Les ravissements de Maud Lübeck

En mars 2023, Maud Lübeck est invitée par Ghislaine Gouby, directrice des Scènes du Golfe à Vannes, pour une carte blanche lors du festival ‘Les Émancipéés’. Cette année-là, pour la première fois, se déroulent ‘Les ravissements’, quatre rencontres animées par…

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The Experimental Tropic Blues Band

Ce disque est invendable...

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The Experimental Tropic Blues Band se produisait ce samedi 19 avril, au Salon de Silly, afin d’y présenter un curieux concept intitulé ‘The Belgians’. Après une bonne heure trente d’un show particulièrement déjanté et décomplexé, votre serviteur part à la rencontre d’un des deux guitaristes : Jérémy dit ‘Sale Coq’. Sans doute, le plus exubérant de la bande ; et pourtant il a la tête bien sur les épaules. Entretien.

Comment est née l’idée de réaliser une ode patriotique et électrique à notre drôle de pays ?

Elle est née suite à un simple concours de circonstances. Aux Etats-Unis, les gens ne nous surnommaient pas les ‘Tropics’, mais ‘The Belgians’. A notre retour, nous avons accordé un concert dans le minuscule Lou's Bar, à Liège. Nous voulions rendre hommage à notre pays. Nous avons dès lors choisi de conserver ce sobriquet plutôt sympa. Le programmateur du Festival de Dour, Alex Stevens, y était. Il estimait le concept original et nous propose alors de nous produire le jour de la Fête nationale, tout en gardant ce nom, afin de marquer le coup. Dans un premier temps, on a estimé l’idée saugrenue. Mais finalement nous avons joué le jeu à la condition que nous puissions projeter quelques images propres à la Belgique sur un écran, durant le set. Les étapes se sont construites intuitivement pour finalement aboutir à ce que nous avons présenté ce soir.

Un concept album consacré à la Belgique, est-ce sérieux ?

Le spectacle de ce soir est un condensé d’évènements qui ont marqué la Belgique. Parfois drôles, parfois dramatiques, comme les tueries de Liège, par exemple. Ils constituent le miroir de notre société. La Belgique est-elle sérieuse ? Est-ce sérieux de vivre dans un pays qui n’existe même pas aux yeux des Belges et du monde ? Nous voulions présenter, naïvement, la vision que nous avions de notre propre patrie sans prise de position aucune. Il s’agit d’une démarche plutôt artistique, proche de celle des dadaïstes.

Cet elpee serait-il plutôt le reflet d’une récréation, d’une blague potache ou d’un cri du cœur ?

Il résulte de la culture et de l’expérience de Jon Spencer. Il nous a inculqué un principe, celui de pouvoir exercer ce métier tout en restant soi-même et en acceptant ses erreurs. Sa philosophie est la nôtre. Nous sommes issus de la même école. Lui comme professeur et nous comme ses élèves. Pour ma part, je n’aime pas du tout les disques léchés. Je préfère de loin ceux dont l’imperfection est palpable. Ceux qui trébuchent le plus en quelque sorte. Le lâcher prise est essentiel dans ce métier.

Quelle symbolique souhaitiez-vous développer en adaptant ‘La Brabançonne’ ?

A vrai dire, nous n’avions jamais imaginé enregistrer un album intitulé « The Belgians ». La mise en place s’est opérée en fonction des rencontres et des circonstances. Lorsque le projet a mûri, la Brabançonne s’est imposée d’elle-même. Cependant, nous la voulions ‘façon’ Jimi Hendrix, afin de nourrir davantage le disque et le spectacle. Encore une fois, rien n’a jamais été calculé. Nous avons d’abord réalisé l’album. Le visuel a été conçu par ‘Film Fabrique’ et ‘Sauvage Sauvage’, deux structures qui avaient déjà bossé sur nos clips. Les morceaux prennent tout leur sens à l’appui des images. Il était important que notre démarche soit bien comprise, et tout particulièrement la signification que nous voulions communiquer à notre définition du surréalisme. Par exemple, pour « Belgian Hero », il était intéressant d’appuyer la dichotomie entre un chômeur qui noircit ses cases et celle d’une Justine Hénin savourant une victoire. Nous fonctionnons à l’instinct à vrai dire. C’est essentiel ! Le jour où nous changerons cette perspective, nous sommes morts.

Les paroles sont sans langue de bois et bien éloignées de ce fameux ‘compromis à la Belge’ !

Oui, effectivement.

On a l’impression qu’en gravant un tel LP, le groupe n’a pas voulu s'enfermer dans une routine et a osé prendre des risques, notamment celui de ne s’adresser qu'à une partie de son public potentiel. Est-ce exact ?

En Belgique, la prise de risques n’existe pas. Un groupe belge ne parviendra jamais à révolutionner le milieu. Seuls ceux issus du pays de l’Oncle Tom parviennent véritablement à imposer leur propre vision des choses. En Belgique, il n’y a que Hooverphonic, Stromae et dEUS, même si ce dernier est à la traîne aujourd’hui, qui y soient parvenus sur notre territoire. Pour notre part, nous sommes juste une bande de potes qui prennent plaisir à faire un truc complètement barré. Nous avons l’opportunité de poursuivre cette voie et le public nous suit. Que demander de plus ? Notre prochain projet sera différent, mais tout aussi décalé. Nous y avons travaillé pendant une année complète. Ce qui a exigé beaucoup d’investissement, mais le plaisir est omniprésent…

Lorsqu’on écoute "Belgians Don't Cry", on ne peut s’empêcher de penser aux sonorités new beat des Confetti’s…

C’est exact. Les Confetti’s restent une référence. Tu sais, lorsque nous avons enregistré « She Could Be My Daughter », nous recherchions clairement cette identité noir/jaune/rouge en y insérant des sons propres aux fanfares belges. Tu y entends beaucoup de percussions. Toute cette culture appartient à notre patrimoine et nous ne pouvons l’ignorer, en fin de compte.

La pochette du disque nous projette dans un univers proche du communisme. Qui a eu cette idée et pourquoi ?

Le postulat de départ était d’y voir des personnes sur une plage belge. A la place des yeux, nous avions imaginé des gaufres. Puis, Pascal Braconnier (NDR : Sauvage Sauvage) avait une autre idée en tête. Il nous avait suggéré de retranscrire les dernières images du film ‘La Planète des Singes’ où sur fond d’apocalypse, la statue de la Liberté reste figée. Nous estimions ce concept très intéressant. Nous avons donc pris le parti de mettre en exergue le symbole national qui est l’Atomium et l’avons transposé sur la jaquette. Le produit fini est une forme d’art en quelque sorte. Il y a une pochette, des chansons à textes et un spectacle.

Que pensez-vous de l’étiquette de ‘groupe sérieux qui ne se prend pas trop au sérieux’ ?

Ecoute, on s’en fout. On peut écrire ce que l’on veut sur nous, ces réactions ne nous touchent pas. Le pire serait de tomber dans l’indifférence complète. Nous essayons de faire partager notre univers à un maximum de personnes, sans aucune pensée manichéenne. Nous ne sommes pas dans une optique carriériste. Il y a quinze ans que le groupe existe et pourtant nous ne passons toujours pas à la radio. Mais au fond, ce n’est pas important. Tu sais que lorsque nous avons commencé, le batteur était complètement néophyte. Il était guitariste et n’avait jamais mis la main sur une batterie auparavant. Nous voulons pratiquer naïvement de la musique, sans se fixer d’objectif précis. Il n’existe vraiment aucune volonté arriviste chez nous.

Tu déclarais, lors d’une interview, que tu avais voté blanc pour la première fois de ta vie et que tu ne te rendrais plus aux urnes, à l’avenir. Coup de gueule ou coup de com’ ?

Je ne crois plus en la politique belge. Je recherche une certaine forme d’utopie en quelque sorte. J’ai l’impression que les gens sont pris d’une forme d’aliénation. Nous ne voulons pas communiquer un message politique à travers nos chansons. Mais plutôt d’afficher notre propre perception des événements. En fait, notre discours est politique, mais sans le vouloir. Je ne m’y intéresse absolument pas, ni aux programmes proposés par les partis. Ils ne prennent pas leurs responsabilités. J’assume complètement et ouvertement ces propos.

Une formation qui prend pour patronyme ‘The Belgians’, mais qui ne s’est pas encore exportée en terres néerlandophones, n’est-ce pas un peu paradoxal ?

Les Belgians n’ont jamais été invités en Flandre, c’est vrai. Par contre, nous nous sommes déjà produits à l’Ancienne Belgique. Mais, ce jour là, la salle était quasi francophone.

Quels pourraient être vos homologues flamands ?

Je me sens assez proche d’un Mauro Antonio Pawlowski, même si son univers est assez différent (NDR : il a entamé sa carrière en 1992 comme chanteur d’Evil Superstars et a ensuite rejoint dEUS).

La belgitude est-elle soluble dans le rock ?

Les étrangers parviennent difficilement à comprendre ce qu’est la belgitude. Pour un belge, c’est un concept assez naturel somme toute.

Difficile de l’exporter, et notamment en France ?

Nous avons déjà joué en France à deux reprises. Les Français ne parviennent pas à comprendre toutes les subtilités liées de notre culture. C’est tout à fait normal. Nous nous inscrivons dans une démarche plutôt spontanée. Dans le cas contraire, nous n’aurions jamais pu tourner ailleurs qu’en Wallonie avec tout au plus dix dates. Nous ne sommes ni carriéristes, ni arrivistes. Notre aventure ne nous permet pas de gagner notre vie. Nous voulons juste nous amuser et donner du plaisir. Pour de nombreux artistes, faire de la musique, c’est d’abord se façonner une identité avant même de pouvoir proposer quoique ce soit de concret. Cette démarche n’a jamais été notre truc. Nous avons réalisé un spectacle sur la Belgique, sans même imaginer qu’on allait le mettre en scène par l’image. Jamais, nous ne calculons.

C’est le ‘live’ qui vous permet de bénéficier d’un certain écho auprès du public. Ce nouvel opus semble d’ailleurs davantage taillé pour la scène. Etait-ce calculé ?

Ce disque est invendable, c’est clair. Je considère qu’il s’agit avant tout d’un concept album. Une fois complètement achevé, on passe à autre chose, c’est tout. Nous travaillons pour l’instant sur le projet suivant. Ceux qui s’installent d’ailleurs dans la routine sont pathétiques...

Nicola Testa

La boucle est bouclée…

Écrit par

C’est dans le cadre de la promotion de son nouvel album, sorti fin mars 2015, que Nicola Testa a accordé cette interview à Musiczine. Ne parvenant pas à aligner nos agendas respectifs, c’est par téléphone que ce sympathique entretien s’est donc réalisé.

