Une importante colonie britannique avait effectué le déplacement pour venir assister au set de la sensation outre-Manche du moment ; un concert qui affichait complet depuis plusieurs semaines déjà ! Ce soir, la langue de Shakespeare irradie les airs du Botanique et plus particulièrement ceux du bar, soldout lui aussi du début à la fin de la soirée.
Tandis que la bière coule à flot près du zinc, la formation classique danoise (chant - guitares - basse - batterie) d’Annasaid se produit devant un public clairsemé et timide pour assurer la première partie du spectacle. Pourtant annoncée comme la nouvelle sensation de la scène rock danoise et encensée par le célèbre magazine de rock anglais NME, cette dernière ne remue pas vraiment les foules. Cependant, ces artistes font leur job sans complexe et comptent assurément défendre leur quatrième Ep « Well, Well, Well ». Le quatuor danois envoie le bois pendant 35 minutes et distille un punk-rock sans fioriture mais efficace.
Transition frappante lorsque Florence Welch et sa gracile bohème foulent délicatement les planches de l’Orangerie. Florence & The Machine est venu nous présenter sa pop baroque et chic. D’emblée, le décor en témoigne. C’est au centre d’un salon cosy orné d’un ‘wallpaper’ aux fleurs blanches qui pleurent en coton, de cages d’oiseaux éclairées qui éclaboussent la scène de douces lumières intimistes et d’un pied de micro couronné de plantes et de fleurs que les six ambassadeurs du bon goût britannique parsèment anarchiquement la scène pour nous présenter leur premier opus « Lungs », sorti ce 6 juillet dernier.
Après avoir reçu le prix de la critique au Brit Award 2009, sa prestation au festival de Glastonbury, ses premières parties de Blur (…), Florence Welch use de la joliesse et de la bouleversante limpidité de sa voix avec une naturelle assurance. Voix admirablement servie par les talentueux musiciens dont elle a su habilement s’entourer (The Machine). Si l’on y ajoute des textes métaphoriques en forme d’‘histoires qui ont des conséquences et des problèmes étranges de morale’, l’ensemble est renversant.
Quant au registre musical, il est atteint du syndrome de la tour de fromage français. On y trouve un peu de tout : du tendre, du moelleux, du sec, du piquant… Tantôt mélancolique, tantôt emportée, la jeune Londonienne glisse spontanément de la pop nostalgique à la musique psychédélique des années 70 en passant par un punk-rock ou à un folk enragé. Souvent comparée aux nouvelles artistes féminines britanniques (Lily Allen, Kate Nash, Duffy…), elle évoquerait davantage le chaînon manquant entre PJ Harvey et Kate Bush. Ou dans une moindre mesure entre Feist et Bat For Lashes…
Florence & The Machine est parvenu à faire patienter le public durant une heure avant qu’il ne puisse goûter à la délicieuse voix de Welch. Seule sur scène et tambourinant de la main droite sur une caisse claire, la belle glace les spectateurs d’admiration de sa voix claire et puissante sur les deux premiers morceaux (« Bird Song » et « Coffins »). Le tubesque « Kiss With A Fist » rompt subitement ce pop-folk doux- amer pour nous écraser littéralement sous un pop-rock aux limites du punk. Quant à « Drumming Song », il nous secoue de sa rythmique dantesque. Hormis une batterie autoritaire et omniprésente portant radicalement la voix de la jeune chanteuse anglaise à des sommets de puissance, tous les instruments se mettent en valeur et modifient les genres. Autre marque de fabrique du groupe : la harpe. Avec ses notes féériques et délicates, elle se fait d’ailleurs merveilleusement remarquer sur « I’m Not Calling You ». Chanteuse et musiciens se répondent en écho pour créer une étoffe sonore originale, riche, harmonieuse. Enfin, on décèle les influences marquantes du groupe puisées chez Bat For Lashes sur « Cosmic Love » et « Blinding ».
Un répertoire intelligemment construit qui porte, crescendo, le public jusqu’à l’explosion ! Alors que la salle est en ébullition, le sextet britannique ne revient que pour un seul et court rappel. Trois étaient originellement prévus sur la setlist.
Une enchanteresse soirée de plus dans les méandres du Botanique.
(Organisation Botanique)