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Entre la nuit et le jour, RIVE propose "Tension", un 4ème extrait de son album "Collision", sous forme de clip. La photographe et réalisatrice Laetitia Bica (prix du ‘Changemaker de l’année 2023’ au Belgian fashion awards) emmène le duo dans la nuit des…

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Le bonheur est dans le (Maxïmo) Park... Spécial

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Depuis quelques mois, le label anglais Warp, considéré comme un des pionniers de l'électronique anglaise, s'intéresse de plus en plus à des groupes (ou artistes) musicalement étrangers à ses racines. Après Vincent Gallo, Gravenhurst et !!!, Maxïmo Park est venu grossir l'écurie. Son premier elpee fait suite à deux excellents singles qui nous avaient donné l'eau à la bouche. Son titre ? " A certain trigger ". Un disque très britannique, mais fort différent de ce que l'Albion nous réserve habituellement. Tom English (le drummer) et Paul Smith (le chanteur) ont donc accepté de passer sur le grill de Musiczine…

Mais pourquoi un label comme Warp, aussi branché sur la musique électronique, a-t-il décidé de signer Maxïmo Park ? Paul prend la parole : " Je pense que le label s'est intéressé à nous parce que nous étions différents. Aussi bien dans l'utilisation de la guitare qu'à travers le message que nous essayons de transmettre. Des émotions directes véhiculées que du dynamisme affiché par nos chansons… "

M.P. vient du nord-est de l'Angleterre ; de Newcastle très exactement. Une région dont la mentalité est tout à fait indépendante du reste de l'Albion. Tom s'explique : " Un état d'esprit qu'on retrouve, par exemple, à Middlesbrough. Par contre, si on descend un peu plus vers le nord-ouest, alors on atterrit dans des villes comme Manchester ou Liverpool ; des cités auxquelles on associe instantanément des figures de proue comme les Beatles, La's, Echo & the Bunnymen, les Stone Roses, les Smiths ou encore Joy Division. Newcastle n'a jamais eu cette aura. Il y est même difficile de s'y faire un nom. Ce qui explique pourquoi cette région a acquis une mentalité indépendante. Vous n'existez qu'en dehors de ce qui est labellisé musique pop. Ou alors vous vous laissez rattraper par le système. Et vous partez à Londres pour y épouser ses aspects les plus mercantiles. Nous voulons rester comme nous sommes. Nous ne cherchons pas d'autre influence que nous-mêmes. Il est indispensable de faire preuve d'introspection, sans quoi non n'arrive qu'à imiter les autres artistes… " Tom confirme : " A l'instar de Sheffield, Newcastle est vraiment indépendante. Parce qu'on y place la musique d'abord. C'est aussi ce qu'on fait. A l'origine, nous nous efforçons de composer de la bonne musique. Et ensuite on essaie de la vendre. Si nous avions opté pour la formule inverse, nous nous ennuierions très vite et notre objectif de départ serait faussé… " Paul reprend le crachoir : " Tu sais, tout le monde peut vendre de la daube ; mais au bout du compte ce sera le public qui aura le dernier mot. Notre ambition, notre volonté, est de parvenir à convaincre les auditeurs de regarder, d'écouter deux fois un groupe. Que son opinion ne soit pas arrêtée, définie. Parce que la musique mérite un second regard, une seconde écoute. Nous avons opté pour ce cheminement…"

