Démontrant à nouveau que qualité, quantité et fréquentation ne sont pas des valeurs étroitement liées, les Ardentes ont enregistré, en 2014, un record d’affluence historique, accueillant 76 000 festivaliers.
S’il est fort à parier qu’une seule tête d’affiche soit parvenue à booster la vente de tickets pour cette édition, le phénomène n’est pas nouveau et reflète simplement l’engouement toujours grandissant d’un public bon enfant, qui tient absolument à participer à l’événement.
Pour les mélomanes les plus difficiles, la programmation définitive n’avait plus le même attrait que l’initiale. Et le prix du sésame n’était plus du tout proportionnel à la quantité de musique appréciée par un seul et même quidam.
Mais au demeurant, l’affiche concoctée est en tout point restée fidèle aux préceptes initiaux ; et cette recette, visant un public très diversifié, a de nouveau porté ses fruits.
À l’instar de son allée des saveurs, cette grande artère longeant le site et conduisant à sa scène principale, proposant à chaque pas effluves épicées et plaisirs du palais issus des quatre coins du monde.
Prenant soin d’éviter l’écoeurement et certain d’y trouver un minimum son compte, le festivalier n’a plus qu’à opérer ses choix et espérer que le temps soit de la partie…
Mais vu les dernières pluies, il restait donc à enfiler sa belle humeur imperméable et chausser ses plus belles bottes de caoutchouc.
Rendez-vous en terrain connu, entre jeunesse festive et vieux briscards à qui on ne la fait plus. Le compte-rendu des Ardentes 2014, c’est ici!
Alors qu’un boyau longiligne sépare cette année l’espace public en deux devant la scène principale, la boue, elle, s’est invitée tout autour, isolant du coup les premiers festivaliers sur un îlot encore propre et sec.
Quelques heures plus tard, un véritable déluge va transformer le site en zone marécageuse… y compris pour les prochains jours. Pourtant plusieurs milliers de braves vont affronter les intempéries pour assister au final de Shaka Ponk. Pas votre serviteur, qui a préféré réembarquer sur la première pirogue destinée à le ramener chez lui.
Avant de reprendre la Meuse, il a quand même fallu se farcir l’affiche du jour, pas très passionnante, il faut l’avouer.
En balançant la tête de gauche (Main Stage) à droite (HF6) et de droite à gauche, je chope une sorte de tournis qui n’est pourtant pas consécutif au mouvement de balancier infligé à mon cervelet. Finalement, j’aurais plutôt dû accepter de participer à une thalasso en famille. Et je me morfonds déjà en imaginant devoir subir une musique de fond, insipide…
Et, de quoi amplifier un sentiment de déception, les infos relatives au set exécuté par Ulysse, jeune formation liégeoise talentueuse, m’indiquent qu’il aurait fallu déjà être sur place. Fondée en 2013, elle est manifestement à suivre.
Héritant donc du titre d’espoir en devenir, ces jeunes pousses remportaient voici peu le tremplin des Ardentes, qui leur ouvrait les portes du HF6 en début d’après midi.
Un cadeau qui ne se refuse pas, même si d’avance, il est certain que la fréquentation du site en sera encore à ses balbutiements, à cette heure précoce du jour.
Ce qui du reste ne semble pas avoir terni la prestation de ces jeunes gens, dont l’electro subtilement teintée d’influences Indie Pop aura fait forte impression.
Frais, carrés, et faisant preuve d’une étonnante maturité, Ulysse semble voguer vers des horizons emplis de promesses.
Du coup, amputé de la moitié des prestations qui pourraient m’intéresser en ce premier jour, mon agenda ressemble à une peau de chagrin.
Essayant de trouver mon compte malgré tout et éprouvant le plus souvent un ennui profond, j’étire tant bien que mal ma patience jusqu’au set de Cats On Trees.
Loin d’être fascinant, il a le mérite de nous sortir de la déprime.
Les mélodies égratignées par le duo Toulousain s’accommodent fort bien des timides rayons de soleil qui à l’extérieur tentent de percer, tandis qu’à l’intérieur de ce grand hangar à l’acoustique approximative, l’ambiance est à la détente et à la bonne humeur.
Sans subjuguer l’auditoire, le groupe récolte quand même un accueil chaleureux, et par temps de disette, leur prestation est perçue comme salvatrice.
Servis par un light show habillant subtilement leurs statiques postures (difficile à blâmer dans la mesure où il s’agit d’un duo piano/batterie) et usant de ficelles évidentes pour aider le public à pénétrer leur univers, Nina Goern et Yohan Hennequin remplissent parfaitement leur contrat et nous offrent les premiers hochements de têtes approbateurs.
Ce qui hélas clôt le chapitre des bonnes nouvelles.
Si le Reggae sans réelle inspiration de Naâman et la loufoquerie de La Pegatina, sorte de sous-Mano Negra de supérette, invitent plus à la noyade qu’à l’acharnement, à force de gueuler depuis le fond de la plaine, une immonde boîte à muzak pour décérébrés va te forcer à t’enfoncer dans la boue et n’en ressortir que le lendemain. La House Of Bull d'un célèbre brasseur local se chargeant en effet d'assurer les interludes à grands coups de musique de kermesse.
Complètement immergé dans les artères du sol, les vociférations de Naughty Boy et de son crew me laissent indifférent et mon irrésistible désir de fuir à tout prix les immondes Shaka Ponk pousse ma barque à grands coups de rames.
Sillonnant sur un fleuve épais, j’entends au loin résonner les échos de Wiz Khalifa et les sirènes me murmurent que je ferais mieux de faire marche arrière.
Mais je m’entête, et du coup, rate ce qui semble bien avoir été la révélation du jour, bien loin des clichés ‘Bling Bling’ auxquels je m’attendais.
Quelques encablures plus loin, au sortir d’une grotte, j’aperçois de menaçants nuages foncer sur le site Ardentes ; et dans le tumulte de cet orage naissant, je regagne mes pénates.
(Organisation Ardentes)