Dirigé par Mark Burgess, l'un des plus talentueux chanteurs/compositeurs/poètes de l'histoire du rock (et un de mes ‘héros’), The Chameleons a marqué les années '80 en produisant des bijoux de rock post-punk psychédélique, comme "Script of The Bridge" ou "Strange Times". Malheureusement, la formation s'est séparée après la mort de leur manager Tony Fletcher, en 1987. Après avoir tenté plusieurs projets en solo ou en compagnie d'autres musiciens (The Sun and The Moon, Invincible, ...), Mark Burgess a décidé, en 2000, de reprendre le flambeau sous le vocable Chameleons Vox (la voix des Chameleons) à l’aide du batteur originel, John Lever et d'autres musiciens.
La tournée européenne qui passe par Het Depot, ce soir, repose sur l'interprétation intégrale du premier album des Mancuniens, « Script of the Bridge ». Probablement leur meilleure réalisation, elle remonte à 1983. En fin d'après-midi, j'ai eu la chance d'interviewer Mark Burgess. C'est un homme attachant, très brillant et pétri d'humour typiquement britannique. Il a parlé de son enfance à Manchester, des Beatles, de T.-Rex, de l'enregistrement de « Script... », de ses projets, etc., mais aussi, de son intérêt pour les OVNI, les expériences proches de la mort et les phénomènes paranormaux, en général. Cette interview sera publiée sur musiczine.net dans les tout prochains jours. Stay tuned !
Mais pour l'heure, concentrons-nous sur le concert. Het Depot est en configuration 'box', car un rideau coupe la salle en deux. Chameleons Vox n'attire pas la toute grande foule, mais c'est un public de véritables fans, majoritairement des quadragénaires, qui est venu vivre ce moment unique.
Dès la première chanson, « Don't Fall », le ton est donné. La formation reproduit à la perfection le titre original. Depuis qu'il a recommencé à jouer de la basse sur scène, Mark Burgess ressemble à s'y méprendre à l'image qu'il reflétait dans les années '80. Ce qui frappe également, c'est l'excellent travail réalisé par les deux guitaristes, qui ont réussi la gageure de reproduire les tonalités extrêmement élaborées, créées à l'époque par Dave Fielding et Reg Smithies ; des tonalités bourrées de réverbération (notamment, grâce à l'ampli Roland Space Echo). Le son général est parfait. Pas étonnant, puisque c'est l'excellent ingé’ Thomas ‘Mixmeister’ (TNproductions) qui est préposé à la table de mixage.
Après « Here Today », il attaque « Monkeyland », un des titres phares de l'opus. Le morceau s’ébroue tout en douceur, mais quand éclate le refrain, le public reprend comme un seul homme : ‘It's just a trick of the light !’ Le set embraie par « Second Skin », une de mes 10 chansons préférées toutes époques et catégories confondues. Sept minutes de pur plaisir, où l'on ressent pleinement la profondeur de l'inspiration de Burgess, qui puise ses racines dans les années '60 comme en témoigne l'allusion concédée au « Please, Please Me », des Beatles, glissée au beau milieu de la chanson. Dans la deuxième partie, superbement psychédélique, on flotte dans un autre monde, les yeux fermés, transpercés par la beauté hypnotique de la musique.
Les plages suivantes de l'elpee sont une succession de classiques incontournables et indémodables, depuis l'énergique « Up the Down Escalator » jusqu'au très sociologique « A Person Isn't Safe Anywhere These Days ». Au moment de « Paper Tigers » l’intensité est à son comble et la formation clôture sa prestation par le très beau « View From A Hill ».
De retour sur le podium pour le rappel, Mark Burgess nous réserve, a capella, la chanson que les fans de Manchester City, son club favori, entonnent en l'honneur de notre Vincent Kompany national, sur l'air de Mrs Robinson : ‘And here's to you, Vincent Kompany’... Un clin d'oeil très apprécié par un public de connaisseurs ! Ensuite, le band reprend « Looking Inwardly », une plage extraite du second elpee des Chameleons, « What does anything mean? Basically », avant d'entamer un autre tour de force, « Soul in Isolation ». Cette composition très élaborée, issue du troisième album du groupe, « Strange Times », s'étire sur plus de 9 minutes et comme d’habitude, Burgess s'y adonne au 'song dropping' en plaçant quelques extraits de « The End » (The Doors) et « Eleanor Rigby » (The Beatles). « Singing Rule Britannia (While the Walls Close In) » est présentée comme une chanson ‘Made in Manchester’ et Burgess y introduit également une évocation musicale, mais au « Transmission » de Joy Division…
Après une seconde pause, Chameleons Vox revient sur les planches pour interpréter le très funky « Swamp Thing » et le solide « Return of the Roughnecks ». Au final, excepté le manque relatif d'interaction entre les musiciens en ‘live’, ce concert a été en tous points parfait. On a pu se rendre compte de l'incroyable spectre qui caractérise les Chameleons : une musique forte et en même temps très sophistiquée, des paroles très poétiques, voire philosophiques, révélant un regard unique sur la société et la condition humaine. On attend impatiemment les nouvelles compositions que Mark Burgess et surtout son nouvel elpee qui devrait paraître dans le courant de l’année, une œuvre pour laquelle il a associé différents musiciens, à l’écriture...
En première partie, Reiziger, une formation louvaniste et limbourgeoise, a présenté un power-rock énergique, aux accents Sonic Youth / Fugazi / Girls Against Boys. Leur album « Kodiak Station » est sorti il y a peu sur Birch&Broom/[PiaS]. A suivre !
Organisation : Het Depot, Leuven
Setlist :
Don't Fall
Here Today
Monkeyland
Second Skin
Up the Down Escalator
Less Than Human
Pleasure and Pain
Thursday's Child
As High As You Can Go
A Person Isn't Safe Anywhere These Days
Paper Tigers
View From a Hill
Encore 1
Looking Inwardly
Soul in Isolation
Singing Rule Britannia (While the Walls Close In)
Encore 2
Swamp Thing
Return of the Roughnecks