Si la veille l’affiche lorgnait vers les 80’s, ce lundi est réservé, pour une large part, aux 90’s, proposant comme têtes d’affiche, les Pixies et l’ex-The Verve, Richard Ashcroft. Mais pas que… puisque quelques surprises vont pimenter la soirée. Compte-rendu de cette journée
Place d’abord à la synth-pop incandescente de Future Islands. La formation avait déjà opéré un passage remarqué, il y a un peu moins d’un an, à l’Ancienne Belgique. D’entrée de jeu, le leader Samuel T. Herring se dépense sans compter. C’est presque devenu un rituel.
Ses vocalises sont incomparables. Il est capable de monter dans les aigus puis de hurler comme un chanteur de doom-métal, sans la moindre difficulté. Et sa chorégraphie n’a rien à envier à Béjart ou Charmatz. Les compos s’enchaînent et tapent comme les rayons de soleil sur nos têtes. On a cependant parfois l’impression que le set tire en longueur, mais en fin de parcours, « Seasons (Waiting On You) » (NDR : élu meilleur single par le NME, en 2014) réveille la foule. Pour clôturer sa prestation, la formation nous gratifie d’un de ses premiers ‘simples’, « Long flight ». Caractérisé par sa longue intro, il nous fait presque oublier que certaines compos se ressemblent…
La grosse surprise la soirée viendra à nouveau du club Studio Brussel. Bill Ryder Jones y est programmé. Votre serviteur s’y rend avec des pieds de plomb. A cause de son passé de guitariste au sein de The Coral, groupe destiné aux ados, fondé en 1996. Et puis la presse spécialisée le taxe de songwriter, laissant supposer qu’il s’agit d’un folk singer au répertoire soporifique. Votre serviteur débarque d’ailleurs dans la salle, alors que le set est déjà bien entamé. Mais en observant le line up, il y a de quoi changer d’avis. Il implique une violoncelliste/choriste, deux guitaristes, dont l’un double aux chœurs, un claviériste, un batteur, un bassiste et bien sûr Bill au chant et à la sèche. Bien que soigné, son look est plutôt dépareillé. Chaussé de lunettes fumées et les cheveux hirsutes, il ressemble un peu à Richard Aschroft, également issu du Nord-Ouest de l’Angleterre, et qui va le succéder sur la main stage. Les compos oscillent entre folk qui monte régulièrement en crescendo, et une sorte de dream-pop/shoegaze surprenante. En extrapolant, cette expression sonore navigue quelque part entre celle de Swell et de The Folk Implosion. Les quelques centaines de spectateurs apprécient et réalisent qu’ils vivent un bon moment. Un regret quand même, c’est ce timing de Bill Ryder Jones qui empiète sur celui de la scène principale. Ou l’inverse ! Finalement il aurait été préférable d’écourter le concert de Future Islands pour ne rien manquer de celui-ci. Un artiste à suivre donc.
