Quand on évoque The Psychedelic Furs, on pense inévitablement aux hits, « Sister Europe », « Love My Way », « The Ghost in you » ou encore « Pretty In Pink », morceau qui va inspirer le film américain du même nom, un long métrage réalisé par Howard Hughes, sorti en 1986. Fruit d’un cocktail subtil entre punk, art-rock, goth, new wave, jazz, funk, alt et hard rock, la musique de ce band londonien a toujours été luxuriante, esthétique et mélodieuse. Et puis, il y a la voix de Richard Butler, éraillée, abrasive même, et dont les lyrics poétiques apportent une profondeur à l’ensemble. Fondée par Richard et son frère Tim, la formation s’était séparée début des nineties, avant de reprendre le collier à l’aube de ce millénaire, intervalle au cours duquel les frangins ont poursuivi leur route chez Love Spit Love, outre les différents projets solos. Et puisqu’on parle de fratrie, votre serviteur et son frère assistaient à un mini festival au Brielpoort de Deinze, au cours duquel se produisaient Nacht und Nebel, Prefab Sprout, The Sisters of Mercy sous son line up originel et Psychedelic Furs, en 1984. Et ils y sont de nouveau, mais à l’AB, 35 ans plus tard. Un petit événement, en quelque sorte… Mais place au compte-rendu de cette soirée.
Qui s’ouvre par Red Zebra. Formé en 1978, ce groupe brugeois a splitté à plusieurs reprises, avant de revenir dans le circuit dès 2017. Grâce à son hit international « I Can't Live in a Living Room », décroché en 1980, le combo a pu tourner, en compagnie de grosses pointures ; et notamment, The Undertones, The Sound, Simple Minds, Killing Joke et The Sisters of Mercy. Du line up originel, il ne demeure cependant plus que le chanteur Peter Slabbynck, mais la musique émarge toujours au post punk et à la new wave.
A l’instar de sa prestation au W-Festival, le set s’ouvre comme un défilé militaire. Peter a endossé un manteau kaki, mais est coiffé du célèbre chapeau de l’Oncle Sam. Il est soutenu par deux guitaristes, un bassiste et un drummer. Et le set tient parfaitement la route. La voix de Stabbinck campe le plus souvent un hybride entre celle de Peter Murphy et de Johnny Rotten, alias John Lydon. Pas étonnant, dès lors de retrouver, au beau milieu de « Shadows of doubt », quelques mots empruntés au « This is not a love song » de PIL. L’humour est encore bien présent chez Peter, puisqu’il nous présente une banane, lui consacre un laïus, l’épluche, puis la mange, en chantant « Man comes from ape » (Trad : l’homme descend du singe). Et le set de s’achever par la cover du « Winning » de The Sound, une adaptation, faut-il-le souligner, bien personnelle. Une prestation qui a recueilli de chaleureux applaudissements, au sein de l’auditoire (Pour les photos, c'est ici)
Set list : Agent Orange, TV Activity, The Ultimate Stranger, Shadows of Doubt, I Can't Live in a Living Room, I'm Falling Apart, Man Comes From Ape, Winning
Les baffles crachent de la musique d’opéra. La voix du chanteur est androgyne : ce serait bien un morceau interprété par feu Klaus Nomi. Puis les musicos grimpent sur l’estrade à 21 heures pile, et Richard débarque le dernier, sous les acclamations de la foule (NDR : ce soir, c’était presque sold out). Cheveux grisonnants, charismatique, souriant, le visage marqué par le temps (NDR : et sans doute aussi par les excès commis au cours de sa jeunesse), il porte une veste noire, et un gilet dont les larges poignets blancs à pois noirs débordent. Tim a enfilé une veste de velours rouge foncé, et il a noué une cravate sur sa chemise blanche. Les deux frangins, comme le saxophoniste Mars Williams (NDR : il est de petite taille !) ainsi que la claviériste, Amanda Kramer (NDR : elle a notamment milité chez Information Society, The Golden Palominos et tourné en compagnie de Lloyd Cole et Siouxsie Sioux), sont chaussés de lunettes fumées. En retrait, Paul Garisto, le drummer porte un casque d’écoute sur la tête. Les deux guitaristes, Rich Good (ex-The Pleased et toujours impliqué au sein de Mirrors, ce Britannique vit aujourd’hui en Californie) et un musicien de tournée se plantent à gauche du podium.
Et le set de s’ouvrir par « Dumb Waiters ». Mais il faudra attendre le cinquième morceau, « There’s a world outside » pour que le groupe trouve son équilibre tant instrumental que vocal, la voix de Richard éprouvant des difficultés à retrouver son timbre si caractéristique. Bien chauffée à partir de ce moment-là, elle va demeurer bien stable le reste du concert. Il arpente la scène sur toute la largeur, s’accroupit, serre des mains, chante en regardant dans les yeux des fans. Le saxophoniste déambule tout autant, alternant entre le saxophone alto (le plus souvent) et la clarinette (parfois), dans un style bien free, torturé, inspiré par John Coltrane ou Charlie Parker. Les interventions de Rich à la gratte deviennent progressivement plus incisives, à l’instar de « All that money wants » et « Sister Europe », un titre imprimé sur un tempo hypnotique. Peter retire sa veste, avant d’attaquer « Heaven », un morceau dont le refrain est repris en chœur par une bonne partie de l’auditoire. The Psychedelic Furs nous réserve un seul nouveau titre (NDR : un album serait prévu pour 2020 !), « The Boy that invented rock’n’roll », une compo qui s’achève dans un climat psychédélique. « Pretty in pink », chanté à nouveau par la foule, n’est bien sûr pas oublié. « President gas » nous réserve un joli duo de grattes, entre le 7ème élément (NDR : plutôt réservé, il se consacre cependant surtout à la rythmique) et Good, alors que Richard lève le poing, chaque fois qu’il prononce le titre du morceau. Le set s’achève par « Hearbreak beat », une compo qui alterne cordes saccadées et grondantes. Mais un sentiment envahit l’esprit de votre serviteur ; car si le set est de bonne facture, il manque quand même de morceaux plus punchy. Ce qui va néanmoins survenir en rappel, lors d’un « India » de toute beauté. Imprimé sur un tempo new wave et bien balisé par la ligne de basse puissante de Tim, il permet à nouveau au saxophoniste de se mettre en exergue, alors que les grattes enflamment une expression sonore qu’on aurait aimé plus énergique, lors du concert proprement dit… Suffisait peut-être d’insérer l’un ou l’autre morceau plus percutants et moins mainstream dans la set list… (Pour les photos, c'est là)
Setlist : Dumb Waiters, Mr. Jones, Love My Way, There's a World Outside, The Ghost in You, Like a Stranger, Sister Europe, Heaven, All That Money Wants, Into You Like a Train, The Boy That Invented Rock & Roll, Pretty in Pink, President Gas, Sleep Comes Down, Heartbreak Beat
Rappel : India
(Organisation Ancienne Belgique)