OK Panda s’intéresse à la psychiatrie…

Après avoir publié un premier Ep intitulé "Perspectives", fin 2022, qui lui avait permis de fouler des salles comme le Cirque Royal, le Bota ou encore le Belvédère, le quintet bruxellois Ok Panda a sorti son second, "Chasing home", ce 20 février 2024. Dès la…

logo_musiczine

TORRES perdue dans une salle immense…

TORRES (le nom de scène de l'artiste new-yorkaise Mackenzie Scott) publiera son nouvel elpee, « What an enormous room », ce le 26 janvier 2024. La chanteuse américaine propose également son premier single/vidéo, « Collect ». Parallèlement à cette annonce,…

Trouver des articles

Suivez-nous !

Facebook Instagram Myspace Myspace

Fil de navigation

concours_200

Se connecter

Nos partenaires

Nos partenaires

Dernier concert - festival

Vive La Fête - 11/04/2024
Enter Shikari - Ancienne ...
Interviews

La Chiva Gantiva

L’importance du paramètre visuel…

Écrit par

Ce vendredi 13 octobre, le combo bruxello-colombien La Chiva Gantiva donnait un concert dans la petite salle de l'Ancienne Belgique. Rapidement sold-out, ce spectacle arrive un an après la sortie de leur disque "Pelao" chez Crammed Discs. Nourrie de cultures afro-colombiennes, leur musique, métissage de funk, rock, jazz, rap, afro-beat et cumbia se nourrit de percussions caribéennes, d'instruments typiques du rock, mais également de cuivres, et en particulier d’interventions de clarinette et de saxophone. Une demi-heure avant le concert du collectif, Raphaël Espinel, membre fondateur et chanteur de la Chiva, nous a accordé cette interview, au milieu du crew se préparant dans une ambiance tranquillement excitée.

Vous avez tourné dans plusieurs pays au cours de cette année. Vous êtes allés jouer en Colombie pour la première fois, où vous avez reçu un accueil très enthousiaste. Prévoyez-vous d'aller vous produire, à nouveau, en Amérique Latine ?

Bien sûr ! On a maintenant un label là-bas. On aimerait retourner jouer en Colombie, et dans toute l'Amérique Latine. Mais on entre maintenant dans une période consacrée à la composition. En fait, nous avons l'intention d'enregistrer un disque en 2013, qui sortirait idéalement à l'automne.

La Chiva Gantiva réunit sept musiciens, parfois des invités vous rejoignent sur scène. Comment se déroule le processus d’écriture ?

En général, c'est Philipp Deckers, le guitariste, et moi qui composons, ensuite on propose le morceau au groupe qui le façonne en le jouant. Pour le texte, je demande parfois conseil à des amis écrivains, journalistes...

Les membres du groupe ont fréquenté les beaux-arts ou suivi une formation de théâtre. Y en a-t-il qui ont également suivi un même cursus dans le domaine de la musique ?

Le guitariste et le batteur sont musiciens de formation. Effectivement, trois d’entre-nous sont issus du monde des arts plastiques (illustration, gravure, sculpture), un autre du théâtre ; ce qui explique pourquoi on conserve toujours cet intérêt pour le côté visuel. L'image reste un paramètre important pour nous.

On le voit dans vos deux vidéo-clips, il existe un vrai travail créatif, notamment dans “Pelao”, où un petit personnage de papier évolue au sein d’une ville multicolore, peuplée de jouets et de marionnettes. Cet aspect ludique semble très présent, que ce soit dans la façon dont vous jouez avec le public lors des concerts, sur la pochette d'album...

C'est vrai, d'ailleurs “Pelao” en Colombie signifie à la fois pelé, fauché ; et c'est également ainsi qu’on appelle les gamins. Même si on a un regard critique sur la société, c'est pas pour ça qu'on va s'habiller en noir et jouer les fatalistes ! On souhaite garder un regard d'enfant, être positifs même si on dénonce les clichés qui collent à la peau ou si les textes de nos chansons sont consacrés aux difficultés rencontrées par les immigrants.

Vos concerts sont efficaces. On y ressent une énergie très forte et communicative. Comment faites-vous pour préserver l’intensité de l'enregistrement du disque, sans l'éteindre ?

Pour “Pelao”, on a travaillé en compagnie de Richard Blair, producteur anglais qui vit depuis trente ans en Colombie. Il nous a proposé d'enregistrer en studio mais de garder les conditions du ‘live’. Nous avons joué ensemble, dans la même pièce. Chaque musicien ne s’est pas acharné à enregistrer des prises séparées. Cette technique aurait communiqué un climat plus froid à notre musique. C'est la raison pour laquelle, l’album a un son un peu ‘garage’. Mais ce choix est circonstanciel. On ne reproduira pas forcément cette recette pour le prochain disque.

Je laisse ensuite les musiciens finir de se préparer avant leur entrée en scène.

Le concert sera chaud, festif, le public bruxellois se prêtant volontiers aux jeux et danses proposés par la Chiva Gantiva. Comme quoi, avec un peu de bonne volonté, même un samedi 13, par un soir pluvieux d'automne, on peut garder la frite.

 

Mark Eitzel

Une affaire de cœur…

Écrit par

Apparemment Mark Eitzel a définitivement refermé la page de l’histoire d’American Music Club. Il en est donc revenu à son aventure en solitaire. Enfin, pas tout à fait, puisque Vudi, son fidèle guitariste, est toujours au poste et que pour enregistrer son nouvel opus solo, ‘Don’t be a stranger’, il a reçu le concours de quelques collaborateurs. Au cours de l’année dernière, Mark a vécu deux épreuves. Tout d’abord, il a été victime d’une crise cardiaque. Dont il s’est apparemment bien remis. Puis appris que Tim Money, drummer d’AMC de 1994 à 2004, était décédé des suites d’un problème semblable. Mais a ensuite vu le sort lui être bien plus favorable. Aussi, avant d’entamer notre entretien, je propose à Mark de compléter une grille du Lotto. Six croix, je lui précise. Il a l’air perplexe, mais s’exécute consciencieusement. Ce qui me permet d’entrer dans le vif du sujet.

En fait, l’enregistrement de ‘Don’t be a stanger’, son nouvel opus solo, a été financé par un multimillionnaire. Ce qui méritait quand même une explication. Après avoir posé cette question, le franc est tombé : « Le gagnant avait décroché le jackpot ! 11 000 000 de dollars. On n’avait plus un rond. On a donc enregistré les démos sur mon portable, mais le résultat était merdique. Comment allais-je donc faire pour convaincre un label avec cette merde ? Et comment choisir la bonne personne pour pouvoir organiser les sessions, quand tu es fauché ? Un pote connaissait très bien ce lauréat. C’était un de ses copains. Et il l’a convaincu de financer le projet. Mais on l’a déjà remboursé ! »

Pourtant, ce disque était, au départ, destiné à American Music Club. Alors pourquoi avoir changé d’avis ? « En fait, je ne voulais plus de cette ligne de conduite revivaliste. Etablir un record de longévité ? Pas vraiment mon truc ! En outre, hormis Vudi, tous les autres musiciens ont été remplacés. J’avais envie d’aller de l’avant. C’est ma nouvelle philosophie. Et puis Vudi s’en fout complètement… »

Les sessions d’enregistrement se sont déroulées sous la houlette de Sheldon Gomberg, un producteur dont la carte de visite mentionne la mise en forme d’albums de Rickie Lee Jones, Ron Sexsmith, Ben Harper et bien d’autres. Parmi les invités figurent le drummer d’Elvis Costello, Pete Thomas et le pianiste de jazz, Larry Golding. De toute évidence, ils ont été sollicités par Gomberg. « Ben oui ! Comment veux-tu que je parvienne à dégoter de tels collaborateurs ? Pour lui, c’est facile ; il décroche le téléphone et en deux temps trois mouvements, il a l’accord de son interlocuteur… » Les interventions de Golding au piano sont superbes. Sonores, limpides, profondes, spontanées… Parfois on se demande même si ce n’est pas de l’impro. « Quand il a débarqué, il n’avait jamais entendu la moindre compo. Il les a écoutées une fois. Il a pris quelques notes. Il les a jouées à trois reprises et la troisième, c’était extraordinaire. Il est incroyable ! Il s’est parfaitement fondu dans l’esprit des chansons… » Une section de cordes s’est également intégrée dans l’ensemble. Plusieurs musiciens s’y sont investis ou est-ce le fruit d’arrangements ? Mark confesse : « Ce sont des arrangements. Il n’y avait qu’un seul violoniste. Mais il ne souhaitait pas que son nom figure dans les ‘credits’. Sinon le syndicat lui aurait intenté un procès. En fait, il bosse pour PIXAR ; tu sais cette boîte qui réalise de films stupides mettant en scène des animaux… »