Nicola, l’accueil critique de ton premier LP, « No more Rainbows », est excellent. Une réaction ?

Je suis évidemment très content des échos plutôt favorables des médias et du public à propos de cette sortie. Je ne m’attendais honnêtement pas à un tel engouement.

Tu as travaillé en compagnie d’Antoine Gaillet (Julien Doré, M83, Talisco, François & The Atlas Mountains, ...), déjà considéré comme une pointure dans le milieu. Es-tu parvenu à gérer facilement la pression inhérente à sa présence ?

Au début, j’étais impressionné ! Nous ne nous connaissions pas. Il a écouté mes démos. Je me suis penché sur le travail qu’il a réalisé. Nous nous sommes ensuite rencontrés à Paris, un après-midi, dans son studio d’enregistrement. Nous avons beaucoup dialogué au sujet de nos attentes respectives. Nous nous sommes rapidement trouvés des points communs dans le domaine de la musique, même si nous nous ne partageons pas exactement les mêmes goûts dans ce domaine. Ensuite, je suis arrivé en studio avec des bandes et un matos sous le bras.

L’elpee reflète un univers très contrasté. Il est à la fois très lumineux et très sombre. Comment s’est-il construit ? Avais-tu un postulat de départ précis ou alors les sessions se sont-elles déroulées naturellement ?

De manière très instinctive. Ensuite, il est clair qu’on est amené à prendre une certaine direction. C’est obligatoire ! Ce disque, je l’ai voulu varié, mais cohérent. Antoine Gaillet en a produit la quasi-totalité. Nous avons œuvré de concert afin de trouver un son qui me corresponde totalement. La suite s’est ensuite mise en place naturellement. C’était une expérience très enrichissante !

Es-tu sensible à la critique ?

On ne peut pas être totalement insensible à la critique, mais j’essaie, dans la mesure du possible, de n’y accorder que peu d’attention. On ne peut évidemment pas plaire à tout le monde ! Cela fait partie du jeu ! Je fais ce qui me plait et le public s’y retrouve. Ceux qui n’aiment pas, tant pis ! Il faut être content de soi. A partir du moment où on est fier du travail accompli, la critique devient accessoire.

On a l’impression que tes influences sont assez rétro et se nourrissent aux années 80... Tu confirmes ?

Il s’agit d’une tendance qui se généralise actuellement, dans le milieu de la pop. Mais l’album va au-delà car il propose une palette de couleurs variées : il y a des sonorités techno, rock et folk aussi. Je ne voulais rien m’interdire. Je souhaitais construire des chansons en laissant le plus possible d’ouverture. Il est la résultante de tous ces paramètres… Mais, tout en gardant à l’esprit cette culture musicale qui m’est propre.

L’elpee s’ouvre par « Rainbow » et se termine par « No more Rainbows ». Pourquoi ne pas avoir choisi de terminer ton disque par une note positive ?

L’idée était de transformer un message négatif en force. Finalement, je ne sais pas si la notre est vraiment négative parce qu’il y a quand même de l’espoir dans cette chanson. Il s’agirait plutôt d’une boucle. Lorsqu’on arrive en fin de parcours, il suffit d’appuyer sur le bouton ‘repeat’ et de recommencer par « Rainbow ». La boucle est bouclée !

La pochette est plutôt conceptuelle. Les couleurs sont brouillées et partent dans tous les sens. Pourquoi ne pas avoir opéré le choix du portrait classique ?

Sa réalisation a été confiée à d’Eric Croes. Elle représente la propre vision du disque de cet artiste. Nous avons discuté et élaboré plusieurs projets. Celui-ci s’est imposé de lui-même. L’idée était de traduire une forme de dissimulation. Il y a moi, d’une part, et tout ce qu’il y a autour de la musique, d’autre part. Toutes ces émotions prennent parfois le dessus ! Je souhaitais qu’elle incarne davantage une vision de ce que représente le disque qu’un simple portrait linéaire.

Ton LP « Wanderland » était davantage centré sur toi-même alors que celui-ci l’est plus sur les autres. Exact ?

Je souhaitais écrire des histoires qui me touchent et concernent tout le monde. Ecrire pour soi est un concept qui vous enferme dans les mêmes thématiques. Cela commençait à devenir inintéressant ! On a vite fait le tour de la question ! Le fait de décrire, en se servant de mes mots, des émotions et des histoires qui appartiennent aux autres était un défi. Je désirais évoluer comme auteur aussi.

Entre le premier long playing et celui-ci, quatre années se sont écoulées… Est-ce le temps nécessaire à la maturation ?

Je ne sais pas si cinq ans constituent le temps nécessaire… C’est en tout cas, le temps qu’il m’a fallu pour réaliser cet album. C’était un long travail. Il y tout un tas de processus en amont, à savoir la recherche de fonds, d’un producteur, … Entre-temps, j’ai aussi continué à faire du théâtre. Au final, je ne sais pas si c’est moi qui a eu besoin de temps ou alors si ce sont les choses qui ont besoin de temps pour se faire.

Tu as décroché le Prix du Public lors des Octaves de la Musique pour le clip délirant de ‘KOKO’ face à des artistes comme Stromae, BRNS, Suarez, Girls in Hawaii ou bien encore Antoine Chance. Tout roule pour toi en cette année 2015 ?

J’espère que cette année sera la mienne, d’autant plus qu’elle ne fait que commencer ! J’ai été très surpris de gagner face à des artistes de cette trempe. Je dispose peut-être d’un public moins large, mais sans doute plus fidèle !

Pour tourner cette vidéo, tu avais choisi une comédienne, Aurélie Lannoy. Dans « Rainbow », tu te mets en scène. Tu sembles tout disposé pour la danse. Qui en a eu l’idée et pourquoi ce choix délibéré ?

Je voulais me mettre à nu ! En plus, je trouve que cette option correspondait bien à la chanson. Afficher ma propre vulnérabilité à travers un clip était une bonne idée.

Le concert du 17 avril à la Rotonde a très vite été sold out. Ton single est régulièrement  diffusé sur les ondes. Comment gères-tu cette soudaine célébrité ?

Je n’ai pas l’impression d’être aussi célèbre que tu crois ! Par contre, rencontrer les gens après un concert, recevoir des mails d’encouragement ou encore des vidéos décalées où certains se filment dans leur voiture occupés d’écouter ma musique, est très plaisant. C’est ce qui m’enchante, véritablement.

Il y a une vraie dynamique scénique qui se forme aujourd’hui. Au début, tu étais seul alors qu’aujourd’hui vous êtes six sur les planches… Les choses évoluent y compris dans le visuel.

Oui, tout à fait ! Pour ce disque, j’avais envie de m’entourer de musiciens. Mais pas seulement. Former un groupe afin de créer une dynamique susceptible d’emmener la musique au-delà de ce que peut procurer un disque. Certaines chansons live auront de facto une couleur différente. La scène est magique ; elle permet un réel partage avec le public.

Tu es un artiste pluridisciplinaire, mais la musique a toujours été en toi ?

Depuis tout petit, la musique a toujours pris une grande place dans ma vie. Je ne dirais pas qu’il s’agit d’une drogue, parce que l’addiction est dangereuse. Je parlerais plutôt d’un besoin. Elle transporte et permet un voyage en dehors de soi !

Tu as participé au festival dourois ‘La Vie en Rock’, en 2014. Ce festival est destiné à rechercher des fonds pour la lutte contre le cancer du sein. Apporter ta collaboration à des actions caritatives, est-ce important pour toi ?

Les organisateurs me l’ont demandé avec beaucoup de sincérité. Il était donc important d’y répondre positivement. C’est une maladie qui nous touche tous, un jour ou l’autre, de près ou de loin. Il y a tellement de progrès encore à faire dans ce domaine. Ce sont des aventures humaines face auxquelles on ne peut pas rester insensible.

As-tu contribué à d’autres manifestations de ce type ?

Non, pas pour l’instant. Ce n’est pas non plus mon rôle ! Mais pourquoi pas, si elles peuvent aider des gens à concrétiser des projets comme celui-là.

L’industrie du disque traverse une crise sans précédent. Penses-tu qu’un jour, on pourra oublier ce support physique ?

Je ne suis pas sûr ! Le vinyle fait un retour en force par exemple. L’industrie du disque propose des produits sous des formes plus abouties, comme les éditions limitées ou ‘collector’. Le support physique a une symbolique sentimentale que le digital ne parviendra jamais à égaler !

Une question que je pose systématique aux chanteurs francophones… Pourquoi chanter en anglais ?

Pourquoi pas finalement ! Il s’agit d’une forme de langage. Si j’avais été peintre, j’aurais pu choisir l’huile, l’aquarelle ou encore le crayon. J’ai choisi une langue que j’aime. Je la connais et la maîtrise. Je prends beaucoup de plaisir à écrire et en jouer. J’aurais bien plus de difficultés à réaliser cet exercice dans la langue de Verlaine.

Comment enisages-tu ton futur musical ?

Je me vois progresser et enregistrer encore quelques disques ! Enfin, j’espère… Peut-être aussi, ferais-je autre chose… J’essaie de ne pas me projeter. J’aime le présent. Ce qui me permet d’envisager l’avenir plus sereinement !

