Elena, du groupe Eosine, lance son projet solo: Tokyo Witch

Elena Lacroix, la chanteuse du groupe Eosine, annonce la sortie imminente du premier album de son projet solo: Tokyo Witch. Intitulé “Skin Like Feathers”, il propose des compositions qui, dit-elle, “sont trop intimes pour être incarnées par le groupe Eosine”.…

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Le DIY de scrapidoh

Bercé par le rock indé depuis ses débuts, scrapidoh était à l’origine le projet solo de Seb Vanneste. Né en pleine gestation post-covid, il s’est transformé en groupe pour le défendre en ‘live’ : Matt à la basse, Jean a la guitare, FJ à la batterie ainsi que…

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Aldous Harding

Froid comme la glace…

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Aldous Harding a ouvert sa tournée européenne au Cirque Royal de Bruxelles, ce 21 mars 2023. La dernière visite de la Néo-Zélandaise remonte à 2019 ; ce qui semble être une éternité. Depuis lors, sa fanbase n’a fait que croître. La musique de cette autrice-compositrice-interprète évolue dans le néo folk/pop gothique voire baroque.

Produit par John Parrish (PJ Harvey, Eels, Perfume Garden), son dernier elpee, « Warm Chris », est paru en 2022.

Pas grand monde dans l’hémicycle, lorsque Huw Evans, aka H Hawkline (NDR : son patronyme est tiré du livre de Richard Brautigan, ‘The Hawkline Monster : A Gothic Western’), débarque sur les planches. Le public ne va vraiment la remplir que peu avant le début du set de la tête d’affiche. Elle sera même quasi sold out.  

Cet auteur-compositeur-gallois est également présentateur de TV, à Cardiff. Il chante d’ailleurs une partie de son répertoire en langue locale et l’autre en anglais. Il a également vécu et travaillé à Los Angeles pendant plusieurs années. A son actif, cinq albums et quatre Eps.

Au cours de son récital, il va nous réserver de larges extraits de son dernier elpee, « Milk For Flowers ». Il prend place sur un siège devant son micro, armé d’une gratte électrique, près d’un enregistreur à bandes, placé sur une table. Sympathique et interactif, il bavarde entre les chansons, prenant alors le soin de mettre son enregistreur sur pause. Donc hormis les six cordes et le chant, toute l’instrumentation et les arrangements figurent sur cette bande magnétique. Une manière économique d’épargner la présence d’autres musicos. Et en 30 minutes, H Hawkline va démontrer toute l’étendue de son talent…

Sur le podium, Aldous Harding est soutenue par quatre musiciens. Un drummer, perché sur une estrade, qui troquera ses fûts et ses cymbales contre un bugle et le micro pour un morceau. Un gratteur, partagé entre l’électrique, la sèche et la basse. Enfin, deux claviéristes. La première, également installée sur une estrade, est également préposée aux vocaux et aux chœurs. Le second se charge également de la sixcordes. Assise, Aldous s’installe juste en face de ce dernier pour se consacrer au chant, à la guitare électrique ou semi-acoustique. En arrière-plan, 6 spots ronds paraboliques sur pied vont projeter des faisceaux lumineux aux teintes feutrées, suivant l’instrumentation.

Le concert s’ouvre par la triade « Ennui », « Tick Tock » et « Fever ». Le premier morceau nous confronte à des sonorités incohérentes et distordues, mais au bout du compte, elles finissent par vous mettent à l’aise. Plus léger, le dernier repose sur la sèche et la voix atmosphérique d’Aldous. Elle crée de la tension et est très susceptible de capter votre attention rien qu’avec un soupir. A un certain moment, le public s’émeut de voir comment elle a retiré le microphone du support avec tant de soin.

Le titre maître du dernier opus, « Warm Chris », est rendu mystérieux par sa voix qui oscille du grave à l’aigu. Tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes, si elle était un peu moins statique. Plus interactive. Pas un bonjour, pas un merci, pas une parole, pas un regard. Juste une courte phrase de 4 mots avant « Lawn », une expérimentation ludique parsemée de sonorités allègres, subtilement secondées par des ivoires. Elle ne renonce clairement pas à sa propre marque de fabrique qui peut être très variable. « Bubbles » et « She'll Be Coming Round The Mountain » continuent de progresser sur des ivoires accrocheuses ainsi que trois grattes entêtantes et addictives, donnant l'envie de rejoindre le dancefloor, mais le public reste stoïque.

Alimenté par un orgue mélodieux mais puissant et parcouru d’accords de sèches discrets, « Leathery Whip » constitue l’apothéose du concert. Les voix particulières en arrière-plan créent, de manière inattendue, un ensemble harmonieux, de sorte que cette chanson parvient à pénétrer votre matière grise sans trop d'effort. L'influence de John Parish est ici très claire sur ce morceau, qui aurait pu figurer au répertoire de PJ Harvey. L’elpee « Warm Chris » aura été interprété dans son intégralité.

Aldous Harding paraît cependant bien seule dans son monde, malgré un public attentif et applaudissant à l’issue de chaque chanson. On dirait même qu’elle est mal à l’aise face à ces acclamations. Elle reste sans réaction. Sa musique est magnifique, mélancolique, quelquefois grisante, mais Aldous la dispense avec une froideur extrême. Et son regard perçant nous glace le sang…

Un rappel quand même, au cours duquel elle nous réservera deux titres : le funky « Designer » et l’émouvant « She'll Be Coming Round The Mountain ».

Setlist : « Ennui », « Tick Tock », « Fever », « Treasure », « Fixture Picture », « Lawn », « Warm Chris », « Staring At The Henry Moore », « The Barrel », « Bubbles », « Passion Babe », « Imagining My Man », « Old Peel », « Leathery Whip ».

Rappel : « Designer », « She'll Be Coming Round the Mountain ».

(Organisation : Peter Verstraelen Agency)

 

Louis-Jean Cormier

L’hypnose

Écrit par

Né au Québec (à Sept-Îles, très exactement), cet auteur-compositeur-interprète a grandi au sein d’une famille mélomane. Son père l’a initié à la musique de Félix Leclerc, Gilles Vigneault, Jean-Pierre Ferland et Robert Charlebois, entre autres. En 1998, alors qu'il étudie le jazz au Cégep de Saint-Laurent à Montréal, il fonde Karkwa avec des amis. Le groupe maintiendra le cap pendant 15 bonnes années. Lors d’une pause de la formation, il milite quelque temps, chez Kalembourg. C’est en septembre 2012 qu’il entame sa carrière solo. A son actif quatre elpees, dont le dernier, « Le ciel est au plancher », est paru en avril 2021. Il se produisait ce mardi 22 mars à la Rotonde du Botanique. Deux heures de grâce. Un des plus beaux concerts auxquels votre chroniqueur ait pu assister, à ce jour.

Louis-Jean Cormier débarque sur le podium, à contre-jour. Il s’apprête à nous livrer un spectacle d’une force intime éblouissante.

Il annonce que les spectateurs vont avoir l’impression d’écouter la même tune du début à la fin. Il passe en effet subtilement d’une compo à l’autre par des voies d’accords. Il s’arrête néanmoins quelques fois pour parler à son public. Il improvise de manière très naturelle, autour de son discours préparé. Il reprend même quelques airs connus sur les mêmes accords que ses compositions. Il s’amuse, et nous aussi. Bref, il ne manque pas d’humour.

Mais revenons au début.

