C’est dans un Botanique bondé que le collectif liégeois est venu fêter la sortie de sa quatrième compilation maison. Une copieuse galette de 21 titres où les stars du collectif (Superlux, Hollywood P$$$ Stars, Malibu Stacy) côtoient les nouvelles recrues (Dan San, Pale Grey).
Le concept de la soirée est simple. La Rotonde accueille les artistes pratiquant une musique intimiste, plus adaptée à cette petite et très belle salle, alors que l’Orangerie va se réserver les plus électriques. C’est là que les riffs vont fouetter l’air et les beats sans fioritures décoincer les guiboles (et le reste). Au total, une vingtaine de groupes vont se succéder lors d’une soirée sans temps mort, riche en surprises et, surtout, en bonne musique.
El National Quaterback ouvre les festivités à la Rotonde. Nouveau venu dans le collectif, ce quatuor rock n’a sûrement pas inventé la poudre. Ces jeunes gens pratiquent un rock indé qui fleure trop les années 90 pour totalement convaincre. Première surprise de la soirée, le chanteur des Malibu Stacy les rejoint pour un titre. Il faut dire que le chanteur des Quaterback n’est autre le frère de David. Et chez JauneOrange, la famille ça compte ! Le reste de la soirée confirmera largement cette impression.
Les vétérans de 7evenPm enchaînent rapidement pour jouer les trois morceaux qui leur sont dévolus. Quota accordé à tous les artistes, il faut le rappeler. Il faut dire que ces vaillants trentenaires sont actifs depuis le début de l’aventure JauneOrange. Nourri à la pop anglaise et aux sonorités américaines, leur rock n’a jamais vraiment touché le public, malgré leurs nombreuses années d’existence. Ce soir, leur prestation a beau être généreuse, leur musique est un peu trop poussiéreuse pour accrocher et appartient donc à une période révolue.
Changement de registre en compagnie de Pale Grey. Une guitare, une basse et un laptop. Ces nouvelles recrues du collectif proposent une musique très mélodique au cours de laquelle, ils s’amusent à expérimenter les sons. Cette pop atmosphérique rappelle un peu New Order (la voix du chanteur surtout) mais aussi un certain Notwist. Pas mal du tout !
Direction l’Orangerie pour assister au prochain tiercé de poulains. **Two-Star Hotel ouvre le bal et débute son set par « Cheeze Brain », chouette titre punk pop disponible par ailleurs sur la nouvelle compile JauneOrange. C’est toujours un bon moment de voir cette formation sur les planches. C’est dans ces conditions qu’elle parvient à montrer sa vraie nature : celle d’une machine à danser à la mode new wave, dans le sens le plus large et éclectique du terme. Ces trois excellents morceaux font même oublier la relative déception provoquée par leur deuxième album, paru en début d’année.
Electric Ladies Blues enchaîne en beauté. Une formation qui porte bien son nom. ELECTRIC SIN D est une authentique bête de scène, une chanteuse qu’on avait déjà eu l’occasion d’entrevoir sur les planches, en compagnie du groupe Seasick. Elle arpente la scène telle une possédée et éructe comme à la belle époque des Babes In Toyland. Un de leurs titres s’intitule « Motherfucker » et leur elpee « The Devil is a woman ». De quoi annoncer la couleur d’une musique réminiscente à la fois de Jesus Lizard, Lydia Lunch, Birthday Party ainsi que du rock noisy et barré en général. Une sacrée claque, qu’on vous invite à aller voir en ‘live’ au plus vite.
Le boogie-punk de The Experimental Tropic Blues Band suit l’ouragan des Electric Ladies Blues. A défaut d’être original, ce trio ressuscite fougueusement les fantômes de Little Walter et Howlin’ Wolf mais aussi le Jon Spencer Blues Explosion originel.
En s’absentant quelques minutes pour se rendre aux toilettes du Botanique, on rencontre un Américain. Il se plaint que ‘pissing is expensive in Belgium’. On lui rétorque que cinquante cents c’est pas la mer à boire, surtout quand on a traversé l’Atlantique pour venir se geler les gonades dans la capitale de l’Europe…
Retour à la Rotonde pour se reposer les oreilles. En fait, Tsu vient d’attaquer son set. Autre nouvelle recrue du collectif, ce groupe est drivé par le chanteur des Pale Grey. Ce quatuor pratique une pop pastorale gentillette. Hormis une belle chanson interprétée en ouverture, sa musique s’essouffle assez vite. Un comble pour une prestation d’à peine quinze minutes… Il existe certes du potentiel chez ces jeunes gens, mais il reste aussi beaucoup de pain sur la planche.
