De grosses pointures de l’univers du Metal étaient attendues ce dimanche soir, à l’Ancienne Belgique. Drivé par son légendaire chanteur/guitariste Zakk Wylde, Black Label Society est originaire de Los Angeles. Un combo bien gras et incontournable du heavy metal de ces vingt dernières années. Ce soir, il va une nouvelle fois libérer toute sa puissance. Deux trios accompagnent cette formation, lors de cette tournée européenne : Black Tusk et Crobot. Le premier pratique un Sludge/Thrash pêchu, et le second un Heavy Metal teinté de Blues. Une soirée flairant bon le Rock’n’Roll dopé aux stéroïdes.
Cheveux longs, barbe, jeans, vestes à patchs ou Perfectos ornés de badges métalliques, tel est le dress-code implicite du public qui patiente devant l’Ancienne Belgique, attendant impatiemment l’ouverture des portes. Le show n’est pas annoncé sold out, mais il ne devrait pas en être loin. Rapide crochet par le stand merchandising, où les t-shirts à l’effigie de Black Label Society partent comment des petits pains. La fierté de porter hautes les couleurs du band passe apparemment au-dessus du prix élevé du chandail.
Direction ensuite vers le théâtre des opérations, où Crobot a pour mission de démarrer les hostilités placées sous le signe du Heavy. Première constatation : difficile de croire que le trio n’est actif que depuis 2011, tant il occupe bien la scène. Le ton est donné dès le premier morceau « Legend of the Spaceborne Killer ». Le son est lourd, groovy. La voix claire et hypnotique. Les guitares sont rondes. Jake Figueroa, le bassiste, ressemble quelque peu à Hendrix. Mais il est surtout emporté par la musique et semble vivre intensément chaque note qu’il arrache à l’aide de ses quatre cordes. Une symbiose partagée par le guitariste Chris Bishop, s’achevant même à terre en fin de set, alors qu’il gratte frénétiquement son instrument. Pointe d’acclamation dans l’auditoire, lors de « The Necromancer », où Brandon Yeagley, vocaliste du band, débute énergiquement ce morceau à l’harmonica. C’est frais, c’est naturel, ça donne le sourire et c’est rock’n’roll à souhait. Que demander de mieux pour débuter la soirée ? (Voir photos ici)
A peine le temps d’aller chercher une bière afin de prolonger ce moment de bonne humeur que le deuxième trio, Black Tusk, investit les lieux. Le backflag du groupe est hissé en arrière-plan, mais il est partiellement occulté par l’abondance de fumée. Parcourue de faisceaux de lumière rouges, l’ambiance est apocalyptique. Autant le démarrage de Crobot s’était opéré en douceur, autant Black Tusk enclenche directement la troisième vitesse. Assez justement, le trio se targue de faire du ‘Swamp Metal’, autrement dit du Metal des marais. Une métaphore bien trouvée pour cette ambiance lourde et sale entretenue par ces Américains qui nous viennent de Géorgie. Un rouleau compresseur où, telle une hydre à trois têtes, chacun des musiciens hurle au micro tout en grattant ou en martelant ses fûts. La dextérité de Jamie May, batteur du band, est à ce titre vraiment impressionnante. Parvenir à maintenir le rythme tout en chantant de la sorte requiert un savoir-faire remarquable. Musicalement, on ne peut pas louper que Black Tusk évolue dans le Sludge Metal, mais sur lequel vient se greffer la voix typiquement thrash d’Andrew Fidler (NDR : évoquant parfois celle de Kreator), offrant à l’ensemble une sonorité originale et captivante. Un set intense d’une demi-heure, où les Américains n’oublieront pas d’insérer « Bring me Darkness » dans leur setlist –demandant à l’occasion au public de crier avec eux ‘Six, Six, Six’ en guise d’intro– ou encore « Truth Untold », dernier single-vidéo issu de leur long playing « Tend No Wounds ». Black Tusk revient en Belgique dans le cadre de l’Ieper Hardcore Fest qui se déroulera les 14, 15 et 16 août prochains. (Voir photos là)
La température est à présent à point pour accueillir Black Label Society. La salle est plongée dans le rouge et un large drapeau à l’effigie du combo est déployé, cachant désormais l’entièreté de la scène. De quoi instaurer une tension pour la demi-heure à venir, en attendant le band. Cinq minutes avant l’heure H, les spots s’éteignent et un mashup de « Whole Lotta Love » de Led Zeppelin et « War Pigs » de Black Sabbath envahit l’espace, pour laisser ensuite place à un déchaînement de sirènes, annonciatrices du futur déferlement musical. Les premières notes de « The Beginning... At Last » retentissent. Le drapé tombe, la foule crie tel un seul homme, laissant enfin apparaître l’immense Zakk Wylde. Et encore, le mot est faible. Tel l’archétype du Viking, l’ancien guitariste d’Ozzy Osbourne, aux cheveux blonds aussi longs que la barbe, est planté comme un roc à l’avant du podium, ses doigts parcourant le manche de sa guitare. Vêtu d’un t-shirt de la tournée et d’une veste en jean patchée à l’image du quatuor, le géant à la musculature plus que développée fait face à un micro au pied orné d’un chapelet, de grosses chaînes et de crânes. Deux toiles tendues floquées de leur logo sont disposées à gauche et à droite de l’estrade. Un mur d’enceintes Marshall est disposé en arrière-plan, de part et d’autre de la batterie de Jeff Fabb. Derrière lui est accroché un backflag, frappé d’une grande croix sur laquelle figure le nom de la formation.
