Dans le cadre des Nuits Botanique 2016, la fabuleuse salle du Cirque royal accueillait Yann Tiersen, musicien et compositeur responsable de ballades mélancoliques, dont certaines sont devenues notoires. Et c’est au sein d’une ambiance décontractée qu’il est venu présenter son dernier petit bijou. Intitulé « EUSA », son neuvième opus rend hommage à sa Bretagne bien-aimée. Dix morceaux délicats, oniriques. Un voyage aux effluves bretons, mais qui souffre parfois d’une absence de tressaillements, d’émotions inattendues.
« 48° 26' 19" N 5° 6' 40" W ». Non, ce ne sont pas exactement les durées des morceaux du nouvel elpee de l’artiste récompensé à deux reprises par une Victoire de la Musique pour les films ‘Le Fabuleux destin d’Amélie Poulain’ et ‘Good Bye, Lenin !’ Pour ce dernier essai, Yann Tiersen s’est retranché dans son fief natal, loin du tumulte de la ville, afin de composer de nouveaux poèmes symphoniques. De « Porz Goret » (dont les coordonnées sont communiquées en introduction) à « Lok Gweltaz » en passant par « Penn Ar Roc’h », l’artiste a arpenté les recoins de l’île d’Ouessant en y laissant son empreinte musicale. En effet, chaque plage de son dernier long playing, dont la sortie est prévue pour septembre 2016, a été baptisée suivant les noms des lieux qu’il a visités. C’est un vibrant tribut à la région qui l’a vu naître.
La salle est comble. Sur scène, un piano à queue trône à côté d’un violon, de deux ‘toy’ pianos et d’un mélodica. On connaissait la timidité de l’artiste et il le prouve une fois de plus. Une bière à la main, il s’avance nonchalamment et s’installe derrière ses ivoires. Les premières notes sont hésitantes. Un magnétophone par bande magnétique diffuse simultanément des enregistrements de différents lieux captés sur l’îlot ouessantin. On entend les vagues s’échouer sur les côtes. La symbiose semble tracer une parfaite harmonie. Mais les premières minutes laissent un goût de trop peu. Le temps s’égrène et les compositions manquent d’émotion. Jusqu’à cette ballade intitulée « Penn Ar Roc’h », un morceau dont les suites de croches rendent vigueur à des fragments musicaux jusqu’ici légèrement moroses. La prestation du compositeur, timide et hésitante au départ, monte progressivement en crescendo. Sans doute aussi à cause de son doigté, de plus en plus agile.
La suite s’annonce plus allègre. Le titre « Kadoran » démontre sa virtuosité au piano tandis que celui de « Penn ar Lann », révèle sa sensibilité. Le public est conquis. L’artiste adresse un timide merci entre chaque grande composition, ce qui fait rire l’auditoire. La troisième partie fait la part belle au violon ou au toy piano, qu’il joue de main de maître. Le tube « La dispute » interprété au mélodica et aux ivoires nous replonge dans le film qui a rendu célèbre le multi-instrumentiste. Les mélomanes sont sous le charme. La soirée se termine, en apothéose. Magistral, le violon illumine le fabuleux « Sur le fil ». Et la prestation est unanimement ponctuée par des applaudissements nourris.
Ce dernier LP, aux couleurs ouessantines, joue la carte des émotions et propose un retour aux sources pour le maître des ballades mélancoliques. Ouessant, Eusa en breton, est un lieu où l’artiste a jeté l’ancre. Ses titres sont composés avec beaucoup d’amour. Mais l’ensemble de son chef-d'œuvre manque parfois de mordant, d’un grain de folie. Peut-être qu’en rendant hommage à ces lieux tant aimés, le maestro a oublié d’en explorer d’autres.
Organisation : Botanique + Live Nation
Yann Tiersen
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