Lola Colt

Apprendre du passé, regarder vers le futur et le vivre aujourd’hui…

Écrit par

Lola Colt, c’est le titre d’un film spaghetti datant de 1967, réalisé par Siro Marcellini. Un long métrage qui cumule les clichés du genre. C’est également le patronyme choisi par une formation insulaire au sein de laquelle milite une Danoise, Gun Overbye. Au chant et circonstanciellement à la guitare. Et une Berlinoise, Sinah Blohberger. Qui se consacre à la basse. Elle n’a pas participé aux sessions d’enregistrement de l’album ‘Away from the water’. C’est Tatia Starkey, la petite fille de Ringo Starr, qui s’y était collée (NDR : scoop !) Et votre serviteur ne s’en est rendu compte qu’en préparant cet article. Donc, il n’y aura pas de question sur ce sujet. Et c’est justement Sinal –peu loquace, il est vrai– et Matthew Loft, le guitariste soliste, qui ont accepté de répondre à nos questions, avant d’accorder leur set, ce 17 mars, au Botanique…

La musique de Lola Colt constituerait une bande sonore pour films imaginaires. Ce qui expliquerait donc le climat angoissant, obsessionnel, menaçant, au sein duquel baigne l’opus. On pense parfois aux B.O. d’Ennio Morricone composées pour les westerns de Sergio Leone, mais aussi à celle que les Doors avaient réalisée pour le chef-d’œuvre de Francis Ford Coppola, ‘Apocalypse now’. Surtout sur le titre maître, dont l’atmosphère évoque le fameux ‘The end’. Matt réagit : « Les journalistes n’ont pas nécessairement le même rapport historique et les mêmes influences que nous, pour écrire une chanson. Donc ils perçoivent différemment notre musique. Et à travers toutes les interviews accordées, on nous a déjà cité un bel éventail de références. Et ça, c’est fascinant… Nous sommes tout à fait conscients de la tension que nous injectons dans nos compos. Elle ne sont ni allègres ni ‘dance’. Mais bien intentionnellement agressives. Et lorsqu’on relâche cette tension, on profite d’un grand moment… »

La première fois que j’ai entendu un morceau de Lola Colt, la voix de Gun m’a immédiatement fait penser à celle de Grace Slick (Jefferson Airplane) ; encore que sous sa forme la plus déclamatoire et emphatique, c’est plutôt Patti Smith qu’elle évoque. Sinal nuance : « Vous savez, je ne pense pas que ce soit conscient. Elle chante du plus profond de son cœur. On l’a déjà comparée à celle de Siouxsie Sioux ou encore PJ Harvey. Non, elle a sa propre voix. En même temps, c’est un compliment. » Parmi les sources d’inspiration majeures citées par les musicos du band figurent Jefferson Airplane, Jesus & Mary Chain (et surtout l’album ‘Psychocandy’), The Doors, les Bad Seeds, les Cramps ainsi que le Velvet Underground ; mais de quelle formation contemporaine se sentent-ils les plus proches ? la réponse de Matt fuse : « Warpaint ! » Je leur signale que le combo s’était produit l’avant-veille au Cirque Royal de Bruxelles. Ils semblent agréablement surpris. Matt embraie : « Bien que leur musique soit différente, on respecte ce que ces filles réalisent. Leur univers sonore est unique en son genre et très intéressant… »

Les textes des chansons de Lola Colt sont poétiques, sombres, mélancoliques, métaphoriques et même ésotériques. Ils parlent souvent de la mort et de l’amour perdu. Mais qu’est-ce qui peut bien les pousser à écrire des lyrics aussi ténébreux et désabusés ? Matt clarifie : « Je pense que dans la vie, il y a des événement qui vous marquent profondément ; mais tout dépend de la personne que vous êtes. Chez certains, cette réaction va se transformer en art, et notamment la musique. Pour d’autres elle prendra une autre forme. Si les paroles sont torturées, ce n’est pas parce que Gun est déprimée, mais parce qu’elle interprète les événements, et ce qu’elle ressent est tourmenté. Je pense qu’elle les exprime aussi de manière ironique, oblique. Ce n’est pas du blues, mais elle utilise souvent la métaphore… »

Jim Salvunos, le drummer des Bad Seeds, s’est chargé de la mise en forme de l’elpee, mais il a également coopéré aux parties instrumentales. Matt raconte : « Il est toujours actif comme musicien. Donc, on parle le même langage musical. Et sous cet angle son approche des sessions d’enregistrement a facilité le travail et a permis à note collaboration d’être efficace. Les groupes doivent apprendre à communiquer avec leur producteur, car si on reste trop longtemps sur la même page, on ne peut pas commencer à bosser… Il a joué du carillon (tubullar bells) et des cymbales. Un peu de percus. Il est plus facile de travailler en compagnie d’un musicien/producteur que d’un simple producteur…»

Mais comment Lola Colt envisage-t-il l’évolution de sa musique ? Dans certains articles de la presse spécialisée britannique, le recours aux orchestrations, comme chez Godspeed You ! Black Emperor, Broken Social Scene ou encore Arcade Fire, figurerait parmi leurs projets. Matt s’étonne : « Vraiment ? C’est une formule qui est dans l’air du temps. Mais en prenant de l’amplitude, on perd également de la force. Dans le passé, certains ont réussi le challenge. D’autres se sont plantés. Nous avons déjà tenté l’expérience. Mais on en a conclu qu’il serait plus judicieux de garder notre configuration actuelle, plutôt que d’élargir le line up. On va bien sûr chercher à innover, plutôt que d’en remettre plusieurs couches. Pour en revenir aux formations que tu cites, on apprécie leur musique. Arcade Fire est un grand groupe. Les orchestrations et les arrangements sont très riches et minutieux. Tandis que chez Godspeed, leur approche est plus noisy, plus sonique. C’est un paysage sonore. Et même si on n’a pas d’influence directe, on a pas mal de choses en commun. »

Alors, chez Lola Colt, y a-t-il davantage de yin (le noir, le féminin, la lune, le sombre, le froid) ou de yang (le blanc, le masculin, le soleil, la clarté, la chaleur) ? Sinah a son explication : « C’est un parfait équilibre. Dans le line up, il y a trois garçons et trois filles. Une formule plutôt rare. Dans la plupart des autres groupes, elle est très souvent déséquilibrée. Le plus souvent, elle implique davantage de mecs que de filles. Certains considèrent que s’il y a plus d’hommes, la musique sera plus agressive. Et si c’est au féminin, elle sera plus pop. C’est à prouver ! Mais lorsque la répartition est égale, la dynamique est meilleure. Mais finalement, cette situation est arrivée par hasard… »

Apparemment, le groupe utilise des ‘liquid lights’ pendant ses spectacles (NDR : pas trop remarqués ce soir, probablement à cause de la configuration du Witloof Bar). Ce type de jeux de lumières était utilisé, fin des 60’s par le Pink Floyd. Matt confirme : « Nous y sommes très intéressés, et notre système s’inspire de celui utilisé à l’origine. Soit ceux des années 60, aux States. Avant qu’il ne débarque en Angleterre. Nous souhaitions ajouter à l’expression audio, un effet visuel. Donc proposer 2 spectacles, en même temps. Je suppose qu’à l’époque, la consommation de LSD était courante. Et ces expériences étaient destinées à faire exploser les frontières de la conscience. Nous on cherche à se rapprocher de cette expérience, mais sans avoir recours aux psychotropes. Effectivement ces shows liquides sont inspirés par les sixties et même les seventies. Mais on projette la matière en se servant d’ordinateurs portables pour nos light shows… »

Les musiciens seraient passionnés par l’incertitude du futur. Ce qui méritait des éclaircissements. Matt s’en charge : « En fait cette déclaration est à mettre en relation avec le peu de relation que nous avons avec notre passé. Mais on essaie de le mettre en corrélation avec notre futur. Nous avons donc décidé d’explorer plusieurs décennies afin d’y puiser des éléments qui puissent nous permettre de progresser dans le futur. » Serait-ce la raison pour laquelle, le groupe essaie de créer de la musique intemporelle ? Et quelle est leur définition de la musique intemporelle ? Matt commente : « Je pense qu’il s’agit d’une musique qui n’appartient à aucune époque particulière. Qui vient davantage du cœur ou d’une vison qui ne concède aucune référence à une tendance ou une mode spécifique. Celle qui vient de votre for intérieur et que vous transmettez. Et qui n’est pas nécessairement liée au temps… » Apprendre du passé, regarder vers le futur et le vivre aujourd’hui serait donc la devise de Lola Colt… Pour Sinah, c’est toute la synthèse de ce qu’ils viennent de raconter au cours de cet entretien…

(Merci à Vincent Devos)

 

  

The Subs

Difficile de décompresser, quand on a fait la fête…

Écrit par

Cet entretien s’est déroulé le 30 août 2014, dans le cadre du festival des Barges à Scène sur Sambre. Pour répondre à nos questions, The Subs a délégué Jeroen ‘Papillon’ De Pessemier  et Wiebe ‘Tonic’ Loccufier. Il y a un bon bout de temps que votre serviteur souhaitait rencontrer les musiciens de cette formation gantoise. Jeroen est une véritable bête de scène. L’énergie qu’il y libère est fascinante. Pourtant, malgré leur réputation internationale et leur professionnalisme, les musicos sont demeurés humbles. Ils sont peu notoires en Wallifornie. C'est le moment de les faire connaître…

Entre vous et les Lokerse Feesten, n'y a-t-il pas un peu, une histoire d'amour ?

Jeroen : On aime bien y jouer. Le public est bon. Il y a toujours de chouettes têtes d'affiche. L’équilibre entre nouveaux et anciens groupes y est parfait et se manifeste à travers la programmation.
Wiebe Loccufier: C'est la cinquième fois consécutive que l'on y joue. Le public de Lokeren vient d’un peu partout. Et pas seulement de Lokeren. Ce sont 10 jours de fête. Il y règne une ambiance particulière. Lokeren est situé juste à mi-chemin entre Gand et Anvers et ce n'est pas loin pour nous.

Jeroen déborde d’énergie sur les planches. Tu prends les mêmes vitamines que Ricky Wilson de Kaiser Chiefs ?

Jeroen : Oui, je pense bien. Je prends des vitamines tout le temps. J'adore bouger. C'est ma manière d'avoir un contact avec le public. De communiquer. Je pense qu'il existe deux types de performances. Soit tu te montres arrogant ou généreux. Et les deux formules fonctionnent. Elles sont pourtant extrêmes. Regarde le chanteur d'Artic Monkey. Le gars, il ne donne rien. Enfin, quand même sa musique. Il n'y fait passer aucune émotion. D'une autre manière, il donne beaucoup, c'est du minimalisme. Ou alors tu prends l'autre extrême et c'est du maximalisme. Tu essais de livrer tout ce que tu as dans le ventre. C'est intéressant pour moi. Car je ne comprends pas pourquoi l'autre manière fonctionne aussi bien. J’incarne mon propre personnage sur scène. Il est difficile de comprendre parfois, pourquoi des performances peu intéressantes, ne sont pas généreuses. Pourquoi elles marchent. C'est quoi ce truc ? Le gars ne donne rien et le public renvoie, simplement à cause de la musique. C’est comme il existe également deux manières de séduire une femme. Tu la joues cool. Tu ne donnes rien et elle te saute dessus. Tu peux faire le bulldozer et tu donnes tout ce que tu as. Tu fonces et ça marche aussi. Moi je ferais plutôt le bulldozer, c'est plutôt dans mon caractère.
Wiebe : Il saute partout.

Lors des concerts, votre public s’agenouille. C'est intentionnel ?

