Tout au long de ce premier album, Mr. Lif nous narre l'histoire d'un pauvre type tué par balles, qui ressuscite (par la musique) pour sauver l'Amérique de sa morgue patriotique… jusqu'à son réveil, direction le boulot et toutes ses injustices. Un rêve ? Peu importe, le B-boy décide de prendre le taureau capitaliste par les cornes : Bush n'a qu'à bien se tenir, et avec lui tous les symboles écrasants de l'impérialisme sauvage et du consumérisme ravageur (argent, religion, travail, médias, drogues, justice,…). Mr. Lif, rappeur érudit qui n'a pas sa langue dans la poche (sorte de cousin de Mos Def et de Tribe Called Quest), tire à boulets rouges sur tout ce qui gangrène l'Amérique, loin de toute démagogie et avec un talent certain. Chroniqueur hors pair qui veut amener la population occidentale à une prise de conscience (tout n'est pas noir, mais il y a du pain sur la planche), Mr. Lif se pose donc en digne descendant de KRS-One et de Chuck D, avec toutefois moins de virulence et plus de discernement. Et quand la musique est bonne (à la production, El-P, Fakts One, NASA, Edan et Insight, bref la crème du hip hop underground le plus fascinant), ça nous donne un concentré de beats, de flow et de samples supérieurs à la moyenne. " I Phantom " dépeint les démons d'un homme en prise avec son environnement immédiat, cette Amérique 'post 11 septembre' toujours groggy, aveuglée par la haine de l'autre et la soif de vengeance. A la fin du disque, c'est la menace d'une guerre nucléaire qui pointe même à l'horizon, avec " Earthcrusher " et " Post Mortem ", constats désabusés d'une société pourrie qui court vers son anéantissement. On n'a pas fini de mesurer les secousses sismiques enclenchées par l'effondrement des Twin Towers… ce disque en est la preuve. Effrayant, mais important.