Après quelques morceaux, il prévient l’auditoire : ‘Bruxelles, si tu es venu à la Rotonde ce soir, c’est sûrement parce qu’inconsciemment, tu as le besoin d’intimité. Un criant désir de tendresse et de proximité. Je vois que tu es venu seul, ça tombe bien, moi aussi (rires). Ce que tu vas trouver ce soir est bien plus fort que ça ; ça va être tripatif. Bruxelles, j’ai pris des cours d’hypnose. Ce soir tu vas vivre ce que nous, les pros, on appelle dans le jargon, une sortie de corps (rires). Je t’invite à venir visiter l’endroit dans lequel toutes mes chansons naissent et vivent à l’année. Cet endroit-là, se trouve à l’intérieur de moi. Ça si ce n’est pas de la proximité, je ne sais pas ce que c’est (rires). J’ai élaboré une technique avec un ordre de chansons précis. Tu vas quitter ton corps par le biais de la physique quantique (rires). C’est très scientifique, très factuel tout ça. Ce qui va arriver, c’est que tu vas être nu (rires), ne t’inquiètes pas, tu vas quitter ton corps, tu vas être nu mais tu vas venir visiter, à l’intérieur de moi, l’endroit que nous les pros, on appelle le safe space. Tu sais ce que c’est le safe space ? C’est un endroit à l’abri de tout, à l’abri du temps, du quotidien, des aléas de la vie, il n’y a pas de comptes, de taxes municipales. Tu vas être bien. Tu n’auras pas de forme physique. Tu vas être nu mais sans forme physique. Tu ne pourras pas te vanter d’avoir des formes. Tu me suis ? Restes avec moi (rires). Tout au long des chansons, ça va être spécial, tu vas apercevoir un passage secret, qui ressemble étrangement à un canal auditif. C’est une sorte de tunnel jaune orange. Tu vas traverser ce conduit là et ton corps physique va rester ici. Ton corps va être là, un peu niais. Mais ton corps sera dans de bonnes mains (il présente ses ingénieurs lumières et son ; ce qui déclenche des applaudissements dans la foule). Le seul truc que tu dois savoir c’est par où on entre dans le tunnel. A quel moment il faut sauter et où est la porte d’entrée du tunnel. La seule affaire que tu dois retenir dans tout ce que je viens de dire c’est que l’entrée du passage secret se situe entre chacune des notes que je vais jouer à la guitare ce soir (propos qui entraînent de nouveaux applaudissements). Notes qui se trouvent dans toutes les chansons durant toute la soirée. Tu as l’embarras du choix. Tu vas te sentir vibrer et tu devras sauter dans un trou. Ce sera entre deux affaires (rires). Tu me suis ? Je ne répéterai pas ça en flamand car je le maîtrise mal. Ceci dit, tu te laisses aller. J’ai tout prévu. Je ne suis pas comme les hypnotiseurs. Comme Mesmer. Tu connais Mesmer ? Je ne suis pas comme eux, je trouve ça vulgaire. Tu seras hypnotisé à un, deux, trois, non… ici, tu vas être à l’intérieur de la musique. Tu vas voir, tu vas triper, ça va être débile (rires) ! Tu me fais confiance ? Alors c’est parti !’

Force est de constater que le public est nu, sorti de son corps physique, sous hypnose consciente, à l’intérieur de Louis-Jean Cormier. Il a pris la porte et tout le monde a sauté dans le trou, pour le plus grand bonheur auditif.

Tout au long de la soirée, l’artiste joue avec les mélodies, les mots, l’esprit. On peut voir sur son visage, son sourire sincère et le plaisir qu’il a d’être auprès de nous dans un partage fort, authentique et profond.

L’ensemble est très fluide et emporte l’auditoire qui reprend ses chansons en chœur.

Limité à deux petits spots élégants sur les côtés, quelques bandes de lumières chaleureuses à l’arrière et les éclairages habituels de la Rotonde, le décor est minimaliste.

Les ingénieurs connaissant leur job et arrivent parfaitement à souligner, à rythmer les moments importants du spectacle.

L’artiste se sert d’une Gibson ES-125 datant de 1966, une guitare câblée dont le son est doux, presque jazzy, d’un micro voix et d’un micro directionnel pour la gratte. Mais également d’un pad électronique sur lequel il marque le rythme sur l’estrade à l’aide de ses pieds (il est sur le pad !).

Il utilise souvent un capodastre, l’open tuning, et sa technique de picking est belle et travaillée. Il nous offre aussi quelques petits solos en gammes pentatoniques.

A la fin du spectacle, Il a le soin de clore ‘l’hypnose’ pour libérer les spectateurs et revient sur scène après le rappel en proposant d’interpréter les deux premiers titres qui seront proposés par les spectateurs. Il nous réserve alors deux vieilles chansons, ‘en soins palliatifs’, précise-t-il, puis clôt le set par une compo de son choix, plus récente. Le tout s’achève par une dernière note alors que les lumières s’éteignent au même moment. Bravo à ses ingénieurs !

Derrière la décontraction et la bonhomie de Jean-Louis, on devine les années de travail pour atteindre un tel résultat.

Mon ami spectateur, qui m’accompagne, était un peu dubitatif, se demandant s’il était possible d’être captivé par le concert d’un artiste, seul sur scène, pendant une heure trente. Nous n’aurons pas le temps de nous rendre compte que deux heures se sont écoulées.

Un regret ? Qu’une telle figure considérée comme majeure dans l’univers de la chanson française actuelle ne soit pas encensée par les médias et un très large public à travers toute la francophonie, tout en admettant que cette situation nous a permis de vivre un moment merveilleux tout près de lui, en toute intimité.

Merci Jean-Louis pour cette parenthèse généreuse, magique et suspendue.

A très vite !

Méthode chanson

(Organisation : Botanique)

 

Father John Misty

Savoureusement rétro…

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Né le 3 mai 1981, Joshua Michael Tillman, mieux connu sous le pseudo de scène ‘Father John Misty’ (FJM), est auteur, compositeur, multi-instrumentiste (NDR : il joue de la guitare, du piano, de la basse, de la batterie et de l’harmonica), chanteur et producteur. Originaire du Maryland, aux States, Il a notamment milité comme drummer chez Fleet Foxes et apporté sa collaboration à une multitude d’artistes. Parmi les plus célèbres, citons Beyoncé et Lady Gaga.

L’Ancienne Belgique est en mode Ballroom. Il doit y avoir plus ou moins 800 dans la fosse.

Neuf musicos constituent le backing group. Tout d’abord un trio de cuivres qui se partage trompettes, bugle, saxophone, clarinette, flute à bec et traversière. Il s’installe sur une estrade, à gauche. Un préposé à la pedal steel et parfois à la trompette, un bassiste/contrebassiste, un drummer, un claviériste/guitariste et deux sixcordistes complètent le line up.

Joshua se consacre au chant, mais également à la guitare semi-acoustique ou électrique. Ce soir, il est venu défendre son dernier et cinquième album, « Chloë and The Next 20th Century », paru en avril de l’an dernier. Un opus où il s’éloigne définitivement de son registre folk-rock baroque pour mieux se plonger au sein des ambiances de comédie musicale rétro, comme l’atteste des titres à l’ampleur théâtrale…

Les baffles crachent « A Face in the Crowd », une excellente cover de Scott Walker, dont la voix de crooner préfigure l’univers de FJW. Cette intro permet aux musiciens de s’installer derrière leurs instruments. Le concert s’ouvre par « We Could Be Strangers », un extrait du dernier elpee, qui raconte l’histoire d’un couple victime d’un accident de la route. Les cordes contrôlent les opérations. Faut dire que lorsque les 5 grattes se conjuguent, il y a plus que de l’électricité dans l’air. Le light show est à la fois luxuriant et multicolore.