Jeroen : Oui, c'est voulu. C'est drôle d’y parvenir. Quand j’ai essayé pour la première fois, il a accepté de prendre cette posture. La chanson y était propice. Ce moment particulier, on l’a maintenu au cours du set et on l’a perpétué, d’autant plus que le public adhère. C’est une petite ‘joke’ personnelle. Mais c'est cool. C'est dû à l'énergie libérée par la musique ; et à ce moment-là, je descends toujours dans la foule. Pour être directement en contact avec elle. Et quand elle est conséquente, c'est alors comme plonger dans une piscine. La mer qui crée des vagues humaines.
Wiebe : Moi, j'ose pas trop le regarder dans ces moments-là.

Répétez-vous un rituel avant de monter sur l’estrade ? Et puis, en la quittant ?

Wiebe : Je bois du coca. Je pense que notre rituel se produit lors du soundcheck.
Jeroen : On n’a pas vraiment de rituel. Maintenant, nous portons tous les costards. Et enfiler un costume est une forme de rituel.
Jeroen : Après un concert, on bavarde tout simplement avec les gens qui sont venus nous y voir. On souffle et on décompresse. Tu ne sais jamais dire. Quand c'est un grand et bon show comme à Dour et que tu as vraiment senti que l'énergie du public était vraiment forte, on a davantage de difficultés à décompresser.
Wiebe : Quand je rentre à la maison, j’ai besoin d’une heure pour reprendre mes esprits. J’essaye de dormir un peu. Car si je repars directement, je ne pourrais plus dormir après. C'est exactement le même phénomène qui se produit, quand je conduis 90 minutes. C'est bizarre…

The Subs, une réunion de Dj's ou de musiciens ?

Jeroen : Les deux, nous comptons au sein du line up un Dj et deux musiciens. C'est le mix.

Eclectique est incroyablement prolifique, la scène gantoise regorge d’excellents groupes. Une explication ?

Jeroen : À Gand, la scène électro est toujours en ébullition. Depuis au moins 15, si pas 20 ans. Avant ? Je ne sais pas. Tout a commencé par The Glimmers, Two Many Dj's et puis nous. J’ignore pourquoi ? Peut-être y a-t-il des vitamines dans l'eau potable. Ce mouvement s’est finalement ancré dans une forme de tradition. Quand quelqu'un entame un projet, d’autres veulent lui emboîter le pas, mais en mieux. Et finalement, c’est devenu une marque de fabrique. La nouvelle génération est prête à prendre le relais. Une nouvelle vague en route vers le succès.

Vous êtes gantois et pourtant surtout notoires à l'étranger ?

Jeroen: Oui, il faut bien vivre quelque part.
Wiebe : Quand on se produit en Wallonie, c’est un peu comme si on se produisait dans un pays étranger. S’y imposer est parfois difficile pour les groupes flamands.

D’où vient votre passion pour la musique ?

Jeroen : Nous y baignons depuis que nous sommes tout gosses. C’est plus facile quand tes parents sont musiciens. C’est une passion qui se transmet de père ou de mère en fils ou fille. Quand tu viens d’une famille qui n’a pas cette passion, c’est plus difficile de faire le pas et ton parcours est jalonné d’incertitudes. C’est un job stimulant. Si tu décides de reprendre la friterie familiale, c’est différent. Et bien moins attrayant.
Wiebe : J’ai d’abord été Dj. Je pense que quand tes parents sont musiciens, tu évites de te lancer dans la musique.

Parallèlement à The Subs, développez-vous également d’autres projets ?

Jeroen : Plein ! Je milite chez Friends In Paris. J'y bosse en compagnie d’un gars de Londres, où je vis. On est occupé de monter un concept quelque peu secret. On n'a pas encore discuté de ce qu'on allait réaliser ensemble et on n’a pas encore signé de contrat. Mon collègue Wiebe cherche à créer un label. Et nous proposons à d’autres artistes de le rejoindre…

Est-ce qu'il vous arrive de remixer des chansons d'autres groupes ?

Jeroen : On l’a fait pour Alt-J et La Roux. Nous y consacrons moins de temps, aujourd’hui. Comme notre album est plus pop, il y aura moins d'intérêt pour les clubbers à le remixer. Nous allons donc réaliser nos propres remixes de ce disque Ainsi, The Subs va remixer The Subs. Parce qu'on a voulu enregistrer un long playing pop…

Dr Lektroluv, vous êtes sur son label, est-ce une référence ou un ami pour vous ?

Jeroen : Un peu des deux.

Selah Sue a collaboré à votre album. Comment la rencontre s'est-elle opérée ?

Jeroen : J'envoie des petites démos et parfois nous travaillons ensemble. Je la connais, nous avons déjà travaillé ensemble. Nous partageons le même management et nous appartenons au  même cercle d'artistes.

Et par quel hasard avez-vous reçu le concours de Jean-Pierre Castaldi?

Jeroen : Jean-Pierre chante sur notre album. Je l'ai appelé. Il était très sympa. Il n'avait pas entendu le morceau avant. Je lui ai fait écouter le titre au téléphone et il a accepté immédiatement.

Faire la fête, c'est important pour vous ou est-ce tout simplement rock'n'roll ?

Jeroen : Faire la fête, c'est basique pour moi. C'est important et tout le monde doit faire la fête le plus possible. Quand tu es trop fatigué, tu ne sais pas faire la fête.

(Photo : Hanse Cora and Uber&Kosher)

 

 

 

 

Von Durden

On a bénéficié d’une presse de dingue…

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C’est à l’issue de leur concert accordé à la Rotonde du Botanique, dans le cadre de leur ‘Release Party’, que Nicolas Scamardi et Elliott Charlier, respectivement drummer et chanteur de Von Durden, nous ont accordé cette interview. Elliott va entreprendre un tour du monde, à partir du mois de février. Un rêve d’enfant qui se réalise. On en parle…

Elliott : Le départ est fixé au 8 février 2015. J'avais envie de faire ce voyage. J’ai toujours aimé voyager. Comme mes parents. Et je les accompagnais dès mon plus jeune âge. Ce que je n’ai plus fait depuis mes 18 ans. Je ne m’en plains pas, car mon agenda débordait de concerts. J'aurais bientôt 30 ans, et si je décide de fonder une famille, il faudra que je me fixe. Partir à l’aventure deviendrait alors plus compliqué. C’est donc le bon moment.

Dès lors, toute la tournée va se dérouler avant ton départ. N’est-ce pas un peu précipité, 3 mois juste après la sortie de l'album ?

Elliott : C’est selon le point de vue. Si tu envisages la stratégie promotionnelle, c’est un peu court. Mais à mon avis, l’industrie du disque réfléchit beaucoup trop. Elle se prend la tête avec des tas de méthodologies. Nous, on veut simplement prendre du plaisir. Et jouer de la musique, avant tout. Finalement, on est ravi du déroulement des événements.

Christine Verschorren est une pointure dans le milieu de la musique. N’est-ce pas trop difficile de travailler sous sa houlette ?

Nicolas : Nous l'avons choisie pour produire notre album, car elle bosse d’une manière très particulière, hors des sentiers battus. On a pourtant l’habitude de travailler en compagnie de pros. Nous ne souhaitions pas être aidés, mais accompagnés différemment, par un(e) ingé son. Elle a une approche différente de la mise en forme. Et se distingue par sa capacité à te plonger dans un autre univers…

La voix d’Elliott colle bien au style hard. Dans les moments les plus paisibles des compos, elle me fait parfois penser à celle de Lenny Kravitz. Vous partagez mon point de vue ?

Elliott : C’est cool, deux fois aujourd’hui qu’on me le dit.

Elle est travaillée ou naturelle ?

Elliott : Je ne la travaille pas hors du groupe. Uniquement lors des répètes. Je ne prends pas de cours de chant. Je n'ai pas de projet parallèle. Je ne participe qu’à l’aventure de Von Durden.

Et Fabrice ? Il me semble qu’il développe plusieurs projets?

Nicolas : Fabrice est capable de maîtriser tous les genres de musique. Il considère son implication comme un job. Il joue merveilleusement bien de la basse. Son background est impressionnant. Et pourtant, il ne participe au projet que depuis trois ans. Il est polyvalent. Il peut intégrer n’importe quel line up et apprendre leurs morceaux en deux semaines. C'est un mec sur lequel on peut compter. Il adore l’aspect familial de la vie d’un groupe. Il a besoin de bien s’y sentir. Il peut également devenir un mercenaire. Il connaît son truc. Il ne joue plus chez Ozvald.

« Lucky In Love » est le titre le plus funk de votre répertoire ? On n’est pas loin de Jessie J. C’est une référence pour Gladys, la bassiste ?

Nicolas : Absolument ! Elle est fan de toute la production américaine : Pink, Katy Perry, Jessie J, c'est vrai. C’est une géniale ‘performeuse’ qui communique à nos compos un sacré groove.

Les medias décrivent votre musique comme ‘Brute de décoffrage’. Une explication ?

Nicolas : C'est parce qu’elle est dispensée ‘live’, sans artifice. Christine y est pour quelque chose. La musique n’est ni léchée, ni assujettie au clic. Si certaines fréquences sont susceptibles de te casser les couilles, mais qu’elles sont bonnes, on les laisse. Nous avons la totale liberté de création. Nous avons réalisé notre album en 2 ou trois semaines. Le mix et tout le reste y compris.

Quel est vraiment le style de votre musique ?

Elliott : C'est du Rock.
Nicolas : On ne peut rien dire d'autre. C'est du rock, malgré ses multiples influences. Qu’on digère progressivement. Celle qui te fait penser à Kravitz est certainement due à la mélodie.  

Le Grand Jojo, Queens Of The Stone Age, Pearl Jam, Stromae, Beatles, Arno et les Sex Pistols. Au sein de cette liste, vous avez détecté des intrus ?

Nicolas : Le Grand Jojo. Pas vraiment mon truc. Mais il donne du bonheur à des tas de gens. Faut surtout pas qu'il arrête.
Elliott : Rien. Même pas le Grand Jojo. C'est du talent qui ne me parle pas.

Vous semblez bénéficier d’une bonne équipe pour assurer la promo…

Elliott : La promo doit passer par toutes les formes de medias. Que ce soit sur papier ou via Internet. C’est indispensable pour être visible. Si tu ne l’es pas, les gens pensent que tu n'existes plus. Oui, c'est important et c'est la raison pour laquelle nous avons choisi Olivier Biron, comme attaché de presse. Il est particulièrement compétent. C’est même le meilleur avec lequel nous ayons eu la chance de bosser. On se sert également des réseaux sociaux comme une majorité d’autres artistes. C'est important.
Nicolas : La plupart de nos connaissances estiment que bénéficions d’une presse de dingue. Depuis un mois, les articles pleuvent, grâce à son implication. C'est un tueur et il abat un boulot monstre.