L’an dernier Eitzel a été victime d’une crise cardiaque. Ce qui l’a forcé à se reposer. Mais qu’a-t-il fait au cours de cette convalescence ? Se consacrer à la composition de nouvelles chansons ? Ecouter de la musique ? Réfléchir sur la signification de l’existence ? Il raconte : « Non, je n’ai rien fait du tout. J’étais terrifié à l’idée que cette crise se produise à nouveau. J’ai quand même passé pas mal de temps à communiquer avec ma compagnie d’assurances. Et j’ai regardé beaucoup de films. En fait, j’étais la plupart du temps, cloué au lit. Quand j’essayais de marcher, il fallait que je m’asseye constamment, pour récupérer. J’étais incapable de bouger. Mais en quelque sorte, j’ai appris à ne rien faire. J’ai passé trois jours à l’hôpital, puis mis un bon trimestre pour me rétablir. Après un mois, j’ai pu me rendre au parc, près de mon domicile. C’était un moment bizarre, mais en même temps j’en ressentais une fierté… depuis cet incident, je dois prendre des pilules (il les cherche dans son sac…) »

Tim Money, l’ex-drummer d’AMC a eu moins de chance. Il est décédé l’an dernier. A 53 ans. C’est-à-dire au même âge que Mark. Evidemment, vu les circonstances, ce décès doit certainement le toucher davantage. « Effectivement. Pour être clair, je ne lui avais plus parlé depuis 7 ans. Pourtant on était amis. Et j’ai toujours pensé qu’on allait se revoir un jour. Quand j’ai appris sa disparition, j’ai pris un coup sur la tête. En fait, il avait déjà eu une petite alerte ; mais il n’en avait parlé à personne. Il aurait dû le signaler à sa femme ou à son médecin. Il a succombé à une rupture d’anévrisme. Et la faculté en a conclu, ensuite, que c’était la conséquence de ses problèmes cardiaques. C’était un mec branché, cool de chez cool. Fumant la cigarette. Il avait piqué la plaque qui rendait hommage à James Dean, posée à l’endroit où s’était tué, pour la mettre chez lui. C’était son petit trésor caché. Il était stylé. Et il appartenait à cette catégorie d’êtres humains qui ne jugent personne. Je me considère comme un écervelé. Mais il ne me critiquait jamais. C’est ce que j’appréciais le plus chez lui… »

‘Don’t be a stranger’ aurait dû s’intituler ‘The bill is due’. Ce morceau figure également sur l’album. Cette compo évoque les promesses non tenues, la fuite du temps et de l’argent ainsi que la peur du futur. On aurait pu croire qu’il l’aurait écrite pendant sa convalescence. Mais pourquoi avoir changé le titre de cet elpee ? Mark argumente. « J’ai écrit cette chanson bien avant mon attaque. J’en ai bien composé quelques unes au sujet de la crise cardiaque. Mais je les ai écartées. Je les réutiliserai peut-être plus tard. Dans 10 ans, pourquoi pas ? Faudra bien que j’attende une aussi longue période pour savoir comment je me sentais à ce moment-là ; car pour l’instant, je ne le sais pas… On aurait pu l’appeler ‘Knife in my wrist’ (Trad : couteau dans le poignet) ; mais finalement ’Don’t be a stranger’ était moins déprimant que ‘The bill is due’… » ‘All my love’ est apparemment une chanson d’amour (NDR : ou de cœur, si vous préférez…) Mais Eitzel lui réservait un autre destin. Il s’explique : « Elle véhicule l’idée qu’on se fait de l’état euphorique dans lequel on est lorsqu’on est amoureux. C’est une bonne chanson, mais j’ai toujours pensé qu’elle aurait pu servir de support musical pour un clip publicitaire. J’avoue que de manière secrète, j’escomptais qu’elle soit rentable, car j’ai besoin d’argent… » A contrario, ‘I love you, but you’re dead’ est davantage cynique. Mark partage cet avis: « En fait, c’est une véritable histoire. En 1979, j’avais découvert un groupe punk qui répondait au nom de Destroy All Monsters. Au sein duquel militait Ron Asheton, l’ancien guitariste des Stooges et Michael Davis des MC5. A l’époque, j’avais 19 ans. J’étais super enthousiasmé. Ils étaient géniaux. Il y avait une femme dans le line up. Et je souhaitais qu’elle me dédicace un poster. Elle y a mentionné ‘I love you, but you’re dead’. ‘Allons-nous faire foutre. Et disparaissons !’ C’est le sens de la chanson. Très rock’n’roll ; même si ce n’est pas du tout du r’n’r. C’est trop lent pour en être… » ‘Oh Mercy’ est une chanson qui se penche sur la liberté d’expression aux States. Il commente : « En fait, elle me met en scène quand je participe à l’une ou l’autre fête. Et au cours desquelles, j’ai un verre dans le nez. Moments les plus propices pour la discussion. En général, les gens racontent n’importe quoi. Ils sont peu informés. Ne lisent pas suffisamment. Je tire mes informations de toutes mes lectures. Ce qui m’autorise à leur dire qu’ils ne comprennent rien à rien. Mais cette attitude me rend impopulaire. Vous avez probablement entendu parler de ces scientifiques qui travaillent pour le FBI. Ils ont conçu tous les algorithmes de la guerre froide. Vous savez, les algorithmes mathématiques utilisés pour traquer le peuple, surveiller ses activités. Et bien on est en train de faire la même chose aux States. On élabore une véritable infrastructure dans l’Etat de l’Utah, à cet effet. Les Etats-Unis sont occupés de devenir le plus grand pays totalitaire du monde. Dans 10 ans, cet objectif sera atteint, j’en suis sûr ! Vous savez, il y a des gens très riches et de très pauvres. Et ce sont les riches qui gouvernent. Les multinationales. C’est le chemin inéluctable. J’aime beaucoup Obama. C’est le meilleur président que l’on puisse avoir. Mais Guantanamo est toujours ouvert. Les services de sécurité sont de plus en plus vicieux ; et quand on est arrêté, on est photographié, on prend nos empreintes et on se retrouve sur une liste. Et toute cette procédure a été mise en route sous la présidence d’Obama ! Aujourd’hui les flics peuvent faire tout ce qu’ils veulent. L’Habeas Corpus (NDR : le fondement de la démocratie : on ne peut détenir quelqu’un de manière arbitraire, sans jugement) a été supprimé aux USA. Merci Mr Obama ! Enfin, on a construit un mur entre la Californie et le Mexique. Mais où toutes ces mesures vont-elle nous mener ? C’est le symptôme d’un énorme désespoir. Et cette situation me met en colère » 

On termine cet entretien par une note plus musicale. En parlant des goûts musicaux de Mark. De ses coups de cœur, si vous préférez… Qui hésite entre ‘Harvest’ de Neil Young et le ‘Five leaves left’ comme l’album qu’il emporterait sur une île déserte ; mais choisit, in fine, celui du Canadien. Et puis il nous parle des crooners qu’il adore. Tels que Frank Sinatra et surtout Jimmy Scott (NDR : considéré comme le chanteur américain le plus injustement ignoré, il était atteint du syndrome de Kallmann, ce qui lui avait permis de conserver sa voix d’enfant), dont il me fait découvrir un extrait via sa tablette tactile…

(Merci à Vincent Devos)

Mark Eitzel : ‘Don’t be a Stranger’ (album paru ce 2 octobre 2012)

 

En concert :

18-01-2013    Het Depot, Louvain
20-01-2013    Vooruit, Gandt

 

 

 

 

Marillion

L'album de la maturité

Marillion est un des secrets les mieux gardés au sein du petit monde de la musique pop/rock. Au cours des années 80, ce groupe britannique était le fer de lance du renouveau du rock progressif, notamment grâce à des hits tels que ‘Kayleigh’ ou ‘Incommunicado’. Suite au départ du chanteur, Fish, c'est Steve Hogarth qui a repris le rôle de leader. Le groupe connaitra ensuite des fortunes diverses, fondera son propre label et sera un des premiers  à développer un lien très étroit avec ses fans via internet, sans l'aide des majors et des médias ; et ce, bien avant Radiohead ou NIN. Aujourd'hui, la formation a vendu au total plus de 15 millions d'albums et a joué devant plus de 3 millions de spectateurs. Nous avons rencontré Steve Hogarth à l'occasion de la parution de leur dernier opus, ‘Sounds That Can't Be Made’.