La musique oscille entre indie pop poignante, arrosée d’un romantisme luxuriant, lo-fi, blues, americana et lounge, mais l’ensemble est teinté de nuances jazzyfiantes. Equivoques, les textes sont empreints d’ironie et de sarcasme ou alors s’appuient sur la propre expérience de la religion vécue par l’artiste, naviguant alors du profondément personnel au totalement ludique.

Progressivement, Father John Misty va nous entraîner dans un monde éthéré et théâtral, tel un Frank Sinatra contemporain. Le saxophone s’impose régulièrement et s’accommode de cordes lancinantes.

Si les interventions de cuivres se révèlent souvent somptueuses, les titres blues et americana laissent davantage d’espace à la pedal steel.

Juste avant « Nancy From Now On », l’artiste s’adresse plus longuement au public, le remercie d’être présent et raconte quelques anecdotes. Une dame lui remet une boîte métallique contenant des friandises. Un dialogue s’installe entre elle et l’artiste. C’est touchant !

Tout au long de la ballade « Disappointing Diamonds Are The Rarest Of Them All », l’auditoire se montre particulièrement attentif. Dans un registre qui évoque le music-hall d’avant-guerre, Josh Tillman se montre plus crooner que jamais, et particulièrement lorsqu’il interprète des chansons plutôt rétro, certaines totalement irrésistibles, à l’instar de l’envoûtant « Chloë », qui nous plonge au cœur d’un cabaret new yorkais des années 50 ; modulable à souhait, la voix de Joshua laissant planer le spectre de Chet Baker.

A l’écoute de « Goodbye Mr Blue » on ne peut s’empêcher de penser à la bande originale du film ‘Macadam Cow-Boy’, et notamment « Everybody’s Talkin » d’Harry Nilsson. Les cordes, les cuivres, le piano, la contrebasse et la batterie y soutiennent parfaitement la voix, plus pure que jamais, de John Tilman.

Davantage country/folk, « Q4 » raconte l’histoire d’une romancière ambitieuse qui s’inspire du parcours de vie de sa sœur décédée. « Buddy's Rendez-vous » est une superbe reprise de Lana Del Rey. En rappel, « Pure Comedy » n'est peut-être pas la chanson la plus populaire de FJM, mais c'est sa plus révélatrice.

Un regret ? L’absence d’« Olvidado (Otro Momento) ». Ses rythmes bossa nova auraient pu faire fondre les cœurs de l’auditoire. N’empêche, quelle belle soirée !

Setlist : « A Face in the Crowd » (Scott Walker song), « We Could Be Strangers », « Mr. Tillman », « (Everything But) Her Love », « Nancy From Now On », « Goodbye Mr. Blue », « Funny Girl », « Disappointing Diamonds Are the Rarest Of Them All », « When You're Smiling And Astride Me », « Chateau Lobby #4 (in C for Two Virgins) », « Q4 », « Chloë », « Total Entertainment Forever », « Things It Would Have Been Helpful To Know Before The Revolution », « Buddy's Rendez-vous », « Hollywood Forever Cemetery Sings », « The Next 20th Century », « I Love You, Honeybear ».

Rappel : « Date Night », « Pure Comedy », « Holy Shit » (acoustic, guitar and piano only)

(Organisation : Ancienne Belgique)

Fuzz

Back to the end of the sixties…

Écrit par

Ce samedi 4 mars, l’Aéronef accueille trois groupes : Death Valley Girls, Hooveriii et en tête d’affiche, Fuzz, un des nombreux projets de Ty Segall. Ce chanteur, guitariste et batteur californien est tellement prolifique qu’il est parfois difficile de s’y retrouver dans sa discographie, d’autant plus qu’il multiplie les collaborations. Fondé en 2011, Fuzz est un trio réunissant Ty (qui se charge des fûts et du chant), le guitariste Charles Moothart (également frontman, sixcordiste chez CFM et batteur au sein de différents projets de Segall) et le bassiste Chad Ubovich (frontman, sixcordiste chez Meatbodies) qui a remplacé Roland Cosio, en 2013.

Lorsque nous débarquons dans la salle, Hooveriii vient d’entamer son set et il doit y avoir plus ou moins 700 personnes, dans la fosse. Elle est, en tous cas, bien remplie, réunissant pour la moitié des trentenaires et des quadras, mais aussi des jeunes –beaucoup de filles– d’une vingtaine d’années. Etonnant, vu le programme qui va suivre !   

Hoveriii (NDR : prononcez Hoover Three) est une formation californienne, dont le dernier album, « A round of applause », est paru en juillet de l’an dernier. C’est son sixième, si on ne tient pas compte du mini LP « Highland Park TV », publié en 2018. Bert Hoover en est le leader. Il est aussi chanteur/guitariste, tout comme Gabe Flores. Le line up est complété par le bassiste Kaz Mirblouk, le préposé au mini-synthé/MPD James Novick (un bonnet enfoncé sur le crâne) et le batteur Owen Barrett. Hormis Gabe, dont la chevelure est abondante, mais bouclée, ils portent tous des cheveux longs et même pour le leader, très longs. 

Première constatation, le son est puissant, voire un peu trop. Au bout de quelques minutes, il faut se résigner à s’enfoncer des bouchons dans les oreilles. Dommage, car on perd inévitablement une fréquence des aigus. Au cours de son set, le band va nous proposer une sorte de kraut/space/psyché/blues rock dont les références oscillent de Can à Allman Brothers Band, en passant par Hawkwind et Pink Fairies. Malgré le tourbillon de riffs et le mur de son spatial, viscéral et fuzz, le sens mélodique est souvent préservé, d’autant plus que les deux chanteurs ont des voix bien timbrées ; cependant, comme elles se conjuguent rarement en harmonie, elles glissent plus difficilement dans les portugaises (NDR : sans les bouchons, évidemment…)

Photos Ludovic Vandenweghe

Place ensuite à Fuzz. Le trio entame le concert par « Let it love », une compo qui s’ébroue dans le psychédélisme atmosphérique, avant d’opérer une accélération, déjà fulgurante (NDR : les sonorités dispensées par la guitare rappellent celles d’Adrian Gurvitz, du band londonien The Gun, un trio qui avait décroché un hit en 1968, « Race with the devil »). Le combo embraie par « Fuzz's Fourth Dream », d’abord sous la forme d’un blues avant de changer complètement de direction en mettant la gomme. Une construction qui va se reproduire régulièrement au cours du show. L’ombre de The Cream plane (NDR : composé du guitariste chanteur Eric Clapton, du bassiste chanteur Jack Bruce et du batteur Ginger Baker, The Cream était un supergroupe qui a sévi de 1966 à 1968). Mais parfois aussi celles de Groundhogs ou de l’Allman Brothers Band (encore !) …

Dès le quatrième morceau, des audacieux se lancent dans le crowdsurfing, discipline qui va perdurer tout le concert. Ty Segall assure donc le drumming et le chant. Pas vraiment facile à coordonner, mais Ty a de l’expérience et il a une frappe d’enfer. Parfois, on aurait cependant aimé qu’elle soit plus souple. Sur certaines compos, Charles Moothart se consacre également au micro. Notamment sur « Rat race ». Mais c’est sur sa guitare qu’il étale toute sa technique. Encore que lorsqu’il en rajoute plusieurs couches, la démonstration devient gratuite. Si c’est sa manière d’improviser, il n’y a pratiquement plus que les solistes des groupes de métal qui déversent gratuitement un tel flux de notes. Enfin, c’est une question de goût !

