Soirée de clôture pour l’édition 2022 des Nuits du Bota. Alors que DIIV se produit sous le chapiteau, un autre concert focalise l’attention d’un public branché indé/rock : celui de Wet Leg. Ce groupe s’était illustré fin 2021, lors de la sortie de ses deux premiers singles, vus des millions de fois sur les plateformes de streaming. Et aussi en décrochant cinq nominations aux NME Awards 2022, avant la sortie d’un premier elpee en avril dernier. Mais on peut déjà vous l’annoncer : le concert ne sera pas vraiment à la hauteur de ce buzz !
Heureusement les premières parties sont souvent le théâtre de bonnes surprises. Le Grand Salon (NDLR : baptisé le Musée le reste de l’année) est déjà bien rempli lorsque les locaux Ada Oda grimpent sur l’estrade. Et ses fans sont enthousiastes. Dans le public, juste à côté de votre serviteur, s’est glissé un vieil homme très élégant : Frédéric François. En fait, il s’agit du père de Victoria Barracato, la chanteuse du groupe. Elle accompagnait déjà son papa en duo dans certaines émissions de variété, il y a une bonne dizaine d’années. Heureusement, la musique proposée par le band, ce soir, sera résolument rock, teintée d’une petite touche de surf. Et pour en être persuadés, les membres du combo ont choisi des accoutrements estivaux mais bien punks…
Victoria est épaulée par des musicos expérimentés, dont le bassiste Marc Pirard ainsi que les guitaristes Alex De Bueger et Aurélien Gainetdinoff.
L’aspect binaire, limite schizophrène des compos et les paroles exclusivement chantées en italien constituent l’originalité de sa musique. Et parfois, elle nous fait penser à une variété un peu kitsch dispensée dans les shows télévisés en Italie. Les trente petites minutes du set sont toutefois bien remplies, les gratteurs s’autorisant des envolées de guitare rock garage, alors que la prima donna va manifester un dynamisme auquel on ne s’attendait pas…
Passons à univers diamétralement différent. En l’occurrence, celui des Américains Water From Your Eyes. Si à l’origine, la musique de ce duo baignait dans l’électro-pop, depuis la sortie de son cinquième opus, « Structure », elle a adopté un style indistinct, voguant quelque part entre rock, post-punk et synth-pop. De petite taille, la chanteuse semble effacée, alanguie, sa voix est même censée accentuer cette impression. Cependant, son air de ne pas y toucher intrigue et lui confère une certaine forme de charme. Entre ironie et introspection, elle parvient même à nous entraîner au cœur de son monde. Déroutante, la musique Water From Your Eyes est alimentée par des riffs de guitares hypnotiques et contagieux. Difficile de croire que le combo est issu de Brooklyn, comme Big Thief ou A Place To Bury Strangers. En outre, l’énergie libérée en ‘live’ donne envie de suivre attentivement l’aventure de cette formation.
La salle est bondée lorsque Wet Leg débarque. Il est 22 heures. On dénombre, quand même, pas mal de jeunes (sans tickets) à l’extérieur du Grand Salon, aussi. Pas étonnant, quand on sait que le site Ticketswap recensait plus de 500 demandes pour aucune offre. Dans la fosse, on croise de nombreux journalistes, sans doute à l’affût des mouvements opérés par cette nouvelle sensation anglaise. Produit par Dan Carey (NDR : déjà au service de Fontaines DC, Black Midi ou encore Squid) le premier elpee (NDR : un éponyme !), fraîchement sorti, laissait augurer une bonne soirée. Les deux natives de l’île de Wight, Rhian Teasdale et Hester Chambers, occupent bien le devant de la scène en début de set, chacune dans son style, comme sur « Wet Dream ». Caractérisé par une ligne de basse omniprésente, ce titre nous replonge dans l’univers des sœurs Deal (The Breeders), à moins que ce ne soit celui de Kristin Hersh voire, et la référence plus récente, de Karen O des Yeah Yeah Yeahs.
« Pieces of shit » et « Ur Mum » sont peuplés de gros mots. Parce qu’émargeant à la girl power, le band assume son féminisme, tant sur les planches que dans les lyrics.
Mais les morceaux qui s’enchaînent finissent par se ressembler, tellement ils souffrent d’un manque de relief. Et puis les deux frontwomen ne débordent vraiment pas d’enthousiasme, snobant tout dialogue avec le public. Même le (déjà) méga-tube « Chaise longue » sera rapidement expédié clôturant, au bout de 50 minutes, un set sans grande saveur.
Il n’y aura pas de rappel, malgré l’insistance de l’auditoire.
Paris-Match n’hésitait pourtant pas, dès le lendemain, à situer la performance parmi ‘les 5 concerts qui auraient enflammé les Nuits Botanique’ (sic).
Alors Wet Leg, plutôt un pétard mouillé ou un coup d’épée dans l’eau ? A vous de choisir !
Setlist Wet Leg : ‘Being in Love”, “Wet Dream”, “Supermarket”, “Piece of Shit”, ”Primo Skin”, “Too Late Now”, “Obvious”, “Oh No”, “I Don't Wanna Go Out”, ”I Want to Be Abducted”, ”Ur Mum”, ”Angelica”, ”Chaise Longue“
(Organisation : Les Nuits Botanique)
WET LEG - WATER FROM YOUR EYES - ADA ODA
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