Publié le 24 septembre prochain, ce long playing, sera le 17ème dans la longue carrière du combo. Il marque une nouvelle évolution en proposant, non pas un concept-album, mais plutôt une collection de chansons très fortes et autonomes allant de la ballade romantique (‘Poor My Love’) au tour de force progressif (NDR : ‘Gaza’, qui s’étale sur plus de 17’). L'album de la maturité? "Oui, je crois qu'on peut le dire", confirme Steve Hogarth. "Il représente bien la situation dans laquelle nous sommes dans notre voyage artistique. Ce disque recèle certaines compositions qui peuvent être considérées comme les meilleures depuis longtemps".

‘Power’ est notamment un morceau particulièrement... puissant, dont le refrain s'envole vers les sommets : une pure merveille. "Effectivement, le feedback de cette chanson est très positif. Nous aurions peut-être dû la développer un peu plus, lui donner plusieurs dimensions, mais elle tient bien la route." Elle pourrait devenir un excellent single? "Bien sûr, vu que qu’elle est comparativement assez courte (NDR: 6 minutes, quand même) mais franchement, je ne vois plus l'utilité de sortir des singles aujourd'hui."

‘Sounds That Can't Be Made’ a été essentiellement enregistré dans le studio de Marillion, Racket Studio ; mais aussi dans ceux de Peter Gabriel à Bath, le célèbre Real World. Ils y sont restés plus d’une semaine. "Elle a été très fertile pour nous", poursuit Steve. "C'est un endroit où l'on peut habiter, ce qui nous a procuré davantage de flexibilité et surtout, nous a rendu l'impression de former un 'gang', comme à nos débuts."

A la production, Michael Hunter, fidèle au groupe depuis 2007, a donné toute sa cohésion au nouveau CD. "Le rôle de Michael est essentiel", souligne Steve. "Il a compris l'esprit de Marillion, surtout l'importance que nous accordons à la scène et au contact avec le public." Serait-il devenu en quelque sorte le 6ème membre de la bande? "Oui, on peut le dire. Il est arrivé souvent qu'il assemble lui même des morceaux d'enregistrements pour nous proposer de nouvelles idées. C'est notamment grâce à lui que 'Gaza' a pu prendre forme et devenir ce morceau complexe de 17 minutes."

Une des chansons les plus accessibles est ‘Lucky Man’. L'occasion de demander à Steve Hogarth s'il se considère comme un 'homme heureux'? "Oh mon Dieu oui! Quiconque à ma place le serait. Je me considère comme extrêmement chanceux. Je connais de nombreux musiciens, excellents au demeurant, qui ne parviennent pas à nouer les deux bouts. Je suis au sein d’un groupe qui jouit d'une totale liberté. Nous ne subissons aucune pression pour sortir un single, d'être diffusé à la radio, etc. En plus, nous ne sommes même pas célèbres, ce qui est bien! Je peux me promener dans la rue sans être importuné par des gens stupides qui ne comprennent pas ma musique et me posent des questions sur ce qu'ils ont lu dans les journaux. J'ai une très belle vie. Nous ne sommes pas millionnaires mais nous vivons bien. J'ai une belle maison, une jolie petite amie, un magnifique petit garçon, une superbe famille. Je viens de faire ce put*** de bon album ; si je ne suis pas heureux, qui peut l'être?"

Marillion s'embarquera pour une tournée qui passera par l'Angleterre, l'Amérique du Sud, la France, l'Allemagne, les Pays-Bas, etc. Tiens, pas de concert en Belgique? "Ce n'est pas voulu", justifie Steve. "C'est juste que nous n'avons pas reçu de proposition qui puisse convenir. Nous aimons jouer en Belgique. Il y trop longtemps que nous ne nous y sommes pas produits. Je me souviens de ce concert à l'Ancienne Belgique en 1989 : il faisait tellement chaud que, quand j’ai quitté la scène, j'avais l'impression d'avoir traversé une rivière à la nage..."

L'appel est lancé aux promoteurs belges. Surtout à l'Ancienne Belgique et au Biebob, qui devraient se sentir visés. Grâce à son prog-rock intelligent, bien plus proche de Radiohead, Razorlight ou Muse que de Genesis, Marillion a tout pour séduire le public belge. En plus, c'est principalement en ‘live’ que la formation prend sa pleine dimension, en créant une véritable communion avec ses fans. En attendant, on ne manquera pas le concert au Splendid à Lille, qu’elle accordera le jeudi 15 novembre prochain!

Pour plus d'infos et pour commander le nouvel album: www.marillion.com

Preview du nouvel album: www.youtube.com/playlist?list=UUZRP6c2JuCCZhG4jMjYaYtw

 

Les Panties

Les Panties dévoilent tout!

Le 30 juin dernier, le groupe bruxellois Les Panties accordait un concert remarqué au T.A.G. de Saint-Josse (Bruxelles), dans le cadre des Fantastique.Nights. Une prestation fascinante, hypnotique, dominée par la voix grave et envoûtante de Sophie Frison. Sophie était surtout connue pour ses animations à la RTBF ; mais au sein de ce nouveau projet, elle dévoile un véritable talent de chanteuse et de compositrice. Il n'en fallait pas plus pour nous donner envie de rencontrer cette formation prometteuse.

L'histoire commence à la fin des années 80 lorsque les trois fondateurs, Xavier Fernandez (basse), son frère Hugo Fernandez (batterie, production) et Vincent Lachenal (guitare), décident de faire de la musique ensemble. "On était très influencés par la vague Cure, avec un peu de retard certes", précise Xavier. "On a acheté des instruments pour apprendre à jouer en autodidactes. On avait entre 14 et 17 ans. C'était un petit groupe d'ados. On a juste enregistré des démos sur cassettes sans se produire en concert ni enregistrer d'album." Après quelque temps, l’aventure est abandonnée et ce n'est qu'en 2008 que les trois acolytes décident de déterrer les cassettes et de recommencer à bosser ensemble.

Au bout de quelques mois, ils se rendent compte qu'il manque une 'vraie' voix sur les morceaux et demandent à Sophie Frison, la compagne de Xavier à la ville, de tenter quelques essais. "C'était ma première expérience dans un groupe", se rappelle Sophie. "Auparavant, j'avais juste suivi des cours de chant classique. J'ai improvisé des lignes de chant, puis des paroles et chacun a amené ses suggestions de façon très démocratique, comme tout ce que nous décidons d'ailleurs." Le timbre de Sophie est très particulier ; il évoque Siouxsie dans les aigus mais c'est surtout dans les graves qu'il assied sa spécificité ; et là, on pense surtout à Nico.

Le combo puise ses sources dans la new-wave et le post punk, et en particulier chez  Joy Division et Cure, mais en combinant les spécificités de chacun des musiciens. "Vincent apporte une touche 'power-rock' par son approche ‘Magazine’", précise Xavier. "En fait, nous partageons des goûts très éclectiques, qui englobent aussi des groupes comme Velvet Underground, Justice, A Place To Bury Strangers, Crocodiles, KVB ou The Soft Moon."

Il y a neuf mois, un jeune claviériste, Pony Bambinelli, a rejoint le line up. Passionné par les synthés et les ordinateurs, il apporte une couleur plus moderne, plus 'branchée' au son général. "Mon groupe préféré est Soulwax", confie Pony. "Mais j'aime aussi Justice, Late Of The Pier, etc. "

On l'aura compris : en combinant des musiciens issus de générations différentes, Les Panties dressent un pont entre les musiques du passé et une véritable modernité. Une approche 'rétro-futuriste', en quelque sorte. "Au départ, le son était plus brut, plus postpunk", nous dit Xavier. "Au fur et à mesure, il est devenu plus riche, plus complexe." Cette évolution se retrouve dans les deux compositions ‘Eno Vision’ et ‘Post Eno Vision’, qui font référence au claviériste et producteur notoire Brian Eno. "Les morceaux commencent dans un style typiquement postpunk, mais petit à petit, on déconstruit la structure pour évoluer vers un style plus orienté synthés, plus hypnotique, un peu à la Suicide".

Si le band avoue une passion pour les instruments analogiques, leur démarche n'est pas intégriste. "Nous utilisons beaucoup des émulateurs de sons analogiques sur PC ou MAC", explique Hugo. "C'est plus pratique et également plus économique!"