Au bout d’une demi-heure de set, Ty s’adresse à la foule pour la première fois et demande : ‘How are you ?’, ajoutant ensuite ‘That’s good’, alors que quasiment personne dans l’auditoire n’a répondu. Lorsque la guitare épouse la voix, votre serviteur ne peut s’empêcher de penser à Taste, trio irlandais qui a sévi à la fin des sixties, et dont le sixcordiste n’était autre que Rory Gallagher. Décidément, les références aux sixties se multiplient. De jolis lasers blancs balaient le podium lors du fiévreux « Say Hello », un morceau qui tout naturellement va prendre de la vitesse en cours de route. Une certitude, le light show est vraiment superbe et évolue bien en phase avec la musique. Tout au long d’un autre blues, « What’s in my head », la basse et la guitare se lancent dans un long bavardage. C’est le titre qui clôt le concert.

Le trio remonte quand même sur l’estrade pour accorder un rappel. Ty concède une seconde fois, quelques mots à l’auditoire. Enfin, pas grand-chose, simplement ‘Thank you !’. Pas très bavard l’artiste. Et la soirée s’achève donc par « Time Collapse/The 7th terror », un morceau caractérisé par son groove entêtant, mais toujours dans l’esprit revivaliste du concert au cours duquel, Fuzz aura puisé dans ses trois elpees, gravés à ce jour…

Photos Ludovic Vandenweghe, ici

Setlist

Let It Live

Fuzz's Fourth Dream

Loose Sutures

Sleigh Ride

Nothing People

Returning

Rat Race

Spit

Jack the Maggot

Earthen Gate

Raise

Say Hello

What's in My Head

Rappel

Time collapse / The 7th terror

(Organisation Aéronef)

Bullet For My Valentine

Plein les oreilles, mais surtout plein la vue…

Écrit par

Ce dimanche 26 février, l’Ancienne Belgique célèbre la grand-messe du metal. A l’office : les vétérans gallois du trash metal, Bullet For My Valentine, le groupe de groove metal progressif Jinjer et des vétérans américains Atreyu. La cérémonie est sold out depuis longtemps. Le concert est sold out depuis belle lurette.

Atreyu ouvre les hostilités à 18h55. Fondée en 1998, sous le patronyme Retribution, la formation de metalcore californien avait changé de nom lorsqu’elle s’était rendue compte qu’un autre band issu du même Etat, répondait à la même appellation.

Depuis le départ du frontman, c’est l’ex-drummer Brandon Saller qui assure le chant. Très grand, il dépasse tout le monde d’au moins deux têtes. Il signale d’emblée : ‘An Atreyu show is fucking fun as shit’. Une vraie bête de scène ! C’est Kyle Rosa qui le remplace derrière les fûts. Le line up est complété par deux guitaristes, Dan Jacobs et Travis Miguel ainsi que le bassiste Marc McKnight. Les gratteurs sont assez mobiles et déambulent constamment. Ils participent également aux backing vocaux. Brandon invite deux audacieux, dans la foule, à se faire un câlin, tout en pratiquant le crowdsurfing. Les musicos sont très interactifs. A deux reprises, Brandon demande à la foule d’exécuter des round circles. Seule une petite dizaine de personnes s’y aventurent, mais se dégonflent rapidement. Mais le quintet n’en démord pas. Et si au cours de « Let The Bull », l’auditoire joue les choristes, pendant « Save Us », Saller –en pleine forme– traverse la fosse pour interprète le très accrocheur « The Time Is Now » et se faire offrir une bière par un spectateur. Puis l’auditoire répond favorablement à l’invitation officielle d’ouvrir le premier circle pit de la soirée sur « Ex’s And Oh’s ». La température monte en crescendo et atteint son pic sur « Battle Drums », au cours duquel musicos et aficionados se déchaînent chacun de leur côté mais en parfaite communion. « Blow » clôt un set de 30’ qui a qui filé à toute allure, un morceau au cours duquel les deux sixcordistes vont entrer en duel, lors d’une joute électrique particulièrement huileuse. Une excellente entrée en matière !

Pour les photos, c’est ici

Setlist : « Strange Powers of Prophecy », « Let the Bull », « The Time Is Now », « Ex's and Oh's », « Save Us », « Drowning », « Battle Drums », « Blow ».

Jinjer embraie. Une formation ukrainienne fondée dans la région de Donesk, en 2009, et établie aujourd’hui à Kiev. Il n’y a plus de membre originel au sein du line up. Aujourd’hui, il implique le bassiste Eugene Abdukhanov, le drummer Vladislav Ulasevish, le guitariste Roman Ibramkhalilov et la chanteuse/frontwoman, Tatiana Shmayluk. Bien que la langue maternelle des musiciens soit le russe, idiome parlé dans l’est de l’Ukraine, Tatiana Shmayluk s’exprime en anglais. A ce jour, le combo a publié six elpees studio, dont le dernier, « Wallflowers », est paru en 2021. Depuis ses débuts, la musique de Jinjer a évolué. Elle fusionne ainsi des éléments de groove metal, de death metal, de metal progressif, de djent et de metalcore tout en s’autorisant des incursions dans le jazz, le rap, le rock ou encore le reggae.

Le set s’ouvre par « Who's Gonna Be the One ». Tatiana est vêtue d’un pantalon noir en latex et d’un body de couleur mauve. Le climat est plutôt sombre. Le light show ne se focalise guère sur les artistes. Glacial, le band semble prendre une certaine distance par rapport à l’auditoire, reflétant ainsi le drame qui se déroule dans son pays, depuis un peu plus d’un an…

Show woman, Miss Shmayluk est cependant remuante et occupe tout l’espace scénique disponible. Faut dire que le matos de BMTH est conséquent. Sa maitrise vocale est impressionnante. Sa voix peut osciller du super mélodique au chant hurlé et guttural, ponctué de grognements… disgracieux. La technique du guitariste est spectaculaire. Que ce soit à travers les riffs ou les solos. Ses doigts glissent sur les cordes à la manière de Steve Vai…

Pour les photos, c’est

Setlist : « Who's Gonna Be the One », « Judgement (& Punishment) », « Home Back », « Wallflower », « Perennial », « Pit Of Consciousness », « Call Me A Symbol », « Copycat »

Place alors à la tête d’affiche, Bullet For My Valentine (BFMV). Son dernier long playing –un éponyme– est paru en 2021. Depuis, il a quand même publié un single, « Omen », en août de l’an dernier. C’est la cinquième fois que votre serviteur assiste à un de leurs shows.

Le light show est imposant. Un mur de lumières est disposé sur toute la longueur du podium. Au moins 60 projecteurs sont disposés par 4 dans des caissons en bois, sur une hauteur d’un mètre cinquante. Il y en a partout, même au plafond. De quoi aveugler la foule…

Le drummer Jason Bowld est prisonnier sur son immense estrade. Placé au moins à 3 mètres de haut, il siège derrière une double batterie. Elle est énorme. Les trois gratteurs s’installent devant le ‘mur’ : Matthew Matt ‘Tuck’ (lead vocal, guitare rythmique), Michael Padget (guitare solo) et Jamie Mathias (basse). Ces musiciens participent également aux chœurs

En intro, les haut-parleurs crachent le « Chop Suey » de System Of A Down et le « Duality » de Slipknot. Les fans entonnent bruyamment les paroles de « Knives », révélant un avant-goût de ce qui va suivre…

Matthew, Michael et Jamie auraient pu se passer de microphones, tant le public les supplée. Il connaît les paroles par chœur et même celles des refrains des compos qui vont suivre.

Issu de « Gravity », « Over It » baigne au sein d’un metalcore moins sauvage.

