Pour la seconde journée de la 24ème édition du festival des Inrocks, prévue à l’Aéronef de Lille, le public a débarqué en nombre. Si bien que l’étage est accessible. Faut dire que Foster The People et surtout Friendly Fires ont déjà acquis une belle popularité sur la scène musicale pop/rock. Et pourtant, le point d’orgue de la soirée nous viendra de Miles Kane…
Une bonne surprise pour commencer : Morning Parade. Un quintet issu de Harlow, en Essex, qui pratique une forme de britrock dans l’esprit de Coldplay, mais en plus dansant. Faut dire que le tempo imprimé par le drummer y contribue largement. La formule consomme cependant un peu plus d’électro. Et la présence d’un synthé n’y est pas étrangère. Les mélodies sont hymniques, contagieuses. La voix de Steve Sparrow bien timbrée et les accords de guitare dispensés par Chad Thomas, tour à tour puissants ou tintinnabulants. Le tout au cours d’un set bourré d’énergie, privilégiant les compos mid tempo. Si vous avez apprécié les débuts de la bande à Chris Martin, vous ne pouvez passer à côté de cette formation dont le premier véritable album devrait sortir l’an prochain.
Formation californienne (NDR : issue de Los Angeles, très exactement), Foster The People fait un véritable buzz pour l’instant. Un trio drivé par Mark Foster, chanteur/guitariste, rejoint par deux musiciens supplémentaires, en ‘live’, dont un multi-instrumentiste. Le groupe dépense beaucoup d’énergie sur les planches, pour finalement obtenir assez peu d’effets. Les percussions et les claviers fonctionnent à plein tube. Ils en usent et en abusent. Au point qu’on finit par avoir la tête qui vibre de l’intérieur. Cet attirail superficiel recouvre les couches musicales inférieures. Conclusion, on ne distingue plus grand-chose de plaisant. En outre, non content de gaver sa voix d’effets qui lassent rapidement, le chanteur se tape un marathon sur scène. Il accomplit des allers et venues incessants de droite à gauche de la scène. Faut croire qu’il n’a pas eu le temps de faire son jogging depuis trois jours. Et ce parcours finit aussi par nous fatiguer ! On dirait un poisson dans son aquarium (un peu survolté le poisson, c’est vrai). Et ce n’est pas le final « Pumped up kicks », dans une version dubstep/techno, qui nous permettra de reprendre son souffle… (Set list : “Houdini”, “Miss you” », “Life on the nickel”, “Call it what you want”, “Don’t stop”, “Helena Beat”, “Pumped up kids”)
Miles Kane, c’est la moitié de The Last Shadow Puppets, duo qu’il partage en compagnie d’Alex Turner, le leader d’Arctic Monkeys. Ex-Little Frames et ex-Rascals, il a décidé d’embrasser une carrière solo, en août 2009. Son premier opus personnel, « Colour of the trap », est d’ailleurs sorti cette année. Avant que le combo ne monte sur les planches, la sono diffuse à fond la caisse, un des meilleurs morceaux de Pink Floyd : « One of these days ». Kane a du goût ! Et dès le premier titre, « Invisible », il va nous le démontrer, empruntant même quelques phrasés de guitare au célèbre « Cold Turkey » du Plastic Ono Band. Il a un look plutôt mod. Surtout la coiffure qui me rappelle Paul Weller. Et curieusement, on retrouve des inflexions propres à l’ex-Jam dans la voix de Kane, une voix aussi juste que les mélodies. Pour ce show, il est soutenu par cinq musicos, dont un claviériste, responsable, suivant les circonstances, d’interventions d’orgue ‘manzarekiennes’. Le set carbure au bon rock à l’état pur ! Miles a une présence scénique indéniable. Il en impose même. Pourtant, il cause peu entre les morceaux. Faut dire que non seulement il se réserve les vocaux, mais aussi la guitare solo. Et ses riffs sont cinglants, torturés, décapants, mais tellement jouissifs. Du coup, on fait un bond en arrière de quelques décennies, pour se retrouver à la fin des sixties. Ça bouge, ça balance du son sans excès. Et au milieu de la prestation, on a même droit à un titre un peu plus calme et posé. De quoi reposer les oreilles pour repartir de plus belle et mettre à nouveau la gomme. On a même droit à une excellente cover du « Responsable » de Jacques Dutronc. Heureusement que Miles l’avait signalé, sans quoi nous ne l’aurions pas reconnue. A voir et à revoir, c’est une certitude ! (Set list : “Invisible”, “Counting”, “Rearrange”, “Kaka Boom”, “Telepathy”, “King Crawler”, “Responsible”, “Happenstance”, “Quicksand”, “Colour”, “Womans touch”, “Come closer”, “Inhaler”)
Friendly Fires s’était produit en 2008, au Splendid, dans le cadre du festival des Inrocks. Et il avait fait un malheur en dispensant un punk funk terriblement excitant. Un punk funk chargé de groove, contaminé par le shoegaze, l’électro et la pop et dynamisé par des percus latino, dignes du carnaval de Rio. Une sorte d’hybride entre !!! et Radio 4, si vous préférez. Le tout revisité par Franky Goes To Hollywood et LCD Soundsystem. En août dernier, Richard Turner, trompettiste qui rejoignait régulièrement le groupe en tournée, est décédé des suites d’une crise cardiaque. Il n’avait que 27 ans. Aujourd’hui, le trio bénéficie toujours de la présence du bassiste Rob Lee, en ‘live’, ainsi que d’une section de cuivres, soit un saxophoniste et un nouveau trompettiste. Le guitariste nous balance parfois des accords de gratte qui rappellent Steely Dan. Tout en sueur, la chemise complètement trempée, Ed Marcfarlane s’agite toujours autant sur les planches. Il existe même un énorme partage entre le chanteur et le public. Il arrive à l’enflammer en descendant au sein de l’auditoire. Mais après 3 ou 4 morceaux, le set commence à lasser. La formation semble figée dans une forme de soul/r&b basique constamment hanté par James Brown. A tel point qu’on a l’impression que toutes les compos se ressemblent. Ecrasantes, elles négligent les variations. La conquête du public s’effectue en force. Mais est-il judicieux de démontrer constamment sa toute-puissance, pour faire la différence ? (Set list : “Lovesick”, « “Jump in pool”, “Blue cassette”, “True love”, “On board”, “Skeleton boy”, “In the hospital”, “Live those days tonight”, “Hurting”, “Pull me back to earth”, “Paris”, “Hawaiian air”, “Kiss of life”)