On venait d’en parler : Richard Ashcroft se produit donc, sur la grande scène. Il grimpe sur l’estrade d’un air désinvolte. Et entame un petit pas de danse clownesque sur la musique d’intro, « Bring On The Lucie » de John Lennon (NDR : inclus sur le dernier opus, « Acoustic Hymns Vol 1 »). Cheveux en bataille et veste militaire sur le paletot, il s’exclame ‘What a beautiful evening’ (NDR : Il est vrai que le soleil se couche, et ses derniers rayons illuminent le podium). Il s’emballe même un peu trop, en annonçant de manière précipitée, le premier morceau : ‘This song is called « Sonnet »’. Avant que ses musiciens ne rectifient le tir. C’est par un autre titre du répertoire de The Verve, « Space and time », que le set débute. Et préalablement au suivant, le leader annonce, sur d’un ton amusé : ‘Ok, now we will play « Sonnet »’. Il introduit le morceau suivant par ‘It’s a song we have not played since a long time : « Weeping willow »’. Tout au long de la ballade « A song for the lover », des images de couples célèbres sont projetées sur l’immense écran installé en fond de scène (NDR : il reproduit une TV géante parfois subdivisée en plusieurs postes vintage). Malheureusement Richard, armé d’une sèche, n’est pas toujours très visible sur l’estrade. Il est trop souvent masqué par le guitariste et le bassiste. Excentriques, ils monopolisent l’espace. Look jamaïcain, le premier est coiffé en dreadlocks. Le second n’arrête pas de bondir sur la gauche du podium. En fin de parcours, la setlist nous réserve quelques tubes : « The drugs don't work », « Lucky man » et bien sûr l’incontournable « Bitter sweet symphony », pour lequel Richard propose au public de chanter l’intro (NDR : et celui-ci ne va pas se faire prier !) Le chanteur commence enfin à se remuer. Il simule un combat de boxe contre son pied de micro et fume une dernière cigarette (NDR : il en aura grillé quelques-unes entre les morceaux, causant des interruptions inopportunes). C’est sous la forme rock’n’roll qu’on préfère le voir ; cependant, le concert s’achève au bout d’une petite heure et quart.
La foule s’agglutine de plus en plus aux premiers rangs. Pas de doute, la majorité du public est venue pour voir et écouter les Pixies. Les échos recueillis à la suite de son passage, la veille, à Ronquières, sont plutôt dithyrambiques. C’est de notoriété publique, le groupe s’amuse à changer ses playlists. Et ce soir, le set démarre en force par « Gouge away », « Wave of mutilation » et « Isla de Encanta ». Mais à l’instar de sa prestation accordée au festival Hear Hear, en 2022, la suite est plus cool. Frank Black troque sa guitare électrique contre une sèche. Il nous réserve deux nouvelles compos, « Chicken » et « The vegas suite ». Elles sont quelque peu anesthésiantes et devraient figurer sur un prochain elpee, intitulé « The night the zombies came », dont la sortie est prévue pour la fin de l’année.
Mais l’impressionnante liste de singles de la première heure rebooste le concert : « Vamos », « Velouria », « Debaser » et l’hymne « Where’s my mind », en final. La nouvelle bassiste Emma Richardson apporte un plus à l’ensemble ; en outre, elle assure les backing vocaux (NDR : expérimentée, elle milite également chez Band Of Skulls).
Pour terminer cette soirée, cap sur le club Studio Brussel pour assister au set de The Murder Capital. On ne parlera ici plus d’une découverte (NDR : sa prestation accordée dans le cadre de l’édition 2019 du Sonic festival, et celle dispensée à l’Orangerie du Botanique, en 2020, ont été commentées dans Musiczine), mais plutôt de confirmation. Voire d’évolution. Une mutation qui frappe dès l’entrée en scène des musicos. Tout d’abord en ce qui concerne le look. Exit l’apparence post punk entrainant le port d’un costume élégant et d’une chemise. C’est plutôt sous l’aspect de bad boys que le band déboule sur le podium. A l’instar du chanteur de Fontaines DC, James McGovern, derrière des lunettes fumées, affiche une image qui pourrait naître d’un croisement entre un rappeur et Sid Vicious, Déchaînés, les derniers pogos éclatent au sein des premiers rangs. Certains spectateurs sollicitent un stage diving du leader, dont il est coutumier, mais ils ne l’obtiendront pas. Même si son attitude davantage survoltée sur certains titres aurait pu traduire une envie d’opérer le grand saut. Un set sans temps mort, au cours duquel le combo n'a pas négligé les incontournables « More is less », « Green & Blue » et en clôture « Don’t cling to life ». Le parfait complément aux Pixies ou une belle manière de ponctuer cette journée, très riche, en force…
FUTURE ISLAND, Bill RYDER JONES, RICHARD ASCHCROFT, PIXIES, THE MURDER CAPITAL
(Organisation : Lokerse feesten)
Photos Wim Herbaut ici