Les intrigants Dan San leur emboîtent le pas. C’est aussi une autre des bonnes surprises de la soirée. Leur folk rock psychédélique doit beaucoup à Elliot Smith et dans une moindre mesure à Nick Drake ; mais surtout à Simon & Garfunkel pour les superbes harmonies vocales. La belle chanson intitulée « Pillow » ouvre leur concert et ce groupe a tellement de charme qu’on vous invite à aller jeter un œil et tendre l’oreille sur leur MySpace : http://www.myspace.com/dansanmusic
Le pouvoir de fascination de Blue Velvet est sûrement moins puissant. C’est peut-être la raison pour laquelle la Rotonde se vide progressivement aux notes de leur pop très professionnelle (mais pas très enthousiasmante) qui rêve de gloire et d’Amérique.
Retour à l’Orangerie pour apprécier le show de Hollywood P$$$ Stars. Une formation dont l’histoire a commencé sous la forme d’une plaisanterie. Pour finalement se traduire par une véritable aventure. D’ailleurs le combo est désormais le fer de lance de JauneOrange. Pas de surprise ici, mais leur rock ciselé et nerveux est impressionnant de maîtrise. Surtout que les gaillards prennent un plaisir visible à se déhancher sur scène. Rock’n’roll quand tu nous tiens !
C’est encore en sueur que le batteur des Hollywood empoigne une basse pour entamer la prestation de Les Singlets. Il est rejoint sur le podium par le bassiste et le guitariste des Malibu Stacy. Leur court set, pas encore très au point, est une plongée sans prétention dans l’univers du punk glam et du rock ‘burné’ proche d’AC/DC.
Place ensuite à la pop ‘weezerienne’ des Malibu Stacy et leur. Le combo ouvre sa courte prestation par « Duck & Cover », ballade dont le style lorgne vers les derniers jours de Pavement. Très pro comme d’habitude, le groupe assure tranquillement, sans surprise.
La fatigue commence à se faire sentir… Et il faut bien avouer que s’il n’y avait pas la figure menaçante de Bernard pour nous rappeler qu’il faut chroniquer toute cette soirée, on s’éclipserait bien à l’anglaise… Mais le devoir est plus fort que tout et on se traîne à la Rotonde pour assister à la prestation profondément ennuyeuse de Vancouver, autre vétéran du collectif liégeois. La musique du groupe renvoie à un certain rock geignard et bruyant qui sévissait dans les années 90. Malheureusement, le manque de solidité des compos est flagrant, tout comme l’ennui qui plombe les spectateurs dans la salle.
My Little Cheap Dictaphone est venu présenter quelques morceaux d’un projet très ambitieux. Dirigé par Redboy (par ailleurs guitariste des Hollywood), la troupe prépare en effet un opéra rock ! Un spectacle complet impliquant costumes et orchestre symphonique. Ce concept devrait aboutir l’année prochaine. Une idée originale et audacieuse qui mérite d’être saluée. Les quelques titres (dans une veine très cabaret) présentés par l’équipe baignent en tout cas dans un climat proche de Kurt Weill.
Ensuite, le band de Redboy vient soutenir Elvy. Pour un titre. L’homme prend ensuite seul les commandes. Il s’accompagne uniquement à la guitare sèche pour nous plonger dans son univers ‘americana’. Cette musique dépouillée et sincère est manifestement destinée aux fans du Neil Young dans sa phase acoustique.
La soirée touche à sa fin et Piano Club déboule sur le podium. Sa pop est gonflée aux synthés ‘vintage’. Anthony Sinatra (chanteur des Hollywood P$$$ Stars) a le chic pour composer des morceaux qui semblent surgir d’un film pour ados américains des années 80. Le groupe n’avait plus répété depuis un an, mais personne ne s’en rend vraiment compte. Le son est gros et les titres efficaces, à l’instar du single « Andy », achevant la prestation.
Me & My Machines enchaîne. Si je ne m’abuse, cet artiste répondait autrefois au pseudonyme de Mr Poulpy. Son électro bastonne. L’efficacité est au rendez-vous ; mais le chant maniéré a raison des dernières gouttes de patience coulant dans les veines de votre serviteur…
La formule plus maîtrisée de Superlux est bien plus convaincante. En quelques années, la formation a bien mûri ; et son électro pop met littéralement le feu à l’Orangerie. Leur cocktail sonore est pêchu et subtil. Et franchement, réussir ce type de mixture n’est pas à la portée de n’importe qui.
La soirée s’achève par les hilarantes élucubrations décadentes du Colonel Bastard et sa majorette poilue et enrobée. Ce quart d’heure de furie technoïde et couillonne fait l’unanimité et amuse franchement la galerie. Le colonel montre son zizi à tout le monde et la (le) majorette éructe comme un(e) damné(e). Bref, on a l’impression d’être tombé dans une kermesse aux horreurs. Une manière comme une autre de clôturer la soirée… (NDR: et on vous invite à aller jeter un oeil sur les photos consacrées de cet événement)
Organisation : JauneOrange/Botanique