Si hier, j’ai éprouvé les pires difficultés pour atteindre le parking de la gare de Bruges, suite à un trafic anormalement dense, ce dimanche, il est d’une fluidité élémentaire, même si en cours de route, je traverse quelques averses. Qui semblent avoir arrosé Bruges, quand je débarque dans le Minnewaterpark. Il y règne alors une chaleur quelque peu amazonienne. De quoi nous rappeler que ce soir, il y a la finale de la Coupe du Monde. Mais sans les Diables Rouges, ce n’est plus une priorité. D’autant plus que vu ce que l’équipe d’Argentine nous a montré jusqu’alors, le choix est vite fait…
En débarquant sur le site, Johan me signale que pendant le set de Jungle By Night, il est tombé une solide drache. Ce qui explique la présence de flaques d’eau dans les allées qui séparent les pelouses du parc.
A contrario de Tinariwen et Tamikrest, Bombino n’est pas un groupe touareg, mais un artiste touareg. Nigérien et non malien. En live, il est cependant soutenu par un backing group. Son cocktail de blues, roots, world et rock projette dans notre esprit des images du désert saharien. Sa voix nasillarde n’est pas transcendante, mais suffisamment distincte pour s’imposer face à une musique à la fois hypnotique, puissante et même très électrique ; une voix qui véhicule des lyrics particulièrement engagés…
School is Cool est un sextuor qui fait un énorme tabac dans le Nord du pays. Au cours des deux dernières années, il a d’ailleurs tourné à travers toute l’Europe ; et en particulier, participé aux festivals Werchter et Pukkelpop. Paru en 2011, « Entropology », le premier elpee a été mis en forme par Reinhard Vanbergen de Das Pop. Leur second, « Nature fear » a été autoproduit. Et il en émane une juvénile innocence. Johannes Genard en est le leader, mais également le chef d’orchestre, le chanteur et le guitariste. Combinant arrangements baroques, percussions ethniques dans un esprit punk, le combo libère une belle énergie sur les planches. En fin de parcours, il va même recevoir le concours de Mauro Pawlowski (dEUS, Evil Superstars). Sympa mais pas vraiment transcendant.
Intergalactic Lovers est une autre formation issue de Flandre dont la popularité y monte en flèche. Mais également aux Pays-Bas. Drivée par la gracieuse Lara Chadraoui, le band dispense une musique extrêmement soignée, raffinée même, très susceptible de produire des hits sur la bande FM. Leur nouvel opus, « Little Heavy Burdens », est paru en février dernier. Sur les planches, le combo manifeste un bel enthousiasme. Lara est une excellente show woman. Elle arpente le podium de gauche à droite et de droite à gauche. Et se tortille avec beaucoup d’expression autour de son mini-ordinateur. Parfois sa voix me fait penser à celle de Nina Persson des Cardigans. Le groupe est solide, les musicos sont excellents, les compos passent bien la rampe. Il ne manque plus à Intergalactic Lovers que le petit plus, l’originalité, qui puisse leur permettre de se démarquer de ses (nombreux) concurrents et ainsi de s’exporter. C’est tout le mal qu’on leur souhaite…
Il faut avouer que les deux derniers sets de Mark Lanegan auxquels j’ai assisté m’ont laissé sur ma faim. En 2011, il s’était produit en compagnie d’Isobel Campbell et j’ai failli m’endormir. En 2006, c’était au Pukkelpop, et là il avait tenté de sauver la prestation des Twilight Singers. Mais en deux morceaux, c’était peine perdue. Bref, suivant l’adage, nous l’attendions de pied ferme. Bonnet enfoncé sur le crâne, il monte sur l’estrade, flanqué d’un véritable backing group. Section rythmique et claviériste/organiste y compris. Il s’installe devant son micro et ne bougera quasiment plus de cette place pendant tout le show. Sa voix est toujours aussi râpeuse, nicotinée, ravagée par l’alcool et autres excès. Mais elle tient bien la route, surtout dans un contexte bien électrique, puisque le line up implique également deux gratteurs qui mettent la gomme comme à la belle époque des Screaming Trees. Et surprise (NDR : ou pas surprise, puisqu’il se produisait dans la foulée), Greg Dulli le rejoint sur l’estrade pour partager l’interprétation de deux morceaux, « Hit the city » et « Methamphetamine Blues », avant que tout ce beau monde ne tire sa révérence. Pas le concert du siècle, mais un bon concert !
Afghan Whigs vient donc de sortir un nouvel opus, « Do the beast », et on ne peut pas dire que la critique soit dithyrambique. Pourtant, cet elpee me botte bien, même s’il souffre quelque peu de l’absence du guitariste soliste Rick McCollum. Avant le show, en prenant le pouls autour de moi, je commence même à m’inquiéter. La voix de Greg Dulli ne serait plus à la hauteur… il aurait même recours à des tas d’artifices pour la maintenir à flots. Pas que de bonnes nouvelles. La troupe débarque sur le podium. Un sextuor : Greg au chant, un violoniste, un bassiste, un drummer et deux guitaristes. Perso, je me dis que ce n’est pas mal pensé. Vu les critiques relatives à l’absence du gratteur originel, rien de tel que de le remplacer par deux sixcordistes. C’est le crépuscule. Et le set peut commencer. Première constatation, la voix de Dulli tient parfaitement la route. Elle est éraillée, savoureuse, trempée dans la soul ou le blues, selon. Il y livre toute son âme, tout son corps. A deux titres près, le combo va interpréter l’ensemble de son dernier long playing. Sous ce line up, les compos prennent une autre dimension. Les guitares crachent le feu, crépitent, éclatent. Le violon virevolte. En outre, la setlist a le bon goût d’alterner nouveau et ancien répertoire. Et dans ce contexte, « Gentlemen », « My enemy » ou « Going to town » font absolument merveille. Retour d’ascenseur, Lanegan rejoint Afghan Whigs le temps de « Stations », reformant le temps d’une chanson, Gutter Twins. Et en finale, le band rend un bref hommage à Bobby Womack, en incluant « Across 110th street » au cœur de son « Faded ». Un grand moment !
Caribou, c’est le groupe dont tout le monde parle, pour l’instant. Daniel V. Snaith, de son véritable nom, est accompagné par trois autres musicos/bidouilleurs. Vêtus de blanc, le quatuor fait bloc au milieu de l’estrade. Manifestement leur électro ne manque ni de punch ni de groove. Et puis surtout leurs harmonies vocales sont superbes. Le site est balayé d’une multitude de faisceaux au laser. Bref, le light show est impressionnant. Mais après avoir vécu un concert comme celui d’Afghan Whigs, difficile de faire le vide dans son esprit. Je préfère donc rentrer au bercail. Demain, il y a Mogwai et surtout Massive Attack…
(Organisation Cactus)
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