Daniel ‘Slick’ Ballinger est un très jeune bluesman. Originaire de la Caroline du Nord, il est à peine âgé de 23 ans. Il a déjà côtoyé les plus grands noms du blues, et en particulier les légendaires Pinetop Perkins, Hubert Sumlin, Big Bill Morganfield, Bob Margolin et même un vétéran de 94 ans qui répond au nom d’Othar Turner ; un personnage qu'il rejoint dès qu'il en a l’opportunité dans les collines du Mississippi. C'est ainsi qu'il a appris à jouer le blues authentique et primaire, sur le tas. Que ce soit lors de barbecues, de piqueniques, dans la nature, à l'église, dans les juke joints, il resitue les empreintes laissées par les légendaires bluesmen d'avant-guerre. En l’occurrence Robert, Johnson, Mississippi Fred McDowell, puis Muddy Waters ainsi que Ligthnin" Hopkins et plus près de nous, RL Burnside ou Junior Kimbrough. Slick est aussi devenu un spécialiste de la technique du picking pour la guitare, le célèbre Piedmont style. Progressivement Daniel se fait un nom. Il vient d'être signé par le label Oh Boy pour lequel il signe ce premier opus. Il est soutenu par Blind Mississippi Morris à l’harmonica et Leon Baker aux drums. La production est assurée par le célèbre Jim Gaines, assisté du claviériste anglais Tim Hinkley ; une belle preuve que notre jeune garçon représente un solide espoir. Les sessions d’enregistrement se sont déroulées à Stantonville, dans le Tennessee. Au cours des dernières années, il a appris le blues, le vrai, l'authentique, en vivant durant plusieurs mois auprès du vieux Othar Turner. Slick possède une voix particulière, jamais grave, un tantinet chevrotante. Il a tendance à crier son répertoire, un peu comme le faisait Johnny Winter. Ce qui rend sa musique très vivante…
Il aborde autoritairement le "Sugar Mama Blues" de John Lee Sonny Boy Williamson I. Il est superbement épaulé par l'harmonica de Blind Mississippi Morris. Originaire de Clarksdale, mais vivant à Memphis, ce dernier est un authentique bluesman noir. C’est également le cousin de Willie Dixon et de deux membres des légendaires Mississippi Sheiks. Imprimé sur un tempo soutenu, "You don't love me" poursuit avec beaucoup de conviction. Un autre canon du blues écrit par Willie Cobbs. Slick n'est pas un virtuose des cordes mais son efficacité est irréfragable. La quintessence de l’opus est atteinte par "Brotherhood blues". Du downhome blues à ras de terre, primaire, tellement naturel. Une plage qui sent bon les eaux boueuses du grand fleuve voisin. Morris est époustouflant lorsqu'il fait vivre sa musique à bouche. Excellent ! Si la voix n'est guère puissante, elle reste en permanence expressive. Le titre maître nous invite à participer à la fête du rythme. Ballinger nous emmène dans son juke joint boogie et embraie par "Let's get down". Morris n'y voit guère mais trouve toujours son chemin pour brûler les planches. Mais qu'est-ce qu'il vit son art le Slick ! Lorsqu'il est pénétré par son blues, on ne peut qu'être pris dans une tourmente interne. A l’instar de "Rosalie", abordé un peu à la manière de Lousiana Red. Un excellent blues basique. Un frisson parcourt votre échine lorsqu’il chante le "Bull Cow blues" de James ‘Son’ Thomas. Il se révèle aussi bouleversant sur son "Slow down" lorsqu'il fait vibrer ses cordes vocales. L'émotion est au rendez-vous! L’album s’achève par "Sleeping dogs lie", un country blues très rural. Et puis, surprise, Slick revient flanqué de ses musiciens pour nous accorder un bonus : "Talkin' bout Jesus". Une fois encore un boogie blues échevelé, chanté furieusement jusqu’à l'infini… De l'excellent juke joint blues!