BFMV allie avec intelligence, puissance et goût des compositions aux mélodies tranchantes et à la musique agressive.  

« Piece Of Me » et « 4 Words (to Choke Upon) » sont particulièrement ‘catchy’.

Les solos de Michael sont carrés, véloces et précis. Mélodique, chargée d’émotions contrastées et souvent torturées, la voix de Matthew alterne le chant éraillé ou clair. Elle rappelle même parfois l'éloquence d'un Chester Bennington (Linkin’ Park). Quant aux polyphonies vocales, elles sont impeccables.

« Hearts Burst Into Fire » est un morceau qui n’avait plus été exécuté depuis longtemps. Il l’est à nouveau par la volonté des fans. Le spectre de Green Day se met même à planer. Sympa !

Tout au long de « Scream Aim Fire », le batteur frappe sur ses fûts, à une cadence infernale. « All These Things I Hate (Revolve Around Me) » est une ballade semi-acoustique, empreinte de nostalgie. Matthias se réserve l'intégralité du premier couplet. C’est le calme avant la tempête. Tribal ou frénétique, le batteur reprend son train d’enfer. Et comme le light show dépend de l’intensité du drumming… on n’y voit plus grand-chose…

Le concert s’achève par l’impétueux « Death By A Thousand Cuts ». Un retour au metalcore burné originel…

Le quatuor gallois va nous réserver trois titres percutants en rappel : « Your Betrayal », « Tears Don't Fall » et « Waking The Demon ». Que du bonheur !

Bullet For My Valentine se produira dans le cadre des Lokerse Feesten, le 8 août prochain.

Pour les photos, c’est ici

Setlist : « Knives », « Over It », « Piece Of Me », « 4 Words (to Choke Upon) », « You Want a Battle ? (Here's A War) », « Hearts Burst Into Fire », « The Last Fight », « Shatter », « All These Things I Hate (Revolve Around Me) », « Scream Aim Fire », « Suffocating Under Words Of Sorrow (What Can I Do) », « Rainbow Veins », « Don't Need You », « Death By A Thousand Cuts ».

Rappel : « Your Betrayal », « Tears Don't Fall », « Waking The Demon ».

(Organisation : Live Nation et Biebob)

 

And Also The Trees

Les arbres sont des poèmes que la terre écrit dans le ciel (Kalil Gibran)

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And Also The Trees a sorti son 14ème elpee, « The bone carver », en septembre dernier, une œuvre atmosphérique, parfois cinématographique, qui revêt un nouveau tournant dans l’évolution de la musique du groupe d’Inkberrow. Qui a enregistré l’arrivée de deux nouveaux musiciens, le bassiste Grant Gordon et le multi-instrumentiste (clarinette, claviers, guitare) Colin Ozanne.

Un concert d’AATT constitue toujours un moment privilégié, surtout quand il y a de nouvelles compos, et l’événement qui va se produire ce soir sera, de nouveau, à marquer d’une pierre blanche…

C’est Mallano Soyoc qui assure le supporting act. Le trio implique le guitariste Olivier Mellano (NDR : il défend un autre projet, MellaNoisEscape, mais a aussi accompagné Dominique A, Brendan Perry de Dead Can Dance, Jambinaï, parmi les plus connus, sur les planches), un compositeur qui multiplie les expérimentations. Vêtue d’une combinaison sexy de couleur noire, Mona Soyoc est mieux connue pour avoir sévi chez Kas Product. Enfin le troisième larron se nomme Uriel Barthélémi. Casque sur la tête, il se consacre aux drums. Excellente show woman, Mona a une forte présence sur les planches et possède une voix à la fois claire et puissante qui sert une musique sauvage, mystérieuse, mêlant transe gothique, dark wave et trip hop. Sur disque et vidéo, l’électro semble s’imposer, mais en ‘live’, l’expression sonore est manifestement plus percutante, car essentiellement organique.  Malheureusement, pour le peu que votre serviteur ait pu voir et écouter de ce set, difficile d’émettre une analyse objective. Mais, le groupe est à revoir, c’est une certitude…

Place ensuite à And Also The Trees. Des sonorités de violon s’invitent en intro ; puis les musiciens grimpent sur le podium sous les applaudissements de la foule, un auditoire réunissant une majorité de quadras, quinquas et sexagénaires (le club est sold out depuis pas mal de temps, déjà). Puis ils entament « In a bed in Yugoslavia », Colin apportant cette touche slave, à la clarinette. Simon Huw Jones débarque ensuite, vêtu de son long manteau très classe. Et puis, il commence à déclamer sa poésie dramatique autant que romantique… Mais on n’entend rien. De notre place on observe l’ingé-son tourner des boutons, mais sans obtenir le moindre résultat perceptible. Les problèmes techniques ne vont quand même pas recommencer comme la veille, lors du concert de Preoccupations ? Ce serait désespérant ! Le quintet achève le morceau, puis disparaît en coulisses. Il faut dire que le band est particulièrement exigeant dans la qualité du son ! Un roadie grimpe alors sur l’estrade et change d’abord le microphone avant d’avoir la bonne idée de remplacer son fil. Eurêka, la voix passe correctement…

Quelques minutes plus tard (NDR : Ludo, notre photographe, craignait que la formation ne revienne plus), le groupe remonte sur scène et se lance dans « Beyond action and reaction ». Cette fois-ci, le son est limpide voire cristallin. Le vocal de Simon aussi ; et on a l’étrange sensation de plonger dans le film Docteur Jivago. Il ôte son pardessus avant que le combo n’embraie par « Your guess », au cours duquel Paul Hill se lève régulièrement de son siège, tel un torero qui va mettre le taureau à mort, en frappant sur ses cymbales et ses toms. Une attitude qu’il va reproduire très souvent au fil du set. Et son drumming virevoltant révèle une amplitude remarquable. Notamment sur « Dialogue » au début duquel Colin reproduit des sonorités de glockenspiel sur son clavier. Tango, « The book burners » véhicule des accents tziganes. Pendant le rituel « Virus meadow », compo remontant à 1986, Simon déploie ses mains comme des ailes d’un oiseau, peut-être un aigle… Tout au long de « Bridges », on dirait que les musiciens tournoient autour du chanteur, comme des abeilles autour d’un pot de miel. Et on se rend bien compte que non seulement la basse de Grant compte 5 cordes, mais que le manche est long. Des lasers blancs, roses et mauves tournoient au-dessus des musiciens pendant « The seven skies », leur conférant un profil fantomatique. Simon enlève son gilet sans manches et se retrouve en bras de chemise, avant le filmique « Across the divide ». L’efficacité et le talent de Justin à la guitare (une Hofner de couleur rouge rutilant) n’est pas que légendaire. Il y brille cependant en toute sobriété et efficacité. Et se révèle éblouissant sur « Brother fear », un titre imprimé sur un tempo new wave. Son phrasé qui lui permet de reproduire les sonorités d’une multitude de mandolines a influencé de nombreux gratteurs. Et il nous le rappelle sur la berceuse « Boden ». Quelque part entre flamenco et klezmer (cette clarinette !), « Missing » élève encore le niveau du concert d’un cran. Simon ralentit volontairement ses gestes, puis s’accroupit au milieu du podium, laissant alors les musicos s’exprimer pleinement. Le set s’achève par « Rive droite ». La section rythmique s’est convertie au jazz, alors que Justin nous réserve une nouvelle envolée dont il a le secret.