Continuez-vous à collaborer avec Julien Henry de ‘Film Fabrique’ ? Il apporte son concours aux projets de The Experimental Tropic Blues Band, il me semble ?

Nicolas : C'est lui qui se charge du visuel d'Experimental. Il est doué et adorable. On s'est entendu sur le projet et on a décidé de poursuivre notre collaboration.
Elliott : On n'en trouve pas des centaines comme lui dans le métier. Il accomplit un boulot remarquable…

Le patronyme de Von Durden Party Project s’est réduit à Von Durden. Pourquoi ?

Nico : Parce qu’au départ, je drivais un autre groupe, Melchior. Je voulais faire la distinction entre ce band et le projet Von Duden. Quant au mot Party, c’est parce qu’on voulait mettre l'accent sur le côté festif et ‘dance’ de notre musique. Puis nous avons abandonné ces épithètes...

 

 

Driving Dead Girl

Il est plus difficile de se produire en Belgique qu'à l'étranger…

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La Maison des Jeunes de Sambreville fêtait, en 2014, ses 40 années d'existence. Quatre décennies déjà que l'institution se décarcasse pour dynamiser la région de Sambreville. Et tout particulièrement dans le domaine de la musique. Nous sommes le 6 septembre 2014, soit le deuxième jour du festival organisé par cette MJ. Driving Dead Girl est un quatuor réunissant le chanteur/guitariste Dim Wild, le second gratteur Ronald Dondez, le bassiste Ruggero Catania et le drummer Vincenzo Capizzi. Ces trois derniers se sont volontiers prêtés au feu de nos questions.

Est-il exact que le festival de Dour a servi de détonateur au groupe ?

Ronald : Dour a été très important pour nous. C’est là que nous avons entamé notre aventure. Nous avions gagné le concours 'tremplin', ce qui nous avait permis de participer au festival. Je suis issu de Mons, donc un peu le régional de l'étape ; aussi se produire lors d’un tel événement alternatif était une aubaine pour nous.

Pourriez-vous nous relater la genèse de Driving Dead Girl ?

Ronald : En fait, Dim et moi étions amis depuis très longtemps. Au départ il évoluait dans l’univers du punk. Nous avons ainsi joué ensemble, brièvement, dans le même groupe. Puis nous avons monté Driving Dead Girl. Qui a vécu de nombreux changements de line up. Vincenzo y milite depuis pas mal de temps. Ruggero vient de débarquer. Il est vrai que plusieurs bassistes se sont succédé, avant son arrivée. Nous comptons 10 ans d’existence. Et Dan Diaz y a milité 4 ans. Pour tout savoir, si je suis montois et les 3 autres sont issus de Bruxelles.
Vincenzo : J’ai débarqué au sein du groupe, il y a 6 ans.

D'où vient le nom du groupe ? Driving Dead Girl signifie ‘conduire les filles mortes’. Ce patronyme a-t-il une signification particulière ?

Ronald : Aucune, en fait. Nous aimions ces mots-là et nous les avons réunis. En même temps, tout n'est pas faux non plus. Quelques anglophones nous ont avoué qu’il sonnait bien. Nous voulions simplement en dénicher un qui tienne la route.

Votre musique est souvent qualifiée de rock/garage. Une réaction ?

Ronald : J'allais justement t’en parler. Ce style de musique en englobe d'autres. Nous, on y a ajouté un zeste de psyché. Mais on pratique du rock pur et dur, tout simplement. On ne prétend pas émarger au garage, ce sont les autres qui le déclarent.
Vincenzo : On a déjà du mal à trouve notre place. On ne joue pas du punk, mais du rock. Energique.
Ruggero : Quand j’ai débarqué au sein du groupe, je n’ai pas pensé au genre de musique pratiqué ou que j’allais jouer. Je me suis amusé et c'est le but que je continue à poursuivre.

Avez-vous suivi une formation académique ou êtes vous autodidactes ?

Vincenzo : Pendant une année, j’ai fréquenté le Jazz Studio d'Anvers. Je n'ai pas d'autre formation particulière. On joue instinctivement.

Par quel hasard êtes-vous atterris sur le label at(h)ome ?

Ronald : En fait, c'est notre manager Bertrand qui s'est occupé de ce deal. Au début, nous étions hébergés chez Bad Reputation, un label français. On n’y a pas rencontré de problème majeur. Mais on ne peut pas dire que la communication et la promotion étaient optimales. On a alors décidé de changer. Bertrand a entrepris les démarches et a contacté at(h)ome qui était emballé par le projet.

Parmi les artistes belges sur se label, il n'y a que vous et MLCD ?

Ronald : En fait MLCD est chez notre tourneur. Il booke nos concerts et ceux de MLCD en France.
Vincenzo : Mais, il y a aussi un autre groupe belge…

Vous comptez 10 ans d'existence et avez gravé 3 elpees dont le dernier est paru l'année passée. Vous carburez au diesel ?

Ronald : Carrément oui. On est un peu fainéants, On se laisse bien vivre. Mais quand il faut, il faut.

Envisagez-vous de publier prochainement un nouvel album ?

Ronald : On a composé de nouveaux morceaux et on bosse dessus. Nous ne sommes qu’aux balbutiements de l’écriture. On a prévu sa sortie en 2015 ; mais il faudra mettre la gomme. Il devrait paraître au plus tard, fin décembre.

Vous avez prévu de nouveaux morceaux, dans la set list de votre concert ?   

Vincenzo : Du futur album ? Non. On en a composé quelques- uns, mais ils ne sont pas encore finalisés. Du troisième, oui c’est prévu. Mais, comme on ne t'a jamais vu à nos concerts, tu vas découvrir les plages du troisième.

Bie sûr que je vous ai déjà vu en concert, et il n'y a pas très longtemps. A l'Ancienne Belgique. Vous vous produisiez au club, juste après Alter Bridge, une formation de métal. Etre programmé après Von Durden et avant The Experimental Tropic Blues Band, c’est une belle opportunité ?

Vincenzo : On a déjà partagé la même affiche. Ce sont tous des amis. C'est chouette, on est très contents et impatients de se revoir. Et puis Von Durden remplace au pied levé Vegas. D'habitude, on les précède. Ils ont davantage de notoriété que nous. Nous avons tourné en compagnie d’Experimental, en France et aux Pays-Bas.

Eprouvez-vous davantage de difficultés à vous produire en Belgique plutôt qu’à l’étranger ?

Ronald : Dans notre cas, il est vrai qu’il est plus difficile de se produire en Belgique qu'à l'étranger. S’exporter est donc une obligation.
Vincenzo : Nous avons effectué des tournées en Tchéquie, en Slovénie, en Slovaquie et en Italie. Après avoir accompli le tour des maisons de jeunes branchées et transité par quelques salles de concert, tu as vite fait le tour de Belgique.

Sur les planches, vous vous montrez particulièrement dynamiques. Accordez-vous une grande importance au ‘live’ ?

Ronald : C'est ce que je préfère dans la vie d'un groupe.
Vincenzo : Monter directement sur scène, sans répéter à chaque fois, me procure un tas de bonnes sensations. Mais les répètes sont nécessaires, sinon on s'éclate systématiquement. Quand je reviens de tournée, je me sens mal dans la peau. Après deux ou trois jours, j'ai le cafard, je suis crevé, mais j’aimerais bien reprendre la route.

Entre les Ramones, Pearl Jam, Nirvana et John Spencer, vous avez une préférence ?

Vincenzo : Spencer et Ramones. Et Pearl Jam quand on est bourrés.
Ronald : John Spencer.
Ruggero : Certainement pas Pearl Jam.

Quelle est la décennie musicale la plus riche, dans l’histoire du rock, pour Driving Dead Girl ?

En chœur : Les sixties !

(Photo : Lara Herbinia)

 

Lemon Straw

Soit dans dix ans je suis encore là, soit j’arrête…

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Cette interview devait se réaliser avant le début du spectacle. Soit vers 21h30. Mais à 18 heures 35, je reçois un SMS : le concert est avancé à 22 heures, et c’est donc après le show que l’entretien se déroulera ; soit vers 23 heures. Qu’importe, le plaisir sera d’autant plus grand. J’espère toutefois que la formation m’accordera le maximum de disponibilité… Pas de stress ! Après tout, ces aléas appartiennent au monde des artistes…  et par conséquent, des journalistes…
Lorsque le set prend fin, je gagne le backstage afin d’y rencontrer le trio. A ma grande surprise, seul le chanteur se prête au jeu des questions/réponses.

Question bateau, mais nécessaire afin que nos lecteurs puissent mieux te définir, pourrais-tu nous relater tes expériences musicales ?

J’ai commencé au sein de petits groupes, il y a une quinzaine d’années. En fait, il n’y en a pas beaucoup. Trois, tout au plus ! Il y a 10 ans que je milite chez Lemon Straw. Pour ma part, je suis auteur-compositeur et quand tu joues dans plusieurs formations, tu ne peux pas réaliser tes propres projets.

Quelles sont tes influences musicales ?

Elles sont diverses. C’est bizarre, mais j’ai écouté pas mal de variétés françaises, lorsque j’étais adolescent. Puis, j’ai aimé des groupes comme Wet Wet Wet, Talk Talk, Depeche Mode. Ensuite, en grandissant les Beatles, Led Zeppelin, Genesis, Peter Gabriel, Police. Je m’intéresse aussi beaucoup à la scène actuelle.

Pourrais-tu me donner le titre de trois albums que tu considères comme ‘culte’ ?

L’album « Blanc » des Beatles (NDR : ce titre lui a été attribué, parce que sa pochette extérieure est entièrement blanche) ; « III » de Led Zeppelin et « Synchronicity » de Police.

Comment définirais-tu la musique de Lemon Straw ?

Aujourd’hui, c’est de la pop/folk/electro.

Peut-on la qualifier de légère (épurée) ?

Oui.

Tu sembles également très proche du public ? Est-ce important pour toi ?

C’est important, parce tu peux être vraiment près de ton public, à partir du moment où les gens se déplacent pour toi. Nous sommes en plein développement. C’est une proximité qui se travaille. Grâce à la confiance que tu acquiers. C’est forcément important, parce que sans eux, tu n’existes pas.

Ce deuxième LP s’annonce comme une aventure différente et constitue un changement important dans l’univers musical du groupe. Lemon Straw s’enrichit de sons planants : des claviers atmosphériques, de la lap steel guitare, des chœurs et une utilisation décomplexée de la boîte à rythmes. Les fans de la première heure pourraient ne pas s’y retrouver. Qu’en penses-tu ?