Newcastle est également une ville où est enracinée une très forte tradition de réalisme social britannique. Il ne faut pas oublier que c'est au cours des années 80, que Margaret Thatcher y a procédé à la fermeture des mines de charbon. Paul acquiesce : " Nous ne pouvons cacher nos origines. Parler de la vie au quotidien dans nos lyrics est une des caractéristiques du groupe. Ce qui ne veut pas dire que nos textes soient chiants. En fait, nous transcendons le quotidien pour montrer qu'il recèle une certaine beauté. Et ce que tu appelles 'réalisme social britannique' transpire dans nos chansons. J'écris à propos d'événements, de lieux que je connais. De l'endroit où j'ai grandi. Du partage de notre origine particulière. Bien sûr, notre musique répond également à des critères plus universels ; parce qu'on y retrouve de la colère, de la frustration. Vous savez, cette sorte de colère humaine née au cours des années 50 et 60. Mais au-delà de ces aspects, on y décèle beaucoup de joie et d'attention… " Un peu de pathos, également… Paul réagit : " On ne peut pas ignorer l'aspect tragique de l'existence. Mais on ne peut pas, non plus, se lamenter sur le sujet. Pour sortir de ce pathos, il est également nécessaire de cultiver le sens de l'humour et parvenir à une combinaison judicieuse entre ces deux expressions. A travers des lyrics auto dérisoires. Des changements de ton, d'atmosphère. Et pour maintenir l'attention de l'auditeur, nous travaillons sur la ligne mélodique… " La colère est donc bien une force qui anime les chansons de M.P. Paul admet : " Les gens expérimentent la colère dans la vie de tous les jours. Mais il faut rester attentif, car la colère peut vous bouffer ; et alors on n'est plus qu'une boule de nerfs. Ce mode de vie est très dangereux, parce que vous ne serez jamais satisfait. Ces pulsions négatives, vous devez essayer de les canaliser. Après avoir écouté une chanson, vous pouvez être en état d'ivresse. Etre littéralement transporté. Surtout lorsque la musique est de bonne facture. La colère est bien présente dans nos chansons, mais la chanson dépasse la colère (NDR : le tout dépasse les parties !), parce que nous la transformons en énergie positive… " Des chansons qui vibrent donc positivement avec une énergie contenue. Tom ajoute : " Les compositions sont compactes, très denses. Elles ne comportent pas de solo de guitare ou de passage instrumental qui tire en longueur. Il n'y a guère de moment pour souffler. Nous ne voulons pas gaspiller le moment présent. L'album ne compte que 45'. Mais chaque instant est important… " Et Paul de paraphraser : " Nous avons beaucoup à donner. L'énergie est notre carburant. La musique exprime la vie. La vie est elle-même une énergie ; et sans énergie, il n'y a pas de vie… "

La scène britannique refait surface. Surtout depuis que la guitare est remise à l'avant-plan. Et il faut reconnaître que pour Maxïmo Park, cette situation est plutôt favorable. Mais après avoir écouté leur premier elpee, il faut quand même se demander si le groupe n'aurait pas eu intérêt à naître soit au début des eighties, en rejoignant une scène emmenée par des groupes comme les Smiths ou les Chameleons ; ou encore mieux à la fin des seventies, lorsque des formations comme House Of Love, Modern English, Sad Lovers & Giants ou encore Kitchens of Distinction faisaient les beaux jours de la scène indie insulaire. Paul met les choses au point : " Nous sommes des fans de tous ces groupes. Ils appartiennent à notre patrimoine musical. Mais nous ne voulons pas nous attarder sur le passé. Nous avons besoin de nous tourner vers le présent et le futur. J'écoute des tas de styles musicaux ; même du rap. Cette musique est très créative et m'inspire. Surtout pour l'utilisation de mots dans la rime. Si nous avons des influences, elles sont avant tout fusionnelles… " Et Tom d'embrayer : " Ta réflexion n'est pas dénuée d'intérêt. Parce que ce qui se passe sur la scène britannique aujourd'hui peut être comparé à une époque ou la musique était aussi forte : la new wave et la cold wave… "

Au sein du quintette, les goûts musicaux oscillent de Roxy Music aux Smiths, en passant par Joy Division, Fugazi, XTC, Will Oldham, Underworld et Interpol. Un point commun, tous les membres du combo apprécient particulièrement un certain Life Without Buildings, dont nous n'avons guère entendu parler à ce jour. Tom s'explique : " Nous respectons ces groupes ou ces artistes pour le style musical qu'ils pratiquent. Mais ils représentent une inspiration plutôt qu'une influence. Nous ne voulons pas sonner comme eux. Nous voulons être reconnus pour notre originalité, que tous ces groupes étaient parvenus à atteindre à leur époque. Nous sommes à la recherche constante de nouveaux sons. Nous voulons être sur la même longueur d'onde que le public et entrer en communion avec lui. Et si nous sommes un groupe pop, nous le sommes de manière différente. "