La formation aura le bon goût d’accorder deux rappels. Elle entame le premier par « Bone carver ». Justin a changé de gratte et joue maintenant sur une douze cordes (une demi-caisse Gibson ES335/12). Colin insuffle à nouveau ce parfum enchanteur venu de l’Est de sa clarinette, alors que Simon a réenfilé son long manteau. Qu’il retire ensuite avant que le combo n’attaque les immortels « Shaledown », « The suffering of the stream » et « A room lives in Lucy », ces deux derniers, sur le tempo de valses allègres.

Et enfin, lors du second encore, Justin (qui a repris sa guitare rouge) et le batteur attaquent le fameux « Slow pulse boy ». Le riff hypnotique dispensé par le cadet des frangins Jones transcende une compo dont l’intensité monte en crescendo lorsque les autres musicos viennent se joindre au morceau, au bout de quelques minutes. Epatant !

Il était passé 23 heures, et pourtant, on avait l’impression que le temps s’était écoulé trop vite. Malgré le temps, les feuilles des arbres ne sont pas encore prêtes à tomber…

Photos Ludovic Vandenweghe ici

Setlist

1)In a bed in Yugoslavia
2)Beyond Action and reaction
3)Your guess
4)… Maps in her wrists and arms
5)Dialogue
6)The book burners
7)Virus Meadow
8)Bridges
9)The seven skies
10)Across the divide
11)Brother fear
12)Boden
13)Missing
14)Rive Droite

Rappel 1

1)Bone carver
2)Shaletown
3)The suffering of the stream
4)A room lives in Lucy

Rappel 2

Slow pulse boy

(Organisation : Aéronef, Lille)

 

Stephan Eicher

Autour d’une bonne table…

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Stephan Eicher est surtout connu pour sa musique. Il l’est moins pour avoir composé des B.O. destinées au le cinéma et aux séries, et encore moins pour ses rôles dans les films ‘Anuk - Der Weg des Kriegers’ de Luke Gasser, sorti en 2006, et surtout ‘Mary Queen of Scots’, en 2013. Côté musical, sa palette est particulièrement large. Il avait fondé le groupe électro Grauzone, début des eighties, en compagnie de son frère Martin (NDR : souvenez-vous du hit « Eisbär », paru en 1981). Il chante aussi bien dans la langue de Shakespeare que celle de Molière, mais est aussi est capable de se frotter au rock ou à la techno-pop. Quoique depuis quelques années, il est devenu un pilier de la chanson française. Ses shows sont particulièrement créatifs. Ainsi, il lui arrive de se servir d’automates ou d’une fanfare (Traktorkestar). Son imagination fantasque, sa spontanéité pétillante et sa sensibilité à fleur de peau sont autant d’armes de séduction massive pour cet artiste bernois qui parvient, malgré plusieurs décennies de carrière, à rester imprévisible. Stephan Eicher a sorti son 17ème long playing, « Ode », en octobre dernier. Pour l’écriture des textes, il a une nouvelle fois fait appel à la plume de Philippe Djian et Martin Suter, qui traitent de la disparition, de la menace qui rôde, des doutes, et bien sûr de l’amour. Des chansons poétiques empreintes d’une grande humanité. C’est cet opus qu’il est venu défendre, en la salle Henry Leboeuf, à Bozar, ce 22 février 2023.

Il est 20h30, lorsque les musicos s’installent autour d’une grande table en bois supportant 2 chandeliers à 3 branches montés de bougies et sur laquelle sont alignés des verres à vin. Elles sont allumées, au début du concert, juste avant l’arrivée des artistes. Nous allons peut-être assister à un repas entre amis. Derrière la table, se plante le multi-instrumentiste et producteur hollandais Reyn Ouwenhand. Devant, à gauche, le fidèle Simon Gerber, qui se charge de la basse, de la guitare et des percus. A droite, la jeune harpiste Noémie Von Felder. Ils sont tous assis. Stephan se poste devant et au centre sur un siège ou debout, selon les morceaux, devant ses claviers. En arrière-plan, on distingue 3 meubles en bois à double-portes. Et à l’extrême droite, une haute lingère de type bretonne par lesquels les artistes sont rentrés sur scène.

Stephan Eicher débarque le dernier, sous les lumières puissantes des projecteurs. Le dîner musical entre amis peut commencer.

Le set s’ouvre par « Sans contact », un extrait du dernier long playing, « Ode ». Reyn y brille aux ivoires. En live, les sonorités des violons sont remplacées par celles de la harpe.

Le climat général du spectacle est propice à la bonne humeur. Très interactif entre chaque chanson, Eicher raconte régulièrement des petites anecdotes ou des blagues. Il salue le public et déclare : ‘Bienvenue chez moi’. Ajoutant : ’Quelle belle salle, on est bien’. Il embraie par « A nos cœurs solitaires ». Son toucher délicat aux claviers est en parfaite osmose avec les cordes de la harpiste.

Il explique avoir eu trois trous dans le bras et deux en plus car il a fait deux fois la covid. Au cours de cette période, il explique avoir sondé la toile sous toutes ses coutures. Il évoque son projet « Radeau des inutiles », né pendant le confinement, tout heureux de présenter ses chansons devant un parterre de 15 personnes. Il précise même avoir préparé les repas et s’être chargé de la vaisselle pour soigner ses spectateurs. Le radeau a été démonté depuis et Stephan, en soulevant sa guitare et en mettant son nez sur celle-ci, affirme qu’elle a été fabriquée dans le bois du radeau. Ce qui déclenche l’hilarité dans l’auditoire. Il invite 15 personnes à se lever et révèle qu’il s’agissait des spectateurs du déconfinement. Il en rigole en ajoutant que personne d’autre ne doit se lever. Son humour est décapant. Entre les chansons, l’Helvète marque de longues pauses, taquine le Jurassien Simon Gerber au-sujet des dialectes suisses, des accents corses et basques, évoque ses nouvelles passions :  le mentalisme et la magie. Le show est plein de petites trouvailles, construit autour de petits interludes amusants comme lorsque Simon Gerber cherche à s’accorder au diapason de verres de vin vides et à moitié plein. Ou quand Eicher nous demande de sortir nos portables pour enclencher le minuteur qui sonnera au beau milieu du titre que le groupe joue. Cet échange direct dégage immédiatement un climat de sympathie et lui permet de tisser un contact chaleureux avec les spectateurs. Pour changer, il nous propose une chanson plus classique, « Pas d'ami (comme toi) », et l’ambiance monte d’un cran.

Avant d’entamer « Lieblingsläbe », il confie qu’à Berne, il causait bernois et qu’il existait une colonie de 7 Jurassiens à laquelle appartenait son bassiste. Il en remet une couche : ‘C’est comme en Belgique !’. Puis, il interprète cette belle chanson d’amour. Il embraie par le tube « Combien de temps ». Il fait la moue et demande à sa harpiste de jouer un peu. Il commence à rayonner. Il regarde les coffres placés en arrière-plan et signale qu’ils sont suisses et forts. Les portes s’ouvrent et révèlent des automates (tuyaux d’orgue, percus et glockenspiel), comme sortis des films expressionnistes allemands d’un siècle plus tôt, qui entament la compo. Magique !

Au piano, aux claviers et aux programmations, Reyn concocte des sonorités électro diaboliquement séduisantes. Derrière sa harpe, Noémie Von Felten apporte quelque chose d’unique, développe de douces sonorités et crée une atmosphère relaxante et féérique.

Plus d’une fois, le chanteur nous prend par surprise en osant de magnifiques versions de ces classiques trentenaires que sont « Pas d’ami (comme toi) », « Des hauts, des bas », « Combien de temps » ou cette sublime adaptation en piano/voix de « Tu ne me dois rien ». Des titres qui nous rendent nostalgiques.