Je pense qu’ils s’y retrouveront parce cet album constitue une passerelle. Maintenant, il y a toujours des changements qui ne plaisent pas toujours à tout le monde. Ce qui constitue toujours un risque. Nous l’assumons. Toutefois, nous ne passons pas du blanc au noir. Pour te donner une idée, avant, nous privilégions les teintes ‘blanches’, mais maintenant elles évoluent dans les tons ‘beige/beige-foncé’. Il s’agit d’une progression, d’une évolution, mais pas d’une révolution.

Giani, on ressent toujours chez toi une certaine fragilité, une sensibilité dans la voix… Te considères-tu comme une source d’émotion ?

Je ne sais pas. Mais, je la vis et si les gens sont touchés, alors oui. Je pense que c’est l’émotion qui me motive à composer et à chanter.

« See you on the other side », titre figurant sur le premier elpee, raconte une histoire sur l’amitié. On la retrouve à nouveau sur cet elpee, mais des arrangements plus contemporains y ont été apportés. Pourquoi ce choix ?

Notre ancien claviériste Renaud est décédé il y a quelques mois. On a tout vécu ensemble. J’estimais que pour ce deuxième album, sur lequel il a quand même un peu participé, il était important de lui rendre hommage. Cette chanson, je l’avais écrite pour lui. Il fallait qu’il y ait une trace de Renaud. C’était important pour nous tous !

C’est une forme de thérapie en quelque sorte ?

Oui, aussi. Sûrement. C’est l’acceptation.

Lemon Straw est donc avant toute chose, une histoire d’amitié ?

J’ai travaillé à l’usine pendant six ans. Un jour, j’en ai eu mare. J’ai pris des cours de guitare et rencontré Boris. Puis Renaud. Au départ, elle n’existait pas, mais au fil du temps une réelle amitié s’est installée. Ce n’est donc pas seulement une histoire musicale. Je suis le parrain de la fille de Boris. C’est une petite famille en quelque sorte.

Cinq années se sont écoulées depuis la sortie du premier long playing. Pourquoi avoir attendu aussi longtemps avant de publier celui-ci ?

En fait, j’avais de nouvelles envies. Je ne parvenais pas à les exprimer. Je ne voulais pas sortir un truc pour lequel, je ne me sentais pas prêt. C’était vraiment difficile. On a failli splitter. Puis, on a malheureusement dû se séparer de Renaud. Il a fallu ensuite retrouver un autre claviériste. J’ai vécu certaines situations personnelles aussi, parfois chouettes, parfois beaucoup moins. Ce sont des événements qui t’inspirent et te permettent d’avoir une nouvelle vision de la composition. La créativité se réinstalle. Elle a nécessité cinq ans ; mais c’était un mal nécessaire. Je pense que si ce second album était sorti plus tôt, l’émotion aurait été absente.

En 2014, lors de la sortie de l’Ep 3 titres, tu avais eu l’idée de customiser le support à l’aide d’une housse artisanale en tricot. Et elles avaient toutes des couleurs différentes. C’était une initiative particulièrement créative. Aimerais-tu la réitérer ?

C’est encore à l’ordre du jour. On vend encore l’Ep dans sa housse en tricot. Sur scène également, il y a du tricot. Qui recouvre le pied de micro. C’est une petite scénographie exprimée en forme de clin d’oeil. Ce sont des seniors qui ont permis la réalisation de ce projet. Humainement et socialement, c’était vraiment une chouette idée. Et puis, il a un côté chaleureux, coloré.

Les chansons véhiculent des messages forts. Pourquoi ne pas chanter dans la langue de Molière ?

Je ne sais pas. Peut-être s’agit-il d’une manière de me cacher. Je n’ai peut-être pas le talent pour écrire en français. Peut-être pour chanter en français. La semaine dernière, on a fait un concert où j’ai dû m’y mettre. Il semble que ça a plutôt bien fonctionné (rires). Peut-être qu’un jour… mais j’estime ne pas encore avoir un niveau suffisant pour rédiger dans cette langue.

La set list est-elle immuable ou la modifies-tu en fonction des circonstances ?

Pour l’instant, c’est une ébauche. La set list a été constamment modifiée. Mais le répertoire que nous avons accordé ce soir, nous le reproduirons lorsque nous devrons jouer entre 45 et 50 minutes… Il s’agit d’un nouveau spectacle que nous avons dû mettre en place rapidement. Nous avons donc misé sur la sécurité avant tout. Il y a tellement de changements qu’il faut pouvoir les maîtriser. Dans le futur, elle se modifiera, c’est sûr.

Comment verrais-tu Lemon Straw dans 10 ans ?

Ecoute, c’est simple. Soit dans dix ans je suis encore là, soit j’arrête. J’ai envie d’en vivre. Je suis quelque part un privilégié, parce que j’en vis partiellement, mais pas encore totalement. Mais pour pouvoir en faire un job professionnel et aller au bout de tes idées, tu dois, à un certain moment, t’installer et t’y consacrer full time. J’espère avoir un jour cette chance, mais je ne mise pas tout là-dessus.

La toile et les réseaux sociaux, est-ce important pour toi ?

C’est important parce nous sommes dans cette mouvance. Mais sincèrement, si les réseaux sociaux n’existaient pas, j’épargnerais beaucoup d’énergie et j’aurais plus de temps à consacrer à autre chose. C’est important aussi parce que les musiciens doivent développer les réseaux sociaux. C’est de la communication. Il faut savoir communiquer. Il y a plein de tâches à gérer. Aller chercher les gens pour qu’ils t’aiment ou qu’ils te découvrent, oui. Mais, je préfère que le processus se fasse naturellement. C’est clair, il faut un peu de promo, mais ce système me met parfois dans une situation inconfortable. Je dois le faire alors je le fais. Le feedback est réconfortant. Mais quelquefois, j’aimerais y consacrer moins de temps.

A ce sujet, quelle est ta position sur le téléchargement illégal ? Comment réagirais-tu si tu en étais victime ?

La musique doit être écoutée. Si les internautes téléchargent illégalement, mais qu’ils viennent te voir concert, why not ? Je préfère cette option plutôt que de ne pas être écouté du tout. Cela ne me dérange pas, tant que tu peux exister et tourner.

De nombreux artistes déclarent qu’il est illusoire de vivre décemment de la musique en Belgique. Les sources de revenus proviennent essentiellement de places de concerts et surtout, majoritairement, du merchandising. Partages-tu ce constat ?

On a un sigle qui pour l’instant passe bien en radio. Mais là où tu gagnes ta vie, c’est en jouant sur scène. Il y a les droits d’auteur aussi. Ce n’est pas la vente d’albums qui te permet de gagner réellement ta vie.

Le vinyle et la bonne vieille cassette audio, ringard ou effet de mode ?

La cassette est un objet devenu obsolète. Le vinyle, quant à lui, est un objet d’une certaine classe. Lemon Straw n’a pas encore le statut pour pouvoir en graver. Mais, si on pouvait, c’est sûr que nous en presserions quelques-uns. C’est l’objet que je préfère. Imagine qu’il y a quelque temps, on te présentait un vinyle alors qu’aujourd’hui, les clés USB prolifèrent. Le vinyle est d’ailleurs en train de regagner du terrain. 

Cet échange verbal durera une bonne vingtaine de minutes… Nous discutons encore de tout et de rien… Giani me quitte et rejoint les groupies qui l’attentent. Les autographes seront légion ce soir. C’est une certitude !

 

The Soft Moon

L’esprit de contradiction…

Le troisième album de The Soft Moon, ‘Deeper’, paraîtra le 30 mars prochain. Créé en 2009 par le Californien d'origine cubaine Luis Vasquez, ce projet américain est devenu le fer de lance d'une nouvelle génération de groupes alternatifs. Consécration suprême : il accède même aux programmations d'un niveau supérieur, comme en témoigne le concert prévu le 17 mai prochain à Bruxelles, qu’il accordera dans le cadre des Nuits Botanique. Nous avons rencontré Luis Vasquez, à Bruxelles, le 18 février dernier, dans le cadre de sa tournée de promotion.

A l’instar du premier opus éponyme de The Soft Moon, ‘Deeper’ a été concocté par Luis Vasquez dans un isolement presque total ; ce qui a conféré à l'oeuvre une dimension très introspective. Il confirme : « L'album reflète essentiellement mon évolution comme compositeur. Je voulais explorer plus profondément mon fors intérieur, ce qui explique le titre ‘Deeper’, et expérimenter à travers des compositions davantage structurées, des mélodies vocales plus élaborées, alors qu'auparavant, ma musique reposait surtout sur des sons et des expérimentations. »

Pour y parvenir, il a choisi de s'isoler en Italie. « Je voulais me rendre en territoire inconnu. Me mettre en danger, afin de me surpasser et dépendre de mon art pour survivre. Je me suis donc installé pendant plusieurs mois à Venise, à 10 minutes de l'île, en pleine campagne. Je voulais être aussi pur et honnête que possible dans mon expression, sans influences extérieures... » Comme dans la plupart des compos de The Soft Moon, les thèmes récurrents tournent autour du mal de vivre. Dans ‘Feel’, notamment, Vasquez s'exclame : ‘Why Am I Alive, Why Are We Alive’. Dans ‘Being’, il murmure : ‘I Can't See My Face, I Don't Know Who I Am’. Il confesse : « Oui, il y a juste quelques thèmes que je régurgite chaque fois. »

A propos des influences.

Dans certaines plages de ‘Deeper’, on découvre une similitude avec Nine Inch Nails, tant dans les inflexions de voix que les arrangements et les sujets abordés. « Ce n'est pas voulu », précise-t-il. « D'ailleurs, je ne connais pas bien NIN. Je possède seulement deux albums, ‘Downward Spiral’ et ‘The Fragile’. Mais je crois qu'on doit être deux âmes sœurs, Trent Reznor et moi. On a ce sentiment de colère, le côté ‘Fuck You’. Nous chantons tous les deux sur le fil du rasoir, en puisant dans nos vulnérabilités. En fait, lui aussi considère que son pire ennemi, c'est lui-même. Il faut se battre contre la dépression, pour survivre et être heureux. »

Mais connaît-il des groupes belges ? La réponse fuse : « Bien sûr ! Front 242, The Klinik... Snowy Red est aussi belge, je crois ? » Of course, voyons ! « J'ai acheté un de ses disques récemment parce qu'il y avait une réédition. Il y a aussi Neon Judgement : j'ai un ami, chez Dark Entries, qui a réédité leurs premiers morceaux » (NDR : l'album 'Early Tapes', paru en 2010).

