Il y a un an et demi, ce disque merveilleux attirait l'œil du chaland sur les rayons de tous les bons disquaires : les couleurs vives et l'absence de toute référence sur la pochette intriguaient, à se demander quel était cet objet tape-à-l'œil qui ressemblait plus à un emballage de friandises qu'à celle d'un CD normal. Une fois inséré dans le lecteur et le casque sur les oreilles, quelle n'était pas la surprise de l'auditeur aventureux d'entendre que cet O.M.N.I. (Objet Musical Non Identifié) n'était autre qu'un petit chef-d'œuvre d'électro soyeuse et sensuelle, bâti comme une cathédrale de sons rieurs et de boucles enivrantes. " Lemon Jelly " s'appelait cette splendeur, en fait un duo britannique de gentils freaks, bien connu dans le milieu du clubbing londonien mais beaucoup moins ailleurs. Leur album, trois Ep's sortis en édition très limitée de 1998 à 2000, resta longtemps dans le lecteur, répandant harmonieusement ses symphonies de poche dans l'atmosphère, tout à coup respirable. L'allégresse provoquée par certains morceaux (" Nervous Tension ", samplant… Nana Mouskouri, " Homage To Patagonia ",…) rendait ce disque indispensable au réveil comme au coucher : Lemon Jelly devint la meilleure pommade musicale du moment, parfaite pour les blasés du quotidien et les militants anti-techno, à frictionner (au moins) une fois par jour pour garder la forme. Puis l'album disparut des bacs des disquaires, comme par enchantement. Ou plutôt comme par maléfice, tant notre oreille s'était habituée à ses mélodies mille-feuilles enchanteresses. Lemon Jelly, un (beau) rêve, une hallucination ? Et puis voilà que réapparaît cet album un an plus tard, en 2002, après des mois de doute et d'abattement à coller des avis de recherche sur les murs de tous les disquaires (" Wanted : Lemon Jelly, a cure for life ", ou quelque chose comme ça…). Une fois réinséré dans le lecteur, les doigts tremblants et les yeux fébriles, la même sensation que la première fois se fait à nouveau ressentir… Sauf que maintenant ce n'est plus une surprise, mais une certitude : cet album ne nous quittera plus et ses mélodies nous berceront pour toujours.