Après avoir vécu l’édition de l’an dernier qui avait accueilli Midlake ou encore Anna Calvi, dans la cité bouillonnante, j’ai donc remis le couvert pour assister à ce festival parallèle aux Ardentes. Un événement qui jouait en 2011, la carte de l’éclectisme et de la découverte. Son appellation ne souffrant d’aucun malentendu, l’accent était, bien entendu, placé sur les artistes en marge du ‘mainstream’. Jeunes talents en devenir ou valeurs (r)assurées, cette nouvelle a permis au public considéré comme le plus ‘chaud boulette’ de s’éclater et de frémir aux sons les plus divers.
Day two.
C'est dans un silence religieux imposé par une assistance des plus clairsemées, que Leaf House, collectif local, dispense les premières mesures de cette deuxième journée, placée sous la bannière étoilée des cœurs plaintifs. Puisant son inspiration dans le souffle des vents d'une Americana en suspens dans le temps et métissant sa musique d'apports electro pertinemment agencés en séquences subliminales, le jeune combo dépose au pied de l'autel de cette plage désertée quelques pétales de fleurs arrachées au balcon de cités noyées dans les brumes de la nuit. Nuancées et délicates, les compositions trouvent un écho timide auprès d'une assistance néanmoins très concentrée sur le sujet, type de respect relativement rare à l'entame d'un festival.
BRNS quant à lui, se charge d'électriser quelque peu l'ambiance par le biais d'un set peut-être un peu inégal, mais bien maîtrisé. Laissant l'excellent "Mexico" terminer leur prestation de superbe manière.
La première gifle de la soirée est assenée par Imany, beauté comorienne montée sur des jambes qui ne finissent jamais et dont la voix est sans conteste à l'instar de son physique d'ex-mannequin. Décortiquant les plages de son premier album, "The Shape Of A Brocken Heart", dont le titre évoque le parallèle subtil entre la forme du continent africain et la moitié d'un cœur brisé, cette grande artiste (dans tous les sens du terme) nous dévoile sa forte personnalité et son talent énorme. Drôle dans ses interventions et touchante dans ses textes, Imany capte l'attention par la grâce d'une technique vocale sans faille mais surtout par une présence scénique remarquable si l'on considère sa frêle silhouette, accompagnée le plus simplement du monde par une guitare acoustique. Sorte de Grace Jones métissée de Tracy Chapman, elle a du bagout et son humour est bien balancé. Bref, cette ex-star des podiums réussit brillamment son virage. Nul doute qu'on en reparlera.
L'atmosphère se drape alors dans des apparats de soie noire, lors de l'apparition du trio Fink. Le protégé du label Ninja Tune n'a pas son pareil pour ensorceler son auditoire en dispensant un folk sombre et pourtant lumineux, parcouru par sa voix au timbre habité par mille démons du passé. Emotions portées à leur paroxysme (en témoigne cette jeune fille en larmes du début à la fin du concert) et efficacité d'un set mené de main de maître basé sur le nouvel opus de cet esthète hors normes. Un moment poignant et à la hauteur des espérances.
Le final de cette seconde édition est donc laissé à Jean-Louis Murat, dont le mot de la fin se déclame en une sombre poésie où la langue française se conjugue au passé Baudelairien, à cheval sur les grands horizons américains. Fidèle à lui même, l'Auvergnat, dans un très bon jour, captive l'assistance en nous racontant ses histoires d'amours déchus et d'espoirs sans lendemain. Présentant son nouvel album ("Grand Lièvre"), le plus Indé des Français recueille un succès mérité pour sa prestation énergique et savamment équilibrée entre hier et aujourd'hui. Au delà du cliché de poète maudit, il affiche la classe d'un artiste n'ayant plus rien à prouver mais toujours un incroyable talent et surtout manifeste une envie insatiable d'aller toujours plus en avant. Chapeau bas, monsieur Murat.
Enfin, l'after party peut commencer à avaler la nuit, et dans son sillage, les échos d'un festival encore mineur, mais plus pour très longtemps.