Concernant les influences extérieures, on ne peut ignorer John Foxx, le légendaire pionnier de la new wave, en compagnie duquel Vasquez a enregistré un titre, ‘Evidence’. « On s'est rencontré à Londres », raconte-t-il. « C'est un très chouette gars ». Après avoir interviewé Foxx, je ne peux que confirmer. En outre, c'est un génie mais il est très modeste, un vrai gentleman. « Oui, on a envie de l'appeler 'Sir' », conclut le musicien en souriant.

La rencontre la plus importante qui soit arrivée à Vasquez, au cours des dernières années, c'est sans nul doute celle de Depeche Mode. The Soft Moon a en effet eu la chance inouïe d’assurer la première partie de la formation anglaise pendant une partie de la tournée ‘Delta Machine’. « Une expérience révélatrice, émotionnelle et très amusante! », raconte-t-il. « Pour moi, passer de la petite chambre de mon appart’, en 2009, à des salles de 20 000 personnes chaque soir, c'était juste fou. Je reste très reconnaissant et humble par rapport à cette opportunité unique. Chaque soir, je devais me pincer pour y croire. Ce qui a soulevé encore plus de questions existentielles au fond de moi-même ! »

La complicité entre Luis et Martin Gore semble s’être parfaitement déroulée. « Martin a beaucoup d'humour ! Une nuit où nous avions pas mal bu, je lui ai confié que je pleurais très facilement en regardant des films tristes. A partir de ce moment-là, chaque fois que je relatais un événement qui m'était arrivé, il répliquait en riant : ‘Oh et tu as pleuré alors ?’, ce qui déclenchait l'hilarité générale. »

Les origines

Les expériences musicales originelles vécues par notre interlocuteur remontent à son enfance et appartiennent à l'univers du heavy metal et du punk. « La première cassette que je ai achetée était ‘Seventh Son of a Seventh Son’ d'Iron Maiden (1988). Puis celles de Slayer et de groupes comme Bad Religion. » Ce n'est que plus tard qu'il découvrira la musique new wave, grâce à The Cure.

En 2010, quand il publie son premier opus, il contribue à l'émergence d'un nouveau style musical, quelque part entre postpunk, shoegaze, darkwave, électro et psychédélisme. Les exégètes de la musique alternative, dont votre serviteur, se demandent si c'est The Soft Moon (en Californie) ou plutôt The KVB (en Angleterre) qui a lancé ce mouvement. Pour Luis Vasquez, « C'est un produit de l'inconscient collectif. Des événements peuvent se produire en même temps à des milliers de kilomètres. Evidemment, mon ego se plait à récupérer la paternité du mouvement ; mais je crois tout simplement que c'est un synchronisme. Je me souviens qu'à cette époque, une vague 'dark' a envahi la scène musicale et cette vague est toujours active aujourd'hui. »

Berlin

Après son aventure italienne, il s'est installé à Berlin. Un très gros changement d'atmosphère par rapport à San Francisco ! Il argumente « Berlin m’inspire. Quand j’y suis, ma créativité est optimale. Cette ville libère un sentiment de tristesse et en même temps, les gens essaient de vivre et de s'amuser. » On se souvient que, quand il était à San Francisco, il ressentait le besoin de s'opposer à son environnement en composant de la musique triste et obscure. « En fait, je suis ce qu'on appelle en anglais un 'antiloquist' (celui qui a l’esprit de contradiction). Je veux toujours faire ou dire le contraire de ce que quelqu'un d'autre fait ou dit. Si j'allais vivre sur la plage, je serais habillé comme un gothique, par exemple. » (Rires)

En toute logique, maintenant qu'il s’est établi à Berlin, doit-on s'attendre à ce qu'il joue à l'avenir de la musique 'surf' genre The Beach Boys ? « Ha Ha Ha ! Very funny ! », conclut Luis en dégustant sa bière belge...

La suite de la conversation avec ce musicien attachant se poursuivra ‘off the record’. J'apprendrai, entre autres, qu'il travaille sur un nouveau projet en compagnie de John Foxx et qu'il va en monter un autre en solo, plus 'noise', parallèlement à The Soft Moon. A suivre !!

The Soft Moon se produira au Botanique le 17 mai dans le cadre des Nuits Botaniques. Pour plus d’infos voir ici 

Merci à Geert (Konkurrent) pour cette interview.

 

Danko Jones

Un retour aux sources

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Dix-huit ans que Danko Jones nous balance son Rock explosif aux multiples influences. Il est peine perdue de tenter de les ranger dans tel ou tel style. Leur but : traduire en musique le feu intérieur qui ne cesse de les consumer. ‘Fire Music’, son onzième album studio, enregistré sous un nouveau line-up et marqué par un retour aux sources, sortira au début du mois de février 2015. Rencontre avec Danko Jones et John Calabrese, respectivement chanteur/guitariste et bassiste de la formation.

C’est à Bruxelles, dans un hôtel situé à côté de la Gare de Bruxelles Midi, que la rencontre s’est déroulée. La formation canadienne y était venue nous parler de leurs nouvelles compos. Le précédent elpee, ‘Rock and Roll is Black and Blue’, était paru il y a trois ans. Le groupe a depuis lors sillonné les routes et mis le feu à bon nombre de festivals. On se souviendra notamment du set endiablé accordé lors de leur dernier passage en Belgique, dans le cadre de l’édition 2013 du Festival de Dour.

Le temps d’avaler leur repas et ils me rejoignent, autour d’un verre, pour débattre de leur nouvelle production. « Il n’y a pas de concept au-delà des chansons elles-mêmes » explique Danko, chanteur de la formation. « On voulait tout simplement apporter de nouveaux morceaux au public. Comme à chaque fois, on a tenté de rassembler l’énergie qui était en nous et de la transposer en musique ». Ce qui explique d’ailleurs le choix du titre du nouveau CD, ‘Fire Music’, un brasier musical retranscrit en onze morceaux, certains plus calmes, d’autres carrément déchaînés. « On pourrait qualifier notre album de Fast and Furious », ajoute en rigolant le bassiste John Calabrese.

Ce nouvel opus célèbre également le retour du producteur de leurs débuts, Eric Ratz. C’est lui qui était derrière les manettes pour le premier opus intitulé ‘My Love is Bold’. Le groupe et lui s’étaient ensuite perdus de vue, chacun poursuivant son chemin. Et ce, jusqu’à ces dernières années où Danko et lui avaient fini par se recroiser de temps à autre. Se rendant compte que le courant passait toujours aussi bien, Danko n’a pas hésité à lui confier une nouvelle collaboration. « Eric a de suite accepté de devenir à nouveau notre producteur, en adoptant la même méthode de travail que celle qu’il avait appliquée en ’99. On avait beaucoup aimé ce qu’il avait réalisé à cette époque. C’était quelque chose d’important pour nous qu’il accepte à nouveau de collaborer. C’est comme si on revenait à cette phase initiale où tout a débuté pour nous. C’était un retour aux sources ».

‘Fire Music’ est également marqué par l’arrivée de Rich Knox, nouveau batteur au sein du trio. Un changement bénéfique pour le band, où chacun peut apparemment désormais se concentrer uniquement sur son instrument. « C’est le premier drummer à rejoindre le line up pour lequel je n’ai absolument rien à dire concernant son jeu. Ce n’était pas le cas de nos deux précédents, car je devais fréquemment vocaliser la batterie pour qu’ils comprennent. Rich est un peu comme Damon Richardson (NDR : derrière les fûts jusqu’en 2005). Aussi, je peux à nouveau me concentrer sur mes vocaux et ma guitare sans avoir à me soucier des drums. » Une osmose qui, selon le groupe, s’étend également au niveau relationnel. Après avoir sillonné bon nombre de routes l’année dernière, le nouveau trio n’hésite pas à parler de symbiose entre eux trois. Une ambiance qui facilite le quotidien, particulièrement lors du récent passage en studio. « Tout a immédiatement bien fonctionné. Rich est entré dans le studio et a géré totalement l’affaire. A un certain moment, lors de l’enregistrement, Eric (NDR : le producteur) s’est tourné vers nous et a déclaré ‘Vous l’avez trouvé où ce mec ?!’. Ses parties de batterie ont été magnifiquement exécutées, sans que nous en ayons particulièrement discuté auparavant. Le genre de détail qui facilite la vie… »

L’adage est bien connu : qui dit sortie d’album dit nouvelle tournée. Même si les dates n’ont pas encore été toutes dévoilées, les Canadiens ont d’ores et déjà confirmé leur présence en Belgique en juin prochain, au Graspop Metal Meeting. « C’est un peu bizarre pour nous de jouer au Graspop car c’est un festival de Metal, et on se demande si on est vraiment en phase pour jouer là, aux côtés de Slipknot ou encore d’In Flames. Une situation qui nous laisse un peu perplexes. Mais on verra bien ! », lance Danko. Le groupe est d’ailleurs un habitué de nos festivals. Outre celui de Dour en 2013, le band s’est déjà affiché à Werchter ainsi qu’au Pukkelpop. « Les festivals belges sont incroyables. Je me souviens que lorsqu’on s’y est produit, le Pukkelpop programmait en tête d’affiche Iron Maiden. On jouait évidemment sur la scène voisine et il n’y avait que quelques personnes pour nous regarder, mais c’était très intense. On ne pouvait s’empêcher de penser, pendant notre set, qu’Iron Maiden allait embrayer à côté de nous juste après… », raconte en souriant le bassiste John Calabrese.

L’occasion de revenir sur leur participation au ‘Motörhead’s Motörboat Cruise’ à la fin du mois de septembre 2014. Une expérience particulière de cinq jours, sur un bateau de croisière, où se sont succédés des groupes invités par Motörhead. « Cette invitation a vraiment été un honneur pour nous. Ce périple nous a permis de jouer parmi d’autres groupes comme Down, Anthrax ou encore Testament. Sans oublier les gars de Ministry, pour qui on avait déjà ouvert le show à Los Angeles. Ce sont des amis. On s’est vraiment bien amusés ! » Ce n’est pas non plus la première fois que Danko Jones figure sur la même affiche que Mötörhead. On se souviendra notamment de leur set en 2008, à l’Ancienne Belgique, où les Canadiens avaient ouvert pour la bande à Lemmy, avant de rejoindre ce dernier sur les planches, un peu plus tard, sur le morceau ‘Killed By Death’.

