa défense de causes diverses lui confèrent forcément un statut d’artiste clairement engagée. Une licence et une aisance qui lui permettent de faire à peu près ce qu’elle veut sans perdre de son flegme. Son concert sera correct. Sans plus. Á vaincre sans péril, on triomphe sans gloire. Parfait pour sonoriser un bon repas et passer un agréable moment à table.

Dizzee Rascal nous a plongés dans un moment de folie. Son mélange de hip-hop, UK garage, R’n’B et de tout ce qu’il faut pour que le public s’abandonne corps et âme dans la chaleur ardente et étouffante, a fait sensation. Quelle ferveur ! Oubliées les températures torrides… Tout baigne dans l’huile effervescente. L’assistance vibre aux accents du chanteur londonien. Sans rien qui pose ou se soucie de l’apparence. Les festivaliers sont uniquement là pour faire la fête et le reste s’efface.

Ska-P. Qu’en est-il de Ska-P?  Existe-t-il seulement encore? Il nous en reste de vagues souvenirs adolescents. Un groupe anarchiste qui s’est battu sur tous les fronts et a vécu son heure de gloire. Et puis s’est estompé ou effacé de la mémoire. Nous ignorons tout de son succès en Europe. Une scène principale et un horaire préférentiel, celui de la plus haute audience, dans le festival sans doute le plus prestigieux d’Europe, ce n’est pas donné au commun des mortels. Leur succès, ils le doivent à l’Italie et à l’Europe Centrale. Ils y sont bien plus connus que dans leur propre pays. Quelque chose comme une version espagnole de Mireille Mathieu ou de Charles Aznavour en son temps. Il ne manquait plus que ça. Son concert m’a fait une impression étrange et paradoxale de souvenirs d’adolescence transférés au présent en un lieu improbable, hors contexte, côtoyant un public totalement étranger à ce passé. Bref, pour des festivaliers venus essentiellement participer à la fête, les moments consacrés à la parole et à la sensibilisation politique…, quel ennui ! Sans compter une pointe de provocation gratuite et du plus mauvais goût qui n’a pas manqué d’offusquer une partie de l’audience, contrairement à d’autres styles musicaux apparemment plus éclairés et plus révolutionnaires. Passons !

Même les plus âgés des ‘locaux’ ne se souviennent pas d’avoir assisté à une représentation de Rachid Taha. Serein, l’Algérien peut encore squatter dignement les planches pendant 90 minutes et livrer un concert plus que correct, soutenu, il est vrai, par un groupe qui lui épargne bien de faux pas pendant la durée du show. Armé d’un répertoire plus proche du rock que par le passé mais non exempt du raï de ses racines algériennes et méditerranéennes et d’un luthier spectaculaire, il parvient à faire danser le public sur les accents orientaux de son Rock El Casbah.

Et pour clore la soirée, Bad Religion. Un groupe de légende. La mémoire vive et vivante du punk. L’un des concerts les plus attendus de la journée. Puissant, spectaculaire, le combo a livré un concert sans fausse note et n’a pas démérité. C’était clean. Le son était parfait, la mise en scène soignée et techniquement irréprochable. Mais… est-ce vraiment ce que l’on attend d’un concert punk ? Chacun se fera son opinion.

Cependant, deux prestations ont tout naturellement attiré notre attention : le stoner rock des Anversois de Triggerfinger dont les échos ont été majoritairement positifs (un concert qui, malheureusement, se déroulait en même temps que celui de Regina Spektor) et la pop éthérée des délicieux Courtraisiens de Balthazar. Ces derniers se produisaient sous une Party Arena noire de monde où de nombreux drapeaux noir/jaune/rouge témoignaient de la présence massive de Belges sur le site. Une pop de très haute voltige, balisée par des harmonies vocales d’une limpide luminosité qui extasie le public. Tous les éléments concourent, convergent pour créer une symbiose extatique. Et la nature elle-même s’en mêle : les éclairs glissant sur la toile, mêlés, mixés à la musique et à la voix du groupe électrisent la foule. Une ambiance irréelle, sur le fil létal de la haute fréquence. Tout juste sublime : à la limite vertigineuse de l’extase, sur la ligne de clivage hautement improbable du beau et du terrible. Un grand frisson qui nous parcourt encore l’échine.  

L’île de la Liberté : un excellent tremplin pour projeter ces deux groupes sur les scènes internationales.      

(Voir aussi notre section photos ici)

 

 

 

mercredi, 07 août 2013 03:00

Sziget Festival 2013 : mercredi 7 août

Day 1.

La programmation du Sziget se veut globalement éclectique et tente de satisfaire le plus large auditoire possible. Elle ignore l’uniformité musicale et propose un éventail ample, tout le spectre visible de la musique contemporaine. Une volonté délibérée de se démarquer des festivals européens dont le line-up se marche souvent sur les pieds.

Pourtant, cette année, les grosses têtes d’affiche ne sont pas exclusives (Blur, Nick Cave & The Bad Seeds, Editors…) ou sont forts commerciales (David Guetta, Mika, Zaz…)

La programmation 2013 demeurera certainement le point faible de ce vingtième anniversaire. Une faiblesse certainement due au nombre important de groupes annoncés qui, pour diverses raisons, ne sont pas venus compléter l’affiche finale. Comparez-la avec celle de 2012, vous verrez vite la différence.

Finalement, peu importe cette vitrine, l’expérience Sziget réside moins dans ce type de détail qu’en un sentiment global de communier à un tout artistique d’exception. Organique et orgasmique, unique et indivisible. Une machinerie parfaitement huilée qui transcende chaque son, chaque image, chaque saveur et porte n’importe quel univers musical à son paroxysme, lui offre une apogée. Une organisation qui frôle la perfection.

