Les Lokerse Feesten fêtent donc leurs 40 années d'existence en 2014. Et chaque édition consacre une journée au métal. Un ‘Metal’s day’ qui s’est donc déroulé ce dimanche 3 août. Au programme Channel Zero, Devin Townsend Project, Dimmu Borgir, Down, Motörhead et Within Temptation.
La formation belge Channel Zero ouvre les hostilités. Très tôt, puisqu’il est 16h30. Dans l’univers du métal noir, jaune, rouge, il s’agit certainement de la formation la plus ancienne. Fondée en 1990, elle s’est inspirée de « She Watched Channel Zero », une compo du groupe de rap américain Public Enemy, pour choisir son patronyme. Le combo s’était séparé en 1997, avant de se reformer en 2010. A 7 reprises elle parvient alors à remplir, une institution comme l'Ancienne Belgique. Malheureusement, le 10 août 2013, Phil Baheux, le drummer, décède inopinément. Juste avant un concert que le band devait accorder dans le cadre du Brussels Summer Festival. Il s’y produira, mais pour y dispenser un bref mais émouvant set acoustique en hommage à leur batteur. C.Z. décide néanmoins de poursuivre l’aventure, et recrute Seven Antonopoulos, un musicien grec, pour participer aux prestations ‘live’, comme préposé aux fûts. « Kill All Kings », leur nouvel elpee, paraît début 2014, un disque qu'il vient défendre au sein d’une AB sold out le 11/04/2014.
Franky De Smet Van Damme (NDR : fier de son nouveau micro), le toujours aussi fringant bassiste Tino Di Martino et le gratteur Mikey Doling, sont bien accompagnés par le nouveau drummer hellène, Seven Antonopoulos. Le set ne va cependant pas dépasser les trois-quarts d’heure. Une petite déception quand on est apprécie tout particulièrement le meilleur groupe belge de métal.
Suivant un certain rituel, Franky s’asperge la tête d’eau, et en réserve également à la foule. Toni partage également ces ablutions, puisqu’il en reçoit dans la nuque. Le vocaliste est en forme. Véritable boute-en-train, il s’autorise même, en fin de parcours, un petit périple au-delà des barrières afin de rejoindre son auditoire. Et le drummer a également la pêche, puisqu’il parvient à briser la pédale de la grosse caisse. Un incident rapidement réparé par les roadies. Entre le quatuor et les spectateurs, l’interactivité est parfaite. Lorsque Mikey a soif, il affone une bière. Moment choisi par Franky pour lui placer le micro sous le menton, afin de bien répercuter le rot salvateur de Mikey. Bourrés d’énergie, les compos défilent : « Feed'Em Witch A Brick », « Hot Sumer », « Suck My Energy », « Dark Passanger », « Electric Cocaine » et en finale, l’incontournable « Black Fuel ». Le quatuor rend également un hommage à Phil, leur ami disparu, lors d’un « Angels » particulièrement électrique. Un set court, puissant, mais bigrement excitant…
Agé de 42 ans, Devin Townsend drive donc son propre band. Talentueux sixcordiste, il a été découvert par un des maîtres sur l’instrument, Steve Vai. A l’époque, le Canadien vient à peine de fêter ses 19 printemps. Et le New-yorkais lui propose d'enregistrer sous sa houlette, « Sex And Religion ». Suite au départ de Robert Halford, Judas Priest propose également à Devin, la place vacante de chanteur. Devin décline l'offre et préfère se concentrer sur sa carrière en solo. Qu’il entame d'abord sous son propre nom ; avant de lui coller, dès 2009, le qualificatif Project. Devin est également venu défendre son nouvel album, « Casualties Of Cool », paru en avril. La plaine est déjà bien garnie. Le leader est soutenu par un second gratteur, un bassiste dont la barbe est aussi fournie que celle de Léopold II et drummer, qui malgré ses frappes frénétiques, se révèle avant tout efficace. Voire même exceptionnel…
