Nous sommes le vendredi 18 juillet. Votre serviteur à rendez-vous avec Charlotte Maison et David Baboulis, du duo electro/pop Soldout, à la cafétéria de l'Hôtel Radisson Blu Palace de Spa. Ce soir la formation se produit aux Francos. Sur la scène Ice Watch. L’entretien se déroule à l’intérieur de l’immeuble. C’est une bonne idée, car dehors, c’est la canicule. Le groupe a publié, ce 7 mai, un nouvel album. Une bande originale de long métrage intitulée « PuppyLove ». Un sujet intéressant pour entamer notre conversation…
Charlotte : C'est la première fois que nous nous chargeons de toute la musique d'un film. Certaines de nos chansons avaient servi de bande sonore pour un documentaire. Mais il est vrai que se charger de l’intégralité de cette tache n’est pas banal. Nous étions vraiment très heureux que la réalisatrice ait pensé à nous pour accomplir ce projet. C'était aussi un challenge, car elle souhaitait que nous réservions aux morceaux, des scripts très différents. Elle avait des idées sur chaque titre et imaginait déjà le contexte au sein duquel ils allaient évoluer. Un bel exercice de style, pour nous.
Comment la collaboration est-elle née entre vous et la réalisatrice, Delphine Lehericey ?
David : En fait, Delphine est venue nous voir après un concert. Le scénario était encore en chantier. Mais elle avait déjà l’intention de nous impliquer. Et quand elle a exposé son projet, nous avons immédiatement accroché.
Charlotte : On a d’abord pris connaissance du canevas. Le tournage du film ne s’était d’ailleurs pas encore déroulé. En fait, elle voulait que les acteurs puissent écouter la musique, avant de passer sur le plateau. Et incorporer la musique au moment de filmer les scènes.
David : Notre job était terminé avant le premier tour de manivelle.
Vous aviez signé une compo pour un documentaire réservé à Andy Warhol, si mes souvenirs sont exacts ?
Charlotte : Deux! Mais également à un autre documentaire consacré au styliste belge Jean-Paul Lespagnard.
On en revient à Andy Warhol, c’est une référence pour vous ?
Charlotte : On s’est imprégné de son œuvre en consultant les bouquins qui le concernaient ; des livres que les cinéastes nous avaient apportés. Je pense que cet artiste majeur avait un style très personnel. Il exerçait une forme de magnétisme dans son entourage. Et il a très vite évolué. Il était conscient que sa création collait parfaitement à son époque.
David : Il parvenait à jouer sur l'image. Et dans son art, il était aussi très complet.
Pourquoi avoir repris « It's A Sin » des Pet Shop Boy, sur votre dernier elpee ?
Charlotte : Il faut poser la question à Delphine, si tu souhaites connaître la raison profonde.
David : Elle voulait cette reprise. Au départ, nous n'étions pas vraiment emballés. Mais en élaborant cette version, on s’est rendu compte qu’elle passait très bien.
Qui se charge de l’écriture de la musique et des lyrics ?
Charlotte : En fait, nos deux fonctions sont plutôt distinctes, au sein du groupe. David se charge surtout de tout ce qui concerne le son. L’instrumentation, et en particulier les synthés ainsi que les rythmes. Perso, je me consacre au vocaux, à leur aspect mélodique, mais également aux lyrics. David accorde une grande importance à la technique. Ou plus exactement à la technologie. Il a accompli ses premières armes sur Atari. Particulièrement patient, il adore les mélodies pop. Nous sommes très complémentaires et n’hésitons pas à nous intéresser à ce que les autres ne sont pas parvenus, malgré leurs moyens, à imposer…
Comment situez-vous « Puppy Love » dans le processus d’évolution de votre musique ?
Charlotte : C'est une étape dans notre développement. Le public s’est davantage intéressé au concept et les medias se sont posé plus de questions. Cet intérêt plus marqué est la conséquence de ce support qu’a constitué la musique de film. On a aussi démontré que nous étions capables de nous adapter et également de nous renouveler. Certains titres sont plus rock. Finalement cette expérience a été particulièrement enrichissante.
Charlotte, tu as reçu une formation dite classique. Qu’est-ce qui t’as poussé à t’orienter vers la musique électronique ?
Charlotte : Le déclic c’est produit après avoir rencontré David. Auparavant, je composais et interprétais des chansons à la guitare, en m’entourant de musiciens de jazz. David baigne dans la musique électronique depuis très longtemps. Personnellement, j’en écoutais un peu, mais j’ignorais son fonctionnement.
Comment vous êtes-vous rencontrés ?
David : C’est un ami commun qui nous a présentés.
Charlotte : Et il a eu le bon feeling en permettant cette rencontre.
Quel est votre le concert le plus récent qui vous a le plus marqués ?
David : Un concert que nous avons accordé au Mexique. Nous avions pourtant éprouvé de gros problèmes techniques. Et pourtant, l’ambiance était incroyable. On n’est pas prêt de l’oublier !
Charlotte : On a été confrontés à des tas d’imprévus. Le son, le matos, la table de mixage, rien ne fonctionnait normalement. Et on dû se battre pour corriger le tir. Nous étions d’illustres inconnus pour les spectateurs, et pourtant leur réaction a été autant spontanée qu’enthousiaste. C'était vraiment génial ! Et j’ignore si la foule réagit toujours ainsi au Mexique. En tout cas, elle était à fond…
Vous accordez une grande importance à vos prestations scéniques ?
David : La scène est très importante pour tous les musiciens. Quand tu t’enfermes dans un studio, au bout d’un certain temps, tu commences à te faire chier. En tournée, tu as l’opportunité de rencontrer du monde, et notamment tes fans. De leur parler, de les écouter, d’avoir un contact direct avec eux…
Charlotte : Aujourd'hui, pour être reconnu, on doit tourner. C’est la meilleure manière de toucher le public. Il se souvient alors de nous. Il y a tellement d’artistes et de groupes aujourd’hui…
Charlotte, tu portes constamment des lunettes fumées. C’est pour le look ?
Charlotte : Oui (rires), elles appartiennent à mon look. Et puis sur les planches, j'aime fermer longuement les yeux. En fait, le public finirait par trouver cette attitude bizarre. Mais elle me permet, en même temps, d’ajouter un élément rock à l'ambiance électro, tout en dissimulant mon regard. En vérité, je suis plutôt timide…
Quels sont vos albums de chevet ?
Charlotte : « Is This Desire » de PJ Harvey. Ce disque constitue un tournant dans l’évolution de mes goûts musicaux…
Denis : « Violator » de Depeche Mode et « X » de Klaus Schulze.
Est-ce que vous remixez des titres d'autres artistes ?
David : Oui. Mais, c’est plutôt rare. L’exercice de style est totalement différent de la composition.
Charlotte : Là, on vient quand même de réaliser le remix d’un morceau des Girls In Hawaii. Il devrait bientôt sortir…