Surprise du Sziget 2013, des températures proches de 40°C nous plombent. L’ombre est prisée par les festivaliers, surtout vers 16h00, moment auquel débutent les concerts. Il faudra souffrir pour apprécier le beau. Cette année, plus que jamais, pour rejoindre le ciel de l’Art, ce sera à la sueur de notre front.

C’est par Skunk Anansie que s’ouvre le Sziget. Une véritable débauche d’énergie à laquelle s’est livrée sans compter sa chanteuse fétiche Skin dans un mouvement perpétuel envahissant la scène, le tout amplifié encore par un haut-parleur haut-perché et vrombissant permettant au public de la capter sans qu’elle ne cesse de chanter. Bien que le groupe ne traverse pas son meilleur moment de popularité, il conserve néanmoins la puissance et les crocs qui lui permettent de livrer un set des plus appétissants.

Dans la foulée, sur la Scène World Music, se produit le combo espagnol de la journée, La Pegatina (énième formation intégrée dans ce que l’on a appelé le ‘Barcelona Sound’, un mouvement qui a tant inspiré Manu Chao, Macaco, Muchachito, El Tío Carlos et bien d’autres…) Pendant sa prestation, l’île se transmute littéralement en un une immense place de village bigarrée où un public déchaîné danse à la folie sur cette étrange mixture d’airs à la fois propres et étrangers que leur offre le groupe catalan. Si le seul objectif que s’était fixé le band, c’était de régaler l’assistance d’un bon moment, on peut dire que la mission a été accomplie avec brio et au-delà des espérances.   

Changement de podium pour le show de Flogging Molly, un groupe qui combine punk et musique celtique. Scène A38 archicomble. Au cours de la production, on peut voir voler des objets aussi hétéroclites qu’inattendus : souliers, récipients et contenu de bière ou de vodka. Entre autres. Sziget prouve que le punk is not dead ; mais nous verrons bien, la nuit prochaine, si Bad Religion le confirme.

Et pour finir en beauté, place à la prestation du jour et du festival : Nick Cave and The Bad Seeds. Reproduisant un répertoire pratiquement identique depuis le début de cette tournée, il réussit la performance de rendre littéralement fous les spectateurs par sa seule présence. Cette fois, l’approche du public produit un effet érotique moins intense qu’à Barcelone ou à Werchter, mais plus soutenu et continu, déchaînant l’hystérie des premiers rangs. Curieux de constater que les chœurs des aficionados en front de scène, reprennent plus souvent les chansons de son dernier disque que des grands succès tels que « Tupelo », « The Mercy Seat », « Into My Arms » ou encore « From Her To Eternity ». Mais, comme je l’ai déjà évoqué précédemment, la logique hongroise diffère manifestement de celle du reste de l’humanité. Cerise sur le gâteau, le généreux Nick va nous régaler d’une double portion de « We Real Cool », en bissant le morceau.

‘Il ne suffit pas d’avoir du talent, encore faut-il être Hongrois’ (Robert Capa)

(Voir aussi notre section photos ici)

 

 

 

mardi, 06 août 2013 03:00

Sziget Festival 2013 : mardi 6 août

Károly Gerendai, cofondateur du Sziget, nous confie, une pointe de nostalgie dans la voix, ses ambitions pour la vingtième édition du désormais célèbre festival hongrois : ‘Il y a 20 ans, nous formions un groupe de jeunes enthousiastes ayant envie d’une semaine non-stop de fun, ensemble dans un endroit où tout est possible et rien n’est obligatoire. C’est ainsi que l’île de la Liberté est née, en 1993. Cette année nous aimerions accentuer ces souhaits et libérer l’imagination de nos festivaliers plus que jamais’. Un projet qui marque une intime volonté de se ressourcer dans le passé pour saisir le présent et s’ouvrir à la modernité, de préserver le souffle, si libertaire et dru, des origines et le canaliser vers les Arts contemporains… Un vent d’anarchie qui ne serait pas révolu et suivrait les courants incessants du Danube pour vivifier tous les méandres et embrasser toutes les cultures. Une belle utopie qui se matérialise et à laquelle communient plus de 362 000 festivaliers (szitizens) affluant de 69 pays différents (outre d’Europe, ils nous viennent d’Australie, d’Argentine, d’Aruba, du Bahreïn, d’Ethiopie, de Gambie, d’Inde, du Kenya, du Mali, du Pakistan, de Singapour, d’Afrique du Sud, d’Uruguay…). Cet Island of Freedom, ‘endroit où tout est possible et rien n’est obligatoire’, prend corps sur la magnifique île d’Óbuda, située au centre de Budapest. 78 hectares de pur bonheur où les musiques du monde se croisent et s’entrecroisent, se jettent vers l’estuaire mouvant d’une pléthore d’activités culturelles issues de tous les horizons : arts de la scène (danse, théâtre, cirque…), arts graphiques (peinture, sculpture, photo…), architecture… Une organisation titanesque qui s’articule autour de 50 scènes sur lesquelles vont se dérouler plus de 400 concerts à raison de 12 heures de live quotidien et accueillir 200 spectacles pendant une semaine. Le Sziget n’est pas seulement un événement musical, c’est également un rassemblement d’artistes venus du monde entier. Un voyage culturel unique qui a d’ailleurs été élu Meilleur Grand Festival d’Europe par les prestigieux European Festival Awards, en 2012. Et c’est franchement pas volé !