Le show s’ouvre par un « Seventh Wave » plutôt pompeux. Les interventions de Devin sur son manche sont magistrales. Mais le son manque de netteté, fait tellement rare à Lokeren, qu’il faut le souligner. Faut dire que les accès de basse sont trop envahissants. Pour préserver mes fragiles tympans, les boules-Quiès sont de rigueur. « War » baigne dans une même emphase. Heureusement, Devin maîtrise bien sa voix. Tout comme sa guitare. Il arpente constamment l’estrade. La musique de Devin Townsend Project est le fruit d’un mélange bien équilibré entre death, thrash, black et indus. Une fusion de formes métalliques extrêmes. Pourtant, quoique puissante, l’expression sonore peut se révéler mélodique. Du tracklisting, limité à 40 bonnes minutes, j’épinglerai « By Your Command », « Dead Head » et « Planet Of The Apes ». Je découvre pour la première fois ce Devin Townsend Project. Et difficile de se faire une opinion valable, après un set aussi court. A revoir dans d’autres conditions. Et surtout en salle…
Le changement de matériel est assez rapide. Trente bonnes minutes. Place dès lors à Dimmu Borgir, une formation norvégienne qui compte déjà deux décennies de carrière. Et dans le domaine du black metal mélodique, c’est une référence. J’avais eu l’occasion d’assister à leur set, en première partie de Korn, il y a un peu plus de deux ans, à l'Ancienne Belgique. Le concert des Vikings s’était déroulé au cœur d’un décor dépouillé. A Lokeren, les fumigènes, braseros et autres artifices pyrotechniques vont nous en mettre plein la vue. Un peu comme Sabaton, l’an dernier. Et finalement, heureusement que cet environnement est resté sobre lors du show accordé dans la salle bruxelloise, sans quoi il aurait fallu appeler les pompiers à la rescousse. C'est également la première fois que j’assiste à un concert de ce groupe, dans le cadre d’un festival. Leur grimage est de couleur blanche, afin d’accentuer l’aspect sombre de leur black metal. Malgré deux opus gravés par la suite, soit « In Sorte Diaboli » en 2007 et « Abrahadabra » en 2010, le band puise essentiellement sa setlist dans l’elpee « Death Cult Armageddon », qui remonte à 2003. Pas moins de six plages de cet album lui sont réservées : « Allegiance », « Progenies Of The Gredt Apocalypse », « Lepers Among Us », « Vredesbyrd », « Cataclysm Children » et « Eradication Instincts Defined ». Une œuvre qui présage la fin du monde. Et elle commence peut-être sur la plaine de Lokeren. La carrure du vocaliste, Stian Thoresen aka Shagrath est impressionnante. On dirait que sa voix émane d'outre-tombe. Alias Galder, Thomas Rune Andersen (NDR : le guitariste !) a le regard qui tue (NDR : je parie que dans la vie de tous les jours, ce gars est sympathique). Le claviériste a également de la taille. Son physique me fait penser à celui de Rammstein. Le combo a des planches et son show va vraiment impressionner l’auditoire. Il concède un morceau d’« Abrahadabra » (NDR : le long playing que votre serviteur apprécie le plus !), « Dimmu Borgir ». Le concert s’achève par « Mourning Palace », un extrait de leur troisième LP, « Enthrone Darkness Triumphant », sorti en 1997. Mon premier coup de cœur pour la journée !
Fondé en 1991, Down a décroché un album de platine, aux States, en 1995. Puis le combo s’est montré plus que discret, s’autorisant même deux longues pauses. Ce qui explique pourquoi, à ce jour, le band ne compte que trois elpees à son actif. Une formation yankee formée par l’ex-Pantera Philip Anselmo. Préposé à la six cordes, il est toujours soutenu par Pepper Keenan, à la seconde gratte et Jimmy Bower aux drums. La musique de Down est puissante. Les riffs de guitare sont accablants, gras et huileux. Les drums sont incisifs et plutôt rock’n’roll. La voix est gutturale. Elle est cependant imbibée de bourbon. Philip harangue la foule en arpentant l’estrade de gauche à droite ou de droite à gauche. Un set idéal pour chauffer la tête d’affiche.