Une approche très ‘Do It Yourself’ qui a poussé le team à produire lui même son premier single, qui comprend deux faces A : ‘Porkshop’ et ‘Westie’. C'est un 45tours vinyle pressé en 300 exemplaires numérotés. Rétro-futuriste ici aussi ? "Complètement! Nous aimons les beaux objets. Nous avons donc tout conçu nous-mêmes : l'enregistrement dans notre home studio, le 'mastering', la pochette (design par Spike and Jones). L'esthétique est résolument vintage."

Le groupe va même plus loin et envisage de sortir une cassette audio consacrée à deux nouveaux titres. Un code permettant de télécharger les morceaux via internet lui sera attribué : vintage mais adapté à l'époque! Les morceaux sont intitulés provisoirement ‘Endless Day’ et ‘DSK’.

Après des concerts donnés aux Halles de Schaerbeek, La Maison du Peuple, Madame Moustache, à l'Atelier 210 (en première partie de Birdpen), au festival de Bourgeois, aux Fantastique.Nights et au London Calling, le combo se produira au Magic Mirror le 8 septembre prochain. Ne les manquez pas : Les Panties ont promis d'enlever le bas...

Deux extraits vidéo de leur concert aux Fantastique.Nights: ‘Call’ http://youtu.be/b6DZ6Cw_7dQ et ‘Post Eno Vision’ http://youtu.be/cZJG-GJ0Wjw

Les Panties sur Facebook https://www.facebook.com/LESPANTS et Soundcloud: http://soundcloud.com/les-panties

 

Low

La musique est un langage universel…

Écrit par

Une drôle d’aventure a précédé la réalisation de cet entretien. Low annoncé dans le cadre du festival Cactus, je signale mon intention au label qui distribue la formation de réaliser une interview en compagnie du groupe. Trois semaines avant leur passage à Bruges, l’attaché de presse introduit la requête officielle auprès du label. Aucune réponse. Il tente même un dernier essai via la cellule organisatrice de l’événement. Silence radio. Bref, c’est sans issue. D’autant plus que ce 7 juillet, vers quatre heures du mat’, un SMS me confirme la fin de non recevoir. Pourtant, au cours de la matinée, une petite voix me souffle qu’il reste un petit espoir. Donc je passe deux bonnes heures à griffonner des questions, en me disant qu’elles pourront peut-être servir ultérieurement… Après le set du trio, je retourne au stand presse. Soudain, j’aperçois Alan Sparhawk en conversation avec quelques VIP. J’attends patiemment qu’il termine ce conciliabule pour l’approcher et l’interpeler. Je lui explique les péripéties qui ont émaillé la demande d’interview. Et il me demande si je suis prêt à tenter le coup. OK, mais ce sera sans filet…

On se retrouve donc dans la loge du groupe. Le bassiste est couché sur une banquette et semble se défouler sur un gameboy. Mimi Parker (l’épouse d’Alan) et le tour manager sont face à leurs portables, sans doute absorbés par leurs ‘chats’ échangés sur internet. Le temps de préparer le matos et on entre immédiatement dans le vif du sujet…

Pour enregistrer son dernier opus, la formation a reçu le concours de quelques invités. Dont Matt Bekcley (Katy Perry, Avril Lavigne, Vanessa Hudgen), à la coproduction, aux arrangements de cordes et au mixing. Il participe également aux harmonies vocales. Puis, la violoniste Caitlin Moe et surtout le guitariste de Wilco, Nels Cline, que nous avions eu l’occasion d’interviewer, dans le cadre du festival de Dour, en 2007. Un Cline dont la liste des collaborations est impressionnante. Alan précise « On se connaît depuis longtemps. Même avant qu’il ne rejoigne Wilco. Lors des sessions d’enregistrement, c’est lui qui s’est chargé des soli. On s’est croisé il y na une quinzaine de jours. En fait, Wilco se produisait au même endroit que nous. Et on a passé un moment ensemble ».

A propos de coopérations, Low n’est pas en reste, puisqu’il développe différents projets parallèles. Musicaux, mais pas seulement. The Retribution Gospel Choir, d’abord. Un combo responsable de deux excellents opus, dont le remarquable ‘2’, paru en 2010. « On essaie de jouer autant que possible. ‘2’ est un excellent album. On en a extrait un single avec 4 chansons. La formation a l’intention d’enregistrer d’autres disques. » The Hospital Choir ensuite. « On a sorti un single qu’on interprète encore. On a accordé de rares concerts, mais jamais accompli de tournée ». Black Eyed Snakes encore. « Ce concept remonte déjà à quelques années. En fait, on s’est investi pour des tas d’amis (NDR : Rivulets, Haley Bonar, etc.), mais toutes ces entreprises nous ont coûté beaucoup d’argent. On a mis la pédale douce, maintenant. On s’est encore embarqué dans l’aventure The Murder of Crows, dont la violoniste s’appelle Gaelynn Lea. Le disque est instrumental et, je pense, s’inscrit dans la lignée de Dirty Three. » Egalement une pièce de danse contemporaine baptisée ‘Heaven’. « On a été très occupé par ce projet pendant deux ans. Il ne se limitait pas à la bande originale. On a aussi participé à la représentation. Qui a exigé énormément de travail. Bien plus que lors d’une tournée d’un groupe de rock’n’roll. Mais c’est énormément de boulot pour très peu de spectacle. Et rien n’a été ni enregistré, ni filmé. C’est étrange et frustrant à la fois… » Humanitaire enfin : la construction d’une école au Kenya. « Ce n’était pas un grand sacrifice. On connaissait un ami qui vivait dans un village masaï et on lui a demandé ce qu’on pouvait faire pour les aider. Donc on a accordé quelques shows à la Noël dont les bénéficies ont été versés à cette cause. On aurait pu en faire davantage. Et puis, c’était une opportunité pour visiter ce coin d’Afrique. Un endroit incroyable ! Mais en fait, c’est plus le responsable de l’opération qui était engagé. Nous on a simplement financé le projet. C’est tout ! »

Daniel Lanois se produisant au cours de la soirée, en vedette, il était intéressant de demander si un album de Low pourrait un jour être produit par le Canadien. Et comme il est à la même affiche, pourquoi ne pas lui proposer, éventuellement, ce soir… Alan réagit : « Il en avait été question, il y a quelques années. C’était une idée qu’il avait en tête, à l’époque où il avait son studio à la Nouvelle-Orléans. On y était même allés, mais il n’y a pas eu de suite. Ce sera peut-être pour une autre fois. La porte reste ouverte… » Mais n’est-ce pas aussi un problème de coût ? Alan admet : « Oui probablement. Et puis, chez Lanois, il a des aspects que j’apprécie et d’autres moins. Son univers est tantôt proche du mien. Notamment dans la manière de jouer de la guitare. Dans la recherche de l’esthétique. Tantôt aux antipodes. C’est plutôt une relation amour/haine… »

Neil Young et Dylan sont deux artistes auxquels Alan voue une grande admiration. Il confirme. « Oui, en fait, ils viennent plus ou moins de ma région (NDR : le Minnesota est un Etat du Mid-Ouest des États-Unis, dont la frontière Nord est formée par les provinces canadiennes du Manitoba et de l'Ontario). C’est un peu une fierté d’appartenir à cette zone d’Amérique où ont grandi Neil Young (NDR : il est né à Toronto) et Dylan (NDR : Le Zim, à Duluth). Il est certain que Neil Young me parle et plus récemment Dylan. A un certain moment, tout artiste doit être confronté à de grands songwriters. Ce qui fait sens. J’ai écouté de manière obsessionnelle les albums de Dylan. Même les bootlegs. C’était il y a deux ou trois ans… »

A propos de Neil Young, en assistant au set accordé juste avant cet entretien, j’ai ressenti chez Alan, dans sa manière de jouer, le feeling du ‘loner’. Et puis, parfois, quand le tempo s’élève, un rythme tribal que l’on retrouve chez les Indiens d’Amérique. « C’est intéressant ce que tu me dis. Au départ, notre style est minimaliste. Mais le minimum de musiciens doit être capable d’en faire le maximum. C’est un peu comme si j’avais recours à d’autres collaborateurs. Au fil du temps, on est parvenu à créer de l’intensité sans avoir recours aux rythmes normaux du rock’n’roll, sans ses trucs et ficelles. Par rapport au set, je suis d’accord avec toi. Tout d’abord je joue d’une Les Paul, comme lui. Mais ma manière de jouer est plus relâchée. Moins précise. Perso, c’est très expressif. C’est dans l’instant présent, dans le feu de l’action. Et à un certain moment, je m’autorise ce genre d’extra. C’est un peu comme si j’utilisais les mêmes outils que Young. Mais ce n’est pas intentionnel, c’est plutôt comme une mutation, une dérive dans mon jeu. Après une vingtaine d’années de pratique de la guitare, j’essaie d’en jouer le plus spontanément possible… »