Un statut légitime que les organisateurs devaient confirmer pour fêter dignement le 20ème anniversaire du plus grand festival ‘open air’ d’Europe. Ainsi, l’édition 2013 s’est parée encore de plusieurs nouveautés inédites et originales et a acquis le statut officiel d’île de la Liberté. Une organisation qui a décidé d’accentuer encore cette notion originelle de liberté tant sur le plan artistique qu’individuel. Le nouveau concept du Sziget 2013 est une redéfinition de ces souhaits originaux : l’île de la Liberté est née, elle devient une république le temps d’une semaine, imposant ses propres règles et arborant son propre drapeau. D’ailleurs, dès son arrivée, chaque visiteur reçoit la copie exacte d’un vrai passeport faisant de lui un authentique ‘Szitizen Of The Island Of Freedom’. Un document précieux comprenant toutes les informations permettant à chaque festivalier de passer un excellent séjour (line up, plan, activités, animations, soirées…) Une fois complété et estampillé au Sziget Immigration Office, on vous remet une Sziget Green Card faisant de vous un membre officiel de l’île de la Liberté (une opération totalement symbolique et facultative). Plus que jamais, cette année, la nouvelle République indépendante constitue une expérience multiculturelle qui met l’accent sur la défense des droits de l’Homme et la justice sociale. Un objectif commun : ‘L’île de la Liberté est une république démocratique sans leader où chaque membre, aborigène ou immigrant, a les mêmes droits et les mêmes devoirs’.

Alors que les discriminations ne cessent de grandir et frappent, chaque jour, de plus en plus fort à nos portes, deux podiums présents sur le site sont à saluer :

La ‘Yenki Raki Roma Tent’ existe depuis 11 ans et reste certainement l’une des scènes les plus festives et les plus conviviales. Lieu incontournable du festival, cet espace pluriculturel fait danser, s’enlacer et suer des dizaines de nationalités différentes sur les plus belles musiques tziganes jusqu’au bout de la nuit. Bras dessus, bras dessous, la foule fait corps et se laisse emporter, comme un seul homme, dans un voyage exceptionnel aux rythmes envoûtants de ce monde magique de la culture gitane venus des quatre coins de l’Europe (Lituanie, France, Bulgarie, Espagne, Roumanie, Pologne, Serbie, Pays-Bas…) Un espace exceptionnel totalement réservé aux musiques tziganes dont le sol ne s’arrête jamais de vibrer et transcende âme et corps. Une expérience et un moment de fraternité uniques. Ici encore, les Szitizens nous confirment que l’événement est plus qu’un festival : un véritable concentré de cultures !

Intolérance zéro ! Alors que l’homophobie fait rage dans de trop nombreux pays du monde, l’espace ‘Magic Mirror’ nous offre sans complexe un bel éventail de la culture gay et lesbienne européenne. Au programme : cabarets, débats, projections de la Berlinale, films du festival international de Berlin, talk-shows thématiques, soirées disco-funky-beat et spectacles de danse jusqu’au petit matin. Le lieu le plus gay et le plus haut en couleurs du Sziget !

Il est évidemment impossible de décrire chaque endroit tant la diversité des activités proposées est importante. Soulignons toutefois quelques dernières initiatives intéressantes comme la présence de nombreuses ONG, le Sziget Civil, traitant de façon ludique et informative des thèmes majeurs tels l’écologie, la santé, la prévention drogue ou SIDA, l’HANDIPARC, parc d’aventure interactif. Un environnement ludique ouvert à tous contribuant à faire évoluer l'attitude sociale des gens à travers des expériences qui font appel à l'odorat, à l'ouïe et au toucher... Et, finalement, le ‘Culture Zone’, un cadre extraordinaire pour la scène polyvalente, la Fête Foraine d’Europe de l'Est, le Quartier des Musées, le Labyrinthe, le Parc de Lecture, les installations ‘Bonjour le Bois’ et le workshop beaux-arts de l'Agora. On rencontre ici du théâtre contemporain, de la danse contemporaine, des projets d'art appliqué, du design, de la musique classique, du jazz de nuit, du slam, du stand-up, des acrobates, des jongleurs, mais aussi des stages de recycling design, des tables rondes, des workshops, des flashmobs, du yoga, du tai-chi, des ateliers de massage… Une zone qui va occuper sans relâche les journées et les nuits des festivaliers hyperactifs.

Parmi les nouveautés majeures, les organisateurs ont également fait la part belle à l’univers magique du cirque, du théâtre et de la lumière, l’un des grands acteurs de cette dernière édition. Sans oublier l’aménagement d’une plage artificielle installée sur les rives du Danube.  

Le monde du cirque est l’invité d’honneur de la vingtième édition du Sziget Festival. Onirisme et poésie sont les hôtes quotidiens de la Cirque Sziget, une nouvelle scène spécialement dédiée à la fine fleur des saltimbanques.

Ainsi, on pourra se régaler les sens, en avant-première, sur ‘Recirquel’, la dernière création époustouflante de Vági Bence qui met en scène une troupe exceptionnelle dont les acteurs principaux sont issus du célèbre Cirque du Soleil. Un spectacle à vous couper le souffle qui s’amuse à mixer les atmosphères uniques des théâtres ambulants typiques des représentations de la fin du XIXème siècle à l’aide d’une musique et une mise en scène résolument modernes. Ajoutez-y le talent de la costumière Kasza Emese qui réinvente avec bonheur l’imaginaire rêveur de Tim Burton et le spectateur est emporté pour un long moment de pure poésie en mouvement. Extrait : http://www.youtube.com/watch?v=ExRC7BPeRzk

Outre ces représentations exceptionnelles, le nouvel espace mêle structure hors-normes, haute-voltige, acrobaties et trapèze : https://www.youtube.com/watch?v=ccNFxsd467E

Day 0

Un jour avant l’ouverture officielle du festival, la mécanique infernale du Sziget est finement rôdée pour accueillir les premiers festivaliers. Et quel accueil !