Pour M.P., le monde est trop obsédé par des catégorisations et des règles secrètes. Pour eux, il n'existe que de la bonne et de la mauvaise musique. Ne s'agirait-il pas plutôt d'une question de sensibilité ou de goût ? Et n'est-ce pas la raison pour laquelle les auditeurs on besoin de ces catégorisations et de ces règles ? Paul concède : " Le public a besoin de catégories pour pouvoir décrire ; mais lorsqu'on commence à catégoriser, l'attrait est limité. C'est la raison pour laquelle nous nous sommes simplement appelés groupe pop. " Tom commente : " Nous essayons de défier les barrières de la catégorisation. Tout simplement parce que je ne ressens pas Maxïmo Park comme un groupe de rock ou une formation indie. Nous pratiquons de la musique contemporaine, avant tout. Si on nous attribuait une étiquette punk, métal ou rock, le public conclurait que cette musique ne leur est pas adressée. Nous croyons en notre étoile. Nous avons nos goûts. Nous pensons que notre musique ressemble à celle du monde ; immortalisée quelque part sur la planète à un moment précis. Le fait de transcender ces catégories permet aux fans de punk ou de métal d'avoir une porte ouverte sur notre musique. La pop est finalement un terme très vague… "

Mais que pensent nos deux interlocuteurs de deux formations très contemporaines comme Futureheads et Franz Ferdinand, auxquelles les médias les associent régulièrement. Pour Franz Ferdinand, les avis sont assez divergents. Tom apprécie plus qu'il ne savoure. " Ils ont encore un beat disco à la Blondie et un bon riff derrière. Qui vous font bouger. Franz Ferdinand est plus attaché aux lyrics et on ressent qu'ils prennent du bon temps. Ce que je vois chez F.F., je ne le vois pas chez Futureheads. Ils ne sont pas sur scène pour passer du bon temps, mais pour bosser. " Paul donne son opinion : " Ce sont de bons amis. Nous sommes fans de Futureheads. Ils n'habitent pas loin de chez nous. Ils travaillent très dur. Je suis content de voir où ils sont arrivés. C'est un excellent groupe de scène. Il n'existe pas de compromis chez eux. Ni de complaisance. Simplement de l'intransigeance. Leurs harmonies vocales et les mélodies sont très originales. Mais sur scène, j'apprécie autant les deux formations… "

'The night I lost my head', 'Once a glimpse' et 'Kiss you better' sont apparemment des contes de rencontres romantico-sexuelles manquées. Mais paradoxalement, ce sont également les plages de l'album… les plus glamoureuses. Pour la circonstance, partageraient-ils cette sensibilité 'glamour' avec Roxy Music ? Paul clarifie : " 'Kiss you better' parle de séduction. Mais j'accentue l'aspect de la tentative que celui de l'échec. Dans la vie, il faut prendre des initiatives. Il existe toujours une alternative. Le message va au-delà des paroles. Chacun a droit à ce choix. Il est trop facile de se sentir frustré parce qu'on n'a pas pris de décision. Le danger c'est d'aboutir à des choses qu'on n’a pas envie de faire. Sur un air guilleret, 'The night I lost my head' véhicule un message plus profond. Une déception. Qui laisse encore l'opportunité de choisir. Le message est de ne pas être passif. Aller de l'avant. Il y a une sorte de vibration qui te pousse à opter pour ce qui se présente à ce moment là. 'Once a glimpse' est la chanson la moins glamoureuse. Elle évoque des souvenirs. Quelqu'un qui construit sa vie en la berçant de souvenirs… tout comme chez Roxy Music, il ne faut jamais s'arrêter à la connotation sexuelle du texte de base, mais aller au-delà… "