« Funeral Bell », tiré de l’opus « The Blessed Hellride », est de suite enchaîné. A ceux qui en douteraient encore, Black Label Society est avant tout le groupe de Zakk Wylde. Les artistes qui l’accompagnent sont plutôt appelés à se faire discret. Preuve en est l’étonnement non feint par Dario Lorina, lorsque le colosse l’appelle durant le set à le rejoindre à l’avant du podium afin de jouer côte à côte. Posté tout le long du spectacle sur la gauche de l’estrade, John DeServio, quant à lui, va quand même s’illustrer en arborant une basse aux cordes de nos couleurs nationales, noire jaune rouge. Le nouvel album, « Catacombs of the Black Vatican », est particulièrement mis en exergue. Un tiers des morceaux, exécutés ce soir, sont issus de cet opus, parmi lesquels « Heart of Darkness », « My Dying Time » et « Damn the Flood ».
Malgré son insubmersible apparence, Zakk laisse néanmoins parfois apparaître quelques signes de défaillance. Un certain nombre de petits flacons sont disposés à l’avant de la batterie ; et il vient fréquemment s’y abreuver. Pareille pour cette mystérieuse tasse au contenu fréquemment renouvelé tout au long du show. Sa mémoire n’est peut-être également plus ce qu’elle était, le frontman se référant à un pense-bête sur lequel figurent les lyrics, remplacé à chaque morceau. Ce qui n’enlève rien à ses aptitudes instrumentales exceptionnelles, déployées entre autre lors de ce solo de plusieurs minutes, majestueux selon certains, interminable selon d’autres, accordé en milieu de parcours.
La scène est ensuite une fois de plus plongée dans l’obscurité et un piano est installé sur la gauche de la scène. Dario Lorina abandonne sa guitare et s’installe derrière le clavier, afin d’entamer un émouvant « Angel of Mercy ». Les briquets s’allument dans la salle, les poings levés se transforment en va-et-vient de la main au rythme mélodique du morceau. Dans le public, certaines s’étreignent, d’autres s’embrassent. Juste à côté de moi, un fils, alors près des barrières à l’avant de la fosse, rejoint son père et le prend dans ses bras. Des larmes se mettent à couler sur les joues du père, visiblement ému. Outre son côté tout en muscle, Zakk Wylde possède en effet cette magie de pouvoir composer des ballades qui vous transpercent l’âme. Zakk et Dario permutent ensuite de place alors qu’« In This River » poursuit cette séquence ‘émotion’ de la soirée. Devenu un des classiques du groupe, ce morceau s’est transformé au fil du temps en hommage à Dimebag Darrell, ex-guitariste de Pantera assassiné en 2004, en plein show. Après un peu plus d’une heure de concert, Black Label Society entame sa dernière partie par le titre maître de « The Blessed Hellride » et « Concrete Jungle » issu de l’opus « Shot to Hell ».
Une prestation exceptionnelle, haute en couleurs et en émotions, qui se terminera en apothéose par leur tube « Stillborn ». Une fois de plus, Black Label Society n’a pas failli à son statut de groupe d’exception, ne manquant pas de nous mettre un fameux coup de botte au derrière tout en polissant son blason d’icône du Heavy Metal. Respect! (Voir photos ici)
Setlist : The Beginning... At Last, Funeral Bell, Bleed for Me, Heart of Darkness, Suicide Messiah, My Dying Time, Damn the Flood, Guitar Solo, Godspeed Hell Bound, Angel of Mercy, In This River, The Blessed Hellride, Concrete Jungle, Stillborn
(Organisation : Ancienne Belgique)