Dès l'entrée du pont-K, et jusqu'à la Main Stage, les visiteurs sont plongés dans le monde fantastique de Lewis Carroll. En immersion totale dans le pays des merveilles du Sziget, ils sont invités à louvoyer entre cirque, acrobaties, théâtre visuel, littérature, concerts acoustiques, musiques du monde, danses folkloriques et poésie avant de rejoindre la Main Stage où les attend leur premier rendez-vous musical. Une première journée spécialement dédiée à la musique hongroise et, principalement, aux deux groupes nationaux cultes : Quimby et Muzsikás.

Après la thématique Carroll, la première performance scénique se déroule sur la Pop-Rock Main Stage et met en exergue les stars du rock alternatif hongrois. Quimby, les Noir Désir locaux (NDR : comparaison reposant sans doute sur la légère ressemblance physique des deux chanteurs), accompagnés d’un combo de cuivres et de deux danseuses à tutu rouge, vont transmettre effectivement une énergie digne d’une fanfare affolée dont, personnellement, je ne possède pas tous les codes.

Par contre, la musique traditionnelle magyare de Muzsikás qui résonne plus tard sur la World Music Main Stage surprend l’ouïe dès les premières notes et vous plonge spontanément dans les contrées d’Europe centrale. Célébrant les 40 ans d’existence du groupe en signe de bienvenue ce concert d’ouverture invite l’âme au voyage et nous oriente, nous aimante vers le cœur même de la Hongrie. En effet, Muzsikás est soutenu par des virtuoses tels Alexander Balanescu au violon ou le groupe Amadinda aux percussions, mais aussi de musiciens et de chanteurs amateurs originaires de petits villages indigènes qui insufflent une authenticité touchante aux mélodies colorées. Soulignons également la générosité du groupe rock américain Wovenhand venu tout droit des Etats-Unis souffler la chansonnette et les 40 bougies de ce groupe légendaire hongrois.

Ce premier bref aperçu est une parfaite indication de ce qui nous attend pendant cinq jours consécutifs. Aussi nous vous donnons d’ores et déjà rendez-vous demain pour l’ouverture officielle du vingtième anniversaire du Sziget qui s’annonce totalement déjanté…

 (Voir aussi notre section photos ici)

L’espace réservé par la programmation des Nuits Botanique aux musiques alternatives et expérimentales n’a pas fait défaut ce samedi soir au Cirque Royal. Ainsi, sous les projecteurs du Cirque, le producteur allemand Sascha Ring alias Apparat –l’un des piliers du milieu électro berlinois– y présentait son dernier projet « Krieg und Frieden (Music for Theatre) », la bande-son surprenante de la récente pièce de théâtre de Sebastian Hartmann inspirée par le chef-d’œuvre de Tolstoï, Guerre et Paix. Une soirée sono-visuelle à laquelle étaient également conviées les nouvelles « Images Du Futur » de l’excellent groupe canadien Suuns qui nous livrait son nouveau matériau sonore sorti le 5 mars dernier, sous le label Secretly Canadian. Autre invité de marque, le trois-pièces français Aufgang dont l’électro-baroque-expérimental peu conventionnel conjugue ingénieusement musique classique et électronique pour des shows généralement explosifs.

Il fallait, comme il se doit, une ambiance feutrée, une scène plongée dans l’obscurité et un décor dépouillé pour accueillir les mélodies alambiquées des Canadiens de Suuns. Sans détour, le quatuor de Montréal nous plonge dans les profondeurs viscérales de sa dernière exploration. Hormis les manœuvres dynamiques de « Powers of Ten », les morceaux se veulent globalement moins rageurs, moins bruts, moins immédiats que par le passé. Les orages magnétiques de « Bambi » sont sous contrôle et laissent moins de place à l’improvisation.

Ne prenez pas peur. Les morceaux restent néanmoins toujours infectés par cet esprit sombre, vicieux et contrarié. Ils sont simplement plus travaillés, mieux calculés, plus pensés. Une maîtrise live que l’on peut distinctement entendre sur « 2020 », « Mirror Mirror » ou « Sunspot ».

Les Montréalais pyromanes continuent férocement à jouer avec nos nerfs et enchainent les chansons branlantes et psychotropes, minimales et obsédantes. Chantés la mâchoire crispée, les murmures mélodieux et angoissés de Ben Shemie plongent l’auditoire dans un monde parallèle et intriguant. Un concert cathartique aux couleurs du monde contemporain instable dont il est le reflet. Chansons du désordre qui illustrent leur engagement physique et intellectuel lors des manifestations qui se sont déroulées l’année dernière à Montréal. Une musique qui s’inscrit résolument dans son époque. Le résultat final est profond de sens, d’équilibre et de déséquilibre, tant dans l’écriture et le son que dans la vision créatrice. Des « Images Du Futur » écrites dans ‘le climat enthousiaste et excité, d’espoir et de frustration’ d’un Québec au bord de la crise de nerfs. 

Partisans actifs aux manifestations des étudiants québécois en 2012 et survivants d’une tournée interminable consécutive à la sortie de « Zeroes QC », accomplie en 2011, Ben Shemie et Joe Jarmush semblent pourtant, par moments, manquer de souffle sur scène. En effet, certains titres comme « Minor Work » enthousiasment moins et montrent quelques signes de lassitude. Petits détails pour une grande prestation de Suuns sur les planches du Cirque Royal.     

La suite du programme risque de surprendre davantage, d’assommer ou de passionner. C’est selon. Quoi qu’il en soit, l’expérience inédite d’Apparat reste impressionnante.