Avant d’aborder « Eisbär », il nous parle de son frère (en compagnie duquel il a fondé Grauzone). La formation va publier son second opus, 40 ans après le premier. Il n’en oublie pas ce « Déjeuner en Paix », devenu anthologique…

Stephan Eicher et sa troupe vont quand même accorder un rappel de deux morceaux, pratique dont il n’est pas du tout friand. Tout d’abord, « Eclaircie », un dixième extrait d’« Ode » et puis encore « Djian's Waltz » …

Setlist : « Sans Contact », « A Nos Coeurs Solitaires », « Pas d'Ami (Comme Toi) », « Le Plus Léger Au Monde », « Tous Les Bars », « Prisonnière », « Orage », « Voyage », « Des Hauts, Des Bas », « Lieblingsläbe », « Combien De Temps », « Rêverie », « 1000 Vies », « Je Te Mentirais Disant », « Doux Dos », « Autour De Ton Cou », « Eisbär » (Grauzone song), « Déjeuner En Paix », « Ce Qui Me Peine », « Tu Ne Me Dois Rien ».

Rappel : « Eclaircie », « Djian's Waltz ».

(Organisation : Live Nation)

Preoccupations

Complexe et brouillon…

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C’est en 2015 que ce groupe canadien (NDR : il est issu de Calgary, en Alberta) s’est décidé de changer son patronyme en Preoccupations. Jusqu’alors, il s’appelait Viet Cong, et ce choix créait de plus en plus de polémiques, à cause des massacres perpétrés par cette organisation révolutionnaire communiste, lors de la guerre du Viet Nam. A tel point, que certains organisateurs avaient annulé ou refusé certains concerts en raison du nom plus que controversé.

Responsable d’un excellent elpee (« Arrangements »), paru en septembre dernier, la formation était donc programmée à l’Aéronef de Lille, ce mercredi 22 février. Il doit y avoir plus ou moins 200 personnes, dans la salle.

Première mauvaise nouvelle, Drahla, qui devait assurer le supporting act, a déclaré forfait. Certains membres du groupe ont chopé la COVID. Décidément, il faudra du temps pour se débarrasser totalement de cette pandémie. On débarque donc, un quart d’heure avant le début du set de Preoccupations…

Qui s’ouvre par « Fix Bayonets ! », le premier morceau du quatrième et dernier opus. Surprise, Matt Flegel ne se consacre plus à la basse, mais exclusivement au chant ! C’est son frère qui le supplée, le line up se produisant dès lors sous la forme d’un quintet. Mike Wallace se charge toujours des drums et Scott Munro (NDR : il pourrait jouer le rôle principal dans un biopic consacré à Jésus Christ) ainsi que Daniel Christiansen (NDR : de petite taille et la chevelure bouclée), des guitares, mais également des claviers. Le tempo est martial, mais on a l’impression que le batteur frappe sur des casseroles. Le son n’est pas bon. Problème de balances, de mixing ou manque de cohésion du combo ? Etonnant, car suivant les échos recueillis, lors de sa prestation au club de l’AB, à Bruxelles, le concert était, paraît-il, impeccable…

Le band aligne les 7 morceaux de son long playing « Arrangements », sans autres interruptions que des intermèdes instrumentaux, conférant à l’œuvre une impression de concept album. Mais la ligne de basse a beau être cotonneuse sur « Ricochet » et les guitares se mettre à gémir tout au long de « Death of melody », les arrangements (NDR : un comble !) sont trop approximatifs. Encore qu’au fil du temps, les différents instruments commencent à mieux se coordonner. Ainsi, les deux sixcordistes parviennent à faire carillonner leurs cordes au sein d’un climat brumeux. Mais la voix de Matt est particulièrement écorchée, alors que sur disque, grave, austère, mais bien timbrée, elle rappelle parfois celle de Ian Anderson (Jethro Tull).

La formation prend alors une courte pause, et Flegel en profite pour présenter ses musicos. 

Le contagieux « Continental Shelf » prend le relais et on perçoit bien les sonorités de grattes bringuebalantes et surtout vertigineuses, réminiscentes des Smiths. Plus enlevé « Silhouettes » est boosté par le drumming frénétique de Wallace. Qui enlève ensuite le haut, terminant le set torse-nu. Les riffs de guitares giclent littéralement tout au long de « Bunker buster », la fin de parcours s’enfonçant au cœur d’une forme de délire sonore. Un constat s’impose, les compos sont particulièrement complexes. Retour à la mélodie pour « Disarray », même si la fin du morceau devient hypnotique.

Un sens mélodique qu’on retrouve au début de « Memory », une composition de plus de 10’. Et si votre serviteur n’a pas regardé sa montre, le morceau a certainement débordé ce timing. Il change d’abord de tempo et de mélodie avant de s’enfoncer dans l’expérimentation éthérée, puis de déraper dans l’apocalypse…

Le set de Preoccupations s’achève par un titre du répertoire de Viet Cong, « March of progress », une autre composition atmosphérique alimentée par les deux claviers d’abord, imprimé sur un rythme tribal, avant que le drummer ne se mette à accélérer l’allure et puis d’embrayer sur un tempo plus tribal, sur une musique complexe rappelant parfois The Dodos. Le morceau à peine terminé, les musiciens se retirent, alors que les baffles crachent « The model » de Kraftwerk…

Photos (Ludovic Vandenweghe) ici

 Setlist

Fix Bayonets !
Ricochet
Death of Melody
Slowly
Advisor
Recalibrate
Tearing Up the Grass
Continental Shelf
Silhouettes
Bunker Buster
Disarray
Memory
March of Progress

(Organisation : Aéronef Lille)

Daan

Un régal!

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Agé de 54 ans, Daan Stuyven, mieux connu sous son prénom, est un compositeur, chanteur, guitariste et acteur louvaniste. Son registre musical oscille du rock à l'électro, en passant par les ballades, qu’il interprète d’une voix de crooner, souvent en anglais, parfois en français. Son treizième elpee solo, « The Ride », est paru en novembre dernier. En parallèle à son parcours en solitaire, il compose des musiques de films, mais surtout drive Dead Man Ray, une formation fondée en 1997, au sein de laquelle militait, à ses débuts, Rudy Trouvé (dEUS).

Pas de première partie. Le concert commence à 20h30 précises et il est sold out depuis longtemps. Le fidèle backing group de Daan réunit toujours Isolde Lasoen (drums, percus), Jeroen Swinnen (claviers, synthés), Jean-François Assy (basse), Jo Hermans (trompette, bugle) et enfin, bonnet de couleur noire enfoncé sur le crâne, Geoffrey Burton (guitare). Vêtu d’un costume bleu ciel, d’une cravate noire et de baskets bleu foncé, Daan est chaussé de ses habituelles lunettes fumées sur le nez. Il s’accompagne à la guitare, tour à tour d’une semi acoustique d’un noir jais ou d’une électrique d’un bleu pétant.

