‘La pluie qui tombe m’effraye un peu’ chante Daniel Darc. Il est 22h30. Faut dire que les spectateurs qui se sont déplacés pour assister au festival, ce soir, ont dû s’armer de courage (et d’un parapluie qu’il valait mieux tenir à deux mains) pour affronter les orages et pluies diluviennes, qui se sont abattues sur la commune de Saint-Josse, à partir de 19h30. Des conditions météorologiques qui pourraient bien se reproduire lors des prochains festivals d’été, si le climat continue à flirter avec des températures aussi élevées. Et ce n’est pas une bonne nouvelle pour les organisateurs, qui risquent de devoir alors faire face à d’autres problèmes bien plus conséquents. Mais inutile d’anticiper, chaque chose en son temps…
C’est donc trempés jusqu’aux os que la plupart des spectateurs sont arrivés au Bota sur le coup de 20h. Parfois même simplement après avoir traversé le parc. Il est alors 20 heures. L’œil furtif, j’observe d’un air amusé le comportement des individus. De jolies jeunes filles moulées dans leur t-shirt (mouillé) côtoient des cadres à peine sortis de leurs bureaux et quelques punks errants. Un public aussi hétéroclite que l’expo proposée au Witloof Bar.
En déambulant dans les couloirs, on croise Brisa Roché et Daniel Darc. La première conjugue beauté et élégance. Par contre, on ne peut pas en dire autant de l’ex-leader de Taxi Gril. Trapu, presque bossu, son corps et son visage sont profondément marqués par les excès commis au cours de sa jeunesse. Et pourtant, Daniel Darc passerait incognito parmi les musiciens de rue et les mendiants du quartier. Mais respect pour ces artistes. Y compris Daniel Darc. Car se soir, il va nous accorder un show de toute bonne facture. Car comme chez tous les écorchés vifs, on ne sait jamais à quoi s’attendre. Lors de son dernier passage à Dour, son concert était pathétique ; alors que quelques jours plus tard il livrait un set d’exception aux Francos de Spa.
Mais ce soir, c’est le bon soir. Sur le coup de 22 heures, il monte sur les planches, empoigne le micro d’une main ferme et donne immédiatement le ton : le spectacle sera rock’n’roll. Il enchaîne les différents titres de son dernier opus « Amours suprêmes », mais en adoptant un tempo nettement plus enlevé que sur disque. Juste avant, mais aussi après « Les remords », Darc échange quelques mots avec une jeune groupie perdue au milieu de l’auditoire. Une réaction qui démontre l’état de forme de notre homme. Le set monte en puissance et atteint un des premiers sommets lors de l’interprétation du single « J’irai au paradis ». Puis par « Je me souviens, je me rappelle ». On lui pardonnera cependant, des improvisations souvent foireuses. Tout comme ses errements dans ses textes. Il s’en excuse d’ailleurs, spontanément. Des carences largement compensées par un backing group particulièrement solide et talentueux. Darc a quand même le bon goût de le remercier, juste avant d’attaquer « L.U.V.», morceau au cours duquel le guitariste se substitue à Alain Bashung pour partager le duo. Manifestement, du Daniel Darc de cette trempe, on en veut bien encore…
Un peu plus tôt en soirée, Brisa Roché avait précédé le Parisien sur le même podium. Les médias comparent souvent la Franco-américaine à Björk. Si c’est pour le physique, elle mérite mieux. Quant à la voix, elle possède sans doute les inflexions de l’Islandaise, mais pas le timbre. Habillée d’une longue robe colorée, la diva campe un jeu de scène qui colle bien avec celui de ses musiciens, tout de blanc vêtus. (NDR : Richard, le bassiste, me fait penser à Stefan Oldsdal, le bassiste de Placebo). Malheureusement, le chapiteau n’est qu’à moitié rempli et le public n’applaudit guère. Ou à peine. Même lorsque la belle fait son entrée. Et pas davantage à l’issue de ses premières chansons. Il faut avouer que son style, oscillant du jazz au gospel, joue constamment sur les atmosphères. Et cette approche musicale plutôt déconcertante est assez difficile à apprécier d’entrée de jeu. Pourtant, malgré l’ambiance presque glaciale et le manque de réaction manifestée par le public, le collectif ne se décourage pas pour autant et ne se départit jamais de son sourire. Et finalement leurs efforts seront récompensés ; puisque après avoir invité les spectateurs à siffloter son tube « Whistle », Brisa hérite d’un tout autre accueil. Bien plus convivial. Soudainement, l’ambiance monte d’un cran et la bonne humeur devient communicative. Les applaudissements concurrencent même la pluie, qui n’a pas cessé de tomber à l’extérieur. On a même droit à un fin de parcours nettement plus rock’n’roll. Le band précise d’ailleurs que le temps imparti sur scène lui est compté. Et dès lors qu’il préfère raccourcir la setlist, tout en la rythmant. Une initiative très appréciable, dans le contexte d’un festival.
Après avoir assisté aux bonnes prestations de ces deux artistes, nous sommes repassés prendre un denier verre au bar du Bota. Tranquilos ! En plaignant les spectateurs entassés comme dans une boîte à sardines au sein de la Rotonde pour applaudir le set de Girls in Hawaii, sold out depuis des lustres. Et on n’avait même pas envie d’être à leur place, tant nous avions pris notre pied lors de la prestation de ces artistes français, ce soir…
Daniel Darc + Brisa Roché
Organisation Botanique