C’est après s’être évadé d’une vieille usine berlinoise abandonnée où il a enregistré les dix pistes de « Krieg und Frieden » durant plus de quatre semaines, en compagnie d’un orchestre de 30 musiciens, que Sascha Ring décide d’arpenter les routes pour exposer son nouveau projet atypique sur les scènes internationales.

Une exclusivité dénichée par les programmateurs des Nuits Botanique censée ravir les oreilles des amoureux de musique expérimentale avant qu’elle ne tombe entre les mains des plus gros festivals européens (Brighton, ‘Primavera Sound de Barcelone’, etc.)

Grand nom de la scène musicale berlinoise, créateur de dreamscapes, Sascha Ring aka Apparat aime tisser des textures et peindre des paysages sonores étourdissants. Il a le talent pour conjuguer son et image et se plaît à créer des univers multiformes capables d’explorer les sens et les émotions. La création d’une bande-son pour le théâtre n’est d’ailleurs pas un exercice qui lui est totalement étranger. Au cinéma, il s’était déjà livré à ce type d’exercice expérimental lors du dernier long-métrage de Jacques Audiard (« De rouille et d’os ») ou encore pour la série Breaking Bad.

Les planches du Cirque Royal tombaient comme une évidence pour faire place aux frasques audiovisuelles du génie allemand. Un écran géant comme seul décor et cinq artistes sur le podium. Côté jardin, trois musiciens. Côté cour, deux magiciens de l’image aux techniques peu conventionnelles. Tandis que le jardin se lance dans des airs de cordes (violon, violoncelle) lugubres voilés de couches de musique électronique, les deux vidéastes projettent en direct des images en totale synchronisation avec le son. Une technique particulière qui consiste à passer des filtres (ou autre matériau) avec une dextérité impressionnante sous un faisceau lumineux à une vitesse proportionnelle au rythme de la musique. Un fond d’écran qui s’anime de taches noires et d’éléments figuratifs abstraits à la vitesse du son. Plus les couches électroniques se superposent, plus les cordes montent crescendo et plus l’écran s’anime jusqu’au bourdonnement final et anxiogène de « Blank Page » où l’image s’efface. C’est que   lumière et son s’allient et se consolent, se taisent ou bien s’éteignent, signant, dans cet accord obscur, la fin de ce voyage en terre inconnue. 

Bref, un phénomène inexplicable. Plus facile à saisir au cœur battant de la présence, à éprouver en cet instant de grâce fugitif que nous offre la scène. Les mots nous font défaut pour le décrire. Seul le silence fait sens et transmet le vrai son. 

Eric Ferrante

Apparat + Suuns + Aufgang

(Organisation Botanique)     

mercredi, 08 mai 2013 03:00

Nuits Botanique 2013 : mercredi 8 mai

C’est dans l’enceinte du Cirque Royal que les organisateurs des Nuits Botanique ont décidé d’accueillir les Américains de Low, les Suédois de Junip et le Britannique Barbarossa. Une configuration réduite au strict minimum où les loges étaient murées d’une toile sillonnée de lumières en boucle aux faisceaux subtilement psychédéliques. 

Face à un parterre silencieux et singulièrement discret (50 personnes tout au plus), James Mathé, seul sur scène, caché derrière sa barbe rousse, retrousse les manches de sa marinière avant de lancer ses séquences électro conçues pour habiller ses textes pop-folk sombres et délicats. Un univers atmosphérique où la voix majestueuse du songwriter londonien s’aventure davantage sur des airs électroniques que par le passé. Venu présenter son Ep « Butterfly Plague », sorti en 2012, Barbarossa nous offre une belle entrée en matière pop-folk juste avant d’accueillir les Suédois de Junip.

Les quelques minutes qui suivent la fin du set de Barbarossa nous font comprendre, sans l’ombre d’un doute, qu’une grosse partie du public s’est déplacée pour écouter la folktronica du sextet scandinave. Les corps se glissent en masse dans les couloirs du Cirque, la rumeur enfle autour du dernier album éponyme « Junip ». Les noms de Barbarossa et Low se fondent plutôt dans le silence. Je m’incline, je souscris à l’évidence : la véritable tête d’affiche du soir, c’est incontestablement Junip.

Il a fallu près d’une décennie avant que le premier long playing de Junip ne soit enfin publié. Victime du succès planétaire rencontré par José Gonzales, leader incontournable du groupe, le trio suédois végétait dans un demi-sommeil rêveur jusqu’en 2010. Comme à la poursuite d’un songe d’adolescent, les trois amis d’enfance guettaient inlassablement l’instant. L’instant du premier Opus. Cet instant symbiotique convoité depuis 1998. Cet instant incessamment différé par la célébrité grandissante de l’enfant prodigue. Laissés dans l’expectative, Elias Araya (drums) et Tobias Winterkorn (claviériste) ont observé sans ciller l’ascension fulgurante du trinôme. C’est alors que José Gonzales décide subitement d’abandonner sa guitare aux cordes d’acier noueuses pour rejoindre fidèlement ses deux autres tiers. Il reprend enfin son souffle et se consacre sereinement à son projet initial : Junip. Jouer en équipe l’inspire subtilement et le résultat est stupéfiant : ‘Nous ne sommes ni les meilleurs ingénieurs du son, ni les meilleurs musiciens, mais nous savons enfin ce que nous aimons’. Dix ans de patience et de frustrations récompensés par « The Fields » : une curiosité folk-pop-électro addictive sortie en 2010. Transcendé par le succès de cet elpee, le trois-pièces issu de Göteborg repousse encore les frontières expérimentales et s’enrichit de trois nouveaux membres pour sortir un deuxième album éponyme, en 2013.  

