Suite des festivités au Magasin 4 qui, depuis près d’un mois maintenant, fête ses vingt années de sévices.
Au menu du soir, du singe et du lapin, et bien plus encore à se mettre sous la dent…
Mesdames et messieurs, veuillez prendre place.
Voici le menu.
Pour toute ‘mise en bouche’, rien de tel que du Lapin Cru.
Il mijote parmi les convives, puisque jeté directement à même le sol, ici, devant la scène.
Cru et désossé, la chair bien visible.
Un parterre de curieux s’installe donc tout autour du duo qui s’agite frénétiquement, l’un arc-bouté sur ses fûts, l’autre sur son manche électrifié.
Forcément tendue, au bord de la rupture, la musique se déploie en ondes saccadées, brisées, épousant des pics d’agressivité, haletante ici, reprenant son souffle par là.
C’est que tout lapin qu’il soit, il nous a grugé !
Pas question que la bête se laisse manger toute crue.
Il faut donc se lancer à sa poursuite, se glisser dans les interstices qu’elle épouse, se glisser comme elle dans la fange, grimper et dévaler les sommets à son rythme effréné.
Ce qui bien entendu en laisse quelques uns sur le carreau.
Ceux pour qui l’effort n’est pas de mise.
Pas encore. Pas si tôt.
Le cercle se délie donc autour du combo.
Au bout du compte, Lapin Cru s’abandonne aux papilles auditives des spectateurs accrochés à leurs sonorités escarpées.
Bravo l’animal ! Tu t’es bien défendu !
D’Adolina, combo de chez nous, on ne sait que peu de choses au départ.
Étonnant puisqu’il existe depuis 98.
Menant sa barque en toute discrétion mais en manifestant énormément de foi et d’abnégation, il est donc inclus sur une bien belle affiche.
Un mélange de styles plutôt bien digérés, mais dénué d’originalité.
Attention, ce n’est pas un reproche.
Chercher à tout prix l’originalité équivaut souvent à vouloir en faire trop.
Ce qui manifestement n’est absolument pas dans l’optique du groupe.
Adolina se contente donc de s’exprimer dans un style déjà maintes fois remanié mais aux angles toujours aussi pointus et tranchants, de Shellac à Chevreuil pour ne citer qu’eux.
En résulte un set efficace qui se suit très agréablement depuis le bar.
Amputée d’un membre, et pas n’importe lequel (!) la soirée en est déjà à sa deuxième moitié.
Les Liégeois d’Ultraphallus ont dû renoncer pour cause de naissance imminente ; on passe donc illico à Hey Colossus.
Et là, on embraie en enclenchant le braquet supérieur.
« Cuckoo Live Life Like Cuckoo », leur dernier album en date, est sorti l’année dernière. La formation britannique est donc déjà solidement armée, mais elle a amené, en outre, dans ses bagages quelques nouvelles compos qui tracent définitivement leur route dans cette belle nuit.
Solide pont transgenre, leur musique a récemment pris ses marques et se distingue nettement de leurs premières traces discographiques.
Émancipée d’influences trop évidentes, l’identité de Hey Colossus s’affiche donc à présent sans masque et éclabousse de sa superbe.
Tendue et sujette à d’innombrables revirements, pleine de surprises et délicieusement retors.
Tantôt rampante, tantôt cinglante, lourde et menaçante, l’ombre de ce colosse s’étend et m’enveloppe tout entier.
Une gifle colossale assenée par une main de velours gantée de fer.
Je resterais bien pantois si je n’étais autant excité.
Entre hypnose syncopée et injection d’adrénaline sous-cutanée, le corps de ce géant, qui en est encore en pleine croissance, s’agite sur scène et l’impact de ses grondements résonne puissamment, me captivant totalement.
Une prestation qui pourrait presque faire de l’ombre à Part Chimp.
Mais c’est sans compter sur l’efficacité du combo londonien, tout heureux d’être à nouveau présent sur notre territoire, après un dernier passage qui datait quand même de deux mille onze (c’était au VK et nous y étions).
Après avoir disparu un temps de nos radars, ceux-ci répondent donc présents à l’invitation du Magasin 4.
Une excellente décision puisque c’est un plaisir de découvrir que non seulement, Tim Cedar et sa bande n’ont rien perdu de leur gouaille, mais qu’en plus, de nouveaux titres ont depuis vu le jour.
Un album en préparation, donc. Quelle bonne nouvelle !
Alors forcément, pour l’occasion, je me suis muni de mes jambes d’antan.
Et c’est euphorique que je les balance frénétiquement sous mon torse gonflé d’enthousiasme puéril, profitant de cette bouffée d’air juvénile.
Prenant autant de plaisir que l’assistance, Part Chimp découpe donc son set de tranches bien saignantes, juteuses à souhait.
Reviens deux fois sur scène, et se plie au jeu des rappels.
Les ‘classiques’ « Trad » ou encore l’incontournable « 30,000,000,000,000,000 People » vont générer, inévitablement, de joyeuses vagues parmi la foule enthousiaste.
Courte mais incisive, leur prestation laisse la marque d’un retour réussi, et elle réclame déjà un nouveau retour chez nous, bien plus rapidement cette fois.
Promis, le band reviendra l’année prochaine.
Alors on se quitte, on s’embrasse et on se tient au courant.
Allez, à bientôt les gars !
Sur ce, j’abandonne le lieu des festivités.
J’ai encore perdu un peu de mes facultés auditives.
Ça zune et ça bourdonne dans les oreilles.
Mais si c’est là le tribut à payer pour revivre de tel moment, alors, demain, je veux bien aller m’acheter un sonotone !
Crever concert ! Comme dirait un certain Zoulk…
(Organisation Magasin 4)