Sur 'Graffiti' Paul chante 'Je ferai des graffiti, si tu chantes en français pour moi ; que faisons-nous ici si la romance n'est pas morte'. L'intéressé s'explique : " Cette chanson parle de la vie d'une petite ville. Au sein de laquelle un type se demande comment il doit faire pour en sortir. Comme s'il voulait s'extraire du monde. Or la ville la plus proche est également la plus éloignée. Donc tu conçois la vie dans une perspective romantique. Et la culture française recèle cette dimension romantique. Pour les Anglais du nord-est, elle possède quelque chose d'exotique. Mai 68. Ses bagarres. Dans cette chanson, ce type veut que ça change et observe cette période de changement. Il se dit que s'ils ont été capables de le faire, pourquoi pas lui. Il éprouve de la nostalgie, car il ne se passe rien dans sa ville. Et il a conscience que dans son patelin, ces événements ne se produiront jamais. C'est une vision romantique. Une échappatoire. Je suis alors dans un autre monde. En fait, il s'agit de regarder ce qu'il y a de beau au coin de la rue ; alors que jamais personne ne le fait. Pour dire aux gens que le bonheur est près de chez lui. L'esthétisation du quotidien ! " Il en ressort une idée de libéralisme : je vais m'en sortir seul ! Paul continue : " Personnellement, c'est un appel aux armes. Cette chanson évoque pour moi mon séjour à Paris. Mon premier séjour à Paris. J'étais malade. Et je voulais en profiter. J'avais 21 ans. Une expérience inoubliable ! Ce dépaysement avait valeur de vision romantique. (NDR : par référence à George Byron dans ‘The world is mine’). "

'Acrobat' est une compo très étrange. On y retrouve à la fois le débit oratoire de Jarvis Cocker de Pulp et un sens théâtral inspiré par Peter Gabriel. Paul se défend : " Je vois ce que tu veux dire. Mais ce que tu ressens n'a rien à voir avec le message que j'ai voulu faire passer. 'Sheffield sex city' de Pulp est une chanson qui libère une charge émotionnelle très importante. Elle est très proche de mon cœur. Je connais très mal Peter Gabriel. Mais je suis conscient qu'en 'live', il a souvent accentué l'aspect théâtral, emphatique, de ses chansons. Personnellement, j'ai surtout voulu injecter dans 'Acrobat' une dose maximale de sensibilité. Etre plus proche de l'auditeur. Aller droit au but. Et je suis assez content du résultat… "

Sur 'Postcard of a painting' figure un passage de claviers rognés qui évoque manifestement le jeu de Ray Manzarek des Doors. Tom réplique : " C'est Luke (NDR : le claviériste !) qui a voulu l'intégrer lors de l'enregistrement. Et on sait que ce moment précis est différent de la chanson. Beaucoup plus swing. Et ça l'amuse. Mais il ne s'agit pas d'une référence aux Doors (NDR : mon œil !) ".

Un certain Paul Epworth produit leur premier elpee. Pourquoi ce choix ? Tom s'explique : " Il est jeune et enthousiaste. Dans le domaine de la production, il est vraiment doué. Son approche de la mise en forme n'est pas figée. Il n'en est pas à son coup d'essai. Il est à l'écoute des artistes. Il veille à ce qu'il y ait une distribution d'énergie en faveur d'une production équitable. Il met en avant tous les moments d'inspiration. Encore une fois, la musique est ainsi mise en avant. Il capture les bonnes vibrations. Lorsqu'on enregistre, on a besoin de confiance. Et on injecte énormément d'énergie dans l'enregistrement. On la retrouve d'ailleurs également sur scène. Il est d'ailleurs essentiel de bien la canaliser sous ses deux formes. Lors des sessions d'enregistrement, la plupart des producteurs veulent capturer l'instant 'live' pour donner l'aspect le plus dynamique à la chanson. Ces ingénieurs du son veulent la perfection. Tandis que Paul Epworth travaille sur une relation de confiance. Et on a cette vision de faire les choses comme on pense qu'elles doivent être faites. On a accepté immédiatement la collaboration. A cause de sa façon de travailler et de placer d'abord la musique à l'avant-plan. "

Merci à Vincent Devos.

 

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