Pour Sparhawk, la musique véhicule une forme de spiritualité. Peut-être comme le gospel… Il s’épanche : « La musique est un langage universel. Elle n’est pas nécessairement spirituelle. Ce n’est pas une religion. C’est une langue que nous parlons. C’est la raison pour laquelle tout le monde l’aime, depuis les temps immémoriaux. Dans ce domaine, l’expérience la plus importante de mon existence est apparue, lorsque je me suis rendu compte que je touchais à la réalité, à la vérité. Et c’est chaque fois arrivé lors d’un moment en relation avec la musique. Une bonne partie de ma foi se décline autour d’elle. Depuis mon enfance. C’est une révélation qui me permet de voir la vérité à travers une chanson spécifique. Comme serviteur de Dieu, c’est la foi pour mon Eglise, un prophète ou même Joseph Smith (NDR : fondateur du mormonisme) qui me pousse à écrire. Ce qui peut sembler stupide ; mais beaucoup de gens comprennent ce que je raconte, car de nombreuses expériences spirituelles sont liées à la musique… »

(Merci à Vincent Devos)

 

Modern Cubism

Une passerelle entre poésie et électro

Il fallait oser : mélanger de la poésie française à de la musique électronique et présenter ce projet tant dans les festivals de musique électro que les évènements littéraires. C'est d'ailleurs dans le cadre du ‘Marathon Des Mots’, le très éclectique festival international des littératures, qui se déroulait, entre autres, au Centre Culturel des Riches-Claires à Bruxelles, que nous avons rencontré Modern Cubism. Formé il y a 4 ans par Jean-Luc Demeyer, chanteur de Front 242, et Jean-Marc Mélot, claviériste et compositeur, le duo belge y accordait un concert afin de présenter son nouvel album, ‘Tout Le Firmament Autour’.

Après avoir publié un premier opus, intitulé ‘Les Plaintes d'Un Icare’, consacré aux poésies de Baudelaire, la formation met en musique une sélection de textes du poète belge Norge. Mais pourquoi avoir choisi Norge? Jean-Luc Demeyer précise: "En fonction de ce que j'avais déjà senti dans l'évolution des musiques de Jean-Marc, je me suis dit : ça prend de la hauteur, les sons sont moins organiques, moins grouillants, l'horizon s'éclaircit, les lourds nuages noirs s'écartent et laissent la place à un ciel très bleu. Ce qui correspond bien à Norge". Jean-Marc Mélot confirme: "Effectivement, elles étaient beaucoup plus positives et les premiers textes que Jean-Luc m'a envoyés, notamment 'En Forêt', convenaient parfaitement à ce nouveau type de musique, plus planante."

On trouve une véritable continuité entre les deux albums dans les thèmes abordés: l'amour, les femmes, la mort, le sexe, la condition humaine, ... Mais aussi ce côté grinçant, cynique, obscur qui semble être la marque de fabrique des interprétations de Jean-Luc Demeyer. "Les thèmes cités sont récurrents chez tous les poètes", souligne-t-il. "Norge aimait aussi beaucoup les animaux et les légumes, par exemple, mais cela correspondait nettement moins bien à la musique." Tout au long des 14 titres de l’œuvre, on découvre donc une poésie à la fois concrète et métaphysique, sensuelle et cruelle, alliant vérité et incrédulité, fringales terrestres et soif d'infini.

Les deux artistes ne sont bien sûr pas les premiers à mettre Baudelaire et Norge en chanson. Avant eux, Jeanne Moreau, Juliette ou encore Florent Pagny ont tenté cet exercice périlleux, une démarche que Jean-Luc Demeyer estime cependant salutaire. "Je ne me retrouve pas dans la plupart des interprétations de Baudelaire ou de Norge parce que j’estime qu'elles sont beaucoup trop légères par rapport à ce que ces auteurs avaient voulu traduire dans leurs écrits ; mais je préfèrerai toujours des gens qui essaient de faire vivre cette poésie plutôt que ceux qui ne font rien. Aujourd'hui, la poésie est diffusée par un nombre grandissant d'artistes qui montent sur scène pour déclamer des textes ou accomplir des performances. Dans un monde où tout devient mercantile et où rien n'est gratuit, la poésie reste un regard neuf et élevé porté sur le monde, qui propose un partage inconditionnel avec le public. C'est une optique qui s'impose naturellement car elle manque terriblement dans la vie de tous les jours."

Dans Modern Cubism, on rencontre des références importantes de la musique électronique, telles que Jean-Michel Jarre, Klaus Schulze ou encore Isao Tomita. Jean-Marc Mélot: "Ces musiciens sont importants pour moi car ils ont combiné électronique et classique pour élaborer des structures différentes par rapport au canevas pop habituel intro-couplets-refrains. C'est une musique qui permet d'explorer de nouveaux territoires, d'ouvrir des portes. C’est ce que nous essayons de réaliser à travers nos albums. Ici, la direction est en effet plus légère, plus éthérée." Notons cependant la présence, ici également, de touches new-wave, synth-pop voire carrément EBM. Le groupe a d'ailleurs réalisé trois remix, qui sont tout naturellement plus 'dance'. "Notre disque propose en fait un bon mix entre des titres lents, low tempo qui évoluent plus progressivement, comme ‘Couronnes / Le Trône’, et à côté de cela, des morceaux plus drum 'n bass, que l'on peut rattacher à l'EBM 'old school'."

La très belle pochette de ‘Tout Le Firmament Autour’ a été réalisée par Natalie Saccu de Franchi, une artiste française polyvalente qui excelle en tant qu'architecte, graphiste, réalisatrice et écrivaine. C'est d'ailleurs elle qui réalisera les prochaines vidéos du duo, mais ce n'est pas une priorité. "Nous avons un profil très bas, ce que nous faisons est assez dépouillé, la musique et les mots se suffisent à eux-mêmes."

Cette approche est confirmée au cours du concert donné aux Riches-Claires. La formule scénique est en effet très 'minimaliste'. Elle se limite au chanteur et son micro ainsi qu’au musicien et ses claviers. Pas de projections, pas d'artifices scéniques, en dehors de la très belle décoration lumineuse mise en place par Olivier Cassart. Modern Cubism joue au total neuf morceaux tirés du nouvel album ainsi que quelques reprises de ‘Plaintes D'Un Icare’. Demeyer alterne déclamation et chant avec une grande expressivité. Habité par les textes, il accompagne les temps forts par des mimiques et des gestes évocateurs. La plupart des titres ont été retravaillés pour le ‘live’. "Vu que notre musique est assez complexe, nous la simplifions un peu pour la scène mais en préservant bien sûr leurs aspects mélodiques et leur puissance." En parlant de puissance, certains spectateurs ont visiblement été surpris par le niveau sonore de la musique, surtout pendant les morceaux plus électro. Mais ce choix appartient au décloisonnement entre les cultures, que prône Modern Cubism. Il demande, en effet, un effort aux amoureux de la poésie pour s'immerger dans la musique électro, de même qu'une ouverture d’esprit est nécessaire aux fans d'électro pour s'intéresser à la prosodie de Norge....

Ce qui pouvait donc apparaitre au départ comme une ‘erreur de casting’, un ‘clash schizophrénique entre deux cultures’, se révèle au final un mariage unique et fructueux entre un chant poétique, brûlant, parfois violent, et une musique froide et mécanique, le tout présentant une très intéressante mise en abyme, un paradoxe criant de la modernité, où l'homme se débat face à un monde de plus en plus déshumanisé....

Pour leur prochain opus, le duo explore actuellement plusieurs pistes musicales et envisage de reprendre un auteur anglo-saxon, à moins que ce ne soit un autre classique français comme Verlaine ou Rimbaud? Wait and see!