Danko se remémore : « Je pense qu’on a joué ensemble à une vingtaine de reprises. J’ai eu l’occasion de voir Lemmy deux fois sur le Motörboat, dont une fois où on a pu parler entre quatre yeux, ce qui n’était pas facile car il y avait toujours une vingtaine de personnes autour de lui. Je dois dire que c’était quand même intimidant de se retrouver face à lui. Il est ce qu’il est ! Il a une aura. Il dégage quelque chose de particulier. J’ai d’ailleurs une bonne anecdote… Lemmy savait que je ne buvais pas beaucoup d’alcool mais il a quand même tenu à m’offrir à boire un whisky coca. Mais je ne savais pas qu’un whisky coca à la Lemmy, c’était autant de coca et autant de whisky (NDR : il mime un dosage dans un verre où le whisky est largement dominant…) Et moi, évidemment, j’ai bu ça comme si c’était de la bière. J’ai bien failli m’étaler. Lemmy a rigolé et m’a rattrapé par le bras en me disant ‘Sit down man, take it easy…’ On a bien rigolé ! »

C’est d’ailleurs à l’occasion de cette croisière que le groupe a partiellement tourné le clip de ‘Gonna Be a Fight Tonight’ (pour le visionner, c’est ici), single du nouvel album, histoire de se mettre l’eau à la bouche avant la sortie officielle de ‘Fire Music’ le 6 février prochain. A bon entendeur : outre leur concert prévu au Graspop Metal Meering en juin, il est probable que Danko Jones revienne  à l’Ancienne Belgique, après l’été.


 

The Scrap Dealers

Marre du garage…

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Ce 13 décembre 2014, la formation liégeoise The Scrap Dealers se produisait au Water Moulin de Tournai. Précédant le set de The Marvin Gayes et The Shivas. Avant de monter sur les planches, le quintet nous a accordé une interview. Au grand complet. Pendant leur collation. Seul souci au moment de rédiger cet article, c’est qu’en retranscrivant cet entretien, difficile de déterminer si les propos émanent de Hugues (guitare, chant), Régis (guitare, chant), Justin (basse), Cédric (guitare) ou Antoine (drums). Heureusement la plupart de leurs avis sont partagés. Et quand ils sont plus nuancés, votre serviteur tachera de le préciser.

La conversation débute par une boutade, puisque ‘The Scrap Dealers’ se traduit par ‘les ferrailleurs’. Or, à Kain, près de Tournai, le long de l’Escaut, est implanté, un énorme chantier de recyclage de métaux. Je leur demande donc si avant de débarquer au Water Moulin, ils y ont fait un crochet. L’allusion semble les perturber avant que l’un d’entre eux ne retombe sur ses pattes : « Faut demander à Hughes. Fallait trouver un nom. Ben, c’est vrai qu’il n’est pas très intelligent, alors on ne préfère pas en parler… » L’occasion d’embrayer par une question bateau (?!?!?), pour connaître le parcours musical des membres du groupe. Ainsi, Antoine a milité au sein de Pirato Ketchup et les autres, Local Fourmost Band, qu’ils ont quitté pour raisons personnelles, afin de rebondir chez The Scrap Dealers. « Un nom plus intelligent », embraie le même interlocuteur… Et en remontant ce nouveau projet, les musicos ont décidé d’y insuffler un nouvel esprit et d’écrire de nouvelles compos.  

Leur premier Ep s’étale sur plus de 33 minutes. Pourquoi donc n’a-t-il pas été considéré comme album ? Le groupe le considère comme tel, mais c’est JauneOrange qui a décidé de lui coller l’étiquette d’Ep. La plupart des critiques du disque que le band a pu lire soulèvent la même remarque. « On pense que la manière et la longueur y sont. On ne croit pas qu’il soit vraiment courant qu’un Ep réunisse 8 titres en près de 35 minutes. C’est même plutôt rare… » Un disque qui recèle un morceau caché. Comme pas mal de cds gravés au cours des nineties. Mais dans un style différent. Plus folk. Minimaliste même. Et sans titre. C’est Hugues qui s’exprime : « Il nous a quand même demandé une journée d’enregistrement. En fait, je voulais composer une chanson pendant les sessions et la travailler en compagnie du groupe. Mais cela n’a pas marché. Comme je l’avais écrite, on l’a enregistrée uniquement avec une guitare et quelques effets et on l’a ajoutée au tracklisting… » Une compo beaucoup plus paisible. « Effectivement, on voulait calmer le jeu. Que ce morceau surprenne. Et on l’assume à 200%. On est satisfait du choix d’ailleurs. » Oui mais alors pourquoi trois guitares sur scène ? « Parce que s’il ne tenait qu’à nous, on en mettrait davantage. Le problème en ‘live’, c’est qu’il faut de la place pour les caser. Et en général, sur les planches, il manque d’espace… »

Etonnant, mais vu leur jeune âge, les musiciens n’ont pas une mauvaise connaissance de l’histoire de la musique pop/rock. Et surtout sont conscients de leurs influences. Intentionnelles ou pas. Un titre comme ‘No sense in your eyes’ est imprimé sur une rythmique hypnotique qui pourrait faire penser aux débuts de Hawkwind. Ou alors a des combos issus du mouvement krautock comme Can ou Faust. Hugues reconnaît écouter beaucoup de rock allemand. Et bien sûr apprécier ce style musical. « On voulait créer un mur de son, en y ajoutant de la distorsion. Mais que ce soit en même temps ‘motorik’. Et c’est facile à jouer tout en y injectant de l’énergie afin de faire passer un simple message. Nous ne sommes pas des rockeurs progressifs comme Hawkwind. D’ailleurs on est moins doués. On essaie cependant de rester cohérents dans la structure des morceaux. Et puis, on ne connaît pas trop bien Hawkwind. M’enfin chacun a le droit de discerner, dans notre musique, ce qu’il ressent. Certains y décèlent du Count Five, du Blue Cheer ou du Blues Magoos… » Avis qui n’engage que votre serviteur, les mélodies d’‘Im so proud’ et de ‘For another day’ lui semblent aussi hymniques que chez les Dandy Warhols. « Davantage dans l’esprit de Brian Jonestown Massacre », me rétorque-t-on. Pourquoi pas ?

Abordons maintenant l’aspect plus garage de leur musique. A l’instar du morceau ‘I need you tonight’. Plus aride, plus malsain, mais dans l’esprit des Pink Fairies, voire des Deviants, deux groupes énormément portés sur les excès en tous genre. Justin prend la parole : « Deviants, j’adore. C’est même carrément mon groupe préféré. A cause du climat au sein duquel leur musique baigne. Sur cette chanson, la voix est particulièrement torturée. Et c’est en même temps lo fi. Très lo fi. Mais le thème de la chanson n’est pas particulièrement ‘harshé’. Elle demeure malgré tout sentimentale. Mais on a mixé très, très vite. Peut-être un peu trop. Pink Fairies ? J’aime un peu moins. Toujours aussi garage, mais plus pop… » Quant à ‘Evil ride’, il affiche une très jolie ligne mélodique. On pourrait même ajouter dans l’esprit du garage sixties cher aux compiles ‘Peebles’ et ‘Nuggets’. Ces anthologies figurent-t-elles dans leur discothèque ? « En fait, c’est une de nos plus vieilles chansons. Elle a même un petit côté post punk. La mélodie accroche facilement, c’est vrai. C’est aussi une des plus courtes. Une ballade de 2’30. » Mais le garage, ils en en ont tous un peu marre qu’on leur en parle et surtout qu’on les enferme constamment dans ce cadre. « Il faut savoir que depuis le début, on nous confine dans une cave. En nous comparant aux Black Lips, par exemple. On en a plein le c** ! Nous ne souhaitons pas être cloîtrés dans un genre,  à tout prix. Correspondre à une image prédéfinie. On a commencé comme formation de garage punk. La critique a essentiellement retenu cet épisode. Et elle continue à nous comparer aux Black Lips, aux Seagulls ou encore à Oh Sees. Ces analogies nous collent encore à la peau comme un chewing-gum pourri. Notre musique est en évolution constante ! Et le public est étonné de voir que le nouveau répertoire est totalement différent du single. En fait nous sommes encore un jeune groupe. Il n’a pas trois ans d’existence. Et au début, on a dû cravacher pour écrire des morceaux. Il était donc plus simple d’adopter le punk garage. Aujourd’hui, on a un peu plus de disponibilité pour travailler notre musique et rendre nos compos plus élaborées. Ce n’est pas qu’on change vraiment de style, mais on consacre plus de temps à les réaliser. Et puis on n’a pas envie de toujours reproduire la même chose. On a envie de toucher à des tas d’autres trucs. En fonction des humeurs… »

Inévitablement, quand on touche au psychédélisme, on pense au recours à des instruments insolites, indiens ou orientaux, notamment. Ou alors à l’utilisation de l’électronique comme Animal Collective, MGMT et il y a quelques années Ozric Tentacles. Alors, tenté par cette vision plus électro ? « On verra bien. Dans le futur, on va essayer de nouveaux types de synthés. Il y aura certainement des choix à poser. Ce sera une décision commune. Si tout le monde est d’accord, pourquoi pas ? Sans culpabilité aucune. On ne va cependant pas aller sur la voie du rock expérimental électronique ou post rock avec énormément de moog. Mais en ce qui concerne un tel recours, dans certains morceaux, à l’avenir, c’est possible. Tout est envisageable. On n’est fermé à rien du tout. Mais ce n’est pas sûr que ce soit en live. Plutôt en studio. Et puis on est plutôt réticent par rapport à l’électro pure. On veut conserver l’aspect hypnotique et psychédélique de notre rock alternatif. Ce qui ne nous empêchera pas d’évoluer. » Un concept hypnotique qui soudain évoque pour votre serviteur –et je me lance alors sans filet–Loop et Spiritualized... En plein dans le mille ! Surtout pour Hugues. « Personnellement que ce soit à travers Spacemen 3 ou Spiritualized, Jason Pierce est un dieu. A cause de la personnalité et de la sensibilité de sa musique. Bien sûr, je ne cautionne pas tout ce qu’il a fait, mais pour moi son œuvre est remarquable. Par contre, Loop adopte un profil plus aride et nonchalant. Plus shoegaze… » Comme Jesus & Mary Chain et Black Rebel Motorcycle Club ? « On apprécie la musique de Jesus & Mary Chain, mais pas vraiment l’attitude de poseurs des frère Reid. BRMC est responsable de quelques bons titres, mais les ¾ ne nous accrochent pas vraiment. Le leader joue bien de la guitare, il chante bien, il est beau, et il le sait. C’est une attitude qui fait c*****… »

Intéressant de savoir quand même si un nouvel et véritable elpee (?!?!?) serait en chantier. « Il est terminé. Il est au mixing. Mais il n’a plus rien à voir avec ce qu’on a fait sur le premier. Pas mal de monde va se poser des questions… »  

 

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