Avouer une quelconque sympathie pour Heather Nova peut porter préjudice en société. Les filles rejettent la belle pour sa sculpture de sylphide, les copains pour son romantisme putassier et sa passion pour la bande FM. Pourtant, le nouvel album d’Heather Nova n’est pas vraiment mauvais. Cette sentence est sans retour – ‘salut les copains, je vous aimais bien….’ - et aura de graves conséquences pour la suite des relations amicales de votre (ex-)rédacteur (dévoué et adoré). Mais essayons de rattraper le coup, de sauver un bout de peau de cet impardonnable égarement… A la moitié des années 90, Heather, douce naïade originaire des Bermudes, laisse entrevoir le bas de ses jolis mollets… euh, non. Plutôt : laisse entrevoir une puissante voix cristalline chargée d’une sensibilité à faire chialer des madeleines. Lancée sous les étoiles par le chanteur de Killing Joke (c’est le genre de détails qui peut vous faire gagner des points, reconquérir un minimum de crédibilité. Et aussi, l’occasion de rabattre le clapet à tous ceux qui pensent que cette charmante demoiselle est une parvenue). A ses débuts donc, Heather ne jure que par Bob Dylan, Neil Young et Joni Mitchell. « Oyster » (1995), son second album rencontre un large succès et emmène Heather Nova sur la route, en compagnie de Pearl Jam et Neil Young, notamment. Trois ans plus tard, c’est le grand tournant de sa carrière : « Siren », disque élégant et singulier s’incruste partout : dans les hits parades, les séries télévisées, en cuisine, dans la chambre à coucher (sous la couette ?), les magazines de mode, les pubs. Bref, partout. Heather devient le symbole de la comptine folk désespérée pour étudiants frustrés de périlleuses relations amoureuses. Heather découvre le succès, son public la vie. Et l’énorme problème pour la belle Bermudienne (un Bermuda, une Bermudienne ?), c’est que, depuis lors, rien ne semble plus évoluer. Les compositions demeurent toujours aussi larmoyantes, choyées par le réconfort d’un timbre céleste. « Redbird » résulte de ce cheminement. Une nouvelle fricassée de notes déjà ressassées. Un album magnifiquement produit, pour lequel Heather s’entoure de l’Orchestre symphonique de Vienne (« This Body »), de la chorale du London Community (« Singing You Trough », « Done Drifting ») et se fend d’une reprise facile du « Wicked Game » de Chris Isaak. La recette fonctionne à merveille, comme en témoignent les nombreux concerts joués à guichets fermés. Pour apprécier « Redbird », il convient de se conduire en fin stratège et de consommer ces substances sonores avec une retenue millimétrée. Alors voilà : faute avouée à moitié pardonnée ?