Motörhead a multiplié les annulations au cours des derniers mois. A tel point qu’on se demandait si finalement, il allait bien se produire, aux Lokerse Feesten. Leur dernier opus, « Aftershock » est paru l’an dernier. Et la bande à Lemmy est quand même venue plaider sa cause.
Nouveau changement de matos et la formation insulaire peut monter sur les planches. Elle débarque même quelques minutes avant l’horaire officiel. ‘Hello, We Are Motörhead!’ lance Lemmy à la foule. Agé de 69 balais, le vieux rocker a rencontré quelques sérieux problèmes de santé, au cours des derniers mois. Faut dire que son addiction au sexe, aux drogues et à l’alcool devait inévitablement déboucher sur une impasse. Il s’agit de la seule date accordée par Motörhead sur le sol belge.
Drivé par le chanteur/bassiste Lemmy Kilmister, Motörhead maintient le cap depuis le début des 70’s. Au sein du trio, Phil Campbell se consacre à la guitare et Mikke Dee, aux drums. Trempée dans le whiskey, la voix de Lemmy constitue toujours une référence pour quatre générations de métalleux. Et un concert du trio est totalement dévastateur. Perso, à moins d’être totalement sourd, impossible de l’encaisser sans boules-Quiès. A l’avant-scène, la muraille d’amplis ‘Marshall’ crache le feu. Ou les décibels, si vous préférez. Motörhead ne fait pas dans la dentelle. J’imagine alors une danseuse gambader sans tutu ni ballerines…
Le set s’ouvre par trois pistes, issue d’« Overkill », un long playing paru en 1979 : « Damage Case », « Stay Clean » et « Metropolis ». La puissance est déjà au rendez-vous. La setlist embraie par « Over The Top », un extrait de « Bomber ». Puis par « The Chase Is Better Than The Catch », une piste qui figure sur « Ace Of Spades ». « Rock It » rocke sec. Pourtant, les solos épiques concédés par Lemmy ne sont pas vraiment convaincants. Ils sont même, à la limite, faiblards. Heureusement Phil et Mikkey compensent ce coup de mou. Et parviennent même à dynamiter l’ensemble. Un seul extrait du nouvel album « Aftershock » est interprété. En l’occurrence, le très blues « Lost Woman Blues ». Dommage que la setlist fasse abstraction des autres compos du nouvel LP. Le papy semble fatigué et s’être endormi sur ses lauriers, en ne proposant que d'anciens standards qui ont fait sa gloire. « Doctor Rock » nous réserve un solo de guitare, qu’assure de main de maître Mikkey, en forme olympique. Du tracklisting j’épinglerai encore « Just 'Cos You Got The Power », « Going To Brazil » et Killed By Dead », mais surtout la fin de parcours « Aces Of Spades » et « Overkill », au cours duquel Motörhead, termine sa prestation en force.
Ce n'est pas le meilleur concert de Lemmy auquel j’ai pu assister, à ce jour. Manifestement, il a pris un coup de vieux. Tout comme son rock'n'roll. Malgré tout le respect que je lui accorde, il serait peut-être temps qu’il prenne sa retraite. Il a quand même presque 70 balais ! Sincèrement, sa santé m’inquiète. Et vu le caractère du personnage, je le vois mal boire de l’eau. Satisfait de l’avoir revu, mais à moins d’un changement radical de comportement, il est ‘mal barre’…
Within Temptation clôt la soirée. Je fais l’impasse sur ce set qui s’adresse surtout aux adolescentes boutonneuses qui ont eu la permission de minuit... Il est temps de rentrer au bercail. Après une telle soirée, on pourrait croiser une louve garou…
(Organisation : Lokerse Feesten)
Voir aussi notre section photos ici