L’architecture minutieuse du deuxième album achevée et déjà remarquée par la presse, Junip peut à présent user de ses mélodies pour fouler sereinement toutes les scènes internationales. Celles présentées ce mardi au Cirque Royal ont encore surpris d’une setlist hétéroclite oscillant du calme au rugissement, de la simplicité au désordre chaotique. Un patchwork étoupé d’une voix de chaman millénaire, de paroles férocement poétiques et de sons délibérément rugueux revêtant les lieux d’une étoffe au grain flou, mélodique et hypnotique. Un mélange séduisant et capiteux qui nous plongerait dans les univers peu conventionnels du folk-jazz de John Martin ou de la soul psychédélique de Richie Havens ; le tout parfumé d’arrangements électroniques. Bref, une capsule d’oxygène gonflée de folk, de pop, offrant un nouveau souffle à un registre pop-folk trop souvent répétitif.

Le sextet suédois surprend d’un concert rigoureusement équilibré et cohérent doté d’une mécanique mélodique de haute précision. Un set composé de chansons riches d’influences, sans texture ostentatoire, sans variation dynamique inutile, sans accord superflu qui s’ouvre sur les champs crépusculaires de « Line On Fire ». Bref, un concert fidèle au dicton : ‘Less is more’.

Çà et là, la chaleur des claviers de Winterkorn, les rythmes subtilement insistants d’Araya, la voix paisible et le lyrisme énigmatique de Gonzales tissent d’heureuses, de délicieuses mélancolies construites de sons analogiques. De Moog sur « Your Life Your Call ». Paroles et mélodies oscillent entre chaos et renaissance, entre vie et mort. Des morceaux qui tantôt s’irradient des origines argentines de José Gonzales et tantôt se perdent dans les nuits vaporeuses de sa Suède adoptive. 

Junip sonne comme un vrai groupe. Un sextet solide aux éléments complémentaires qui ne devrait pas faire regretter à José Gonzales son retour sur la ‘Junipsphere’. Une nouvelle expérience qui étoffe incontestablement son répertoire et résonne comme une renaissance artistique. Heureux aboutissement de ses efforts passés.

Pourtant, la plus grande faiblesse du band réside précisément dans cette belle régularité. Les plages qui ont admirablement fonctionné sur « The Fields » marchent tout aussi bien sur le dernier elpee. Malgré la mise en retrait relative de José Gonzales, quand on songe aux réalisations précédentes, le charme à combustion lente des nouveaux titres pourrait se décrypter comme un pas saisissant vers des covers des premiers morceaux de la formule solo du chanteur. Outre quelques expérimentations originales, les fans du groupe noteront cependant une faible progression par rapport au matériel sonore précédent. Ainsi, de nombreuses nouvelles compos se présentent davantage comme de belles musiques de fond.  Sans rien vouloir ôter au talent indéniable des six musiciens, à la qualité artistique du deuxième opus et à la performance scénique, il serait temps que Junip sorte de ce ghetto doré et par trop confortable de son succès planétaire et ose de nouveaux horizons musicaux. 

L’indie rock de Low avait pour mission de clôturer une soirée aux couleurs folk jusque-là  bien tranquilles. Il ne fallait certainement pas compter sur le slowcore étasunien pour affoler les décibels et secouer les esprits du public. Ils n’étaient d’ailleurs pas venus dans cette optique, mais plutôt pour présenter leur dixième album, « The Invisible Way », sorti le 18 mars dernier sous le label Sub Pop et produit par Jeff Tweedy de Wilco.

Vingt ans de carrière, dix albums studio et rien de neuf sur la planète Low. Seule révolution, la production de Jeff Tweedy. Une ligne artistique qui déteint sur les planches et éloigne les musiciens de leur magie d’Antan. Une production qui se borne à lever le pied sur la reverb’. Un parti-pris dépouillé qui retourne aux racines, mais ne pardonne rien.

Très vite, « Just Make It Stop » nous embarque dans une ballade pop-folk mid-tempo et c’est tout le magnétisme fragile du groupe de Duluth (Minnesota) qui s’envole. Pire, même les harmonies vocales d’Alan Sparhawk (chant/guitare) et Mimi Parker (chant/batterie) sonnent plat. Les paroles mornes, les mélodies pessimistes, les tempos lents et l’inquiétude lancinante plongent la salle dans une profonde léthargie où l’ennui règne en silence. Seuls quelques mouvements de gratte énervée viennent agiter les cris d’une poignée d’aficionados.

Trop de titres faibles viennent habiter l’espace, un atmosphérique trop atmosphérique, le plombant. « To Our Knees » se déguste sans mal, « So Blue », « Holy Ghost » ou « Four Score » nous proposent des mélodies sans génie qui tournent rapidement en rond. Un changement de cap artistique qui ne fonctionne pas et s’éloigne des prestations scéniques habituelles. Malheureusement, le parti pris dépouillé ne pardonne pas ici. Et condamne ce concert à une prestation mineure. Une prise de risque tout en leur honneur qui n’a pourtant pas rencontré un vif succès sur scène.

Soulignons, finalement, la synchronisation entre la structure sonore et le visuel projeté en fond d’écran. Un fond visuel N/B qui tente de renforcer les mélodies atmosphériques. Une photographie austère qui fusionne assez ingénieusement avec le son. Quelques belles vues du ciel qui reposent un instant les oreilles et nous permettent d’ouvrir les yeux. Une projection qui a eu le mérite de rendre le temps un peu moins long. 