Le set s’ouvre par « Western », un long instrumental filmique de près de 5 minutes, sorte de Sergio Leone 2.0. Jean-François a empoigné un banjo. L’idée n’est pas mauvaise et nous entraîne à réaliser un petit voyage dans les grandes plaines des States, à moins que ce ne soit dans les Ardennes, du côté de Manhay, endroit choisi pour illustrer le titre d’un de ses long playings (NDR :  Daan l'a initialement composé en 10 variations différentes pour ‘Rookie’, le premier film de Lieven Van Baelen, un drame qui se déroule sur et en dehors d'un circuit, mettant en scène des motos de course débridées et des cow-boys mélancoliques qui les chevauchent). Particulièrement électro, « Women And Children » est dynamisé par les percus d’Hermans (NDR : qui a alors abandonné sa trompette) et d’Isolde, alors que soutenue par cette dernière aux chœurs, Daan chante d’une voix de crooner. L’artiste ôte sa veste juste avant d’attaquer « 16 Men », puis sa cravate avant « Exes », car il a chaud. Ensuite, il relève les manches de sa chemise en signalant qu’il s’arrêtait là. Ce qui déclenche l’hilarité dans la foule. Il semble prendre du plaisir à se produire au Zik-Zak et déclare être content de remonter sur les planches. Jeroen nappe « Icon » de ses claviers, un autre extrait de « Simple » ; puis Isolde en accélère le tempo alors que Daan pose sa voix de baryton. Entre espoir et désespoir, « The Valley » compare la vie à un voyage dans une vallée où tantôt vous êtes seul, mais parfois vous êtes entouré de tous ceux que vous aimez.

Il serait injuste de ne pas signaler le rôle de Jo Hermans, dont les interventions aux cuivres sont toujours judicieuses. Et puis, c’est un excellent ambianceur, incitant régulièrement le public à frapper dans les mains et à se remuer. Il joint d’ailleurs souvent, le geste à la parole.

Daan nous réserve trois morceaux interprétés dans un français impeccable. Tout d’abord « Parfaits mensonges », au cours duquel il se révèle impérial. Mais également « La Crise », celle de la quarantaine, et « La Vraie Décadence ». Des plages issues de l’opus « Le franc Belge », publié en 2013. Des chansons d’amour qu’il chante à la manière du rockeur français, Dick Rivers. Puissant, « Victory » libère des sonorités singulièrement vintages. Et celles de « Be Loved » le sont tout autant, mais probablement produites par un orgue Hammond, elles donnent l’impression d’émaner d’une église (norvégienne ?).

Le set s’achève par l’électro « Best Days ». Jeroen en profite pour mettre le souk aux claviers.

Et toute l’équipe va encore nous accorder un rappel de 4 titres. Un régal de 75’ au cours duquel Daan aura interprété les 10 pistes du dernier opus, en modulant sa voix du grave à l’aigu, sans aucune difficulté.

Daan se produira à l’Ancienne Belgique le 26 avril prochain.

Setlist : « Western », « Women And Children », « 16 Men », « Exes », « Icon », « The Valley », « The Dancer », « Kill », « Parfaits mensonges », « La Crise », « La Vraie Décadence », « Victory », « Be Loved », « High », « Best Days ».

Rappel : « Morning Sun », « The Player », « Swedish Designer Drugs », « Housewife »

(Organisation : Ether Agency)

 

Crows

Entre post punk, funk blanc, psychédélisme et garage…

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Bien que fondé en 2012, Crows n’a publié son deuxième opus, « Beware believers » (NDR : pour lire ou relire la chronique, c’est ici

) qu’en août de l’an dernier. Un album qui faisait suite à « Silver tongues », paru en 2019. Le quatuor londonien s’inscrit dans la nouvelle mouvance du rock britannique, à l’instar de The Murder Capital, IDLES, Fontaines DC, Shame et TV Priest. En outre, il jouit d’une solide réputation ‘live’, en Grande-Bretagne. Il se produisait au club de l’Aéronef, ce samedi 11 févier. Plus ou moins 250 personnes pour accueillir le band ! La salle est donc bien remplie.

C’est la formation australienne Clamm qui assure le supporting act. Ce trio power punk avait accordé un set particulièrement brillant lors de son passage au festival Leffingeleuren, en 2022. En outre, sur disque, quoique sauvage, (deux albums à son actif, « Beseech me » en 2021 et « Care » en 2002), sa musique tient la route. Depuis, la formation a subi quelques modifications de line up. La bassiste, Maisie Everett, a cédé le relais à Stella Rennex, pour se concentrer pleinement sur son groupe, Belair Lip Bombs. Mais cette dernière ne participe pas à la tournée européenne. Elle est remplacée par un autre musicien. Enfin, le drummer, Miles Harding, n’a pas fait le déplacement, non plus. C’est Alan Jones, le bassiste de la première heure, qui siège derrière les fûts.

Tout un remue-ménage qui explique, sans aucun doute, le manque de cohésion de l’ensemble. Les titres sont courts et écrasants. Finalement, seul Jack Summers, le chanteur/guitariste tente de tracer le fil rouge d’une expression sonore monocorde, assourdissante et dont les mélodies devaient certainement se cacher sous un mur de bruit. 45’ de set, c’était même beaucoup trop long pour nos pauvres portugaises…

Pour les photos, c’est

Place ensuite à Crows. Un quatuor réunissant le batteur Sam Lister, le guitariste (NDR : barbu et une veste en jeans sur le dos), Steve Gossard, le bassiste Jith Amarasinghe (NDR : il a un petit air à la Jamel Debbouze) et le chanteur James Cox. Qui se sert de deux microphones : un ordinaire et un astatique. Tantôt séparément, tantôt ensemble. Et quand il tient leurs supports en main, on a l’impression qu’il se prépare à s’élancer sur une piste de ski…

Le concert s’ouvre par « Silver tongues », le titre maître du premier long playing. Lancinante, imprimée sur un tempo tribal dans l’esprit des Cramps, cette compo est abrasée par le delay et le fuzz dispensés par la gratte de Steve. James Cox descend dans le public pendant le plus punk « Garden of England », un morceau au cours duquel, sa voix est particulièrement réverbérée. Manifestement, son charisme a de quoi impressionner. Régulièrement, il balbutie quelques mots en français, du style ‘Ça va ?’. Dès « Wednesday’s child », martelé d’une frappe sèche par Sam, le public commence à déménager au sein des premiers rangs. La ligne de basse devient caoutchouteuse tout au long de l’hypnotique « Slowly separate », et le spectre de la bande à feu Lux Interior se remet à planer. « Only time » emprunte le rythme d’un convoi ferroviaire lancé à toute allure. « Closer still » s’avère plus lourd et puissant. Le guitariste ôte sa veste avant que le band n’attaque le fiévreux « Healing ». Puis, Crows nous réserve une toute nouvelle compo, qui évolue sur un mid tempo. « The Itch » alterne passages plus calmes et périodes explosives. C’est alors que Cox emprunte certaines intonations à Mark Burgess (The Chameleons). Et pour le spectateur, difficile de se détourner les yeux de ce showman.

Point d’orgue du set, le syncopé « Room 156 » est carrément hanté par le « What we all want » de Gang of Four, un morceau que pilote le drumming martial et percutant de Sam. La foule devant le podium est de plus en plus houleuse. Et un intrépide se lance dans le crowdsurfing. Un tempo similaire contamine le tout aussi fameux « Hang me high », un titre que le gratteur charge de fuzz. La ligne de basse rebondissante conduit l’hymnique et parfois psychédélique, « SNAX ». D’abord rock’n’roll, « Chain of being » adopte progressivement un rythme infernal soutenu par les accords de basse indus et traversé d’éclats de sixcordes spatiaux.

Le rappel, « Pray », sera attaqué dans la foulée. Ce single décapant date de 2015 ; et particulièrement sauvage, il ressuscite les Stooges cuvée 1970 (« Fun house » et tout particulièrement son « Down in the street »).

Entre post punk, funk blanc, psychédélisme et garage, Crows a accordé, ce soir, un superbe concert !

Pour les photos, c’est ici

(Organisation : Aéronef)

Photos Ludovic Vandenweghe

 

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