Considéré par le magazine anglais Metal Hammer, comme un des groupes phares de la nouvelle génération du Metal, Of Mice and Men se produisait ce mardi 24 mars, à l’Ancienne Belgique. Sa popularité n’est certainement plus à mettre en doute aux Etats-Unis, car il est considéré comme une des valeurs sûres de la scène californienne contemporaine ; cependant, il reste encore bon bout de chemin à accomplir pour s’imposer sur le Vieux Continent. C’est donc en toute curiosité (existentielle) que je me suis rendu au show des Américains, afin de constater le bien fondé des articles consacrés à un de ces piliers de cette nouvelle vague… Verdict.
C’est désormais devenu une habitude : si vous voulez assister à un show à l’AB et dégoter une bonne place, il faut patienter et faire la fille, vu que les portes ne n’ouvrent désormais plus qu’un quart d’heure avant le spectacle. Inutile de préciser que vous avez intérêt à vous dépêcher si vous voulez mettre vos effets personnel dans les casiers et arriver à temps pour voir le ou les groupe(s) d’ouverture. Pas de chance aujourd’hui : il pleut. Histoire de tuer le temps, j’observe la foule qui patiente à l’entrée. Manifestement, une majorité de jeunes sont venus, ce soir, supporter les Californiens. La ‘New Metal Revolution’ (dixit Metal Hammer) passe apparemment par de nouvelles recrues.
Les premières balles de cette soirée sont tirées par Volumes, band de Metalcore originaire de Los Angeles. Leur Hardcore est éclaboussé de sonorités Neo-Metal. Tout en empruntant des rythmiques vocales au rap, le chant est caractérisé par une alternance entre chant hurlé et clair. Les Yankees vont rapidement chauffer les premiers spectateurs présents. Il faut aussi avouer que ce n’est pas non plus l’affluence des grosses affiches. Pas de place assise et les balcons sont fermés. En outre, la fosse n’est remplie qu’à moitié. Il n’empêche que l’assemblée répond positivement et s’exécute lorsque le groupe l’inviter jumper, sur le rythme des djent riffs (type de riff particulier, initié par Messhugah et son guitariste Fredrik Thordendal ), propres à ce nouveau type de groupe de Metalcore. Pas de mise en scène particulière, les deux chanteurs emplissent l’espace et délivrent un set dense et musclé, à l’exception d’un morceau perdu en milieu de set, où le chant clair dominant vient quelque peu briser la tension communiquée au show. Saluons au passage cet instant intéressant où Volumes demande d’éteindre les lumières de la salle afin que le groupe ne soit plus éclairé que par les lampes de poche dont sont équipés la plupart des smartphones (nouvelle génération, je vous le disais, où la lumière des briquets fait place désormais à celle des portables). La salle s’illumine donc désormais d’une lumière blanchâtre, mouvant au rythme des headbangings, tel un gros spot qui serait actionné de haut en bas. Une bonne entrée en matière, certes pas révolutionnaire, mais qui a le mérite de planter le décor de la soirée. (Pour les photos, c’est ici)
Rechargez, armes ! Au tour de The Amity Affliction de prendre d’assaut la scène bruxelloise. Un large backflag, composé d’un cœur en cordes tressées et entouré du nom du groupe, tapisse l’arrière de la scène. Deux représentations de squelettes occupés à prier, drapés de noir, sont disposées de part et d’autre de l’espace. Issue de Brisbane, la formation australienne va nous proposer un set de Metalcore ultra mélodique, au chant clair prédominant, parsemé çà et là de touches électros. Malgré leurs douze années d’expérience, le quatuor va nous imposer un show répétitif, dont le calme des morceaux, lorgnant quelque fois vers le post-hardcore, viendra dégonfler l’ambiance insufflée par leurs prédécesseurs. ‘Belgium, you’re the best show of this tour’ balance Joel Birch, un des deux chanteurs du combo. Formulé sans grande conviction, cet éloge tombe un peu à plat. Il en ira de même pour le bravehart de faible intensité lancé quelques minutes plus tard, le style de musique se prêtant peu à ce type de rencontre musclée. Le public se réveille néanmoins, un peu (trop) tard, lors de l’avant-dernier morceau « Open Letter », extrait de l’LP « Chasing Ghosts ». Les deux chanteurs invitent l’auditoire à reprendre le refrain en chœur. Les spectateurs ne se feront pas prier deux fois et donnent de la voix. Une prestation en demi-teinte qui non seulement m’a laissé sur ma faim, mais surtout a fait redescendre l’ambiance de quelques degrés. (Pour les photos c’est là)
Fini de rigoler à présent. L’étrange masse placée en hauteur à l’arrière-plan, recouverte d’un tissu noir, est à présent dénudée, laissant apparaître la batterie de Valentino Arteaga aux deux grosses caisses frappées du logo du groupe. La salle est plongée dans l’obscurité, simplement éclairée par une lumière bleutée. Tel un coup de fusil, le backflag à l’arrière du podium se déroule, dévoilant une esperluette au milieu cercle. Des bruits d’ondes résonnent avant que ne déboule Austin Carlile, chanteur charismatique d’Of Mice and Men, qui hurle les premières paroles du morceau « Public Service Annoucement » : ‘You all have something to say - or something to ask – I don't live in a cage…’ Le public embraie directement et crie d’une même voix avec le vocaliste. ‘… it's none of your business’. Ca y est, le coup d’envoi est donné et la machine se met en route.