Regardez l'interview complète de Modern Cubism ici . Deux vidéos du concert sont également disponibles: ‘L'importun’ (http://www.youtube.com/watch?v=2N9b-4Jb5wA) et ‘Mes Statues’ (http://www.youtube.com/watch?v=A_HBXKzug34)

L'album ‘Tout Le Firmament Autour’ sort le 22 juin via le label allemand Emmo.biz et sous la forme d'un CD (édition limitée de 888 exemplaires) et d'un box-set (111 exemplaires). Pour commander: www.emmo.biz

Tracklist:

01. En Forêt
02. Mes Statues
03. D'enfance
04. Le Petit Non
05. Couronnes / Le Trône
06. La Corde
07. Râpes
08. La Fille de Fabrique
09. Les Quatre Vérités
10. Ennemis
11. En Prison
12. Marche des Paysans
13. La Grande Brosse
14. Force de Frappe / La Foule / De Vivre

Remerciements à Jean-Luc Demeyer et Jean-Marc Mélot (Modern Cubism), Marianne Cosserat et Séverine Provost (Marathon des Mots), Garjan Atwood (Photos du concert).

 

Connan Mockasin

Comme un enfant dans sa bulle…

Écrit par

De son véritable nom Hosford, Mockasin est néo-zélandais. Il avait publié un superbe album l’an dernier, « Forever Dolphin Love ». En fait, il s’agit de son second opus, une version retravaillée de « Please Turn into the Snat », qu’il avait sorti en 2010. Juste avant de monter sur les planches de l’Orangerie du Botanique, ce 26 mars 2012, il nous a accordé une interview. Peu loquace, timide et le plus souvent évasif, déblatérant dans un anglais à couper au couteau, il se révèle néanmoins sympa et souriant. Et finalement, il me fait penser à un ado qui a décidé de s’enfermer dans sa bulle pour n’en sortir que lorsqu’il se produit en ‘live’. Il va d’ailleurs le démontrer, un peu plus tard, tout au long de son set… L’entretien ? Il ne m’apprendra pas davantage que je ne savais déjà. Vu le contexte, cet article a donc été rédigé sous une forme beaucoup plus descriptive que d’ordinaire…

Avant d’entamer une carrière ‘solo’, Connan a milité au sein d’un groupe de blues, Connan & The Mockasins. Un cheminement qui semble logique puisque tout gosse, il écoutait les disques de son paternel, et en particulier ceux de BB King, Hendrix, Clapton et Buddy Guy. Le trio a même tenté de se faire une place au soleil (?!?!) en Angleterre, mais sans grand succès. Et puis, Mockasin n’était pas tellement convaincu par cette aventure. Si bien qu’il est retourné dans l’hémisphère sud.

C’est la maman de Connan qui va jouer un rôle important dans sa carrière. C’est elle qui l’a poussé à sortir un disque. Elle s’inquiétait de voir son fils incapable de décrocher un job et de gagner sa vie. Alors, elle lui a conseillé de foncer. Et le fiston d’enregistrer dans une petite maison en bois à côté de celle de ses parents.  

Donc à l’origine, il a réalisé cet album, pas pour le grand-public, mais pour satisfaire à la demande de sa mère. Il l’a conçu comme un live. En solitaire, suivant l’inspiration. Les rares collaborations extérieures se limitent à quelques drums. « Chaque chanson a été écrite puis enregistrée, l’une à la suite de l’autre, sans jamais chercher à donner un ordre bien précis aux morceaux ».

Hormis Crowded House, groupe préféré de sa maman, et les bluesmen notoires qu’écoutait son père, on ne peut pas dire qu’il soit très réceptif à l’histoire de la musique pop/rock et même à la scène contemporaine. Lui parler de Syd Barrett et de Robin Hitchcock ? Pour le premier, il n’y voit aucune affinité. Quand on second, il n’en a jamais entendu parler. Enfin, le label Flying Nun qui a notamment donné naissance, au cours des eighties et des nineties, à des groupes ou des artistes comme The Bats, Bailter Space, The Chills, The Clean, Jean-Paul-Sartre Experience, David Kilgour, Chris Knox et les Verlaines, il en a entendu vaguement parler. Mais cette scène pourtant aussi remarquable qu’injustement méconnue ne l’a absolument pas touché. Ariel Pink constitue quand même une référence. En fait, il puise ses principales influences dans les B.O. de films. En particulier celles réalisées par Joe Hisaishi et Jonny Greenwood.  

Connan est également peintre, dessinateur et avoue être très branché sur les visuels. Ses dessins, il les réalise en papier mâché avant de les peindre. Ces poupées lui ressemblent. Ou alors à Andy Warhol ! « Je ne sais pas ! J’ai dessiné avant de jouer de la musique. Je me demande si je ne suis pas meilleur en dessin, d’ailleurs. » Ce sont les circonstances de la vie qui l’ont poussé à privilégier la musique. Il estime également que dessiner une pochette apporte une valeur supplémentaire à un disque. Plusieurs de ses figures illustrent ainsi le booklet de ‘Forever Dolphin Love’. Pour lui, il existe cependant un lien entre la peinture et la musique. Car ces deux formes d’art ne demandent pas nécessairement de la réflexion, mais du feeling. Un peu comme quand on se produit en public. Il estime également l’aspect visuel de ses compos très important pour accompagner sa musique ? Mais ce n’est pas lui qui réalise ses clips…

Mais pourquoi Mockasin est-il retourné en Angleterre ? Tout simplement parce qu’il estimait que le public n’était pas assez réceptif à sa musique en Nouvelle-Zélande. Au départ, on ne peut pas dire que l’accueil ait été plus chaleureux en Grande-Bretagne. Jusqu’au moment où Erol Alkan, boss du label Phantasy ne découvre l’artiste et décide de publier l’elpee. « Erol est simplement quelqu’un en qui j’ai confiance ». Est-ce pour autant, son ami ou son guide. La réponse fuse : « Non, c’est mon boss ! »

Charlotte Gainsbourg a demandé à Connan Mockasin d'écrire un titre pour son nouvel opus, ‘Stage Whisper’. Et puis ce dernier va participer à la prochaine tournée de la fille de Gainsbarre et Jane. Qui passera par les Nuits Botanique ce 19 mai 2012 dans le cadre de leur périple commun baptisé justement ‘Stage Whisper’. « Elle m’a rejoint sur scène, hier à Paris (NDR : c’était à la Cigale) et on est souvent en contact, en ce moment. Via le ‘chat’, notamment »

Connan a également d’autres projets. Dont celui qu’il partage en compagnie de Sam Dust, le leader de Late Of The Pier. Et un album devrait paraître. Quand ? C’est une autre histoire, puisque le tandem bosse dessus depuis plus d’un an. Mockasin s’explique : « Mais Sam est présent ce soir. Il a rejoint mon groupe pour cette tournée. L’album est presque achevé. On est content du résultat. J’espère qu’on pourra le sortir cette année encore. Mais il n’a pas encore de titre. ‘Soft Lizard’, peut-être ? » 

Mockasin envisage quand même graver un nouvel opus personnel. Il voudrait qu’il soit plus accessible, plus simple que le précédent. Mais n’est-ce pas risqué de le souhaiter plus abordable ? Il réagit au quart de tour « Non, ça ira, je gère. Même pas peur, j’assure… »

La musique de Mockasin est contagieuse. Lorsqu’une mélodie entre dans votre tête, difficile de s’en débarrasser. Elle peut même trotter plusieurs jours dans votre tête. Il semble étonné : « J’essaie toujours de composer des chansons qui sont agréable à écouter. Mes mélodies sont contagieuses ? C’est bizarre. Enfin, perso, je ne le suis pas ! » (rires) Sa musique est également atmosphérique. Parfois on se demande même si elle ne s’adresse pas davantage aux âmes qu’au corps. Aux esprits plus précisément. Mais notre interlocuteur croit-il aux fantômes, lui qui vit aujourd’hui en Grande-Bretagne où les histoires de revenants sont légion. Au cours de son enfance, dans son patelin natal de Te Awanga, un petit village sis au Nord de la Nouvelle-Zélande, il avait, en compagnie de quelques copains, joué aux fantômes, une histoire qui avait failli mal tourner. Et puis, en Angleterre, il avait aussi commencé à enregistrer son premier opus, dans une maison au sein de laquelle s’étaient produits des phénomènes paranormaux. Connan feint de ne jamais avoir entendu parler de cet épisode : « Oui, il doit exister quelque chose de surnaturel sur cette terre. En Angleterre et en Ecosse, je suis étonné de ne pas rencontrer plus de fantômes. A cause de ces nombreuses vieilles bâtisses. Mais il est vrai que ce sont des expériences complexes et mystérieuses… »

