Natalia Doco est née en Argentine. Elle a pas mal bourlingué. Au Mexique, notamment. Avant d’atterrir en France. Elle a appris à parler la langue de Molière. Elle a été repérée par Serge Sabahi, un véritable découvreur de talents. Le courant est passé immédiatement entre eux. Mais il existe également une grande complicité entre Natalia, Serge et Fréro De La Vega. Ce qui lui a permis d’assurer le supporting act du duo, au Théâtre 140, le 12 novembre dernier. Elle reviendra, toujours en première partie, mais de Rodger Hodgson, l’ancien co-leader de Supertramp, le 25 janvier 2015, au Cirque Royal. Le concert est déjà sold out. Pour entamer cet entretien, les circonstances ne sont pas très favorables ; et pour cause, des groupies ont insulté Natalia, dès le début de son concert. Ce qui l’a forcée à quitter la scène après seulement trois chansons. Evidemment, c’est le sujet de départ de notre conversation…
Pas facile à encaisser. Il m’a fallu un certain temps avant de me remettre et de me calmer. Oui, je suis déçue. C’est la première fois qu’une telle situation m’arrive… j’ai essayé de me concentrer afin de pouvoir continuer à chanter, mais peine perdue, elles continuaient à crier qu’il fallait que je dégage. Tout ce qu’elles attendaient, c’était de voir débarquer les garçons. Quand le public est assez jeune, ce sont des mésaventures qui peuvent survenir…
Parlons un peu de toi. Ton itinéraire musical est assez atypique. Tu es née en Argentine. Tu as vécu un moment au Mexique. Et finalement tu t’es installée en France. Que t’a apporté ce parcours dans ta carrière ?
Je me suis énormément produit au Mexique. J’en ai tiré une grande expérience. Surtout quand tu joues en compagnie de musiciens qui ont une vision différente de la musique traditionnelle. Et cet enrichissement culturel a inévitablement influencé mon style.
Nous t’avons découverte sur YouTube. Manifestement, tu es très active sur les réseaux sociaux. C’est une aide précieuse, pour toi ?
Absolument ! C’est en postant des vidéos sur Internet que j’ai été remarquée par ma maison de disques et mon manager.
Après avoir gravé un premier Ep, tu as sorti un premier album. Il s’intitule « Mucho Chino ». Il a bien été accueilli.
Oui. C'est ce qui m’est arrivé de mieux, depuis que je suis arrivé en France. Mais les événements se précipitent. J’y ai débarqué depuis deux ans, et il se produit de bonnes surprises tous les jours…
Pas aujourd’hui, malheureusement. Tu as chanté exclusivement en espagnol ; mais tu utilises également la langue de Shakespeare et de Molière. Tu es sans doute le plus à l’aide dans ta langue natale ?
Je chante également en portugais. Dans quelle langue ? Tout dépend. Oui il est plus facile pour moi de chanter en espagnol ou en portugais. Mais je m’inspire beaucoup de la musique anglo-saxonne. Et je ne peux l’exprimer qu’en anglais. Je viens d'écrire une chanson, à moitié en français et moitié en espagnol. Mais je dois encore m’améliorer dans ce domaine. Il y a trop peu de temps que je suis en France. La première année, j’étais incapable de m’exprimer dans cette langue.
Dans quelles circonstances as-tu rencontré les Fréro et Serge ?
J'ai rencontré Flo De La Vega pendant les vacances que je passais à Paris. Au cours de la dernière soirée. On s’y est croisé à différents endroits, au cours de la même nuit. Une histoire romantique. Depuis ce moment-là on est ensemble. Et la suite coule de source…
Tu es parvenue à séduire la France. Comment compte-tu faire pour séduire la Belgique ?
Je n’en sais rien. Aujourd’hui, c’était mon premier test. Je ne sais comment y parvenir. En fait, je ne vais rien faire. Ou si, continuer à faire ce que je sais faire : tout simplement chanter et tenter d’entrer en communion avec le public. Le public séduit sera celui qui partage une même énergie que la mienne. Mais ce soir, ce n'était pas possible.
Pour séduire le public belge, il faut un peu le connaître…
Je ne connais pas trop, effectivement. Mais… ne me quitte pas.
Ah Brel, très bien !
C'est une chanson que j’ai entendue très jeune. Même bien avant de savoir qu'il y existait une possibilité de vivre en France. En fait, c’était la version de la B.O. du film de Pedro Almodovar (NDLR : « La Loi du désir » - 1986, le titre y est interprété par Maysa Matarazzo). J'adore ce réalisateur. Il y a plusieurs années que je tente de la chanter. Mais auparavant, l’interpréter en français était pour moi totalement impossible. Il y a des années que j’essaie pourtant. Aujourd’hui, c’est amusant, elle représente beaucoup pour moi. C'est le premier moment proche de la langue française...
Quelque part, Brel t'a donc inspirée. Mais depuis que tu as débarqué en France, on pourrait y ajouter Charles Aznavour et Henri Salvador.
Salvador, j'aime bien. Il m'inspire beaucoup. Georges Brassens également.
Pour la réalisation artistique de ton album, tu as opté pour Jacques Ehrhart. Un choix personnel ?
C'est le patron de ma maison de disque qui me l'a présenté. Il avait déjà entendu quelques chansons… des maquettes notamment. Nous avons énormément discuté et il m’a conseillée. Nous avions plus ou moins les mêmes idées. C'était une belle opportunité de travailler avec quelqu'un à qui je ne dois pas tout dire. Quand j’ai entamé l’enregistrement, je ne parlais pas français. Donc, c'était bien de s'entendre dans une langue musicale, sans trop causer...
Les Beatles, Led Zeppelin ou les Stones ? Tu as une préférence ?
Immédiatement, je te réponds les Beatles. Mais j’adore aussi le Led Zeppelin. Mais pas seulement. Le Pink Floyd, également. La musique qui a bercé ma jeunesse. Mais les Beatles, je peux en écouter tous les jours ?
Qu’est-ce qui t’as poussé à te lancer dans une carrière musicale ?
J'ai fréquenté un peu le Conservatoire. En Argentine, le cursus est très long et je voulais toujours en connaître davantage. J’ai assisté aux cours pendant deux ans et j'ai retrouvé plein de musiciens qui sont mes amis. Mais j’ai arrêté pour en suivre d’autres, afin d’apprendre plus et plus vite.
Tes parents y sont pour quelque chose ?
Ma mère s’intéresse à toutes les formes musicales. Toute petite, elle m'a permis de découvrir les Beatles, Queen et Led Zep. Mon père jouait beaucoup de guitare. C'était un peu le roi de la soirée quand il en jouait en chantant. Il m'a éveillé à toute la musique révolutionnaire d’Amérique latine. J'ai donc grandie dans ce contexte.
Comment envisages-tu ton avenir ?
Je ne pense pas trop au futur. Cette attitude provoque trop d'anxiété. Tu penses que tout va bien ou le contraire. Je vais profiter de faire de la musique tant que je le pourrais.
Donc sur scène, tu es plus anxieuse que sur YouTube ?
Oui, un peu. Mais je profite du moment présent et de la scène. Sauf que je ne veux pas m’enfoncer mille plans dans la tête. Car, une telle accumulation limite les alternatives. Il faut accepter les choses telles qu'elles sont…