Eric Ferrante  

Low + Junip + Barbarossa

(Organisation Botanique)                                                                                             

 

vendredi, 10 mai 2013 20:31

I Awake

« I Awake » constitue le quatrième album studio de Sarah Blasko. Un douze titres dont l’auteure-compositrice-interprète australienne a voulu assurer toute la production. Douze mélodies (trop) soignées qui ont traversé les mers avant d’atterrir dans nos bacs. Pensé en Australie, écrit dans un chalet solitaire à Brighton, enregistré aux Atlantic Studios de Stockholm et parachevé à Sofia en compagnie des 52 musiciens du Nouvel Orchestre Symphonique de Bulgarie, cet album nous livre un voyage introspectif, à la fois mièvre et insipide, sillonné de mélodies d’une triste banalité. Alors qu’une certaine presse anglo-saxonne s’affole et que Blasko elle-même qualifie son dernier opus de ‘géant’, le géant aux pieds d’argile s’écroule rapidement dès la première écoute. Morceaux faciles sans réelle créativité. Musique pop symphonique mille fois entendue.

Seuls le martellement des toms, les vagues de cordes et les paroles insistantes du refrain du morceau d’ouverture où la chanteuse s’écrie ‘I’m going out’ (NDR : un moment de lucidité ?!) allument un faible et fugitif espoir d’échapper aux nuits noires de Sarah.

Ou en plus synthétique : une belle voix et un bel orchestre. Point. Fermez la parenthèse.

Pourtant, pour concocter « I Awake », Sarah Blasko n’a rien laissé au hasard. Enregistrée aux Atlantic Studios de Stockholm, cette galette hautement soporifique devrait faire le bonheur de tout insomniaque. Stratégie machiavélique de l’artiste ? Peut-être. Car les vertus exceptionnelles du produit ne devraient pas passer inaperçues auprès des membres de la prestigieuse Académie royale des Sciences de Suède lors de la désignation du prochain prix Nobel de médecine. Selon la rumeur, ce puissant somnifère, dont l’innocuité est absolue et avérée, aurait été découvert par les éminents spécialistes du comité lors de l’écoute de « Here » et « Illusory Light ». Plus efficace que l’Assommoir de Zola ou l’Ennui de Moravia, « I Awake » de Blasko pourrait se voir également récompensé du Nobel de littérature. Affaire à suivre.

« I awake », un album narcoleptique qui aurait pu rester encore quelques années dans un sommeil profond.

 

jeudi, 02 mai 2013 18:02

Sudden Elevation

Comment expliquer la pluralité artistique des musiciens islandais sur la scène internationale ? La réponse est simple : placer la culture au centre du débat politique. C’est un pays pourtant  où, avant que n’éclate la bulle financière de 2007, soufflaient des vents drus de folie et des rêves de démesure soulevés par les ‘Vikings de la Finance’ aux dents longues, à l’âme exsangue. Alors sévissaient au Nord du Monde la soif inextinguible de l’or, la fièvre consumériste et l’aliénation spéculative. Avant le crash final inévitable (2008). Le bel édifice bancaire reposait sur des sables mouvants qui l’ont englouti et le pays a sombré brusquement dans la faillite. Le peuple a alors repris les choses en main et chassé les mirages. Ainsi, à l’austérité, l’Islande a préféré une politique de ‘New Deal’ artistique qui a fait de la culture le deuxième moteur de la croissance du pays, rapportant près d'1 milliard d’euros par an. La culture représente ainsi près de 20% du PIB national. Un pays qui démontre qu’il peut exister une vie en dehors des banques. 

Ólöf Arnalds tient une place importante dans le paysage musical islandais, au sein de cette effervescence et mouvance artistique. Depuis une dizaine d'années, l’enfant du pays s’illustre effectivement dans plusieurs projets collectifs. Membre sur scène de Mùm, elle a également travaillé en compagnie du bassiste Skulli Sverrisson. En 2010, sur son disque précédent, la multi-instrumentiste a d'ailleurs signé duo remarqué auprès de Björk, pour publier "Surrender", taillé sur mesure pour leur voix d'exception.

Le troisième album, « Sudden Elevation », n’est donc pas le produit d’une inconnue. Ce dernier essai folk enregistré dans son Islande natale, chanté totalement en anglais, capture un talent de songwriting rare et singulier. Un air désinvolte qui sillonne toutes les pistes d’un album réinventant des peines de cœur magiques, éclatées et irréelles. Un son aux harmonies complexes et calmement électriques qui étanche la soif de création sonore de l’artiste et témoigne de sa prédilection pour l’expérimentation sonique. Un ‘12 titres’ proposant une série de morceaux courts, acoustiques, tout en intériorité. Une instrumentation mise au service de la voix ondulante d’Ólöf Arnalds qui flirte incestueusement avec celle de ses ainées Stina Nordenstam et Anja Garbarek.

Malgré une production trop sage, Sudden Elevation nous réserve pourtant quelques moments d'exception et emporte l'auditeur vers des territoires inconnus. Ainsi, « Call It What You Want » s’énerve, choque, captive et s’élève aussitôt vers les univers uniques de Joanna Newson ou Karen Dalton. Une voix singulière dont on joue comme d’un instrument supplémentaire qui sonnerait comme une caisse claire. « Return Again », plus représentatif, est une ballade fragile, presque friable, bercée d’une voix paradoxale, angélique et malicieuse, d’arpèges de guitare et de notes de piano graciles et rêveuses et de la folie douce de sa propre mélodie. « Little Grim » s'envole, prenant, in fine, l'allure d'une chorale improbable. « Numbers and Names » se construit comme un étonnant jeu de voix en écho. Le morceau titre évoque même le Nick Drake de Pink Moon, guitare au plus proche de la mélodie, l'émotion à nu. A lui seul il mérite notre attention.

Produit par son fidèle collaborateur Skúli Sverrisson dans les profondeurs obscures d’une cabane en bord de mer à Hvalfjörður (littéralement le fjord de la baleine) durant l’automne 2011, « Sudden Elevation » s’enivre d’une âme féérique et profondément scandinave.   