Chaque hiver, Mockasin retourne chez lui. Enfin depuis quatre ou cinq ans. Ce n’est pas pour y vivre l’été. Il n’aime d’ailleurs pas trop la chaleur. Il préfère l’automne. Serait-il nostalgique voire mélancolique ? Il l’était et déclare avoir tourné la page, même s’il aime toujours autant les couleurs de cette saison… sans doute un peu comme Robin Proper Sheppard de Sophia. « Sofia ? C’est ma tour manager. Elle est française » Elle entre à cet instant dans la loge en compagnie de l’attaché de presse, pour me signifier que le temps imparti pour l’interview touche à sa fin…

Juste le temps de sortir les planches destinées à un kamishibaï, illustrant l’histoire des babouches d'Abou Simbel. Et soudain de voir le visage de Mockasin s’illuminer. Comme un enfant, à qui on allait raconter une histoire…

(Merci à Vincent Devos)

 

Elvy

Je suis quelqu’un de bien plus triste et désabusé qu'engagé…

Écrit par

La voix haut-perchée, au timbre si particulier, une guitare ou un piano pour l’accompagner, Elvy est un ‘singer/songwriter from Belgium’ tel qu’il se définit lui-même. En publiant ‘The Home and the World’, son troisième opus, sorti en mars 2012, Lionel Vanhaute alias Elvy n’en est pas à son coup d’essai. L’artiste folk/rock avait déjà sorti un premier album intitulé ‘Farwest’, début 2004. Vient ensuite ‘Home recordings’, un recueil de 24 morceaux composés entre 2005 et 2010, tout au long duquel Elvy nous dévoile un univers teinté d’un subtil mélange de douceur, de tendresse et de mélancolie.

Ce qui frappe à la première écoute de ‘The Home and the World’, c’est cette voix en ‘falsetto’ dispensée un peu à la manière de Neil Young, version acoustique. Elvy commente : « J’ai appris à chanter vers 17 ans. Je suis né en 1980. 1997 est l’année d’‘Ok Computer’. Ainsi, j’ai été, en partie, marqué par Thom Yorke. Neil Young dont j’apprécie les premiers albums acoustiques, constitue également une référence. Je ne sais si c’est ma voix naturelle, elle est venue ainsi. »

Bien que francophone de Belgique, Elvy chante en anglais. Il justifie ce choix : « La culture anglophone, par son omniprésence, est également devenue la nôtre. Nous avons donc une double culture et il est aussi légitime de s’en référer autant à l’une qu’à l’autre. C’est une question de penchant. Certains adeptes d’identité culturelle le regrettent, mais je pense que nous ne pourrons pas revenir en arrière et que cette situation nous donne au final une plus grande richesse intellectuelle. »

Elvy n’est pas uniquement un chanteur-compositeur doué. C’est également un multi-instrumentiste talentueux. En effet, il joue de la guitare, de la basse et du clavier. Tous les autres instruments entendus sur ses albums, comme la batterie et les violons, sont en fait des instruments virtuels interprétés au clavier. ‘The Home and the World’ comporte par ailleurs deux morceaux instrumentaux. Elvy s’en explique « J’ai toujours aimé la musique instrumentale, que ce soit la musique classique, le post-rock ou même la musique de film. En composant, il arrive parfois que les doigts jouent des accords sur la guitare et que le chant n’arrive pas à s’intégrer. On sent qu’on tient un truc instrumental et que mettre de la voix n’aboutirait à rien. C’est ce qui s’est passé pour ces deux morceaux ».

A l’écoute de la plupart des compos, à l’instar de ‘Sandflower’ et de ‘The Storm’, on remarque l’omniprésence de la guitare acoustique, le plus souvent jouée en picking. Elvy nous confie : « Je n’ai pas de maîtres dans le sens ou j’ai longtemps été mauvais en picking. J’ai appris seul, parce qu’il le fallait bien pour étendre les possibilités. J’aurais voulu être aussi doué que Ron Sexsmith ou Leonard Cohen ». Excepté une base de solfège acquise auprès d’un professeur, Elvy a vite abandonné le classique pour s’adonner à la musique folk, sans être un féru de jazz pour autant. Et d’ajouter : « J’apprécie certains arrangements mais le swing n’est pas trop mon truc. »

Le jeune trentenaire n’a pour le moment plus de lien avec une quelconque maison de production (NDLR : autrefois, il relevait de l’écurie JauneOrange). Au contraire, faute de label, il a choisi la voie de l’autoproduction. Ainsi, quarante-sept morceaux issus de ses trois albums sont téléchargeables sur son site elvy.bandcamp.com. Elvy concède : « Je n’ai que très peu de chansons en réserve car, bizarrement, je valide tout ce que je fais. Au lieu de composer trente chansons à la va-vite et en garder douze, j’en écris douze que je peaufine jusqu’à ce qu’elles puissent être utilisables. J’ai bien sûr des chutes mais elles ne représentent qu’un quart des 47 morceaux sur bandcamp. » Cependant, pour l’artiste bruxellois, les chansons non publiées peuvent toujours être réutilisées, réarrangées, désossées pour reprendre un refrain, un accord voire un son.

S’il s’est déjà produit au Botanique et à l’AB, ce sont cependant les petites salles où Elvy partage son univers particulier, notamment lors de showcases ou de concerts privés ou en tant que support artist. Cet admirateur de Léo Ferré et de Salvador Allende plaide pour une vision artistique globale, ce dont on peut prendre la mesure en parcourant la rubrique ‘extra’ de son site internet elvy.be . Il confesse cependant : « Il y a certainement un engagement dans ces chansons mais il n'est présent que comme part de moi-même. Je n'ai pas l'envie de composer des morceaux dont l'essence même est la lutte sociale. Je suis quelqu’un de bien plus triste et désabusé qu'engagé. »

Elvy s’est construit progressivement un monde à part dans le milieu de la chanson folk. Ses mélodies légères, éthérées et sa voix aérienne et délicate forment un tout indissociable, qui devrait plaire à ceux qui sont à la recherche d’une atmosphère paisible telle que celle qui se dégage de chansons comme ‘Childhood’, ‘Landfall’ et ‘Unwise’.

Elvy, un artiste à découvrir d’urgence pour les amateurs du genre.

 

John Foxx

21th Century... Foxx

De son véritable nom Dennis Leigh, John Foxx était le chanteur original d’Ultravox avant qu’il ne soit remplacé par Midge Ure, quand il s’est décidé d’entamer une carrière solo. C’était en 1979. Ce soir John Foxx et son groupe accorderont un concert à Aarschot. Et je suis très heureux de pouvoir rencontrer un des mes héros juste avant ce set. En dépit de son statut d'artiste légendaire, il est très modeste, voire même timide, un vrai gentleman à l'anglaise. Ecoutez ici l'interview complète réalisée avant le concert (audio). Ou lisez ci-dessous un résumé des idées maîtresses.

"La nostalgie, ça ne m'intéresse pas". La voix de John Foxx est profonde et douce. De nostalgie, il n'est en effet pas question. S'il a repris, il y a trois ans, le chemin des studios et de la synth-pop, après une longue période d'introspection, c'est pour prendre une nouvelle direction, donner une dimension moderne à la musique qu'il avait imaginé à la fin des années '70. Cette décision, il l'a prise après avoir rencontré Ben ‘Benge’ Edwards, un magicien des claviers, qui a rassemblé dans son studio à Londres une collection inouïe de synthés vintage analogiques. Dans cette caverne d'Ali Baba, on trouve les dinosaures électroniques grands comme des armoires utilisés à l'époque par Tangerine Dream, mais également les premiers Moog Modular, des ARP 2600, Yamaha C360 et autre Korg Trident.

"Travailler en compagnie de Ben est génial car il m'a permis de retrouver le plaisir de se servir de synthétiseurs analogiques. En fait, ils n'ont jamais été pleinement exploités depuis leur création il y a 30, 40 voire 50 ans. Pourquoi? Simplement parce qu'ils ont été très rapidement remplacés par les instruments numériques. Donc, dans le studio, nous les amplifions et les enregistrons à l’aide de technologies modernes et nous découvrons des sons qui n'avaient jamais été révélés auparavant."