Première impression : l’artillerie lourde est sortie, le son est percutant, propre, net et précis. Vêtu d’une chemise blanche recouverte d’une veste noire, Austin Carlile se débat comme un beau diable, déployant le registre de ses impressionnantes capacités vocales. Il faut attendre le second morceau, « Glass Hearts », pour qu’Aaron Pauley, bassiste et chanteur à la voix claire du band, ne s’avance jusqu’au bord de l’estrade. De nombreux groupes de Metalcore ou de Deathcore ont aujourd’hui recours à la voix claire, sans pour autant disposer d’un vocaliste capable de chanter juste. Facile de palier cette carence, à coups d’auto-tune, lors de séances d’enregistrement en studio. L’expérience se révèle par contre sans pitié lorsqu’il s’agit d’un live. Et force est de constater que si Aaron Pauley a une très belle voix, il la maîtrise parfaitement. Tout en épanchant une palette d’émotions particulièrement riche. En outre, elle est capable de monter facilement dans aigus. Franchement, c’est d’ailleurs la première fois que j’entends pareil organe, chez ce type de combo.
Aaron et Austin constituent par ailleurs un excellent duo, crevant la scène pratiquement rien qu’à eux deux, les autres membres du quintet se révélant plus discrets. Autant Aaron, au chant hurlé, possède un physique anguleux et marqué, autant Austin revêt une apparence plus ronde, tant au niveau de la voix que des traits. Une rencontre entre le dur et le doux. Et paradoxalement parfaitement complémentaire, procurant un agréable relief. Les trois elpees du band seront revisités, tout au long du show, en chronologie inversée, par ‘pack’ de chansons. Un concert intense, où le public ne pourra reprendre son souffle que pendant les noirs entre le passage d’un album à l’autre. ‘Belgium, you’re really incredible. Show us that you’re going to do the party with us. Show us !’, met au défi, pointant son index, le frontman du groupe, redoublant par la même occasion la frénésie ambiante dans la fosse.
Of Mice and Men ne bénéficie certes pas (encore) de la même popularité qu’aux Etats-Unis, mais l’auditoire est totalement dédié à leur cause. A voir le large sourire affiché par les musiciens, cette ferveur semble les toucher. Plus d’une fois, les fans montreront au quintet que leurs morceaux ne leur sont pas inconnus, s’époumonant sur les plus gros titres tels que « Broken Generation », « Feels Like Forever » et « Would You Still Be There ». Les spots s’éteignent, les artistes quittent l’estrade, en n’oubliant pas de saluer leur public. Tous ne sont pas encore partis que les fans réclament déjà leur retour. Toute en testostérone, une dernière salve est entamée par un « The Depths » ravageur, issu du deuxième long playing, « The Flood », un disque paru en 2011. ‘Peu importe la langue ou le pays, tout le monde sait maintenant ce qu’on va faire… Je veux que tout le monde s’asseye par terre et attendez mon signal…’, s’adresse Austin Carlile à la foule consentante. Les premières notes de « You’re not alone » résonnent et toute l’Ancienne Belgique se dresse tel un seul homme, continuant à jumper jusqu’à la fin du morceau. C’est donc dans une atmosphère de sueur que les Américains se retirent, promettant de revenir bientôt.
Malgré un set un peu court –à peine un peu plus d’une heure– Of Mice and Men a confirmé sa réputation de tête de file d’un nouveau genre qui ne demande qu’à susciter la curiosité et surtout à se propager. En esquivant les recettes faciles et le symptôme du récurrent, dont souffrent parfois les adeptes de cette nouvelle forme de Metalcore, les Californiens ont donné, ce mardi soir, une leçon de style tout en ouvrant la voie à un boulevard de possibles. La révolution est certes en marche, reste maintenant à voir jusqu’où les rebelles voudront mener le combat. (Pour les photos, c’est ici)
Setlist : Public Service Announcement - Glass Hearts - Broken Generation - OG Loko - Let Live - You Make Me Sick - This One's for You - Feels Like Forever - Bones Exposed - Would You Still Be There - Another You - Identity Disorder - The Ballad of Tommy Clayton & The Rawdawg Millionaire- Second & Sebring - The Depths - You're Not Alone
(Organisation : Ancienne Belgique)