Que celles et ceux qui ont manqué la prestation de Perfume Genius à la Rotonde, le 25 octobre dernier, se consolent : le spectacle livré par Mike Hadreas, ce vendredi soir à l’Orangerie, est à l’identique. Configuration, setlist, décor, rien n’a bougé. Un concert touchant mais pas indispensable à revisiter.
Mike Hadreas, artiste qui se cache derrière le pseudonyme Perfume Genius, joue d’une personnalité discrète, énigmatique mais, somme toute, captivante sur scène. Bien que sa performance délicate et, souvent, dangereusement fragile, ne puisse lutter contre une foule rock qui sent la bière, il parvient à captiver l’assistance. Résonances intimes tissées de petits riens qui émeuvent le public de l’Orangerie littéralement suspendu à chaque note, à chaque son émis par le petit génie de Seattle. Le silence absolu règne dans la salle. Ce défaut assumé, cette vulnérabilité même, le jeune imprudent les transmue en atout redoutable. Le résultat ? Un souffle tel qu’il n’en existe plus à l’heure où les disques en chambre affichent la même assurance que les superproductions.
Le décor nu, sans effets de lumière, habille une performance simple, limpide et délicate réalisée par deux pianistes/chanteurs. Sur scène, Mike Hadreas se réserve les ivoires et tâte parfois de la guitare acoustique. Il s’appuie sur un complice très discret aux claviers et au chant. Apport musical si faible que l’on serait tenté de croire que sa présence même servirait uniquement à rendre plus palpable la timidité du jeune musicien américain. A deux, ils forment un ensemble compact prenant essentiellement sa source dans le premier album judicieusement appelé « Learning ». Malgré la structure assez similaire de ces productions, le duo ne sombre cependant pas dans la monotonie.
Une voix tremblante de nervosité, un piano branlant, un son accidenté, un chant engourdi autour de mélodies fragiles, tels sont les principaux ingrédients. Ils confèrent à Perfume Genius un charisme incomparable. Les émotifs anonymes s’identifient et le charme opère. Une magie rare dont les dernières rencontres remontent à Elliott Smith ou Sufjan Stevens. Une hypersensibilité torturée comparable au paysage mental de Thom Yorke.
L’essentiel de son goût du spectaculaire, Perfume Genius le canalise dans ses textes. Les solistes de la soirée introduiront la hantise de « Mr. Peterson », « Look Out, Look Out » ainsi qu’une nouvelle compo en rappel. Un Mr. Peterson dont le goût amer laisserait comme un sillage étrange de parfum dans la conscience.
Si l’on en juge par la force de ce spectacle, le potentiel artistique du petit génie de Seattle et le dévouement manifesté par le public de l’Orangerie, le deuxième album semble de toute évidence sur la bonne voie. L’orchestration et la mise en scène devront cependant être repensées. Perfume Genius, un phénomène à suivre de près, de très près…
Perfume Genius