Rien d'étonnant donc à ce que ce studio soit devenu le point de ralliement de toute une nouvelle génération de DJs, compositeurs et autres claviéristes, pressés d'explorer cette nouvelle ‘forêt amazonienne’. On pense bien sûr à Ladytron et plus particulièrement à Mira Arroyo, la seconde chanteuse et claviériste du groupe, qui s’illustre sur un des morceaux de John Foxx & The Maths. Ont également participé aux sessions, le duo new-yorkais Xeno & Oaklander, Gazelle Twin, et le DJ français Jean-Gabriel. Mais surtout deux jeunes chanteuses/compositrices/multi-instrumentistes qui militent maintenant au sein du groupe : Hannah Peel et Serafina Steer. "Ce sont deux excellentes musiciennes, chacune avec un univers et une personnalité propres. Serafina, par exemple, est la seule personne que je connaisse qui soit capable de jouer une mélodie complexe au synthé et une ligne de basse en même temps ; le tout en assurant les 'backing vocals'. Elle enregistre actuellement en compagnie de Jarvis Cocker (Pulp). Quant à Hannah, elle a notamment fait appel une chorale de 36 personnes, pour participer à la confection d’un album. Elle écrit aussi des musiques de film et de pièces de théâtre." Notons au passage que cette dernière sera à l'affiche des Nuits Botaniques en première partie de Lisa Germano.

A ce moment de l'interview, une question me brûle les lèvres. J'ai toujours voulu prouver le caractère véritablement ‘pionnier’ de la musique de John Foxx. Et les indices que j'ai relevés me sont confirmés par l'intéressé: dans l'histoire du rock, le tout premier morceau de new-wave synthétique (synth-pop), un style qui sera popularisé plus tard grâce à Gary Numan, Depeche Mode, Human League et autres Simple Minds, est bel et bien ‘Hiroshima Mon Amour’, qui figure sur ‘Ha! Ha! Ha!’, l'album d'Utravox! datant de 1977. Mais par qui John a-t-il lui même été influencé? On a souvent cité Roxy Music, David Bowie et bien sûr Kraftwerk mais il existe d'autres influences bien plus notables. "Je pense surtout à Neu! et à la scène électronique allemande des années septante. Il y avait aussi The Velvet Underground, et tout le mouvement qui gravitait autour d'Andy Warhol. Sans oublier les Beatles. Leur producteur, George Martin, est un génie. Il est le premier à avoir utilisé le studio comme un instrument à part entière. Il expérimentait à l’aide de loops, de samples et de bandes passées à l'envers. Cet esprit a ensuite débarqué en Allemagne et a été repris par Tangerine Dream, Kraftwerk, Can, Neu! et toute cette génération rassemblée autour de Conny Plank, le George Martin de Düsseldorf."

John est largement en faveur de ces échanges d'influences. Il n'est nullement amer de voir que des tas d’autre artistes ont largement puisé dans ses créations, récoltant même davantage de succès. "Et s'ils gagnent de l’argent grâce à ça, tant mieux, de toute façon l'argent n'est qu'un produit secondaire. Vous savez, c'est Picasso qui disait: 'Un artiste moyen reprend, par contre un véritable artiste vole!' Aujourd'hui, des gens comme SKRIILEX ou encore Justice coupent en morceaux toute l'histoire de la musique et les réassemblent à leur manière. C’est très intéressant! En outre, les Etats-Unis viennent de découvrir la musique électronique –mieux vaut tard que jamais– ouvrant d’énormes perspectives à la nôtre." 

A propos de futur: quels sont les projets de John Foxx And The Maths? "Un nouvel opus sort le 19 mars prochain : ‘The Shape Of Things' ; et, ensuite, un Ep début juin, sur lequel figurera des remixes et diverses collaborations. Ensuite, nous travaillerons sur de nouveaux morceaux. Nous ne savons pas encore très bien quelle direction nous allons prendre, car nous procédons de façon très instinctive. En fait, ce sont les machines qui nous dirigent. Quand vous captez un ‘arpeggio’ sur un Moog, par exemple, c'est tellement rythmique et structuré harmoniquement qu’immédiatement une chanson est suggérée ; et donc je me mets à chanter spontanément. C'est tellement irrésistible qu'il serait pervers de résister à une telle tentation! Une chose est sûre, nous sommes maintenant dans la période 'post-digitale' et la musique analogique a encore de beaux jours devant elle!"

Pas de doute, ce John Foxx-là est tout sauf nostalgique: il est bien de ce siècle : le 21th Century Foxx...

Lisez ici la chronique du concert de John Foxx And The Maths à Aarschot.

 

Duo Volta Subito

Une recherche de métadiscours et de sincérité…

Écrit par

La Belgique ne manque pas de jeunes musiciens brillants et deux d’entre eux ont retenu mon attention par leur maturité et l’enthousiasme qu’ils mettent à transmettre l’héritage de l’École belge du violon et du violoncelle. Il s’agit de Vincent Hepp, violoniste et altiste ainsi que de Sarah Dupriez, violoncelliste. Ensemble, ils forment le Duo Volta Subito. Après une enfance remplie de musique, ils ont tous deux brillamment obtenu le diplôme du Conservatoire Royal de Bruxelles avant de se perfectionner à La Chapelle Reine Élisabeth pour Hepp et au Conservatoire de Toulouse ainsi qu’à l’Académie Sibelius d’Helsinki pour Dupriez. Leur excellence musicale respective a déjà été récompensée par plusieurs prix et l’on peut entendre les jeunes musiciens se produire en soliste ou en formation de musique de chambre. Tant en Belgique que dans l’Hexagone. Egalement épris d’enseignement et soucieux de transmettre l’héritage de la grande école belge du violon, ils sont aujourd’hui assistants au Conservatoire de Bruxelles.

La naissance en 2007 de la formation Volta Subito découle d’une envie commune des jeunes interprètes à parcourir l’intégralité du répertoire pour violon et violoncelle ensemble. Le duo défend une curiosité et une affection particulière pour la musique contemporaine, et en bons Belges, les interprètes avouent un faible pour les compositeurs du pays. Lors du choix du répertoire d’un programme de concert, Vincent Hepp avoue chercher avant tout le dialogue potentiel des œuvres entre elles qui par ce métadiscours s'enrichiront les unes les autres. « Cette faculté des œuvres de dialoguer entre elles, de transgresser leur propre finalité, quand on y pense, c'est une donnée absolument fantastique et mystérieuse! » s’enthousiasme le jeune homme. Et d’ajouter : « L'interprétation d'une œuvre va souvent plus loin que l'observation stricte du style ou du langage musical d'une époque et la préparation d'un programme est un exercice subtil ».

Pour les musiciens de Volta Subito, la musique est une évasion, une délivrance, un ‘ilot de grâce’ dans la vie quotidienne. Cette même vie quotidienne pourtant enrichie inspire leur art. Hepp confirme : « Nous sommes entourés d'un monde si riche en impressions, en informations, tout est potentiellement musique ». Il est donc du devoir de l'artiste de chercher, sentir et sublimer ce que le quotidien donne à offrir pour ensuite le partager avec le public. Il faut se questionner et chercher sans cesse. Car bien que son rôle soit de rendre le plus fidèlement possible les intentions d'un compositeur, l’artiste-interprète fait en somme entendre ce qu'il comprend d'une œuvre, ce qu'il ressent par rapport à une œuvre. Hepp l’explique par un proverbe flamand qu'il traduit littéralement ainsi : « Le sang rampe là où on l'empêche de marcher ». C'est-à-dire qu'une chose vivante ira où elle veut aller malgré les obstacles. Il est légitime pour les deux interprètes d'être généreux vis-à-vis de son public et intime et sincère à l’égard de la musique. Dupriez déclare : « Si le public me fait l'honneur de venir m'écouter, je lui dirai ce que je pense en musique. La franchise me joue parfois des tours dans la vie de tous les jours, mais sur scène, jamais ». Les jeunes musiciens nourrissent ensemble l'espoir que plus un interprète est personnel et vrai avec sa musique plus il se rapproche de quelque chose d'universel et d'absolu.

En duo, Vincent Hepp et Sarah Dupriez n’ont pas de projets dans l’immédiat, mais ils se sont associés à un troisième musicien, le violoniste Bence Abraham, pour former un trio à cordes : le Omega Trio. Ils présenteront cet automne les Fugues de Bach transcrites pour trio à cordes par Mozart ainsi que Divertimento que Mozart à écrit pour cette formation. Sarah précise : « Ce sera un peu le pendant baroco-classique de notre duo Volta Subito essentiellement dévoué à la musique romantico-contemporaine ». D’ici là, ils vous donnent rendez-vous lors des divers festivals de musique de chambre qu’offre l’été afin de vous faire partager leur belle philosophie et leur amour inaltérable de la musique.

 

Page 14 sur 41