Il y a deux ans, la chanteuse islandaise nous l’expliquait : ‘Depuis l’adolescence, je joue pour les mariages, les enterrements. J’aime ce rôle communautaire : jouer pour la famille, être avec les gens quand ils ont des choses à célébrer.’ Invitation lancée pour venir arpenter les chemins du Botanique où l’artiste viendra rejoindre les 142 noms à l’affiche de l’édition 2013 des Nuits Botanique. Une célébration qui aura lieu sous le chapiteau du jardin botanique ce lundi 13 mai prochain. Lévitation assurée.

L’un des événements musicaux de l’année 2013 nous est livré par Drew McConnell, bassiste de Babyshambles, lors de l’un de ses entretiens avec la presse britannique. Ce dernier aurait annoncé que l’enregistrement du deuxième album solo de Peter Doherty aurait subi un changement radical et prendrait la forme du troisième long playing des Babyshambles. Une information confirmée par le chanteur et sa maison de disque, Parlophone.

Peter Doherty aurait d’ailleurs commencé à tailler le nouveau produit avec le producteur Stephen Street (The Smith, Blur…) qui avait déjà assuré la production de Shotters Nation, le dernier album du groupe sorti en 2007.

Après le départ forcé du batteur Adam Ficek et le recrutement de Jamie Morrison (Stereophonics), Babyshambles continuera l’enregistrement de ce dernier opus avec un line up légèrement modifié : Peter Doherty (chant/guitare), Drew McConnell (basse), Stephen Large (claviers), Jamie Morrison (batterie), Mik Withnall (guitare) et John Robinson à l’écriture (auteur-compositeur du morceau « I Am The Rain » sur le deuxième album solo de Doherty, « Grace/Wastelands », paru en 2009.

Un enregistrement commencé début de cette année qui navette entre le studio Assault And Battery de Londres et Paris, lieu de résidence du chanteur, qui devrait se matérialiser fin 2013. Une tournée franco-britannique serait déjà programmée pour les mois de septembre et octobre. Ainsi, Peter Doherty et ses camarades de jeu devraient planter leurs guitares sur les planches du Zénith de Paris le 3 octobre prochain pour un concert événement (mise en vente des billets le vendredi 3 mai dès 10 heures.) Gardez en mémoire qu’avec l’enfant gâté du rock britannique il faut toujours utiliser le conditionnel !

Quant à la folie créative du leader charismatique du groupe et sa nouvelle marque de fabrique, la réponse nous est fournie lors d’un mini concert ultra privé donné dans un bar du neuvième arrondissement de Paris (Le Fontania). Le set nous offre un nouveau titre, « Dr No, » qui  circule déjà sur la toile : http://youtu.be/IR9y2iEM5Ys

Maintenant, à vous de juger !

 

        NPR - National Public Radio (radio US non commerciale) propose l’écoute intégrale du nouvel album de Deerhunter quinze jours avant sa sortie chez 4AD.

        Le cinquième long-playing de Deerhunter, Monomania, s'écoute en intégralité ici

Tracklist:

Neon Junkyard
Leather Jacket II
The Missing
Pensacola
Dream Captain
Blue Agent
T.H.M.
Sleepwalking
Back To The Middle

Monomania
Nitebike
Punk (La Vie Antérieure)

mardi, 09 avril 2013 21:02

Orange Syringe

Tom Morgan nous livre une très belle surprise ; un deuxième album qu’il a intitulé joliment « Orange Seringue ». Soulignons, au passage, l’élégant artwork qui habille la plaquette (Orange dominant, évidemment !)

Souvent resté dans l’ombre, Tom Morgan n’en est pas moins un compositeur et un songwriter de talent. Ancien frontman du groupe indie pop Smudge, le musicien australien a été surtout reconnu pour l’intelligence de ses textes et la qualité d’écriture qui ont largement contribué au succès du célèbre groupe power pop de Boston : The Lemonheads. Une coopération auprès d’Evan Dando particulièrement fructueuses sur les excellents « It's a Shame About Ray » et « Come On Feel the Lemonheads ». L’auteur-compositeur-interprète australien est aussi responsable de nombreuses collaborations. Apportées notamment à Sneeze, The Givegoods, Godstar, Tofu Kok et Bambino Koresh.

Ce touche-à-tout multiplie les genres musicaux et, paradoxalement, au terme de ce périple sonore, il s’engouffre au sein d’un album pop-folk plutôt conventionnel. Un dix titres dont la qualité repose principalement sur le songwriting et la voix agréablement rocailleuse du chanteur. Un opus alternant pop et folk, guitares acoustiques et électriques, véhiculant des paroles fortes. Des paroles sombres et mélancoliques à la conduite pop.

L’œuvre s’ouvre sur « One True Love », une ballade noire où la mort et la possession d’un amant sont livrés avec un sac en plastique pour l’asphyxie. Une vision troublante, peut-être lucide, de l’amour ! L’artiste de 43 ans use de son expérience pour moduler les genres et les sons sur le carillonnant « Best Thing For Baby », une plage trempée dans l’alt-country rock, profite de « Taste For Blood » pour revêtir les habits de Lou Reed et nous gifler d’une pop excitée aux riffs agités. Influences qu’il utilise aussi sur la mélodie adroite de « Father Land » aux couleurs prononcées des Lemonheads. Une vague électrique qui retombe sagement sur le folk acoustique plus tendre de « Mess With The Bull » et « Final Final The One The One », en fermeture d’album. 

Un deuxième long playing sans grande prise de risque dont les mélodies risquent de toucher un large public. 

 

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