Quand j’ai entendu sur les ondes et vu à la TV, Julien Doré dans son premier clip « Les limites », je me suis intéressé à lui. Sachant que le garçon avait participé et remporté une émission qui fabrique (soi-disant) les futures stars du paysage musical, j’avais quelques doutes… Mais il faut avouer que le gaillard ne laisse pas de marbre. J’ai donc entamé des recherches sur le net et jeté un œil sur son parcours dans ladite émission. Et là, surprise, le mec a non seulement un talent certain pour l’adaptation mais une forte personnalité. Elle est même hors du commun. Les morceaux ‘pourris’ qu’on lui demandait d’interpréter, il les réarrangeait à sa sauce et à tous les coups, c’était bingo ! Allez donc voir sur Youtube comment il est parvenu à transformer ces titres minables, c’est complètement ahurissant.
Quatre ou cinq ans plus tard, ce Méditerranéen compte déjà deux albums à son actif, « Ersatz » publié en 2009 et « Bichon » sorti deux ans plus tard.
Si son premier ouvrage suscitait la curiosité, il laissait l’auditeur quelque peu sur sa faim. Par contre son second et génial elpee ressuscite la sève d’une variété française seventies. Ce disque est d’excellente facture, très recherché, et hyper varié ; Julien y laisse déborder son imagination.
C’est pour « Bichon » et surtout pour voir ce gars sur les planches, et bien sûr ce qu’il a dans le ventre, que je me suis déplacé ce soir, à Bruxelles.
Quelques 1500 fans et/ou curieux étaient présents pour découvrir ce ‘prodige’ de la reprise décalée.
En attendant ‘la nouvelle star’, c’est à Waterllillies qu’incombait la tâche de faire patienter les francophones venus des 4 (?) coins de notre pays. Avouons in petto qu’ils se sont réellement très bien débrouillés, ces petits Français. Au sein de leur répertoire orienté pop/rock du meilleur acabit, ils chauffent la salle, à température idéale, pour la suite des événements.
Bien soutenus par l’équipe de Julien Doré, ils ont pu compter sur l’appui des pupitreurs et de la sonorisation prévus pour la vedette du soir. Rarement on voit une telle collaboration, voire complicité entre la ‘tête de série’ et les non-classés. Et ce ne sera pas tout…
Vingt et une heures, tout est prêt. Le décor est à l’image du personnage, trois lampadaires ringards sortis d’un grenier, un écran de télévision ne diffusant qu’un fond blanc et un panneau sur lequel est écrit ‘Julien Doré Orchestra’. Le second degré et le ridicule sont poussés à outrance. C’est du meilleur effet et vraiment marrant ! Les musiciens prennent possession de l’espace scénique pour une introduction d’une petite minute qui s’achève par de puissants coups de gong. Au dernier coup, apparaît le ‘papa du bichon’ dans une tenue complètement noire, parsemée de paillettes qui scintillent sur une veste recouvrant son marcel (noir aussi).
Julien présente d’emblée sa face cachée dès « Baie des anges », une splendide ballade sensuelle plus parlée que chantée, dans un style fort proche de Biolay. Pas rigolo, rigolo, mais tout en jeux de mots et musicalement très forte, cette compo démontre le talent d’écriture et la diversité musicale dont il est capable. Ensuite c’est armé de deux cymbales qu’il entame « Piano lys » où il assure le rythme avant de s’écrouler 4 minutes plus tard, visiblement au bord de l’épuisement. « Golf Bon Jovi » marque un retour à la case départ ; mais à la différence de Biolay, quand celui-ci nous semble parfois dans sa bulle, Doré est d’un comportement diamétralement opposé, sa gestuelle exubérante donnant une impression de ‘rigolade’ tout en énonçant des propos qui ne le sont pas vraiment.
C’est le début du show Julien Doré !
Le ton est donné et le véritable spectacle peut commencer. « Laisse avril », dernier hit en date, débute par un lancer de confettis géants. Cette superbe plage pop 5 étoiles est efficacement soutenue par des guitares omniprésentes et une voix excellente et puissante. La première partie du concert s’achève par « L’été summer » et le magnifique « First Lady » qu’il termine au balcon du premier étage avant de descendre parmi ses fans au risque de se casser le cou et il regagne son domaine de prédilection pour terminer cette chanson d’amour à l’humour décapant. Un moment fort !
Changement de décor pour la seconde partie du spectacle. Coiffé d’une couronne de fleurs du meilleur effet, Julien revient armé de sa mandoline pour entamer, en acoustique, la suite et la fin de son set. Contrebasse, guitare sèche, petite batterie portable et autre flûte à bec donnent le change. Les morceaux interprétés en anglais en toute simplicité, sans artifice mais avec l’aimable collaboration vocale de ses acolytes font mouche. On reste dans un registre amusant où la bonne humeur devient terriblement contagieuse.
Second grand moment de communion totale avec le public, « Winnipeg » fait danser et chanter tout le monde lors du refrain. Durant près de 10 minutes, on se régale de ce chassé croisé entre musiciens, public et chanteur.
L’heure du tube a sonné et c’est paradoxalement le moment le moins amusant de la soirée. Heureusement que « Kiss me forever » et ses deux danseurs délicieusement ridicules ont vite succédé aux « Limites » devenues un peu fades sans Yvette Horner, Remy Bricka, le danseur barbu ou la grosse dame blonde au petit chien.
« Campari », « Bleu canard » et « Glenn Close » rappellent ensuite que Julien Doré est un excellent parolier et non moins bon arrangeur avant d’être l’amuseur public qu’il donne l’impression d’incarner en permanence.
Mission accomplie pour ce fou chantant du 21ème siècle. Le public est dans sa poche, conquis par ces deux facettes d’une des personnalités les plus improbables de la chanson française.
Cerise sur le gâteau pour terminer cette soirée d’anthologie, Julien Doré débute « I need someone » le titre final, seul à la guitare. Mais rapidement, c’est la voix de David Bartholomé du haut de son balcon qui surgit pour épauler son ami avant d’être soutenu pour les chœurs par les musicos montés au balcon d’en face. Bel hommage de ce bougre de clown à un chanteur belge qui ne l’est pas moins…
Quand je vous disais que ce type avait un je ne sais pas quoi de spécial…
Ah oui, j’allais oublier de reparler des Waterllillies !
Et bien sachez que Julien Doré n’est pas un ingrat et qu’il sait très bien d’où il vient et comment il y est arrivé. C’est sans doute pour cette raison qu’il a convié ceux qui avaient pour tâche de ‘préparer’ son public à venir le rejoindre sur l’estrade pour interpréter ensemble (ils étaient une dizaine sur les planches) « Murder on a range rover ».
Quand j’vous l’disais qu’il avait un p’tit quelque chose de spécial…
Si vous l’avez raté, il ne vous restera plus qu’à courir la France, car sa dernière date prévue pour la Belgique, c’était ce 15 mars à Liège !
(Organisation Nada Booking)